Il y a quelque vingt-cinq ans, on paraissait ignorer, en
France, le golden retriever, même dans les milieux spécialisés. En effet, dans
une étude sur les retrievers, publiée en 1925 par La Vie à la Campagne,
et qui ne peut être attribuée qu'à un cynophile averti, il est cité « trois
variétés distinctes par la forme de leur poil : le retriever à poil lisse,
ou flat-coated, le retriever à poil frisé, ou curly-coated, et le retriever à
poil plat, ou labrador ».
Cependant le golden existait déjà, bien que sa reconnaissance
comme chien de travail soit plus récente que celle des autres retrievers. On
pourrait aussi bien dire : sa création ; car il est peu probable
qu'il soit, tel qu'il est aujourd'hui, le descendant direct de ses ancêtres.
Ceux-ci seraient des chiens de berger caucasiens, et M. J. Faroux,
secrétaire du club du retriever, explique comme suit la genèse de la race qui
nous occupe.
En 1860, à Brighton, un cirque exhiba toute une troupe de
chiens de berger caucasiens, dont l'intelligence dans le travail et la
conformation physique attirèrent à ce point l'attention d'un spectateur, grand
cynophile et éleveur. Sir Dudley Marjoribanks, que celui-ci en acquit tout le
lot. Il l'envoya en Écosse, où il en fit un élevage en adaptant les aptitudes
de ces chiens aux fonctions de retrievers.
La robustesse de ces animaux, leur fourrure doublée d'un sous-poil
imperméable à l'eau et leur résistance naturelle aux rigueurs des climats
nordiques ou montagneux les faisaient parfaitement aptes au travail rude à
l'eau et sur terrains ingrats, mais leur taille imposante était, par contre, un
handicap : ils mesuraient 75 centimètres et pesaient dans les 45
kilogrammes ! C'est sans doute pourquoi, tels quels, ils ne conquirent pas
d'emblée la faveur du public.
Ce fait permet de faire une remarque générale au sujet de la
taille idéale du chien de travail, tout au moins de celui que l'on destine aux
terrains escarpés ou broussailleux : trop petits, ils se fatiguent,
obligés de sauter trop souvent, quand ils ne sont pas complètement bloqués par
un obstacle hors de mesure avec leur taille ; trop grands, les ronces et
les brandes ralentissent leur train, et leur encombrement les rend
indésirables. Ce dernier inconvénient ne peut plus, de nos jours, être méprisé
par personne ; il y a quatre-vingts ans, on le considérait déjà en
Grande-Bretagne.
Ce serait cette seule considération qui décida Sir Dudley à
alléger ses chiens après dix ans de persévérance dans le sang pur. La
consanguinité ne pouvait, en effet, l'inquiéter encore, étant donné que les
sujets de départ avaient été nombreux et de familles différentes.
C'est à partir de la transformation qu'il entreprit que se
place un point d'interrogation. Quels croisements fit-il ?
Comme tous les grands éleveurs auxquels revient le mérite
d'avoir créé ou seulement fixé une race, Sir Dudley a gardé son secret.
On laisse bien entendre qu'il usa du blood-hound. Que ce fût
pour améliorer la finesse de nez de ses chiens, c'est possible, sinon certain ;
car le blood-hound a toujours passé pour le plus fin limier, et l'on sait bien
que le pointer lui est débiteur de quelques qualités. Mais ce n'est sans doute
pas cette alliance qui allégea le golden ; qu'elle en ait réduit la
taille, c'est possible ; peut-être aussi apporta-t-elle au poil une nuance
plus foncée. D'autres croisements ont dû être opérés ; les Anglais sont
trop enclins à la méthode pour s'en être passés à l'égard d'un chien, qui,
certes, avait d'excellentes qualités, mais dont il fallait, malgré tout, faire
un chien de chasse et qui l'est devenu ; car il semble que le golden soit
plus apte que ses cousins, le flat-coated et le labrador, à ne pas limiter ses
aptitudes au seul travail de la recherche du gibier abattu. En l'occurrence, le
setter était un élément bien à portée et bien tentant ; mais rien ne
prouve que l'expérience en ait été faite.
L'emploi du flat-coated paraît moins discuté.
