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Courrier cynégétique

L'instinct et l’intelligence ?

— Le 26 septembre, j'avais emporté dans ma hutte, au marais de Brand, mes quatre appelants, un canard et trois canes, dont une baguée, parce que fille d'un vrai sauvage et d'une cane domestique. Cette cane s'étant détachée à la tombée de la nuit, je ne la retrouvai plus et la considérai comme perdue. La Gironde fleuve est distante d'un kilomètre à peine, et ma cane l'avait certainement rejointe. Je demeurai à ma tonne pendant deux jours encore, pour y effectuer divers travaux, puis je regagnai mon domicile, à Berson, situé à 23 kilomètres de là. Quelle ne fut pas ma surprise d'apprendre que ma cane m'y avait précédé le matin même ! Pourtant la distance est longue et jalonnée par de nombreuses huttes peuplées de quantités de congénères !

M. Le Roux, abonné.

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Le satanite.

— Il m'est agréable de fournir quelques notes complémentaires à l'article de M. Max P. Robin. paru dans le numéro d'août.

Rendons à cet oiseau son nom propre, « pétrel océanite » (Oceanistes océanicus), et son nom populaire, « oiseau des tempêtes ». Satanite viendrait d'une appellation picarde.

Il y a en tout 21 espèces de petit pétrel dans le monde, dont 2 espèces courantes en Europe : le pétrel tempête (Hydrobates pelagicus) et le pétrel cul blanc (Oceanodroma leucorhoa), qui sont extrêmement voisines du pétrel habituel du cap Horn, que l'on a rencontré d'ailleurs quelques rares fois sur les côtes d'Angleterre.

Cette espèce d'oiseau est inconnu des terriens, pour la bonne raison qu'il mène à terre une existence des plus retirée. En effet, il niche au fond d'une crevasse obscure ou d'un terrier et nourrit son unique petit la nuit. Toutefois, avec un peu de patience et d'observation; on peut le voir au large du littoral français, au printemps et à l'automne. Il niche en Bretagne et dans les îles de la côte marseillaise. Ce sont. d'infatigables voiliers, mais, quand la tempête se prolonge, les pétrels, épuisés par la faim et la fatigue, sont jetés sur nos côtes. Ils se comportent très mal à terre, se traînant plus qu'ils ne marchent, leur habitat étant le grand large, et ils se blottissent le jour dans les trous de rocher.

Leur nourriture se compose des déchets rejetés par les bateaux, de petits poissons, mollusques, méduses, et surtout de matières grasses et d'huile animale. D'où leur vient l'appellation méditerranéenne buo d'oli, qui veut dire « buveur d'huile ».

J'ai pu observer cet oiseau en France, mais il m'aurait été infiniment plus agréable de le voir dans les mers du Sud, comme le capitaine Robin, qui, j'espère, ne m'en voudra pas de cette mise au point, pour la bonne documentation du lecteur.

A. Languetif,

Membre de la Société ornithologique de France.

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Chasse au gibier d'eau.

— M. Gaston Chazette expose à M. le ministre de l'Agriculture que, d'après les arrêtés relatifs à l'ouverture de la chasse, la chasse au gibier d'eau ne peut se pratiquer que sur les étangs, rivières et marais, et non plus jusqu'à une distance de 30 mètres des rives de ceux-ci ;

que, d'autre part, il est interdit d'utiliser certains moyens de transport pour cette chasse, et notamment l'automobile, ce qui supposerait une action à une certaine distance des rives ; qu'il n'apparaît pas de ces dispositions diverses que le chasseur de gibier d'eau puisse connaître exactement ses droits et obligations, et lui demande, en conséquence, de déterminer où peut se placer le chasseur qui, ne disposant pas de moyens mécaniques non interdits ou même ne pouvant pas les utiliser sur certains ruisseaux ou petites rivières, se propose de chasser sur les rives. (Question du 11 août 1951.)

