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Appliquée
ET LEUR Rôle EN AGRICULTURE
Juin
1929
et déclarer son amour pour LYON
(Deux ans auparavant Paillot entouré de personnalités essentiellement lyonnaises
représente la France au Congrès de sériciculture à Milan)
Le
mot entomologie n'éveille le plus souvent, dans l'esprit des personnes étrangères
aux sciences biologiques, que l'idée d'un monde mystérieux, peuplé d'êtres
innombrables, aux formes les plus variées, aux allures étranges, aux moeurs
extraordinaires ; ce monde, beaucoup ne le connaissent que par les récits imagés
et captivants de Réaumur, de Metternich et surtout de Fabre. Ce n'est là
cependant qu'une partie de l'entomologie ; la plus attrayante, certes, sinon la
plus importante.
Les
insectes jouent dans la vie de l'homme un rôle énorme qui dépasse de beaucoup
celui que jouent d'autres animaux beaucoup mieux connus. Soit qu'ils s'attaquent
directement à lui, comme les anophèles, les stégomyes, les poux,
transmetteurs de maladies redoutables : le paludisme, la maladie du sommeil, le
typhus exanthématique soit qu'ils s'attaquent aux plantes cultivées, leur
action nuisible nous oblige à une lutte incessante contre leur extension. Tous
les pays se sont organisés en vue de cette lutte de tous les instants ; les
stations entomologiques constituent les noyaux de cette organisation.
Avant 1911, il n'existait en France qu'une station
officielle dont le siège était à Paris ; en fait, c'était plutôt un
laboratoire spécialisé de l'Institut National Agronomique qu'une véritable
station. A sa tête était placé le professeur Paul Marchal qui peut être
considéré comme le véritable créateur de l'Entomologie appliquée en France.
En 1911, après les ravages énormes
causés dans les vignobles français par deux microlépidoptères très
nuisibles, la Cochyllis et l’Eudémis, le Ministère de l'Agriculture décida
la création de 5 stations entomologiques temporaires dont le siège fut fixé
au centre des principales régions viticoles (à Châlons-sur-Marne pour la
Champagne, à Beaune pour la Bourgogne, Angers pour l'Anjou, Bordeaux pour le
Bordelais et Montpellier. pour le Midi).
Le programme d'action de ces différentes
stations, placées sous la direction technique de M. Marchal, fut d'abord
strictement limité à l'étude biologique des deux parasites de la vigne. A
partir de 1913, le champ d'action des stations entomologiques s'élargit et s'étendit
à tous les insectes nuisibles à l'agriculture.
En 1915, le décret du 11 mai
consacra définitivement l'existence de ces stations par la création du
service des Epiphyties placé sous la haute direction de M. E. Roux,
directeur des services scientifiques et sanitaires et de la répression des
fraudes au Ministère de l'Agriculture. Enfin en 1921 (article 79 de la loi de
finances du 30 avril) le nouveau service fut incorporé lui-même dans une
organisation nouvelle, l'Institut des Recherches Agronomiques., créé «
pour développer les recherches scientifiques appliquées à l'agriculture, en
vue de relever et d'intensifier la production agricole ».
Doté de la personnalité
civile et de l'autonomie financière, le nouvel institut, possède de ce fait
une grande souplesse de fonctionnement.
Quel peut être, dans ce
cadre administratif, le rôle de la. station entomologique ?
Celle-ci
peut se borner par exemple à étudier la biologie des insectes les plus
nuisibles de la région, mettre au point des méthodes de. lutte efficaces et
pratiques, en vulgariser l'emploi par des démonstrations et des conférences.
Ce faisant, elle poursuivra le but utilitaire pour lequel elle a été créée.
Mais on peut avoir une autre conception plus élargie du rôle de la station
entomologique ; on peut approfondir les différents problèmes posés par l'étude
des insectes nuisibles et des procédés de destruction et élargir ainsi le
domaine des recherches. Le champ d'action prendra alors une ampleur considérable
; la station deviendra un véritable centre de recherches dont l'activité,
toutefois, restera conditionnée par les rapports qu'il entretiendra avec les
autres centres de recherches, en particulier, avec les laboratoires
universitaires.
Les problèmes posés par l'étude des insectes parasites touchent à la
plupart des sciences et leur étude ne peut être faite que suivant les méthodes
et la technique propres à chacune d'elles.
