Bien que le commerce livre une notice détaillée, lors de
l'achat de blanc de champignon, pour la culture de celui-ci, nous pensons être
utile à l'amateur en lui indiquant comment pratiquement créer et conduire une
champignonnière, peu difficile et fort intéressante.
Création d'une champignonnière.
— Elle est subordonnée à certaines conditions :
1° Il faut disposer d'un local :
— bien aéré, mais qui ne présente aucun courant d'air ;
— de température douce, tempérée, uniforme, constante :
elle ne devra jamais descendre au-dessous de 10° et elle se maintiendra entre
15 et 20° ;
— d'une lumière pas trop vive.
Il en résulte que le milieu idéal est une cave répondant à
ces conditions, ou une ancienne carrière.
2° II faut disposer d'un milieu de nourriture riche :
le champignon à cultiver doit trouver tous les éléments de sa nourriture dans
le fumier :
a. Choix du fumier : il faut un fumier riche et
chaud ; celui du cheval — le cheval de gros trait, ardennais et
boulonnais — est le plus riche en matières organiques (crottin), chaud,
pas trop pailleux, peu riche en gaz ammoniacaux, et assure à la fois une
régularité et de bons rendements.
À défaut de fumier de cheval, on peut avoir recours au
fumier artificiel, à base de paille de blé ou d'avoine, à condition de tenir
compte du temps de fabrication. Se reporter, à ce sujet, au Chasseur
Français, n°649, 1951 ; p. 162. Mais ce procédé demeure encore
peu répandu en France.
b. Quantité de fumier : on ne peut guère opérer
avec moins de 1 mètre cube de fumier, lequel permet de confectionner une meule
de 4 mètres de longueur, faute de quoi on n'obtiendrait pas une fermentation
convenable.
3° Il faut disposer de mycélium, appelé communément blanc de
champignon, masse blanchâtre constituée de filaments plus ou moins enchevêtrés ;
il doit être sain et vigoureux ; on le trouve facilement dans le commerce
à l'état vierge en briquettes obtenues par des cultures sélectionnées. Une
briquette de blanc de champignon de semis pasteurisé convient ordinairement
pour ensemencer 3 mètres carrés (coût : entre 120 et 140 francs).
Conduite d'une champignonnière.
— Il faut préparer le fumier en vue d'obtenir un
produit brunâtre, onctueux, ne dégageant plus d'ammoniaque, servant à
confectionner les meules.
À cet effet, on montera un tas de fumier de 80 centimètres à 1 mètre
de hauteur (premier plancher) en ayant grand soin de faire des lits
réguliers et de bien tasser. On assurera une humidité suffisante par des
arrosages fréquents et répétés en évitant toutefois de noyer la masse. Une fermentation
active (60 à 80°) va se déclarer au bout de quelques jours et, dès la baisse de
température (huitième au dixième jour), on démontera le tas pour le refaire à
proximité en ayant soin de placer à l'intérieur les parties qui se trouvaient à
l'extérieur (montage du deuxième plancher). Arroser également comme
précédemment. On opérera une troisième fois si besoin est, et le produit obtenu
doit être en définitive brunâtre, onctueux, et doit déjà sentir le champignon.
Il a alors diminué de volume : de moitié environ.
On peut enrichir le milieu en ajoutant soit 4 kilogrammes de plâtre de
démolition par 100 kilogrammes de fumier, soit de 1 à 2 kilogrammes de sulfate d'ammoniaque
par tonne de fumier. On peut alors procéder à la confection des meules.
Confection des meules.
On peut opérer dans un tonneau défoncé, un baquet,
etc., mais le mieux est de monter une meule :
— soit en ados ou dos d'âne, en double pente, de base 40 centimètres
et de hauteur 50 centimètres ;
— soit en accot, au pied d'un mur (au préalable le
badigeonner au lait de chaux), de hauteur 50 à 60 centimètres et d'épaisseur 40 centimètres.
Quel que soit le mode adopté, la meule se monte par
succession de petites meules en diminution vers le sommet, Tassez et lissez
convenablement, et, au bout de quelques jours (un coup de feu se produisant à
nouveau presque aussitôt), la température permettra l'ensemencement (entre 25
et 30°). Au besoin, pratiquer quelques trous d'aération dans la meule à l'aide
d'un simple bâton.
Lardage.
— L'opération consiste à faire revenir du blanc de
champignon, ou mise, ou lardon (fragment de briquette), dans une atmosphère
humide et tiède (couche) et de l'introduire, à la main, dans la meule tous les
30 à 40 centimètres à une profondeur de 3 à 4 centimètres.
Au bout de quinze jours à trois semaines, le mycélium
(filets blanchâtres) apparaît à la surface de la meule ; on enlève les
mises et on procède à l'opération suivante ou gobetage.
Gobetage.
— Le travail consiste à recouvrir la meule, les mises
étant retirées, d'une couche de 1 à 2 centimètres de terre légère et fine. Une bonne
terre de jardin convient fort bien. Un mélange
excellent est constitué par du sable additionné de pierres calcaires, de
plâtras de démolition, et de la terre tamisée. On bassine légèrement (eau
additionnée de 1 gramme par litre de salpêtre), on lisse et comprime légèrement
à l'aide d'une pelle : c'est le talochage, opération importante et
nécessaire pour assurer une bonne fructification (éviter la formation de croûte de terre).
Récolte des champignons.
— Au bout de trois semaines, parfois un mois,
apparaissent à la surface de la meule des champignons par groupes appelés
rochers. La cueillette ne s'effectuera que lorsque le voile ou enveloppe
première du champignon commence à se briser, c'est-à-dire peu de temps avant le
complet développement du chapeau.
Certaines précautions sont à prendre lors de la cueillette :
on les détachera un à un (jamais par groupes), par simple torsion, et on aura
soin de reboucher les trous formés.
On cueillera tous les deux jours au plus tard, tous les
jours lors de la grande production. Mais, la sortie des champignons se faisant
par poussées successives, il y aura des périodes de ralentissement de
cueillette lors de la récolte, qui dure de deux à trois mois et fournit environ
3 kilogrammes au mètre courant.
REMARQUES PRATIQUES.
1° Nous conseillons au débutant de ne procéder d'abord qu'à
l'aide d'une meule (en été de préférence) afin de se familiariser avec cette
culture.
2° On prolonge la fertilité des meules par arrosage à l'eau
(20 à 30°) additionnée de purin et de salpêtre.
3° Durée de la culture : cinq mois environ (préparation
du fumier : trois à quatre semaines ; montage des mailles : une
semaine ; lardage : quatre à cinq semaines ; gobetage :
quatre semaines, et récolte : huit à neuf semaines).
4° Le fumier provenant de la champignonnière sera
précieusement recueilli et conservé (humidité entretenue) : il sera
utilisé comme paillis.
BOILEAU.
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