L'histoire (1ère partie):
Le premier épisode de la série s'ouvre sur un coup de tonnerre suivi d'une longue séquence sans paroles. Après avoir laissé la Lotus dans un garage souterrain, il se dirige d'un pas énergique vers le bureau d'un homme qui semble être son supérieur, ouvre avec grand fracas la porte de celui-ci et dépose violemment sa démission après avoir tenté vainement d'obtenir quelque explication en tapant du poing sur la table. De retour chez lui, il prépare ses valises pour un voyage au soleil, tandis qu'un personnage tout de noir vêtu gravit les marches de son perron. A son réveil, l'homme jette un coup d'oeil par sa fenêtre et constate avec étonnement qu'il n'est plus à Londres !
Un homme - le futur "Numéro 6" - rentre à vive allure dans Londres au volant de sa Lotus Seven.
Il vient de sortir d'un corbillard qui a suivi le futur N°6 jusqu'à son domicile.
En pleins préparatifs, le démissionnaire est surpris par un gaz anesthésiant projeté à travers la serrure de son appartement. Il tombe inconscient...
C'est un drôle de village qui s'offre à sa vue.
Il sort immédiatement à la recherche d'une personne susceptible de le renseigner et trouve rapidement une serveuse de restaurant. Mais les questions qu'il lui pose - premières paroles depuis le début - n'obtiennent que réponses évasives ou ambigües :
Serveuse : we'll be open in a minute. L'homme : what's the name of this place ? Serveuse : you're new here, aren't you ? L'homme :where is here ? Serveuse :the Village (le ton est franchement entre question et réponse) L'homme : yes... |
nous ouvrons dans une minute comment s'appelle cet endroit ? vous êtes nouveau ici ? c'est où ici ? le Village oui... |
Frustré, le prisonnier se dirige vers un point phone. L'échange tourne court rapidement :
Opératrice : number please. L'homme :what exchange is this ? Opératrice :number please. L'homme :I haven't got a number. Opératrice : no number, no call. |
numéro, SVP quel est l'indicatif ? numéro SVP je n'ai pas de numéro. sans numéro pas d'appel. |
Toute la saveur de ce dialogue vient du jeu sur le mot numéro : numéro de téléphone et numéro que porte chaque habitant du Village.
Or, le spectateur, tout comme le Prisonnier, ignore encore cette deuxième signification locale du mot numéro ; d'où l'impression de "décalage" que suscite cette conversation.
La troisième tentative menée par l'inconnu auprès de l'épicier-droguiste se soldera elle aussi par un échec : Le Prisonnier se trouve bel et bien dans une impasse, au propre comme au figuré. Il ne pourra en sortir qu'avec l'aide d'une deuxième personne sachant répondre intelligiblement à ses questions : le Numéro Deux !
il est impossible de trouver une carte géographique qui reproduise - en noir et blanc ou en couleurs - autre chose que le Village et ses limites naturelles !
La suite :
Les images :
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Les notes:
A l'instar des mots d'esprit, lapsus et autres actes manqués, ces irruptions de sensations inexplicables et ces jeux de mots "déplacés" sont considérés par Sigmund Freud comme les manifestations perceptibles de l'inconscient, lequel est forcément en "décalage" par rapport aux actes et paroles conscients. Freud a par ailleurs donné à cette sensation le nom - particulièrement adapté ici - d'inquiétante étrangeté. Le deux aura tout au long de la série la même fonction : il sera le signe de l'autre celui qui est à la fois différent et semblable.
Texte : © éric alglave 1999
Images : © ITV/Polygram Video