Accueil  > Années 1952  > N°662 Avril 1952  > Page 225 Tous droits réservés

Pommes de bonne conservation

On compte un grand nombre de variétés de pommiers. En dehors de celles que l'on trouve partout, chaque région possède, en effet, une ou plusieurs variétés locales, généralement bien adaptées au terrain et au climat. Le plus souvent, ces variétés sont à deux fins : elles servent à faire du cidre dans les années d'abondance, tandis qu'on les utilise comme fruits à couteau dans les années de faible production.

Il faut bien se garder de faire fi de ces variétés locales. C'est, en effet, l'expérience de nombreux cultivateurs qui en a favorisé la diffusion dans une région déterminée, à l'exclusion de beaucoup d'autres dont la réussite serait sans doute plus aléatoire dans cette région.

Les pommes à couteau proprement dites sont aussi très nombreuses. Il n'y a cependant pas lieu d'en cultiver beaucoup de variétés. Les différences entre elles sont, en effet, moins tranchées que lorsqu'il s'agit des poires ; l'abondance du jus, la nature de la chair, le parfum sont peu différents. Les époques de maturité varient également moins, car beaucoup de variétés mûrissent tard et fort lentement, ce qui en prolonge beaucoup la période de consommation.

Parmi les variétés tardives, Calville blanche se place, sans contestation possible, au premier rang pour la qualité. C'est un gros ou très gros fruit, à base élargie, présentant, au voisinage de l'œil, des côtes très nettement accusées. La peau en est fine, vert clair, devenant d'un jaune cireux à maturité, avec du rouge vif du côté du soleil.

La chair est fine, tendre, fondante et parfumée, sucrée, de saveur très agréable.

La maturité s'échelonne de novembre jusqu'en mai.

L'arbre est bien vigoureux, très fertile. Malheureusement, il est extrêmement sensible aux attaques de la tavelure. Aussi l'abri de l'espalier à l'est est-il, le plus souvent, nécessaire à cette variété.

La Calville blanche est une excellente pomme de commerce, de vente rémunératrice lorsque le fruit est sans défaut. Mais elle est également bonne pour les plantations d'amateurs à cause de sa maturité prolongée.

Ce n'est pas, en tout cas, une variété à cultiver en haute tige au verger, où l'on n'est pas en mesure de lutter efficacement contre la tavelure et où le fruit resterait trop petit pour être intéressant comme fruit de commerce.

Par contre, au jardin, en formes taillées, elle est recommandable quand on peut lui donner les soins voulus.

Reinette blanche du Canada est également très estimée. Elle est même souvent préférée à la Calville. C'est un très gros fruit, à base très large, à peau rude, vert tendre, marbrée et tachée de fauve et de gris. La chair en est blanc jaunâtre, fine, assez tendre, sucrée, légèrement acidulée et bien parfumée, de très bonne qualité.

Elle est mûre de décembre à avril.

L'arbre est très vigoureux, mais de fertilité irrégulière. Il peut être cultivé sous toutes formes, même en haute tige. Mais il réussit surtout bien à une certaine altitude, dans le Massif Central par exemple. Dans beaucoup d'autres endroits, il est particulièrement sujet au chancre.

La Reinette du Canada est un fruit de commerce de tout premier ordre qui, comme la Calville blanche, se vend souvent à la pièce.

En formes taillées, greffées sur paradis, ce fruit devient, en effet, très gros. En haute tige, il est encore de bonne grosseur et se vend facilement au poids.

Reinette grise du Canada est quelque peu différente de la précédente. Son fruit, de même forme et de même couleur jusqu'en juillet, prend, à partir de ce moment, une teinte uniforme, gris fauve, qui l'en différencie assez nettement.

L'arbre est un peu plus fertile, moins sensible au chancre, ce qui en rend la culture plus indiquée en haute tige au verger.

Reinette de Caux est aussi une bonne variété. Le fruit est assez gros, régulier, un peu plus large que haut. La peau en est fine, verdâtre, jaune à complète maturité, striée et lavée de rouge sombre du côté du soleil. La chair est jaunâtre, fine, croquante, sucrée, bien parfumée, acidulée et juteuse, de très bonne qualité.

