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Le canoé

Manœuvre de la pagaie

Effet des manœuvres.

— En conclusion à l'étude détaillée des différents mouvements de la pagaie (1), nous pouvons poser comme principe que deux manœuvres semblables exécutées simultanément par les deux équipiers s'ajoutent l'une à l'autre en augmentant la rapidité et l'ampleur de l'action recherchée ; le canoé pivotera sur lui-même dans la direction imposée par l'équipier avant.

Ainsi, dans le cas de la figure 1 (équipier avant bordé à droite), la manœuvre d'appel fait virer le bateau vers la droite. Sur un écart des deux équipiers pareillement bordés, le canoé virerait vers la gauche.

Par contre, deux manœuvres opposées s'annulent en direction et déplacent le canoé latéralement vers la pagaie qui travaille en appel. Suivant la figure 2 (appel av. droit, écart arr. gauche), le canoé se déplace latéralement vers la droite. Il suffirait d'inverser les manœuvres pour obtenir un déplacement vers la gauche.

On conçoit facilement que ces deux manœuvres fondamentales, appel et écart, exécutées séparément ou simultanément par les deux équipiers, dosées suivant l'effet recherché, permettent de diriger et d'orienter un canoé dans toutes les positions possibles avec la plus grande précision et le maximum de rapidité dans l'exécution.

Manœuvres du soliste.

— Un profane regardant évoluer un canoé monté par deux équipiers comprend parfaitement que l'action des deux pagaies sur les bords opposés se compense pendant la propulsion, et qu'ainsi le bateau suive une route rectiligne. Mais le fait qu'un canoéiste en solo puisse marcher droit en pagayant sans cesse sur le même bord lui apparaîtra toujours comme une chose mystérieuse.

En solo, le pagayeur placé presque au centre du bateau est à même d'effectuer les manœuvres de l'équipier avant et de l'équipier arrière. Ainsi, son mouvement de propulsion sera sensiblement le même que celui de l'équipier arrière, terminé par un redressement plus prononcé puisqu'il n'a pas la ressource d'un pagayeur compensant son effort sur le bord opposé. Cependant, pour que ce redressement ne soit pas excessif et risque de ralentir la cadence, la propulsion débutera avec la pagaie un peu éloignée du plat-bord, en angle fermé ; ainsi la passée dans l'eau, en avant du pagayeur, se fera avec un léger mouvement d'appel, qui retiendra le bateau en ligne.

En ce qui concerne les manœuvres, le même mouvement aura un effet contraire suivant qu'il sera exécuté en avant ou en arrière du pagayeur. Ainsi, s'il est bordé à gauche :

Écart avant = virage à droite.
Écart arrière = virage à gauche.
Appel avant = virage à gauche.
Appel arrière = virage à droite.

D'où nous pouvons conclure qu'un écart arrière gauche, par exemple, aura le même résultat théorique qu'un appel avant gauche tendant à faire tourner le canoé vers la gauche (fig. 3). Ici, comme dans la manœuvre simultanée de deux équipiers, le soliste peut conjuguer deux manœuvres différentes pour obtenir l'effet maximum comme le montre également la figure 3, si le mouvement débute par un écart arrière et se termine par un appel avant sans que la pagaie soit sortie de l'eau.

En pratique, le soliste devra acquérir une grande expérience pour savoir, suivant les circonstances, quelle manœuvre il devra utiliser de préférence. C'est un art extrêmement subtil où, seuls, d'excellents canoéistes peuvent passer maîtres. Il n'en est pas moins certain que chacun, même le débutant, doit être capable de se tirer d'affaire en solo.

Pour le soliste, la position du corps reste la même que pour les équipiers avant ou arrière pendant l'exécution des manœuvres ; seuls les points d'appui dans le bateau peuvent être déplacés pour donner plus d'aisance, surtout si l'on utilise un canoé biplace. Pour un pagayeur bordé à gauche, le corps sera légèrement déplacé de ce côté, le genou gauche dans le creux du canoé, mais le genou droit à droite de la quille centrale pour permettre de contrôler l'équilibre ; ainsi le canoé gîte légèrement du côté de la pagaie. Dans un canoé étroit ou sur une rivière accidentée, cette position serait dangereuse et le corps devra rester dans l'axe du bateau, les genoux écartés.

Entraînement.

— Il est bon que le débutant adopte une méthode de travail susceptible de le faire progresser rapidement, et l'ordre suivant, observé à l'école de la pagaie du Canoé-Club de France, semble le meilleur.

    1° Premiers éléments de propulsion à la place d'équipier avant.

    2° Manœuvre d'appel, sur place d'abord en décomposant les mouvements, puis en marche avec application des angles d'incidence et enchaînement avec la propulsion. Manœuvre d'écart de la même façon. Pendant l'étude des manœuvres, le canoé se déplace et l'élève en profite pour améliorer la propulsion.

    3° Propulsion et manœuvres à l'arrière, en débutant de préférence avec un bon pagayeur à l'avant.

    4° Manœuvres simultanées des deux équipiers, déplacements latéraux en effectuant des parcours autour d'obstacles (piquets, bouées) qui permettent de contrôler la bonne exécution des mouvements. Entraînement en solo.

G. NOËL.

(1) Voir Le Chasseur Français de décembre 1951 et janvier 1952.

Le Chasseur Français N°660 Février 1952 Page 93