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La chiroscopie

ou étude des mains.

Malgré une certaine similitude de nom, il n'y a rien de commun entre la chiroscopie biologique et la chiromancie ou autres pratiques occultes plus ou moins équivoques.

La chiroscopie est uniquement et exclusivement une science ayant pour but de participer à l'analyse psychologique d'un individu par l'examen de ses mains. À ce titre, le médecin spécialiste des recherches d'un laboratoire de criminologie, étudiant des empreintes digitales, fait de la chiroscopie. Il en est de même du médecin prenant la main d'un malade pour voir si elle est fiévreuse ou moite.

La chiromancie est tout autre chose. C'est la pratique de certains individus prétendant lire le passé, le présent et l'avenir dans les lignes de la main. Cette seule définition dispense de formuler toute opinion sur ces pratiques, œuvres le plus souvent de fumistes amateurs ou de flibustiers professionnels.

La chiroscopie tient compte de deux sortes d'éléments. Les premiers sont d'ordre général et concernent particulièrement : la couleur, la forme, la texture et la consistance de la main. Les seconds sont du domaine des détails et analysent les parties constitutives de la main (doigts en particulier), et accessoirement quelques dessins et tracés de surface (monts et lignes).

La couleur.

— À chaque genre de main correspond en principe une couleur spécifique, ce qui est logique puisque chaque humain a un tempérament qui lui est propre : le sanguin est rouge jusqu'au violacé ; le bilieux est jaune ; le lymphatique, blanchâtre ou décoloré jusqu'au diaphane.

La main de couleur blanche correspond à des tempéraments déséquilibrés et langoureux.

Cela s'explique par l'absence d'irrigation normale par le sang. En fait, une main trop blanche peut arriver à déceler un tempérament mou jusqu'à être veule, pleutre et lâche, avec les paradoxes de colères violentes pour acquérir ensuite la quiétude. C'est en connaissant cette particularité que les voyants et autres prétendent que la main blanche est « chanceuse ». Au demeurant, elle n'a d'autre privilège que celui du calcul mathématique des probabilités en partant de ces accès d'humeur bouleversant une uniformité de vie.

La main rouge est inverse : la colère, l'impulsivité y sont permanentes. Chez les sujets bien éduqués ou sachant se dominer, ces caractères se transforment en incontinence verbeuse, vantardise, mais le processus est identique. Rarement la mutation s'oriente vers le dévouement et l'audace. La dominance reste : violence et grossièreté.

La main jaune correspond à un tempérament insatiable et fermé, ce qui se traduit par de l'avarice et de l'orgueil, avec comme déformations psychologiques l'entêtement et le fanatisme. C'est aussi celle des velléitaires concevant de mirifiques projets, mais ne réalisant pas le moindre travail pondéré.

Le plus souvent, il y a une relation entre la couleur et les formes des mains : celles rouges sont carrées ou rondes, les jaunes sont en majorité spatulées et les coniques et pointues sont surtout blanches.

Les formes.

— La main aux extrémités coniques se trouve surtout chez les femmes, ce qui correspond parfaitement à leur dominance psychologique de sensibilité et d'intuition. Ce sont les doigts également de l'attirance, de la confiance, de la sympathie, avec une tendance très nette aux poésies et à la rêverie.

Les mains aux dominances rondes, doigts et contours, sont les plus fréquentes chez les hommes. Ce sont celles des gens aimant l'équilibre des formes et l'esthétique équilibrée ; surtout comme fresque de fond dans leur vie. Toutefois des doigts ronds sur une main trop petite indiquent un tempérament érotique, tandis que, sur une grande main, il y a transposition sur le domaine cérébral avec tendance aux fastes et parades mondains.

