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Causerie médicale

Le vitiligo

Si la définition de cette affection n'offre aucune difficulté, il n'en est malheureusement pas de même de sa cause et aussi de son traitement.

Le vitiligo peut être défini comme une dystrophie pigmentaire, par un trouble de la répartition du pigment cutané, caractérisé par le développement, en un ou plusieurs points du corps, de taches blanches cernées d'une zone périphérique plus colorée, qui se confond peu à peu avec la peau saine.

La zone centrale, achromatique, est d'un blanc mat, dont le pigment a disparu ou semble avoir été refoulé à la zone périphérique, hyperchromique et brunâtre, formant une ligne de démarcation nette. Ces taches blanches, irrégulièrement arrondies ou ovalaires, peuvent se trouver partout, au cuir chevelu, à la face, au cou, à l'avant-bras, au dos des mains, aux jambes, aux flancs, surtout à la région pubo-génitale, normalement plus pigmentée, où l'on en trouve presque toujours quand il en existe en quelque autre endroit ; ces taches peuvent être isolées ou disséminées, parfois même d'une façon symétrique, et conserver leur forme ou présenter une tendance à s'étendre. Si elles siègent dans une région pileuse, les poils ou les cheveux subissent la même décoloration ; au cuir chevelu on observera des mèches blanches tranchant sur le reste de la chevelure qui a conservé sa teinte naturelle.

Au niveau de ces plaques de vitiligo, la peau, quoique décolorée, reste lisse et souple, conserve sa sensibilité normale ; jamais ces plaques ne sont prurigineuses, elles ne desquament pas. Ces caractères éviteront la confusion avec toute autre affection cutanée.

La lèpre, maladie devenue heureusement très rare, présente au début des taches blanches de la peau, remarquables par l'insensibilité complète de la peau à leur niveau, ce qui les différencie immédiatement du simple vitiligo.

Le début du vitiligo est généralement insidieux, passant facilement inaperçu s'il se manifeste sur une partie du corps non découverte ; on l'a vu apparaître après un traumatisme, après un choc moral, parfois à la suite d'une compression locale, par un bandage herniaire par exemple ; on observe parfois aussi cette affection après une maladie infectieuse ou au cours d'une maladie de Basedow. Le vitiligo coïncide fréquemment avec la pelade, affection très voisine et, comme lui, non microbienne, ni contagieuse. La syphilis, comme presque toujours, a été aussi incriminée, qu'elle fût acquise ou héréditaire, et ce fut à tort le plus souvent.

Histologiquement, la peau ne présente que pas ou très peu d'altérations pathologiques ; on peut trouver une diminution des capillaires et de petites altérations de dégénérescence dans les filets nerveux du sympathique se rendant à la peau ; cette dernière constatation consolide l'hypothèse d'une cause nerveuse, dont il faudrait rapporter l'origine au système nerveux central en cas de lésions symétriques.

On considère actuellement que ces troubles nerveux ont eux-mêmes leur cause dans quelque trouble endocrinien, comme le fait déjà supposer l'apparition d'un vitiligo à la ménopause, avec insuffisance ovarienne, en cas d'hyperthyroïdie, dont la maladie de Basedow est le type ; la glande surrénale peut aussi être en cause. Remontant plus haut, on a songé à un trouble hypophysaire, l'hypophyse étant en quelque sorte le chef de file de toutes les glandes endocrines.

Comme pour la pelade, dont on a signalé la parenté avec le vitiligo, on a employé des poudres pluri glandulaires, des antithyroïdiens, des extraits cortico-surrénaux et, finalement, des hormones antihypophysaires ; on aurait même obtenu des résultats encourageants avec une hormone de synthèse, le paraoxy-proponiophénone, qui agirait comme régulateur de l'hypophyse, sans action fâcheuse sur les autres glandes endocrines.

Parmi les médicaments proposés par voie interne, on peut tout au plus retenir les calmants nerveux et les douches sur la colonne vertébrale.

Même manque de certitude pour le traitement local ; il est généralement préférable de s'abstenir des révulsifs, de la teinture d'iode ou d'un emplâtre mercuriel ; on peut recourir à l'électricité sous forme de courant continu et aux irradiations, par les rayons du soleil ou ultra-violets, après photosensibilisation de la peau au moyen de teinture de bergamote ou d'eau de Cologne.

Dr A. GOTTSCHALK.

Le Chasseur Français N°657 Novembre 1951 Page 688