La loi de finances du 24 mai 1951 a institué, à compter
du 1er juillet 1951, une allocation compensatrice des
majorations de loyers que les locataires économiquement faibles auront à supporter
à partir de cette dernière date.
Deux articles ont déjà été consacrés dans Le Chasseur
Français à cette importante question sur laquelle nous revenons, car de
nouvelles précisions viennent d'être données au sujet des conditions à remplir
pour l'obtention de cette allocation.
Il est rappelé que seuls peuvent prétendre à l'allocation
compensatrice les locataires, sous-locataires et occupants de bonne foi qui
acquittent un loyer.
Par suite, les propriétaires et les personnes logées à titre
gratuit ne peuvent bénéficier de l'allocation compensatrice pour le logement
leur appartenant ou mis à leur disposition et dans lequel ils sont établis,
puisqu'ils n'acquittent aucun loyer.
Afin de pouvoir bénéficier de l'allocation, les locataires,
sous-locataires et occupants de bonne foi doivent justifier de certaines
conditions essentielles concernant : la nature du logement, la composition du
foyer, le montant des ressources dont ils disposent, leur situation au regard
de la taxe sur les locaux inoccupés ou insuffisamment occupés, l'allocation logement,
et la sous-location des locaux.
I Nature du logement
— 1° Le logement occupé par le demandeur de l'allocation
doit être à usage exclusif d'habitation et constituer sa résidence principale.
Peuvent cependant prétendre à l'allocation les personnes
occupant :
-
des locaux loués exceptionnellement meublés dans
les conditions prévues à l'article 43 de la loi du 1er septembre 1948
;
-
des locaux réquisitionnés dont la prestation
d'occupation est fixée en application de l'article 28 de l'ordonnance du 11 octobre 1945
dans la limite du prix licite en matière de loyer ;
-
les locaux sinistrés, réparés ou reconstruits dont
le prix est déterminé, aux termes des articles 3 et 71 de la loi du 1er septembre 1948,
par référence aux dispositions du chapitre III de ce texte.
Sont au contraire exclues du bénéfice de l'allocation les
personnes occupant :
-
des locaux à usage professionnel pour tout ou partie ;
-
des locaux en tout ou partie à usage commercial ;
-
des immeubles soumis au statut du fermage ;
-
des chambres d'hôtel ou des locaux meublés ou garnis
dont le bailleur exerce la profession de loueur en meublé et dont le prix est
fixé conformément aux dispositions de l'arrêté du 9 février 1951 pris
en application de l'ordonnance du 30 juin 1945 sur les prix ;
-
des locaux situés dans des constructions neuves édifiées
soit depuis le 1er septembre 1948 sous le régime du droit
commun, soit depuis le 3 septembre 1947 sous le régime de la législation
sur les habitations à loyer modéré.
— 2° Le logement occupé par le demandeur de l'allocation
doit être soumis aux règles de détermination des prix fixés soit par le
chapitre III de la loi du 1er septembre 1948 sur les
loyers, soit par l'arrêté du 12 juillet 1949 relatif aux habitations à
loyer modéré.
II Composition du foyer
— Les postulants à l'allocation doivent vivre seuls ou avec
leur conjoint, ou avec une ou plusieurs personnes à charge.
Ces personnes à charge sont :
a. Les enfants, même sans lien juridique de parenté
ou d'alliance, à la charge du demandeur ;
b. Les ascendants et descendants du demandeur ou de
son conjoint, âgés d'au moins soixante-cinq ans ou infirmes, vivant
effectivement au foyer du demandeur et dont ce dernier assure la subsistance au
moyen de ses ressources personnelles ;
c. Les personnes qui, même si elles ne font pas
partie de la famille du demandeur, vivent effectivement à son foyer, dont il
assure la subsistance dès lors qu'elles entrent dans l'une des trois catégories
suivantes : titulaires de la carte sociale des économiquement faibles ; bénéficiaires
de l'allocation temporaire aux vieux ; bénéficiaires de l'assistance aux
vieillards, infirmes ou incurables (loi du 14 juillet 1905).
III. Montant des ressources
— Au point de vue ressources, les postulants sont divisés en
deux catégories.
a. La première comprend les
personnes qui, pour bénéficier de l'allocation compensatrice, n'ont pas à justifier
du montant de leurs revenus en raison de la modicité de leurs ressources déjà constatée
dans le cadre de certaines lois d'assistance.