La
Systématique ou science de la classification des espèces, joue
un rôle important en entomologie ; mais on doit la .considérer comme un moyen,
non comme un but. Il est utile en
effet de pouvoir identifier rapidement les différentes espèces susceptibles de
causer des dégàts aux cultures Il
importe aussi de connaître les plus importantes que l'on
rencontre dans la région et de déterminer le rôle utile ou indifférent
de chacune d'elles. On sait en effet que les différentes espèces qui
cohabitent dans un même lieu réagissent les unes sur les autres chacune
constitue ainsi un véritable Complexe biologique ; l'étude biologique d'un
insecte déterminé ne saurait donc être complète que si l'on tient compte des
influences directes ou indirectes
exercées par d'autres espèces vivant dans le même milieu. C'est dans cet
esprit qu'ont été étudiées, à la Station entomologique du Sud-Est,
la Lyda du pêcher (Neurotoma nemoralis L.), la Piéride du chou
(pieris brassicae L.), la Pyrale du maïs (Pyrausta nubibilalis Hb).
L'étude de la Biologie des insectes nuisibles
est très importante en entomologie appliquée. C'est avant tout une science
d'observation ; mais il ne suffit pas de noter avec plus ou moins de détails
les différentes phases de la vie d'un insecte, d'étudier ses comportements
dans le milieu où il évolue, de préciser l'influence des facteurs météorologiques,
climatologiques et autres sur le cycle biologique ; il faut étudier aussi le mécanisme
des différentes fonctions vitales comparativement à celui des mêmes fonctions
dans les principaux groupes de la série animale : on, est ainsi conduit à
compléter les études biologiques proprement dites par des études d'Anatomie comparée, de Physiologie comparée,
Ces différentes recherches ne donneraient elles-mêmes que
des résultats imparfaits si elles n'étaient complétées par des recherches d'Histologie
et de Cytologie, d'Histophysiologie et de Cylophysiologie. L'étude du fonctionnement de la cellule est en effet d une
importance considérable Pour la connaissance de la vie de l'insecte et de la
vie, en général.. Qu'on ne dise pas que de telles recherches sont superflues,
et ne sauraient trouver place dans le programme de travaux d'une station
entomologique.; il est facile en effet de démontrer qu'elles sont, non
seulement utiles, mais., encore indispensables pour résoudre certains des problèmes
qui nous sont posés, par exemple, celui de l'étude des maladie des insectes
utiles. On trouvera d'ailleurs, parmi les travaux effectués à la station
entomologique du Sud‑Est, des exemples nombreux à l'appui de cette thèse.
Les procédés de lutte contre les insectes nuisibles
peuvent être groupés en deux méthodes très générales : l'une se propose la
destruction des parasites par les procédés physiques, chimiques ou mécaniques
, l'autre a pour but principal d'utiliser, comme agents de destruction, les
auxiliaires naturels de l'homme,. c'est-à-dire, les parasites et les prédateurs
qui vivent aux dépens de chacune des espèces à détruire cette dernière méthode,
que l'on qualifie ordinairement de « biologique », ne peut être
utilisée que si l'on a résolu au préalable un certain nombre de problèmes très
importants concernant les rapports des insectes avec leurs parasites à divers
degrés.
Tout insecte, comme d'ailleurs toute espèce animale, doit être non plus
isolément, mais en relation plus ou moins étroite avec une foule d'êtres
vivants appartenant aux groupes les plus divers, depuis les plus primitifs comme
les bactéries-champignons, jusqu'aux animaux supérieurs. On n'a plus affaire
à une espèce déterminée, mais, comme je le disais plus haut, à un véritable
complexe biologique dont l'étude soulève tous les problèmes de la
Parasitologie.
Parmi
les parasites d'insectes, une place importante doit être faite aux bactéries, aux protozoaires et aux ultra-virus dont, le
rôle est encore à peine soupçonné. Mais la Bactériologie
la Protistologie, la Protobactériologie sont des sciences qui ont leur méthode
propre, leur technique plus on moins compliquée ; ce sont d'autre part des
sciences relativement neuves et en pleine évolution ; elles touchent enfin à
la Pathologie générale, et, à ce titre, ont fait l'objet de recherches
d'ordre médical très importantes. Étudier la pathologie infectieuse des
insectes en dehors du cadre général, c'est se condamner à la stérilité;
c'est s'exposer à des interprétations fantaisistes de phénomènes bien connus
et longuement étudiés ailleurs. L'étude des lésions internes qui caractérisent
les différentes affections ; celle des réactions de défense de l'hôte sont
basées essentiellement sur l'Histo- et la Cytopathologie. Ainsi prennent toute
leur importance et leur signification, les recherches
d'histologie et de cytologie dont il a été question précédemment.
