Dans une chronique récente, j'ai examiné les réponses qui
m'avaient été faites par de nombreux lecteurs du Chasseur Français au
sujet des congés hebdomadaires de deux jours et des congés de Pentecôte, du
Nouvel An et de Pâques.
Sur ces deux premiers points, la grande majorité s'est
déclarée en faveur des congés hebdomadaires de deux jours consécutifs, soit
d'une façon absolue, soit sous la condition, très normale d'ailleurs, que les
programmes scolaires soient modifiés en conséquence.
J'ai oublié de dire qu'un instituteur-chasseur préfère le
jeudi et le dimanche parce que les jours de chasse, dans son pays, sont le
jeudi et le dimanche. Il serait sans doute possible de chasser le samedi et le
dimanche, ce qui permettrait d'ailleurs des déplacements plus lointains.
Pour Pâques, Noël et la Pentecôte, unanimité complète pour
les vacances avant plutôt qu'après, en tout cas correspondant aux jours de
congé des travailleurs.
Reste la question, que j'avais effleurée dans un article
d'août 1951, des grandes vacances.
À ce propos, les avis, reconnaissons-le très franchement,
sont partagés.
La plupart de mes correspondants sont pour le maintien des
dates actuelles : 14 juillet, 1er octobre. D'autres
préféreraient cependant les vacances du 1er juillet, voire même
du 15 juin au 15 septembre. Les arguments mis en avant sont
variables. Mme C..., cultivatrice en Auvergne, voudrait que les
lycéens puissent ainsi prêter main-forte aux travaux des champs. D'autres, les
plus nombreux, mettent en avant la plus longue durée du jour en juin ou début
juillet.
À vrai dire, le problème avait été moins bien posé par
moi-même, ce qui fait que les réponses ont été moins précises.
Reconnaissons aussi que c'est le problème qui risque d'avoir
le plus d'actualité.
Les vacances du 1er juillet au 15 septembre
ont été appliquées à titre d'essai dans l'Académie de Rennes en 1951, et les
Services publics voudraient étendre l'expérience en 1952. Cela n'a d'ailleurs
pas rencontré une approbation unanime et j'ai relevé, dans un journal
quotidien, une mise au point de la section de la Seine du Syndicat national des
Instituteurs qui, faisant état d'informations relatives à une modification de
la période des vacances scolaires, « s'étonne des affirmations tendant à
faire croire que la grande majorité des enseignants est favorable à une telle
modification ». Une étude de ce problème est actuellement en cours,
précise le Syndicat, et rien ne permet de préjuger des conclusions auxquelles
elle aboutira. La section de la Seine s'élève contre toute modification qui
serait apportée en cours d'année scolaire et sans étude sérieuse de ses
incidences sociales et pédagogiques.
J'ai dit, en août 1951, que les arguments en faveur du
changement de date des vacances scolaires étaient les suivants :
1° Les jours sont plus longs ;
2° À partir du 1er juillet, les élèves ne font plus rien ;
3° Il fait plus beau en juillet ;
4° Cela permet d'étaler les vacances.
Tout le monde, mes correspondants et moi, est d'accord sur
le point 1.
Quant au point 2, j'ai dit et je répète qu'à mon avis il
résulterait, d'une avance des vacances au 1er juillet, que
c'est à partir du 15 juin que les élèves ne feraient plus rien. Car c'est
parce qu'ils sentent les vacances proches que l'attention se relâche. D'autre
part, le corps enseignant voulant, à juste titre, profiter des vacances
avancera la date des examens, et les élèves se retrouveront dans des classes
faites par des remplaçants et seront enclins à ne plus y venir.
Le point 3 m'a valu la seule lettre désagréable parmi les
nombreuses que j'ai reçues.
Que mon correspondant, M. B..., de Vendée, me permette
de lui dire qu'il ne m'a pas convaincu. Je reste, par une expérience
personnelle assez longue, sceptique quant au meilleur temps en juillet.
Certes, il fait plus chaud. Mais pas forcément plus beau.
C'est très fréquemment que les journées de septembre sont fort belles.
L'exemple de 1951 ne m'aura pas convaincu du contraire et j'ai souvent, en
septembre dernier, pensé à la lettre de M. B... Mais reconnaissons que ce
point n'est pas le plus important, et il se peut que ce soit là une opinion
personnelle non partagée par la majorité.
C'est le point 4 qui, à mon sens, vient en première place ...
C'est là une des incidences sociales dont parlait la note du Syndicat
des Instituteurs.
Il faut, dit-on, étaler les vacances ...
Or que se passe-t-il à l'heure actuelle ?
Si les dates officielles vont du 14 juillet au 1er octobre,
les dates réelles, nous l'avons vu, sont le plus souvent du 1er juillet
su 1er octobre, soit trois mois pendant lesquels peuvent être
prises les vacances annuelles.
En préconisant les vacances du 1er juillet
au 15 septembre, on coupe quinze jours dans une saison « hors saison »,
c'est-à-dire pendant laquelle les hôtels sont meilleur marché, et non seulement
les hôtels, mais la vie en général (ce qui intéresse plus les campeurs que le
prix des hôtels). Et l'on ajoute quinze jours dans un mois « cher »
étant donné que, dès maintenant, en fait sinon en droit, les vacances partent
pour beaucoup d'élèves du 1er juillet.
Avec les nouvelles dates de vacances proposées, il n'y
aurait plus que quinze jours en septembre pour trouver des séjours abordables.
En ce qui me concerne, je maintiens qu'il vaut mieux un
séjour en septembre, même avec moins de chaleur, que rien du tout, ce qui
devient de plus en plus le cas pour les travailleurs obligés de compter — et
hélas ! Dieu sait s'il y en a —, et pour lesquels les prix de juillet-août
sont prohibitifs.
Ensuite, il y a plus grave. Partant de cette date proposée
du 15 septembre pour la fin des vacances, voici qu'un honorable député
vient de proposer de modifier tout de fond en comble. Comme le premier
trimestre de l'année scolaire serait plus long de quinze jours, si l'on admet
les nouvelles dates, il propose de couper les grandes vacances en deux. Un mois
en hiver, un mois en été.
Ce n'est pas sérieux, ou c'est une idée inspirée par les
stations de sports d'hiver ! Quelques familles aisées pourront envoyer
leurs enfants aux sports d'hiver. Mais la grande majorité, l'immense majorité
des gosses, passeront un mois à la ville en pleine saison d'hiver.
Et en été, tous les gosses auraient leurs vacances en un
mois, août ou juillet.
En fait d'étalement ! On voit cela d'ici ...
Espérant recevoir à nouveau de nombreuses lettres d'amis
lecteurs, je reste, en ce qui me concerne, franchement favorable aux dates
actuelles : 14 juillet, 1er octobre.
J.-J. BOUSQUET,
Président du Camping-Club de France.
|