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Courrier cynégétique

Un passage inaccoutumé.

— Le 29 janvier dernier, par temps de neige, j'ai tué, à une centaine de mètres du village de Vaupoisson, dans la plaine, une oie sauvage du poids de 2 kilos ; elle était posée dans un champ et s'est envolée à portée de fusil. Je l'ai tuée avec du plomb numéro 0. J'ai appris, le soir, que des cultivateurs qui étaient dans les champs avaient, eux aussi, vu et approché à 20 mètres environ une grosse bande d'oies qui cherchaient leur nourriture dans une pièce de blé d'automne. Le fait est rare dans notre région de voir des oies sauvages — notre village est situé sur la rivière l'Aube. Les volatiles en question étaient sans doute fatigués d'un long voyage pour se poser en plein jour et se laisser approcher dans nos plaines de Champagne.

Marius MAUCLAIRE, abonné.

Le Musée de la chasse à tir et de la fauconnerie.

— Gien, « capitale de la chasse » abritera désormais dans son vieux château un musée : l'installation matérielle étant achevée, le « comité d’organisation du Musée de la chasse à tir et de la fauconnerie de Gien » lance un appel à tous les chasseurs pour l'aider à garnir les murs et remplir les vitrines, par don ou prêt d'un vieux fusil, d'une ancienne gravure, de vieux objets se rapportant à la chasse, etc. Le programme du Musée part de la préhistoire et se développe jusqu'aux fusils actuels, en passant par les auxiliaires du chasseur et du fauconnier, les animaux de chasse et leurs ennemis.

Pour l'instant, le Musée a ouvert ses portes grâce à des prêts généreux de musées et de collections particulières. M. Henri de Linarès, artiste peintre, a bien voulu en assurer les fonctions de conservateur.

L'augmentation du nombre de chasseurs.

— Le nombre des chasseurs, chacun le sait, est en progression d'année en année, mais ce que l'on sait moins, c'est que cette progression n'est pas uniforme pour toute la France. Une société de chasse du Midi a dressé un tableau qu'on lira ci-après ; s'il en avait été de même pour l'ensemble du pays, il y aurait actuellement plus de chasseurs qu'il n'existe d'habitants !

1864 422 chasseurs. 1930 6.719 chasseurs.
1895 565 1935 5.159
1913 945 1939 5.264
1920 2.521 1945 8.366
1925 4.649 1946 8.703

La documentation ne va pas plus loin, mais il est probable qu'il n'y a pas régression depuis 1946.

Admirons la nature qui donne au gibier des ressources suffisantes pour n'avoir pas encore disparu ; c'est merveilleux, et le moins que l'on puisse dire !

J. D.

Une belle portée.

— Le 30 mars 1952, au cours d'une partie de chasse, à Mirecourt, lieudit « Bois-Guyot », M. Châtelain a capturé, au pied d'une souche d'arbre, une portée de dix renardeaux, composée de trois mâles et sept femelles.

Ce fait paraît assez rare pour être signalé.

A. DIDELOT, abonné.

Le profanateur.

— N'en déplaise à M. Thierry Maulnier, c'est une histoire de chasse que je vais conter.

Étant invité, le 10 février 1952, à une battue de lapins « au gîte », au nord de Caudebec-en-Caux (Seine-Inférieure), nous allions de-ci de-là, sur les pentes des coteaux qui bordent la Seine, la sacoche à furets en bandoulière et accompagnés d'un chien jaune, fox-terrier à poil ras.

Tout à coup, M. Lemonnier me dit : « Attention aux fougères, le chien sent bon. » Je porte mes regards sur quelques fougères clairsemées et je me mets en joue, prêt à tirer, et qu'est-ce que je vois ? ... un renard couché, allongé, qui dormait.

