Denrées périssables
Rédaction
La création chorégraphique Denrées périssables
traite de l'introspection constructive. D'une mutation qui ne
s'exprime ni par les mots ni par le silence, confine l'état
de l'être à un éloignement crépusculaire
propre à l'approche, voir l'évolution d'une métamorphose.
Elle tente d'appréhender ce qui doit périr en nous
pour laisser place à une nouvelle entité de l'être.
Afin de donner corps à la scénographie et la qualité gestuelle
de la pièce Cathy Testa et Marc Thiriet se nourrissent
paradoxalement des univers distincts des oeuvres du peintre Francis
Bacon et du roman La piscine de l'écrivain Japonaise Yôko
Ogawa.
L'isolement qui se dégage du travail de Francis Bacon
presque entièrement fait d'autoportraits, reflètent
l'attente, l'approche de la métamorphose.
L'oeuvre du peintre, jalonnée toute entière de
parallélépipèdes de verres éclairés,
de chaises, de miroirs, de planches, invitant à des traversées,
trouve sa place dans une scénographie qui tend à animer
une adaptation de l'œuvre globale de l'artiste. Celui-cijoue
des transparences, jeux de miroirs, des déformations d'images,
jusqu'au moment où les modifications successives de celle-ci
finissent par lui ressembler de manière si précise,
qu'un observateur, ne distingue plus le modèle de l'œuvre.
Ces boîtes transparentes traduisent également la
mise à nu des personnages, le moment où ils sont
seuls, livrés à eux-mêmes, où un dépérissement
les guette. La gestuelle traduit des corps désincarnés
amenant une extrême sensation d'isolement, d'insignifiance
du sujet pour rendre place au roulement immuable du temps.
Denrées périssables s'attache à traduire
l'esthétique des variations du corps. La transparence
des éléments.
Au travers de ces deux éléments de recherche et
d'inspiration, les chorégraphes s'interrogent
sur la présence, le mouvement juste et concentrent leurs
recherches sur un état de corps
désincarnés, ancrés dans la gravité terrestre
pour échapper à sa pesanteur.
Transformés en fil de plomb, des corps d'un bloc se déplacent
en désordre apparent dans
l'espace.
Dans cet état de tension sereine constante, entre le bas
et le haut, l'axe des corps engendre en
son centre une mobilité qui tente de faire miroiter l'espoir
d'embellies pulsatives qui
pourraient advenir.
Née de cette espérance, avec lenteur et précision
l'écriture flirte avec le moment qui précède
l'action pour rendre sensible l'oscillation du temps et inviter
les interprètes à explorer
l'esthétique des variations du corps.
La tension axiale des corps se bande à l'extrême
et s'abandonne aux poussières de la
pesanteur pour rejouer dans l'apaisement, en quelques instants,
la scène pathétique des 25
millions d'années qui amenèrent la vie à quitter
la genèse de son liquide amniotique pour
rejoindre une fermeté propice au lourd redressement de
son humanité.
|