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Terriers anglais

de chasse sous terre.

La chasse sous terre au moyen de chiens terriers était encore prospère il y a peu d'années. Si on en juge d'après le nombre de chiens terriers de travail figurant aux expositions, ce sport paraît avoir moins d'adeptes. Les autres moyens de destruction, tels que piège, poison et gaz toxiques, sont de plus en plus employés. Mais pourquoi se désintéresse-t-on d'un sport véritable, comportant beaucoup de savoir-faire, et par cela plein d'intérêt ?

Ce n'est un secret pour personne que les races de chiens terriers, particulièrement celui dont le prototype est le fox-terrier, ont, comme ce dernier, sensiblement évolué depuis l'aurore de notre siècle. Il suffit de consulter la monographie générale du comte de Bylandt, datant de la dernière décade du XIXe siècle, pour être fixé. Les fox-terriers à poil plat de l'époque, fortement corsetés, présentant égalité de longueur de la face et du crâne, n'auraient désormais aucune chance sur les bancs. Inutile de nier que, depuis ces temps lointains, l'ensemble céphalique du fox-terrier s'est sensiblement modifié, en même temps que la taille s'est élevée. Cette évolution ne peut surprendre, la chasse sous terre étant généralement abandonnée en Grande-Bretagne, sauf sur les confins de l'Écosse, où existe précisément un terrier exclusivement de travail, le border-terrier. Toutefois, y a-t-il encore amateurs de ce sport disséminés un peu partout ? Oui, si l'on en juge d'après les petites annonces du Field, proposant des working-terriers ressemblant en général à des fox-terriers près de terre, en quelque sorte des compromis entre le fox-terrier et le Sealyham.

Celui-ci est assez massif, semble-t-il, d'autant que certains le considèrent comme chien de compagnie. Mais le Sealyham est bien un chien de chasse. Le regretté Alain Bourbon s'en est trouvé très satisfait pour le déterrage. Moins téméraire que certains de nos fox-terriers modernes, il sait tenir le ferme sans recourir à la bagarre. Tactique recommandable. C'est un chien compact et près de terre, avec une tête rappelant, en plus refoulée et ouverte, celle du fox-terrier, dont il a les oreilles en V collées contre la face. Sa taille de 0m,30 environ, son poids de 7 à 9 kilogrammes sont caractéristiques du terrier terrant. Toutefois, c'est aussi un bon pisteur, dont les talents comme chasseur de lapin en petits équipages sont utilisés en son pays. Son poil dur lui vaut bonne protection dans les plus mauvais fourrés. Il est malheureusement peu répandu en France, où ses divers talents le feraient apprécier. Sa couleur blanche ne permet pas au tireur de le confondre avec le gibier, grand avantage lorsqu'on chasse le lapin en particulier.

Le Border-terrier, plus haut nommé, à peu près inconnu chez nous, est exclusivement un chien de chasse, sous robe froment rouge ou grise, de 0m,35 à 0m,37, de 7 à 10 kilogrammes, à poil rude, assez près de terre sans être aucunement basset, campé sur des antérieurs bien droits. Sa particularité est sa tête, ressemblant étrangement à celle de la loutre, sauf l'oreille en V des terriers matinoïdes. Le fouet n'est pas écourté. Il est assez court et porté à la manière classique du chien courant, en lame de sabre. Le border est d'ailleurs un bon pisteur menant à voix et, par conséquent, susceptible de nombre d'utilités. Sa couleur seule est inquiétante pour les tireurs trop pressés. Produit d'une région où la chasse au terrier est en honneur, on a toute chance de tomber sur un serviteur utile en en faisant acquisition.

L'Écosse, favorisée de plusieurs races de chiens terriers, possède en particulier le Cairn, petit lupoïde à poil abondant destiné à la chasse de tous les nuisibles dans les amas de rochers, les cairns précisément, d'où son nom. De petite taille, 0m,25 environ, de 5 à 7 kilogrammes, ce petit personnage est bien campé sur des antérieurs droits, plus longs (si on ose dire, car ils ne le sont guère) que ceux de son cousin le scottish, en somme près de terre sans être basset, fauve grisâtre en général. L'expression est très éveillée, avec l'œil brun foncé, l'oreille petite pointue, portée bien droite. La robe, composée de poil assez dur, est très fournie, ce qui présente un léger inconvénient dans les terres légères, où le déterreur préfère le poil plat ou celui très dur et assez court. Tel quel, son apparence dénote bien le chien de chasse, aux multiples aptitudes lui aussi, très bon ratier en particulier.

