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Le canoé

Manœuvre de la pagaie

Après la propulsion, décrite le mois dernier, nous allons maintenant étudier les manœuvres d'appel et d'écart qui présentent plusieurs points communs et se décomposent chacune en deux temps :

    1° La manœuvre par incidence, dans laquelle la force de l'eau agit sur la pale maintenue dans une position convenable ; pour que cette action puisse se faire sentir, il est indispensable que le canoé possède une vitesse supérieure au courant.

    2° La manœuvre active, au cours de laquelle le pagayeur agit sur la pagaie.

En principe, tout mouvement débute par une manœuvre d'incidence qui agit tant que le canoé conserve une force propulsive et se termine par une manœuvre active à partir du moment où la vitesse du bateau disparaît.

Les manœuvres d'incidence s'obtiennent par présentation de la pale dans l'eau dans une position déterminée (angle ouvert ou fermé). On dit qu'un angle est ouvert lorsque la pale, immergée dans une position verticale où proche de la verticale, forme avec l'axe du bateau un angle aigu vers l'avant (fig. 1, équipier arrière). L'angle est fermé lorsque la pale forme un angle aigu vers l'arrière (fig. 1, équipier avant).

Pour l'exécution des manœuvres, l'équipier avant aura le corps légèrement incliné en arrière ; par contre, l'équipier arrière se penchera légèrement en avant.

Appel.

— Ainsi nommé parce que le bateau est appelé, ou tiré, vers la pagaie immergée à distance.

Pour l'équipier avant, en partant de la fin de propulsion, la pale, toujours immergée, est éloignée du canoé par la tranche intérieure (située contre la coque pendant la propulsion) et maintenue en angle ouvert (fig. 2a) à hauteur du barrot, tant qu'agit la force propulsive ; la manœuvre active consiste à ramener la pale contre la coque, en avant du pagayeur (en réalité, c'est le canoé qui se déplace vers la pagaie). Pendant toute l'exécution, le bras supérieur est tendu et pousse l'olive vers l'extérieur. Le bras inférieur, légèrement ployé, tire pour faire opposition à la force de l'eau, puis amener le bateau en contact avec la pagaie.

S'il est nécessaire de réitérer la manœuvre, pour effectuer un demi-tour complet par exemple, la pale, toujours immergée, est reportée par la tranche intérieure en position a pour une manœuvre seulement active, puisque, à ce moment, le canoé est privé de vitesse.

Pour l'équipier arrière, la manœuvre est sensiblement la même, avec cette variante qu'en position d'incidence par angle ouvert (a') la pagaie est portée en avant du pagayeur pour permettre ensuite une manœuvre active d'avant en arrière qui conserve un effet propulsif et facilite l'action de l'équipier avant.

Il est recommandé de ne pas chercher à porter la pagaie trop loin vers l'extérieur en penchant le corps avec excès en dehors du bateau ; c'est peut-être très spectaculaire mais dangereux pour la stabilité.

Écart

— Ainsi nommé parce que le canoé est écarté, ou poussé, par la pagaie prenant appui sur le plat-bord.

Cette manœuvre est beaucoup plus difficile à réaliser que l'appel ; la main basse maintient constamment le manche de la pagaie en contact avec le plat-bord en un point fixe (devant le pagayeur avant et à hauteur du barrot pour l'équipier arrière).

Manœuvre d'incidence : la pale est immergée en position presque verticale, légèrement inclinée sous le bateau (fig. 3a-b) avec un angle fermé. Notons que plus la vitesse est importante, plus cet angle doit être faible, car l'équipier avant ne saurait sans risque maintenir un angle trop important.

Manœuvre active : la main olive tire vers l'intérieur du canoé de façon à écarter la pale vers l'extérieur en position a'-b' (en réalité, la pale reste fixe, et c'est le canoé qui est poussé).

La manœuvre d'incidence a une action rapide et puissante, mais la phase active, de peu d'amplitude, demande généralement à être renouvelée plusieurs fois. Pour revenir de la position a'-b' à la position a-b, la main olive fait décrire un quart de tour à la pagaie pour présenter la tranche arrière de la pale vers l'extérieur et pousse ensuite de a' a. a. À nouveau, un quart de tour en direction inverse place la pale en position convenable, c'est-à-dire avec un angle très légèrement fermé.

Cette manœuvre du poignet olive est très délicate, et le débutant devra en décomposer les mouvements, sans force, en vérifiant bien la position de la pale et surtout l'importance de l'angle d'incidence, qui, trop prononcé, risque d'arracher la pagaie des mains et même de faire chavirer.

Pour l'équipier arrière, la manœuvre est la même, mais il est préférable d'opérer avec la pagaie inclinée, en une position proche de celle du dégagé en fin de propulsion.

Nous avons dit que la phase active avait peu d'amplitude ; en effet, vouloir prolonger la manœuvre en tirant exagérément l'olive vers l'intérieur du bateau aurait pour résultat une pression verticale sur le plat-bord, compromettant l'équilibre. Or la stabilité doit rester le souci primordial du canoéiste, et il y a assez de facteurs extérieurs susceptibles de la contrarier sans qu'il soit nécessaire d'en ajouter d'autres résultant de manœuvres mal exécutées.

G. NOËL.

Le Chasseur Français N°659 Janvier 1952 Page 29