Parmi les maladies des insectes en général, celles des insectes
utiles, abeille et ver à soie,
constituent un chapitre important qu'on ne peut isoler des autres. Comment,
avoir en effet une idée exacte de
la pathologie de ces insectes si l'on ne tient aucun compte des connaissances
acquises dans, le domaine de la pathologie des insectes en général ? Et
comment serait-il possible d'étudier les causes de ces maladies, leur évolution,
les réactions de défense, si l'on ignore ce qui se passe chez les êtres supérieurs
? A notre époque de grande spécialisation et de spécialisation peut-être
trop précoce, on est plus particulièrement exposé à négliger tout ce qui ne
se rapporte pas directement à l'étude que l'on poursuit ; a fortiori néglige-t-on
tout ce qui ne s'y rapporte qu'indirectement. C'est pourquoi je considère comme
indispensable l'établissement de rapports étroits avec les différents
laboratoires. de recherches spécialisés dans les sciences qui, de près ou de
loin, touchent aux différents problèmes soulevés par les études
d'entomologie appliquée. On ne saurait donc concevoir la création d'un centre
de recherches scientifiques appliqués. à l’entomologie en dehors d'un centre
universitaire.
La méthode de lutte qui a pour but la destruction des, insectes
nuisibles par les moyens mécaniques, physiques ou chimiques, est basée surtout
sur l'observation biologique et. sur l'empirisme ; mais comme la méthode
biologique, elle exige une connaissance approfondie de certains problèmes. qui
touchent plus particulièrement au mécanisme de la vie. Considérons par
exemple le. problème de l'action insecticide, des composés chimiques : cette
action peut être étudiée empiriquement en expérimentant sur les insectes à
détruire l'action toxique des différents composés minéraux, ou organiques ;
on en trouvera toujours un certain nombre dont l’emploi sera susceptible de réaliser
le but poursuivi ; il suffira d'écarter ensuite ceux dont la toxicité sera
reconnue insuffisante, ceux dont le prix de revient sera trop élevé ou ceux
qui seront dangereux pour les plantes ; les insecticides ainsi obtenus
constitueront les armes avec lesquelles l'agriculteur se défend contre les
parasites. Si l’empirisme a donné et donne encore d'excellents résultats
dans la recherche des produits .insecticides susceptibles d'être mis entre les
mains des agriculteurs, il n'en reste pas moins que la méthode peut être
grandement améliorée par l'étude concomitante de l'action des composés
chimiques sur l'organisme des insectes, en particulier, sur les tissus et les
cellules. De telles études ont déjà été faites à la Station entomologique
du Sud-Est ; elles ont permis de mettre au point des faits importants concernant
la toxicité de composés divers et les rapports entre cette toxicité et la
forme chimique ou physico-chimique de ces composés. L'étude des réactions
histo- et cytotoxiques, comme celle des réactions histo- et cytopathologiques
dont il a été question précédemment, apparaissent parfaitement fondées et
doivent rentrer dans le cadre général des travaux du centre de recherches
scientifiques tel que je le conçois.
La destruction des insectes par les procédés chimiques pose un problème
qui ne paraît pas avoir été envisagé jusqu'ici c'est celui de l'action des
produits insecticides sur les cellules et tissus végétaux. C'est là cependant
une question d'une grande importance pratique et qui se pose chaque fois, peut-on
dire, que l'on traite des plantes cultivées par les bouillies insecticides ou
anti cryptogamiques. Bien qu'il s'agisse là d'un problème de cytologie végétale,
on peut concevoir son étude dans une station entomologique, car les méthodes
de la cytologie végétale diffèrent peu de celles de la cytologie animale.
Les rapports avec la pathologie végétale peuvent être envisagés sous
deux aspects différents
1/ On peut se borner par exemple à mettre en application les méthodes
de lutte contre les parasites végétaux étudiées
dans les stations de pathologie végétale proprement dites ; il suffira
de pouvoir déterminer les principales maladies des Plantes cultivées
auxquelles on a affaire dans la région et d'appliquer les Principes généraux
de la lutte contre ces maladies.
2/ On peut aussi faire des recherches proprement dites en s'inspirant
des méthodes de la pathologie comparée, envisagées de ce point de vue, les
recherches de pathologie végétale peuvent être rapprochées de celles qui
concernent les maladies des insectes ; elles ne modifieront nullement l'unité
de Méthode de travail qui doit être là la base
de l'organisation nouvelle projetée.