Quoi qu'il en soit, le golden se présente aujourd'hui sous
un aspect très séduisant, d'une taille inférieure à celle de ses ancêtres, bien
que le standard ne la précise pas ; et c'est peut-être en raison de la
haute stature primitive, laquelle doit, de temps en temps, se manifester encore
chez quelques sujets.
Ce qui plaît surtout, chez ce chien, c'est sa couleur, d'un
or plus clair que celui du setter irlandais, lequel doit, lui aussi, beaucoup
de son succès à sa robe élégante aux teintes chatoyantes. Ses formes aussi sont
plaisantes, son caractère est doux et le tout le voue à faire un chien
d'appartement parfait. C'est un danger auquel les plus beaux chiens de chasse
échappent rarement ; car c'est toujours au détriment du bon développement
et du maintien de leurs qualités physiques et pratiques. Pour un retriever, qui
n'est qu'un demi-chien de chasse, ce danger est plus grand que pour un chien
d'arrêt ou pour un chien courant, chez lesquels un long atavisme a vite fait,
entre les mains de chasseurs chassant souvent et bien, de faire oublier la
mollesse des salons et de faire retrouver l'instinct et les qualités
ancestrales. Chez un golden, particulièrement, cet abandon momentané de ses
fonctions, s'il s'étend notamment à toute une famille, risque d'amenuiser très
dangereusement les qualités des futurs descendants. Les éleveurs-chasseurs de
cette belle race le savent bien et s'emploient à lui éviter ce danger.
Car, si ce chien s'acquitte fort bien de ses fonctions, il
passe pour ne pas être très précoce, et ses qualités semblent avoir besoin d'un
certain temps de pratique pour s'épanouir. Bien déclaré, il est alors un
précieux auxiliaire, flatteur pour son propriétaire, qui apprécie ses services
à terre comme à l'eau.
Aujourd'hui, le golden est assez bien connu en France,
quoique encore peu répandu, et il figure au catalogue officiel des races
reconnues par la Société centrale canine. La faveur du public dont il jouit
dans les expositions fait augurer, chez nous, une expansion croissante de cette
fort belle race.
En voici le standard officiel :
APPARENCE GÉNÉRALE.
— Celle d'un chien harmonieusement bâti, actif et
puissant, avec des mouvements aisés. Apparence saine, ne doit pas être commun,
ni trop haut, ni trop bas sur pattes.
TÈTE.
— Crâne large. Tête bien attachée sur un cou musclé et
sans fanon. Museau puissant et large. Mâchoires solides. Bon stop.
YEUX.
— Foncés et bien écartés. Expression très affectueuse
du regard. Bord des paupières foncé.
DENTS.
— Saines, régulièrement placées et s'adaptant bien,
sans aucun prognathisme.
COULEUR.
— Riche, couleur dorée, mais pourtant pas aussi foncée
que celle du setter irlandais. La couleur crème n'est pas admise. La réserve de
quelques poils blancs au poitrail est tolérée, mais le collier, les pieds, les
doigts, ainsi qu'une étoile blancs sont pénalisables.
POIL.
— Plat ou ondulé, bon sous-poil dense et imperméable à
l'eau.
OREILLES.
— Petites et bien plantées.
PIEDS.
— Ronds, pieds de chat, ni ouverts, ni plats.
MEMBRES.
— Membres antérieurs : aplombs droits, bonne
ossature ; membres postérieurs : forts et musclés, jarrets bien
obliques.
JARRETS.
— Les jarrets devront être bien descendus. Éviter les
jarrets de vache.
NEZ.
— Le nez doit être noir, mais un nez clair ne doit pas
faire écarter des récompenses un chien bon à tous autres points de vue.
QUEUE.
— Doit être étroite, ni enroulée à son extrémité, ni
portée relevée sur le dos.
CORPS.
— Bien équilibré, soudé, court, poitrine bien
descendue. Le rein doit être fort. Les côtes longues et bien descendues. Les
épaules bien inclinées en arrière et longues, les omoplates longues.
L'échelle de points donne : 20 à la tête, 10 à la
couleur, 5 au poil, 5 aux oreilles, 10 aux pieds, 10 aux membres postérieurs,
10 aux membres antérieurs, 10 aux jarrets, 5 au nez, 5 à la queue et 25 au
corps, pour un total de 115 points.
Jean CASTAING.
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