Les mains carrées, autant des bouts de doigts que des contours, infèrent d'une activité manuelle, avec beaucoup de précision et d'ordre, mais impuissance dans le domaine des spéculations intellectuelles. Elles sont le miroir d'un tempérament ouvert, donc loyal, dévoué, avec du courage physique et moral. Mais, longue, il y a une extrapolation de cet altruisme qui, pour retrouver son équilibre, tend au despotisme.

Les mains spatulées sont rares et indiquent une activité cérébrale adroite, subtile, réalisatrice, mais de petits projets. Longue, on la trouve chez les taciturnes et les jaloux.

Les textures.

— La main dure est celle de la puissance vitale, de l'activité, mais beaucoup plus débordante et même désordonnée que régulière et rationnelle. Inversement, la main souple est celle des cérébraux, mais, si elle devient molle, ce sera celle d'un caractère rêveur ou mystique. À ce titre, on la trouve souvent chez les peintres, sculpteurs, écrivains.

La main d'aspect sec indique une prédominance cérébrale, celle des nerveux calmes et contenus, c'est-à-dire où la raison prédomine sur les sentiments et la spontanéité. La main chaude est tout logiquement à l'opposé, avec une expression de réflexes brusques du psychisme correspondant à une grande spontanéité, parfois à une expansivité pouvant devenir importune comme chez les bavards et les emportés impulsifs.

La main épaisse correspond à un caractère matérialiste et souvent charnel. Toutefois, si elle est franchement dure, elle correspond à celle des intellectuels.

Les doigts.

— Le pouce présente une grande importance, surtout chez l'homme, et il est un fait, c'est que les idiots de naissance, les arriérés, les dégénérés ont des pouces insignifiants.

Le pouce en forme de boule indique un tempérament sans équilibre, versatile et coléreux. Carré, il est une indication de labeur, mais, si la première phalange est trop longue ou forte, l'impulsivité domine sur la volonté. Inversement, si la seconde phalange est très longue, il y a manque de volonté et absence de vue avec grandeur et recul.

Les grands pouces correspondent ainsi aux personnalités fortes, et les petits aux faibles. On juge la longueur par comparaison avec l'index : la phalange onglée dépassant la seconde jointure de l'index, le pouce est long. Un pouce moyen atteint le milieu de la troisième phalange de l'index.

L'index pointu correspondant a des tendances de cérébralisme exagéré ; simplement conique, il est douceur et art. Carré, il est équilibre, avec beaucoup de conformisme conventionnel. Spatule, il correspond au mysticisme outrancier jusqu'au fanatisme et à l'intolérance. Court, il indique beaucoup plus une ambition d'arriviste peu franc qu'une modération, tandis que long, c'est l'orgueil, l'ambition parfois démesurée.

Le médius, quand il est pointu, correspond à l'intuition, avec facilité de concevoir des sujets vastes et ardus. Carré, il indique une discipline avec intolérance. Spatulé, il correspond à un psychisme renfermé et taciturne. Long, il devient sceptique et instable, relevant alors du fatalisme.

L'annulaire est toujours le plus chaud physiologiquement, et c'est de là que les diseuses de bonne aventure lui ont attribué une correspondance avec le cœur. Scientifiquement, elle fait rire comme explication. Carré, il correspond à un sentiment d'égoïsme, se traduisant souvent en cupidité. Long, il implique la dépense somptuaire, la prodigalité, et court, la prédominance de la richesse sur les honneurs ou la puissance.

L'auriculaire indique des affinités avec le langage et la parole, l'intuition et l'adresse, selon que ses formes et dimensions sont équilibrées ou non. Long exagérément, il implique un trop grand attrait pour l'argent, et court, une absence de sens pratique.

Les articulations.

— Les articulations ne sont pas permanentes, dans leurs aspects ou nœuds, depuis l'enfance jusqu'à la vieillesse. Des mains lisses, uniformes, sans nœuds apparents des articulations, peuvent devenir noueuses, mais l'évolution inverse est impossible.