Il a un alter ego en la personne du West Hightand white terrier. À part la couleur entièrement blanche chez celui-ci, il est difficile de les différencier, tant du point de vue de l'anatomie que de la psychologie. Ce petit chien blanc, aux muqueuses bien noires, est un très joli animal. Provient-il, par mutation albine, du précédent ? Il est difficile de le dire. En tout cas, les deux variétés sont sœurs.

Le Scottish-terrier est de leur parenté assurément ; surtout lorsqu'on étudie les anciennes gravures représentant le scottish, on en est convaincu. Mais celui-ci a beaucoup évolué et a tourné au chien de compagnie. La tête n'est plus, sauf par l'oreille, celle d'un lupoïde ; les membres sont remarquables par la brièveté. L'ensemble en est original, et certains disent un peu caricatural. En tout cas, il a grand succès comme chien d'agrément et l'on peut douter que beaucoup de ceux qu'on voit sur les bancs connaissent les combats souterrains. Il est probable qu'en sa patrie demeurent des représentants de la race un peu différents et utilisés eux aussi à la chasse.

Parmi les chiens terriers du type matinoïde dont le fox-terrier est le prototype, il faut encore citer le Welsh-terrier, de même formule, sous robe à poil dur noir et feu. Très joli chien bien dans le modèle hunter, avec une tête, ou surtout une face moins allongée que celle du fox-terrier. C'est, actuellement, celui qui rappelle le mieux l'old english-terrier, de robe fauve. Chez lui, quand il est exempt d'alliance avec le fox-terrier, pas de prédominance faciale. La taille se tient entre 0m,35 et 0m,37, tout à fait louable pour un chien terrant. Comme le fox-terrier, beaucoup d'entre eux mènent à voix tout gibier, du lapin au sanglier. J'ai vu l'un d'entre eux y exceller. C'est un très joli chien qui, outre la couleur, ne diffère du fox-terrier que par un crâne plus large entre les oreilles, un stop plus visible, et par une face ne dépassant pas la longueur du crâne, comme il sied à tout matinoïde authentique. Mais certains d'entre eux accusent une parenté proche avec le fox-terrier.

Le grand chasseur qu'était M. Cerfon faisait le plus grand cas de l’Irish-terrier. C'est en effet un combattant réputé. Autre terrier dans la formule matinoïde, susceptible de servir au déterrage lorsque sa taille ne s'y oppose, celui qui atteint 0m ,45, comme le standard l'autorise, peut faire merveille derrière le sanglier, mais ne saurait servir au déterreur. Sa structure est celle d'un hunter élégant, sous-poil dur de préférence rouge, les muqueuses noires. Sa tête présente les caractères du fox-terrier et ses aptitudes sont les mêmes, étant comme lui utilisable à la chasse de tous les indésirables. Son tempérament particulièrement bouillant lui a valu le qualificatif de « dare devil ».

Ne consacrant ces lignes qu'aux terriers propres au déterrage, je ne nommerai aucun de ceux que leur taille ou l'évolution écartent de ce sport. En Grande-Bretagne, des races nouvelles de terriers se sont révélées depuis un demi-siècle en grand nombre, dont beaucoup ne sont pas, ou ne sont plus, très employées à la chasse. Parmi elles, une ancienne, de formule bassette, le Dandie-dinmont-terrier, doit être nommée, car sa structure et son caractère lui permettent de faire figure en notre sport, mais elle semble avoir abandonné la carrière où, d'après les auteurs, elle fut autrefois brillante.

Mais sa rareté n'engage pas particulièrement le chasseur du continent à la rechercher. Il lui reste le fox-terrier, qu'il choisira dans le type ne marquant pas les caractères graïoïdes ; il a encore ceux qui gravitent autour de ce prototype et, en outre, les petits lupoïdes d'origine écossaise. Le choix est, comme on le voit, nombreux, et l'expérience enseigne que la médiocrité y est peu à redouter.

R. DE KERMADEC.

Le Chasseur Français N°660 Février 1952 Page 81