La conception générale du rôle de cette organisation, dont je viens
d'exposer sommairement les grandes lignes, peut sembler à première vue
complexe et difficilement réalisable dans la pratique.
En fait, si l'on se reporte aux recherches en cours ou aux différents
travaux effectués à la Station entomologique du Sud-Est depuis son origine
(1917), on verra qu'une telle conception est non seulement possible, mais.
qu'elle a déjà reçu un commencement d'exécution. Les notes ou mémoires
publiés, jusqu'ici concernent la plupart des directions de recherches énumérées
dans la présente étude ; les recherches ont été poursuivies selon les méthodes
propres aux sciences auxquelles elles se rapportent ; la collaboration avec les
laboratoires universitaires a été de même réalisée sur une assez grande échelle
(collaboration avec l'Institut d'histologie de la Faculté de Médecine, avec
les laboratoires de Chimie biologique, de Physique médicale, de Physiologie). L'unité de méthode de travail a déjà prouvé tout le bénéfice que l'on
pouvait retirer de son application aux recherches de l'entomologie appliquée ;
il ne reste qu'à intensifier le rôle de la Station entomologique en lui
donnant les moyens matériels qui lui font encore défaut. L'installation telle
qu'elle fonctionne depuis 1917 ne répond plus en effet aux besoins actuels. Il
faudrait plus de personnel (le personnel scientifique actuel ne comprend qu'un
directeur et un préparateur), des laboratoires plus nombreux et. mieux outillés
afin de pouvoir .accueillir des travailleurs. En résumé, à la conception élargie
du rôle de la station entomologique devrait correspondre une organisation matérielle
nouvelle ; la création d'un Institut d'entomologie appliquée comprenant des
sections entomologique, ,séricicole, apicole et éventuellement, 'une section
de pathologie végétale, un centre
de préparation des virus pour la lutte contre les rongeurs, répondrait
parfaitement à cette nécessité.
C'est à Lyon que doit être le siège du nouvel Institut.
Lyon est en effet au centre de régions fruitières, viticoles, maraîchères
et de grandes cultures très importantes; c'est d'autre part la capitale de la
soie ; elle possède enfin une Université des plus florissantes et sera
incessamment pourvue d'une véritable « centrale médicale ». Il y a là une
ambiance des plus favorables au bon fonctionnement de l'Institut d'entomologie
appliquée.
I.SECTION ENTOMOLOGIQUE
A. -
Recherches d'ordre scientifique
1. Systématique.
2. Biologie des insectes nuisibles.
3. Anatomie et physiologie comparées des insectes.
4. Histologie et cytologie normales et comparées.
5. Recherches concernant la méthode biologique de lutte
contre les insectes nuisibles.
a) Systématique et biologie des auxiliaires parasites et prédateurs
(étude de complexes biologiques représentés par les insectes et leurs
parasites à divers degrés).
b)
Recherches
de pathologie comparée (maladies parasitaires et autres), d'histologie et
cytologie pathologiques.
6. Recherches concernant la méthode de lutte par les procédés
physiques ou chimiques.
a) Recherches empiriques sur l'action des insecticides.
b) Action des insecticides sur les cellules et tissus.
c) Action des. insecticides sur les cellules et tissus des végétaux
traités.
7. Rapports (à déterminer) avec les industries de
produits chimiques fabriquant des insecticides et avec les constructeurs
d'appareils. Contrôle des produits livrés à l'agriculture (ce dernier point
ne peut être envisagé que si des lois ou ‑décrets précisent les
conditions de l'intervention des laboratoires officiels).
B.
-
Applications pratiques.
1. Expérimentation au premier degré dans les champs d'expériences
de l'Institut.
2. Expérimentation dans les conditions de la pratique
courante avec le concours de correspondants bénévoles.
C.
Vulgarisation.
1. Organisation de champs de démonstration.
2, Cours et conférences.
II. - SECTION SÉRICICOLE
a) Étude de l'histologie et de la cytologie normales du ver à soie.
b), Etude de la physiologie normale (histo- et cytophysiologie) du ver
à soie.
c) Etude de la pathologie générale
du ver à soie (ces différentes recherches sont faites en liaison étroite avec
celles concernant les maladies des insectes nuisibles).
d) Expériences au premier degré sur les procédés de lutte contre les
maladies mis au point au laboratoire.
III.
- SECTION APICOLE
Mêmes
directives générales que pour la section séricicole
A. PAILLOT,
Directeur de la Station
entomologique
du
Sud-Est,