La maturité s'échelonne de janvier jusqu'en mai.

L'arbre est vigoureux, produit beaucoup et réussît particulièrement bien en haute tige au verger. C'est un fruit de commerce des plus intéressants à cause de sa qualité et de la fertilité de l'arbre.

Reine des Reinettes se recommande pour la même utilisation, quoique ce soit une pomme moins tardive. Le fruit est assez gros, odorant, globuleux, plus ou moins aplati, à contour régulier. La peau en est d'un beau jaune du côté de l'ombre, fortement lavée de rouge orangé du côté du soleil.

La chair est blanc jaunâtre, ferme, un peu cassante, sucrée, parfumée et un peu acidulée, de très bonne qualité.

La maturité se poursuit d'octobre jusqu'en mars.

L'arbre est vigoureux, très fertile, et peut aussi se cultiver sous formes taillées. Pour l'approvisionnement du ménage, cette pomme est des plus avantageuses en raison de la longue période pendant laquelle on peut la consommer. On peut reprocher à cette variété son extrême sensibilité aux attaques des pucerons. D'autre part, en haute tige, les fruits tombent facilement.

Reinette Baumann est encore, pour la culture en haute tige, une variété très recommandable. Son fruit est assez gros, presque sphérique. Il est richement coloré en rouge carmin du côté du soleil, tandis qu'il est jaune orangé à l'ombre.

Sa chair est blanc jaunâtre, assez fine, sucrée et acidulée. Elle est bonne et peut se consommer de novembre à mars.

L'arbre est vigoureux et fructifie bien lorsqu'il est adulte. Son seul inconvénient est aussi de laisser tomber ses fruits avec une trop grande facilité. À l'époque de la récolte, il est très décoratif lorsqu'il est chargé de fruits rouges, tranchant sur le feuillage vert foncé.

Reinette du Mans, connue également sous le nom de pomme de jaune, est un fruit moyen, assez régulièrement globuleux, à peau lisse, d'abord verte, devenant jaune-paille à complète maturité, avec des ponctuations fauves. Sa chair est blanc jaunâtre, croquante, sucrée, acidulée, assez parfumée, bonne quand elle est bien à point.

Elle commence à mûrir en janvier et se conserve très longtemps, jusqu'en juin et même au delà dans de bons fruitiers et lorsqu'elle a été rentrée parfaitement saine.

L'arbre est d'assez bonne vigueur, produit beaucoup et est très rustique. Il convient tout particulièrement pour la culture en haute tige et réussit surtout merveilleusement en Touraine et dans le Maine, où l'on en rencontre beaucoup. Fleurissant très tard, en mai, il ne redoute pratiquement rien des gelées blanches. Par contre, il est assez attaqué par le chancre.

Ce qui rend surtout cette pomme intéressante pour le commerce, c'est sa conservation extrêmement facile. En Touraine, en effet, on la récolte en fin octobre et on la conserve jusqu'en février, soit sous des hangars aérés où on l'accumule sous une certaine épaisseur, soit, plus simplement encore, en tas dans les cours, en recouvrant ces tas de paille de seigle pour les préserver de la pluie.

La pomme de jaune est très appréciée par le commerce, pour la vente au poids. Les Halles de Paris en reçoivent des quantités importantes chaque hiver. Dans les pays de grosse production de ce fruit, les arboriculteurs se sont groupés pour faire en commun le triage et l'expédition.

Reinette grise haute bonté est également un fruit moyen, parfois un peu allongé, à peau mate, grise ou rousse, un peu rougeâtre du côté du soleil, à chair jaunâtre, ferme, sucrée, acidulée, bien juteuse, parfumée, de très bonne qualité.

La maturité se prolonge de janvier jusqu'en mai.

L'arbre, assez vigoureux, a une production moyenne mais régulière et se cultive sous toutes les formes, même en haute tige.

On apprécie beaucoup cette excellente variété dans le Sud-Ouest, où elle est connue sous le nom de Reinette de Saintonge. On la trouve dans toute la France, et même en dehors de nos frontières, et elle est partout très estimée.

E. DELPLACE.

Le Chasseur Français N°662 Avril 1952 Page 225