Accueil  > Années 1952  > N°662 Avril 1952  > Page 223 Tous droits réservés

Paillage et terreautage

Voici deux opérations fort utiles à pratiquer au jardin : le paillage et le terreautage.

Le paillage consiste à étendre sur le sol un fumier pailleux à demi décomposé, appelé paillis, en couche peu épaisse.

Le rôle horticole joué par le paillis est fort important :

    — La couche de paillis évite l'évaporation de l'eau du sol ;

    — La fraîcheur du sol est conservée plus longtemps ;

    — Il empêche le tassement de la terre par l'eau des arrosages ;

    — Il apporte des éléments fertilisants ;

    — Il permet de préserver certains légumes et fruits contre la souillure du sol : fraises, melons.

Pratique du paillage.

1° Obtention du paillis : il provient de la décomposition, après plusieurs mois de fermentation, des pailles du fumier qui sont aplaties et colorées en brun ; selon leur longueur, on obtient un paillis court (10 centimètres), ou un paillis long (20 centimètres).

Lorsqu'on démonte vers le mois de juin la couche montée en janvier, on obtient un lit plus ou moins épais d'excellent paillis.

Si on a monté une champignonnière, le fumier, qui, alors, a été utilisé à la culture du champignon, constitue également un bon paillis.

On obtient rapidement un paillis de valeur en constituant un tas bien tassé de 1m,50 à 2 mètres de fumier (de préférence de cheval) frais ou ayant déjà fermenté et en l'arrosant abondamment. Une première fermentation active va se produire et, une huitaine de jours plus tard, on démontera le tas et on en constituera un nouveau ; en l'arrosant, on produira une nouvelle fermentation. Une quinzaine de jours plus tard, on répétera pour la troisième fois l'opération : au bout de cinq à six jours, le paillis pourra être utilisé.

À défaut de fumier, on pourra utiliser les feuilles sèches que l'on ramassera et décomposera à demi, les marcs de raisins ou de pommes, la paille hachée, etc.

2° Quand faut-il pailler ? On ne paillera jamais si le sol n'est pas suffisamment réchauffé. Au printemps, on ne paillera pas trop tôt : il faut une température assez élevée, faute de quoi on empêcherait le réchauffement du sol, et le danger de gelée blanche serait à redouter. En été, surtout si la terre du jardin est perméable ou si l'on ne dispose que d'une quantité d'eau limitée, on paillera soit après le semis, soit avant de planter.

3° Comment pailler ? On paillera proportionnellement à la force des plantes : un paillis court sur les semis effectués, sans oublier les plantes en godets, en pots ; un paillis long sur les repiquages, les semis à grand écartement, les plantations en pleine terre.

Le paillis est indispensable pour les cultures avides d'eau : tomates, concombres, aubergines, ce qui permet de réduire considérablement le nombre et la fréquence des arrosages.

L'épaisseur du paillis sera plus ou moins forte selon qu'il s'agira de recouvrir un semis de graines fines ou une plantation de repiquages jeunes (laitues) ou adultes. En moyenne, l'épaisseur convenable du paillis est de 2 à 3 centimètres ; mieux vaut le renouveler au cours de l'année.

4° Cas particulier de paillage. On procède au paillage des fraisiers sous une forme particulière ; on n'emploiera pas un paillis provenant de fumier cuit et décomposé (danger de contamination), mais une paille longue et propre ; il s'agit uniquement de protéger les fraises contre les souillures du sol et de maintenir la fraîcheur.

Le terreautage consiste à recouvrir de terreau, terre fine et noire, obtenue par décomposition totale du fumier, les semis.

Le rôle du terreau est encore plus important que celui du paillis :

    — En raison de sa couleur noire et de sa porosité, il absorbe vite la chaleur solaire et produit ainsi un réchauffement rapide du terrain (le rayonnement au niveau du sol est supprimé) ;

    — Il conserve fortement l'humidité et maintient plus longtemps la fraîcheur de la terre : il résulte d'expériences précises réalisées qu'une parcelle terreautée perd par évaporation 4 à 5 fois moins d'eau que la terre nue ;

    — Il fertilise le sol en permettant la multiplication des bactéries du sol, auxiliaires indispensables pour pourvoir à l'alimentation végétale ;

    — En permettant à la terre, à la manière de l'argile, de retenir les éléments fertilisants pouvant être entraînés par les pluies ;

    — Il alimente les plantes qui, par leurs racines, le dévorent avidement.

Pratique du terreautage.

1° Époque : il se pratique au printemps pour les semis précoces : radis, laitues ; au cours de la saison culturale, et principalement en période ensoleillée, et pour tous les semis quelque peu délicats ;

2° Comment terreauter ? En semant à la main ou à la pelle sur la planche semée ; les semis pratiqués en pleine terre ont plus besoin d'être terreautés que ceux réalisés sous couche. De même, un semis de graines fines pratiqué en sol mal ameubli ne saurait réussir : les graines demeurent dans le vide, entre les mottes ; il est donc indispensable de terreauter. Il est recommandé de terreauter une planche de carottes aussitôt l'éclaircissage exécuté ; le collet des carottes, légèrement déterré, conduit à un verdissement ultérieur des racines, ce qui constitue une perte et donne un goût désagréable.

Mais, si paillage et terreautage exercent une influence favorable sur la végétation, il faut en régler judicieusement l'emploi. Tous deux peuvent présenter des inconvénients en cas de pluies abondantes ou d'arrosages excessifs, en entretenant dans les couches superficielles du sol un excès d'humidité nuisible aux semis et aux végétaux (pourriture).

Si toutes les couvertures sont utiles pendant la saison chaude, il sera préférable d'attendre que la température se soit suffisamment élevée pour les appliquer au printemps. En cette saison, la couverture de terreau est particulièrement conseillée, et on préviendra ainsi le danger de gelée blanche.

BOILEAU.

Le Chasseur Français N°662 Avril 1952 Page 223