Ma première impression, c'est que ce renard est mort ; je m'approche à quatre mètres : « Ce n'est pas possible, me dis-je, il est malade. » Au garde qui était à côté de moi, je dis : « Regardez, c'est un renard, il est couché. » Il me répond : « Ah ! tirez à la tête. »

M. Lemonnier crie : « Attention au chien, tu vas le tuer. — Je me place, lui répondis-je, pour qu'il ne soit pas dans mon champ de tir. »

Pendant tout ce temps et malgré ces cris, le renard n'avait pas bougé.

Je vise à la tête et tue le renard, qui fait un léger soubresaut.

Je tonne : « Étonnant, renversant, incroyable ! »

Je porte mes regards deux mètres à gauche, je crie : « Un autre couché », le chien fox approche, renifle ce deuxième renard couché en rond et que je ne voulais pas tirer, car sa tête était contre son flanc. Le jeune fox, qui n'avait jamais chassé le renard, s'approche à 4 ou 5 centimètres de la gueule du renard qui, enfin, prenant conscience du danger, se réveille, fait un bond et s'enfuit. Le chien le poursuit. Gêné par lui, je manque mon coup. M. Lemonnier ne le rate pas.

Tous les invités, aux cris, se sont approchés, et nous avons étudié le cas.

Il s'agissait d'un renard et d'une renarde jeunes.

Le renard l'avait choisie, elle l'avait suivi, et ils avaient probablement couru toute la journée. Taquinés par leurs premiers désirs et à bout de fatigue, ils s'étaient couchés l'un près de l'autre, se réservant l'un pour l'autre. Ils n'avaient pas encore mis le point final ...

J'ai profané leur nuit de noces, j'en ai de la peine !

Jean LEGRAND, abonné.

Quand le lapin chasse ... le chien.

— Un de mes voisins et bon camarade, coquetier de son état au Vernet-la-Varenne, chasseur et pêcheur devant l'Éternel, M. André B ..., possède un grand et gros chien de chasse griffon qui n'est pas toujours très courageux.

En effet, si celui-ci est une bonne bête qui remplit bien ses fonctions lorsqu'il est en plein air, il devient poltron lorsqu'il se trouve dans l'espace vital réduit qui est sa résidence en temps de fermeture.

Il a comme compagnon un lapin domestique Géant des Flandres qui, comme lui, déambule à longueur de journée dans une cour et qui ne peut admettre que Braco (c'est le nom du chien) se permette de manger sa soupe sans sa permission. Aussi, dès que ledit Braco vient pour se délecter de la pitance apportée par son maître, le lapin s'élance furieusement contre lui et le mord aux jambes et au nez. Le chien vient alors se réfugier dans l'embrasure d'une porte donnant accès aux appartements de son maître en tremblant de tous ses membres.

Voyant son ennemi vaincu, le lapin fait mine de disparaître, mais surveille d'un œil attentif les faits et gestes du chien.

Si celui-ci, se croyant en sécurité, vient derechef essayer une nouvelle fois de manger, le lapin, en quelques bonds, revient et réitère son attaque, et toujours avec le même succès et les mêmes rites.

Le chien, d'ailleurs, n'est pas le seul ennemi de ce fameux lapin : en effet, le chat de la maison est logé à la même enseigne et se fait gratifier de la même conduite, mais, plus agile, il peut esquiver les attaques sans dommage.

Raymond MAGAUD, abonné.

Chasse au gibier d'eau. Location de lais de mer.

— M. Verdeille, sénateur du Tarn et président du Groupe interparlementaire de la chasse, a bien voulu nous communiquer le texte de la réponse que lui a adressée M. Courant, ministre du Budget, le 3 mars dernier :

« Monsieur le Sénateur,

» Vous avez bien voulu demander, par lettre du 19 décembre dernier, quel est le revenu des locations de lais de mer consenties par l'Administration des Domaines en vue de la chasse au gibier d'eau.

» J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'il résulte de l'enquête effectuée dans les départements maritimes du territoire métropolitain (département de la Corse compris) que les produits des locations de l'espèce consenties sur les lais de mer proprement dits, qui dépendent du domaine privé de l'État, se sont élevés, en 1951, à 188.580 francs et n'ont d'ailleurs été recouvrés que dans deux département : Pas-de-Calais (124.000 francs) et Calvados (64.500 francs).