Réponse. — Le paragraphe 2 de l'alinéa 3 de l'article 9 de la loi du 3 mai 1644 sur la police de la chasse permet seulement à l'autorité réglementaire de déterminer « le temps pendant lequel il sera permis de chasser le gibier d'eau dans les marais, sur les étangs, fleuves ou rivières ». Il n'est donc pas permis légalement, en dehors de la période d'ouverture générale de la chasse, d'étendre cette faculté à des parties du sol autres que celles nommément spécifiées dans la loi, bien que certaines espèces de gibier d'eau puissent accidentellement s'y rencontrer. On s'accorde toutefois à reconnaître que l'autorisation doit s'étendre aux berges des rivières, cours d'eau et étangs ; la chasse peut avoir lieu non seulement en barque ou en nacelle, mais encore sur les bords, à la condition de ne point s'éloigner à une trop grande distance dans les terres. Il suffit, pour que les chasseurs soient en règle, qu'ils se maintiennent à une distance assez rapprochée du cours d'eau pour qu'on ne puisse pas les soupçonner de chercher autre chose que du gibier d'eau. C'est là une question de fait laissée à l'appréciation souveraine des tribunaux.

Journal Officiel du 12 septembre 1951.

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Baguage massif d'oiseaux d'eau au littoral belge.

— Le Conseil international de la chasse a exprimé le désir de voir se constituer dans chaque pays des centres de recherches, afin d'étudier les migrations des oiseaux d'eau, d'effectuer des comptages et de trouver les motifs de la diminution de certaines espèces.

Afin de répondre à ce vœu, il a été établi une station d'observation et de baguage des oiseaux d'eau à Knokke-Le-Zoute, ville balnéaire du littoral belge située à la frontière hollandaise, à proximité de l'estuaire de l'Escaut. On y capture des oiseaux qu'on relâche munis d'une bague en aluminium, portant les mots ; « Inst. R. Se. Nat. Bruxelles », suivis d'un numéro. On capture des oiseaux depuis mars jusqu'à octobre.

Voici la liste des oiseaux qui furent bagués depuis juillet 1950 jusqu'au 1er septembre 1951 :

765 vanneaux, 621 canards colverts, 415 guignettes, 267 sarcelles d'hiver, 214 bécassines, 186 chevaliers gambettes, 172 grands gravelots, 93 combattants, 68 sarcelles d'été, 62 chevaliers sylvains, 60 bécasseaux de Temminck, 59 petits gravelots, 49 pluviers de Kent, 44 chevaliers culs-blancs, 43 canards siffleurs, 36 avocettes, 34 huîtriers, 34 poules d'eau, 28 chevaliers à pattes vertes, 26 corlieux, 25 sternes, 20 mouettes rieuses, 16. bécasseaux variables, 13 canards souchets, 11 pluviers argentés, 10 bécasseaux minutes, 9 canards pilets. 9 tournepierres. 6 hérons, 5 chevaliers sombres, 4 courlis, 3 canards tadornes, 2 barges à queue noire, 1 bécasseau canut, 1 bécasseau courlis.

Cela fait un total de 3.412 oiseaux d'eau, auquel il y a lieu d'ajouter plus de 1.200 autres oiseaux.

Le nombre de reprises est, jusqu'à présent, relativement peu important, mais nous autorise déjà à enregistrer des résultats remarquables. Les observations faites tous les jours au même endroit permettent aussi d'obtenir des données extrêmement intéressantes sur la migration des oiseaux d'eau.

Une autre station de baguage similaire a été constituée au nord d'Anvers, dans la Campine. L'avantage de pareille méthode de travail, basée sur le baguage, est de donner des résultats scientifiquement exacts.

Nous faisons un pressant appel auprès de tous les chasseurs français pour qu'ils veuillent bien collaborer à nos recherches, faites avec le désir de servir l'intérêt général des chasseurs et des naturalistes. La meilleure façon de nous aider est de ne laisser perdre aucune bague. La reprise des bagues peut être signalée au Musée d'histoire naturelle, 31, rue Vautier à Bruxelles (Belgique). La moindre reprise peut s'avérer extrêmement intéressante. Notre travail de baguage nous coûte beaucoup de peine et beaucoup d'argent, mais nous sommes convaincus que cette étude vaut la peine d'être faite, et c'est pourquoi nous comptons fermement sur les nombreux et sportifs chasseurs français pour nous aider en renvoyant tout de suite toute bague trouvée. Nous les en remercions d'avance et de tout cœur.

