LA REVOLUTION DE 1848/49

Le milieu du XIXe siècle avait vu la montée d'un fort mouvement d'opposition libérale et démocratique, liant dans ses revendications réformes sociales et unité politique de l'Allemagne. Mais le dénominateur commun de ces mouvements d'opposition ne masqua pas les divergences qui éclatèrent au grand jour lors des nombreuses discussions et négociations, ainsi que des combats qui jalonnèrent la Révolution des années 1848/49.
Sur fond de crise économique rampante (depuis 1846), ce sont les événements politiques en France (février 1848) qui donnent le signal des premiers soulèvements à Vienne et Berlin (mars 1848). Les princes allemands se voient contraints à des concessions : ils accordent des constitutions libérales, nomment des ministres libéraux, promettent la liberté de la presse, le droit de réunion et un parlement national allemand.
Francfort devient le théâtre principal de la Révolution. C'est là que siège le "proto-parlement" issu des mouvements révolutionnaires. Il est dominé par une majorité libérale qui, repoussant les tentatives de la gauche républicaine (minoritaire en nombre) de transformer le parlement en comité éxécutif révolutionnaire permanent, appelle de ses voeux un parlement national respectueux des gouvernements des différents états allemands. L'assemblée nationale élue fin avril entre solennellement dans l'Eglise Saint-Paul le 18 mai 1848. On n'y trouve certes aucun parti politique au sens moderne du terme, mais le centre libéral, qui représente lors des débats le courant majoritaire, se caractérise dès le début par une remarquable volonté de compromis avec les divers gouvernements.
La tâche du parlement est double : rédiger une constitution nationale et créer une instance gouvernementale centralisée. Dès le début du mois de juin est nommé un gouvernement impérial provisoire. Sa composition révèle déjà les ambigüités et les compromis qu'il a fallu faire pour ménager toutes les susceptibilités (notamment celles des deux puissances rivales, Prusse et Autriche). Car si l'administrateur impérial nommé est l'archiduc autrichien Johann, le tout nouveau ministère des affaires impériales est confié à un personnel prussien. En outre, le parlement ne parvient à doter ce nouvel état (plus virtuel que réel) ni d'un appareil éxécutif (fonctionnaires) ni d'une armée que rejettent une partie des monarques allemands.
De juin à septembre sont discutés les "droits fondamentaux du peuple allemand". Ceux-ci, votés le 27 septembre, expriment la volonté d'abolir la hierarchie sociale et les privilèges hérités du système de castes quasi féodal et d'instaurer par la loi l'égalité des droits et des chances de chaque citoyen, à l'instar des révolutions françaises et américaines.
Une première crise sérieuse survient à l'occasion du soulèvement nationaliste au Schleswig. Soutenu dans un premier temps par les armées prussiennes, le Schleswig refuse l'annexion par le Danemark, mais la Prusse, contre l'avis du parlement de Francfort, céde à la pression anglo-russe et accepte le cessez-le-feu à Malmö. Le parlement doit s'incliner, faisant l'aveu de son impuissance.
La constitution reflète les mêmes ambigüités, mêlant les inspirations centralisatrices et fédéralistes, les éléments démocratiques et monarchiques. La question centrale est celle des frontières du futur état allemand (cf. carte). Une fois encore, la volonté des parlementaires, en faveur de la solution pangermanique (Allemagne + Autriche germanophone), est contrecarrée par le refus autrichien d'abandonner sa souveraineté récemment renforcée sur ses territoires non-germanophones (Hongrie, Italie, etc.) par une constitution centralisatrice. L'assemblée nationale se replie sur la solution plus modeste de la "petite Allemagne" (Prusse élargie) et confie le titre d'empereur au roi de Prusse Frédéric Guillaume IV. Mais ce dernier, ne voulant pas d'une légitimité issue de la révolution, refuse un titre et une constitution pourtant déjà acceptés par 28 autres gouvernements allemands (voir caricature)!
Au printemps 1849 recommencent les soulèvements destinés à arracher par la force une constitution impériale. Ils sont réprimés dans le sang. Le parlement, quitté par les libéraux, déménage à Stuttgart, d'où il est bientôt chassé par l'armée du Wurtemberg. L'oeuvre de l'Eglise Saint-Paul a échoué. Dès octobre/novembre 1848 (à Vienne puis à Berlin) les forces de la Réaction avaient fait reculer les révolutionnaires et restauré l'ancienne Confédération Germanique. En 1851 sont supprimés les droits fondamentaux accordés en 1848. La Prusse introduit le "droit de vote de classe".
L'échec de la Révolution est dû aux divergences concernant l'unité nationale et au conservatisme légitimiste des fonctionnaires et de l'armée. Peu à peu s'installera un pragmatisme politique et économique qui, au cours des décennies suivantes, finira par éloigner les idéaux nationalistes des aspirations réformatrices. Il faudra attendre la révolution industrielle et laguerre franco-allemande pour que soit trouvée une solution à la question nationale...

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(c) eric alglave 1999