» Encore que la question posée ne vise pas spécialement cette catégorie de produits, je crois devoir indiquer à toutes fins utiles :

» — que le produit des occupations temporaires par des huttes ou gabions du domaine public maritime, y compris la partie maritime des cours d'eau affluents de la mer, s'est élevé, en 1951, à 1.9l7.471 francs ;

» — qu'enfin des fermages dont le produit s'élève à 180.000 francs ont été recouvrés dans le département de la Seine-Inférieure pour la location de gabions de chasse installés en bordure de la Seine maritime sur des terrains dépendant du domaine privé de l'État, mais ne présentant pas le caractère de lais de mer.

» L'ensemble des amodiations de l'espèce a produit, par suite, en 1951 : 2.285.971 francs.

» Veuillez agréer, monsieur le Sénateur, l'assurance de mes sentiments bien distingués.

« Signé : COURANT. »

S. O. S. en faveur des cerfs et des biches !

— Les cerfs et les biches vont-ils être classés parmi les animaux nuisibles ? Telle est la question que s'est posée un journal de Paris, qui ajoutait :

« Oui, s'il faut en croire les vingt-trois maires de la région de Rambouillet, qui ont adressé à M. Roger Génébrier, préfet de Seine-et-Oise, une lettre revêtant le caractère d'une pétition.

» Ces magistrats municipaux, qui président aux destinées de vingt-trois localités limitrophes de la célèbre forêt domaniale de Rambouillet, se plaignent de ce que les cerfs et les biches s'évadent trop fréquemment, et par hordes entières, des tirés présidentiels pour venir saccager les récoltes de céréales de la région.

» Aussi, après avoir protesté contre le tait que la chasse à ces animaux est, dans notre pays, l'un des privilèges marquants réservés à une seule catégorie de citoyens, demandent-ils que les cerfs et les biches soient classés parmi les animaux nuisibles, tout au moins pour leur secteur, et qu'en conséquence on ait le droit de les tuer lors de la période de réouverture de la chasse.

« Ils réclament, en outre, que des battues administratives soient entreprises rapidement, en forêt de Rambouillet.

» Les services préfectoraux de Versailles ne sont pas restés insensibles à cet appel, puisqu'ils ont demandé aux services des Eaux et Forêts d'envisager très sérieusement une campagne de destruction des cerfs et des biches.

» Dans la même lettre, les maires de la région rambolitaine se plaignent aussi des sangliers qui, s'échappant de la forêt domaniale, où leur nombre s'accroît sans cesse, font des incursions dans la plaine, provoquant des dégâts aux récoltes. »

Sans méconnaître que les hôtes de la forêt de Rambouillet peuvent faire courir des risques aux propriétaires terriens du voisinage, la lettre des vingt-trois maires précités nous paraît fort ... sévère. Il nous semble peu sage, en effet, de réclamer, même sur le plan local, que cerfs et biches soient classés parmi les animaux nuisibles. Que des précautions doivent être prises, s'il y a lieu, personne ne s'en formalisera. Mais de là à permettre des hécatombes, il y a loin.

On se plaint, en France, de voir le gibier disparaître, dans le même temps où le prix du permis de chasse « monte ». Est-ce donc le moment de préconiser une extermination ou ... presque ? Ne serait-il pas plus opportun de capturer cerfs et biches en surnombre et d'en repeupler les forêts d'où ces animaux ont disparu ? La place ne manque point sur notre territoire ! D'aucuns objecteront peut-être : « Pourquoi transporter ailleurs des bêtes qui y seront dépaysées et exposées à toutes sortes de dangers ? » Un tel raisonnement est sans consistance. En de nombreux endroits, les chasseurs seraient heureux d'un repeuplement de cette nature, qu'ils favoriseraient volontiers.

Au fait, qu'en pense le Comité national de la chasse ? N'aurait-il un mot à dire en l'occurrence ?

Antoine AHOND.

Le Chasseur Français N°666 Août 1952 Page 463