Ces personnes sont :
-
les titulaires de la carte sociale des économiquement
faibles, puisque cette carte n'est délivrée qu'aux personnes dont les
ressources n'excèdent pas 100.000 francs pour une personne seule, et 130.000
francs pour un ménage ;
-
les bénéficiaires de l'allocation temporaire aux
vieux, puisque celle-ci n'est servie qu'aux personnes justifiant du même
plafond de ressources de 100.000 francs pour une personne seule et de 130.000
francs pour un ménage ;
-
les bénéficiaires de l'assistance aux vieillards,
infirmes et incurables, qui n'y sont admis que lorsqu'ils disposent de
ressources minimes.
b. La seconde catégorie de
postulants à l'allocation comprend ceux qui doivent justifier auprès des
Commissions cantonales d'assistance que leurs ressources sont inférieures au
salaire servant de base au calcul des prestations familiales.
C'est le préfet, à qui la demande d'allocation est adressée,
qui en assurera la transmission à la Commission cantonale d'assistance.
Le salaire servant de base au calcul des prestations familiales
à retenir pour l'appréciation des ressources des postulants à l'allocation est
actuellement fixé, par le décret du 6 octobre 1946, à 12.000 francs
dans les communes situées dans des zones ne comportant pas un abattement de
salaire. Il est réduit dans les autres communes proportionnellement à l'abattement
de salaire qui était applicable dans les localités considérées, en vertu de la
réglementation sur les salaires en vigueur avant la loi du 11 février 1950
sur les conventions collectives.
Il importe de remarquer que c'est l'ensemble des ressources
dont le foyer du demandeur dispose ou peut disposer qui doit être pris en
considération par la Commission cantonale d'assistance pour l'appréciation des
revenus du postulant.
IV. Occupation suffisante des locaux
— Pour pouvoir prétendre à l'allocation, le locataire doit
aussi assurer une occupation suffisante des lieux loués s'il habite une commune
dans laquelle est instituée la taxe de compensation sur les locaux inoccupés ou
insuffisamment occupés, ou dans laquelle fonctionne un service municipal du
logement.
C'est qu'en effet l'article 40 de la loi du 1er septembre 1948
n'exonérait des augmentations de loyer instituées par elle que les locataires
assurant cette occupation suffisante des lieux.
Dès lors ne peuvent prétendre à une allocation compensatrice
des augmentations exigibles depuis le 1er juillet 1949 que
les seules personnes ayant bénéficié jusqu'à présent de l'exonération
temporaire prévue par ledit article 40, donc assurant une occupation suffisante
des lieux loués.
V. Non cumul avec l'allocation de logement
— Il a été précisé que l'on ne peut cumuler le bénéfice de
l'allocation compensatrice de l'augmentation des loyers et de l'allocation de
logement, allocations qui tendent au même but.
Lorsque le demandeur de l'allocation compensatrice perçoit
l'allocation de logement, il doit l'indiquer expressément sur sa demande,
puisque le service de cette prestation l'écarte de tout droit à l'allocation
compensatrice.
Ainsi l'intéressé n'aurait qu'un droit d'option entre les
deux allocations.
VI Des sous locations
— Lorsqu'une personne, qui pourrait normalement bénéficier
de l'allocation compensatrice, a sous-loué une ou plusieurs pièces de son
logement, il convient de l'exclure du bénéfice de l'allocation puisque, dans
cette hypothèse, le demandeur vit avec une personne qui n'est pas à sa charge
et ne contribue en aucune façon à son entretien.
Il en est ainsi notamment des personnes qui assurent l'hébergement
ou la nourriture d'une ou plusieurs personnes moyennant rétribution.
Observations
— L'allocation compensatrice de l'augmentation des loyers
n'est jamais accordée de plein droit. Il faut donc toujours la demander. Pour
la procédure à suivre à ce sujet, se référer à l'article du mois de novembre.
Le propriétaire n'a pas à intervenir pour l'établissement de
cette demande.
L'augmentation des loyers est applicable, même si la demande
d'allocation compensatrice est rejetée.
_________
Rectificatif : — Dans mon article d'août sur le même sujet,
une erreur de copie s'est glissée au sujet de la date de départ des
augmentations semestrielles du loyer de base à payer par les économiquement
faibles : c'est le 1er juillet 1951.
CROUZATIER.
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