L'articulation donnant le nœud entre la phalange onglée et la seconde est dite indicatrice de la cérébralité, c'est-à-dire des besoins d'étudier, comprendre, raisonner, douter, comparer. La seconde articulation est, d'après ses forme, texture, volume, l'indication de la matérialité, c'est-à-dire les notions pratiques et le sens des réalités, en particulier en affaires.

Les monts.

— Ce sont les protubérances bulbaires qui se trouvent à la base de chacun des cinq doigts. Les diseuses de bonne aventure les utilisent avec des significations extravagantes, autant que les noms astronomiques dont elles les parent. Les psychanalystes, gens à l'esprit scientifique et modeste, se contentent de les qualifier de « protubérances de tel doigt ». C'est clair, simple, sans équivoque et, pour tout dire, d'abord honnête.

On distingue sept protubérances dans la main, cinq sous les doigts et deux limitrophes de la paume du côté opposé au pouce. Ces dernières sont dites extérieures-supérieures, en haut, et inférieures, en bas.

Il existe une énorme masse d'observations statistiques et aussi maintes interprétations possibles, en fonction du volume, de la forme, de la surface, de la hauteur. Parfois il n'en existe pas et, d'autres fois, ces « monts » sont remplacés par des creux ou dépressions.

On ne peut, ici, que considérer les correspondances de grande ligne de ces protubérances : au pouce, affectivité, sentimentalité ; à l'index, vivance, vitalité, joie de vivre exagérée, orgueil, absent ou déprimé, vulgarité ; au médius, taciturne, renfermé, grave ; à l'annulaire, où il est rare, il indique un parfait équilibre du psychisme, ce qui, pour des gens instruits, fournit des aptitudes aux plus belles réussites ; à la base de l'auriculaire, il y a une certaine indication de morbidité pour la ruse, l'escroquerie, le vol.

La protubérance externe supérieure correspond à la maîtrise de soi. Celle inférieure est en liaison étroite avec la sentimentalité, mais aussi un certain érotisme s'il existe des stries.

Les ongles.

— Il y a beaucoup plus d'expression physique et physiologique de l'individu sur les ongles que de relations psychologiques. Toutefois, il y a cependant une corrélation puisque l'un retentit sur l'autre.

Les ongles cassants indiquent un état de déminéralisation, se traduisant par de la faiblesse physique et morale. De couleur normalement rosée, ils indiquent l'équilibre moral et spirituel avec constance, loyauté. Plus ils sont longs, plus ils correspondent à de la réserve, modestie et timidité. Courts; ils sont méthodiques.

Les taches blanches n'indiquent point ... des mensonges, mais plus biologiquement une déminéralisation, en particulier une décalcification, et les points noirs correspondent à des intoxications surtout intestinales.

Les lignes et signes.

— Pour le biologiste, les lignes de la main ne sont pas seulement des plis de la peau occasionnés par les mouvements de la main, car les bébés, même avant de naître, en ont, et de très marquées. Scientifiquement, elles ne proviennent pas d'un effet mécanique, mais au contraire d'un problème de structure : ce sont des traits de moindre résistance, dans la formation de la peau. À ce titre, ce sont des résonateurs permettant le calcul d'actions nerveuses.

Suivant leur importance, on classe les lignes en superficielles, fines, profondes, larges, avec toute la correspondance voulue d'expression, que l'on peut résumer en superficialité, finesse, force et abus.

Toutes ces lignes sont étudiées sous l'angle des couleurs de la forme, et il existe de véritables dictionnaires d'interprétation. Les biologistes, se souciant de test psychanalytique, n'y attachent qu'une importance de détail venant compléter, confirmer ou amoindrir les indications générales d'examens des mains.

Il faut reconnaître toutefois qu'il y a des observations extrêmement troublantes sur les milliers d'observations effectuées.

Professeur A. DE GORSSE et Janine CACCIAGUERRA,

de l'école d'Anthropobiologie.

Le Chasseur Français N°663 Mai 1952 Page 312