Léon Lippens,

Président de la Commission de la chasse des oiseaux gibiers migrateurs, du Conseil international de la chasse.
Membre du Conseil supérieur de la chasse de Belgique,
Administrateur du Royal Saint-Hubert-Club belge.

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Au Congrès du groupe cynégétique de l'Ouest.

— Au cours du dernier congrès de la 2e région cynégétique, qui s'est tenu à Quimper, les vœux suivants ont été adoptés et transmis à M. le ministre de l'Agriculture.

  • Vœu n° 1.

    — Que le Conseil supérieur de la chasse étudie les amendements nécessaires au rajeunissement de certains articles de la loi de police de 1844, notamment en ce qui concerne la fermeture totale d'un gibier, la visite des carniers et des automobiles, le furetage, la chasse en limite des rivières...

  • Vœu n° 2.

    1° Que le permis de chasse départemental et général soit remplacé par un permis unique et soit délivré selon la méthode pratiquée antérieurement ;

    2° Que son prix soit divisé en trois parts égales revenant respectivement : à l'État, à la commune et aux organisations de chasse ;

    3° En attendant la réalisation de ce vœu, que le permis départemental puisse être transformé en un permis général par simple paiement du supplément.

  • Vœu n° 3.

    — Que toutes chasses pratiquées avec filet soient supprimées, que les autorisations de pratiquer ces chasses proviennent de privilèges ou de tolérances.

    Ce vœu vise notamment les pêcheries de canards, les oiseaux d'eau, ainsi que les filets à vanneaux, alouettes, tourterelles, palombes, etc.

  • Vœu n° 4.

    — Que M. le Ministre de la Justice demande à MM. les Procureurs généraux de prendre des réquisitions tendant à exclure du bénéfice de la loi du 1er février 1951 tous les délits de chasse graves, notamment chasse de nuit, chasse en temps prohibé ou avec engins prohibés.

  • Vœu n° 5.

    — Que la chasse au gibier d'eau ne soit ouverte qu'en même temps que la chasse du colvert, le 3e dimanche de juillet.

  • Vœu n° 6.

    — Que les pièges employés soient tenus de manière à ne pas permettre la capture du gibier. Ils devront donc être du type « pièges à appâts » et non du type « pièges à palettes ».

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Curieux cas de fascination d'une belette sur un lapin.

— Lecteur assidu du Chasseur Français depuis quarante ans, je ne me souviens pas y avoir jamais vu que la belette avait un pouvoir de fascination, et je serais heureux de savoir si des cas analogues à celui dont j'ai été le tout proche témoin, et dont je garantis l'authenticité, ont pu être observés par d'autres.

Je remontais, dans ma vieille et bruyante voiture, l'allée qui conduit au « bois du Lattay », lorsque je tombai en panne; je descendis pour y porter remède et c'est à ce moment que dans la haie, très claire et coupée de l'année, juste à ma hauteur et à un mètre de moi, j'observai un gros lapin adulte qui avançait et reculait sans cesse de 0m,50 environ, sans aucunement s'occuper de ma présence. Je crus tout d'abord qu'il était pris dans un collet, mais, au bout d'une demi-minute peut-être, j'aperçus, tapie sous une cépée de ronces sèches au sommet du talus, une belette qui guettait le moment propice pour se saisir de sa proie, qu'elle regardait fixement à la façon d'un serpent qui fascine un crapaud, et je dus faire assez de bruit en criant et frappant des mains pour effrayer les deux animaux, qui prirent enfin la fuite en direction opposée.

J'aurais pu, si je l'avais désiré, m'emparer facilement du lapin en le prenant à la main, mais je regrette vivement de n'avoir eu aucun moyen d'exterminer la belette, cette sale petite bête dont les méfaits — voire même les ravages — sont bien connus de tous.

Léon Bourgeais,

Champigné (Maine-et-Loire).

Le Chasseur Français N°658 Décembre 1951 Page 718