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QUELQUES CONSEILS PRATIQUES

sur le Traitement des Maladies

et Insectes les plus communs

DES ARBRES FRUITIERS

 

Nous nous sommes efforcés, dans cette courte brochure, de résumer les principaux résultats d'ordre pratique qui découlent de nos recherches propres, recherches poursuivies pendant plusieurs années dans une des plus belles et des plus riches régions fruitières de France : La Vallée du Rhône. C'est donc moins une mise au point complète de la question du traitement des arbres fruitiers qu'un résumé sommaire de nos travaux personnels que nous exposons ici. Mais le lecteur peut être persuadé qu'il retirera un grand bénéfice de la mise en oeuvre des méthodes de lutte proposées, car toutes ont fait, de notre part, l'objet de nombreuses expériences de laboratoire et d'applications en grand. Les traitements s'effectuent, dans la plupart des cas, par projection, au moyen d'appareils appelés pulvérisateurs, de produits, insecticides ou anticryptogamiques en suspension dans l'eau. Ces suspensions sont, communément appelées bouillies, par extension, le nom de bouillie est appliqué également aux solutions " vraies " employées pour le traitement des plantes contre certains parasites.

Dans un premier chapitre, nous traiterons sommairement de cette question des bouillies et pulvérisateurs en indiquant les formules les plus courantes pour la préparation des bouillies. Le deuxième chapitre sera réservé à l'étude des principaux parasites et des moyens de les détruire. Nous ne ferons pas mention ici des bouillies commerciales proprement dites ; nous sommes d'ailleurs persuadés que, dans la plupart des cas, l'arboriculteur a intérêt à préparer lui-même ses bouillies ; cette préparation n'offre d'ailleurs aucune difficulté ; il suffira de se conformer aux indications que nous donnons dans cette brochure.

CHAPITRE Ier

Généralités sur la Pratique des Traitements

A. - LES APPAREILS

Le problème de la lutte contre les insectes nuisibles aux arbres fruitiers est plus un problème d'appareil qu'une, question de produit insecticide. Il existe en effet de puissants insecticides qui permettent de détruire très facilement la plupart des insectes les plus nuisibles: les unes agissent par contact comme la nicotine et le pyrèthre ; les autres, comme les arséniates par exemple, ne sont toxiques que par ingestion. Malgré la valeur insecticide indéniable de ces divers produits, leur utilisation dans la lutte contre les parasites des arbres fruitiers ne donne pas toujours les résultats qu'on pourrait en attendre. Le praticien incrimine la bouillie alors que la cause réelle de l'insuccès du traitement doit être cherchée dans son exécution défectueuse. D'une manière générale, on a tendance à effectuer les pulvérisations sur les arbres comme on les effectue sur la vigne contre le mildiou; c'est une grave erreur et qui explique bien des échecs ; alors qu'il suffit en principe de quelques gouttes de bouillie cuprique pour mettre pratiquement une feuille de vigne à l'abri des attaques du champignon du mildiou, cette condition est loin d'être suffisante lorsqu'il s'agit de protéger une partie de la plante contre les attaques de certains insectes parasites. Une idée malheureusement trop répandue chez nous, est qu'il suffit de forcer la dose de principe actif dans les bouillies pour en augmenter la valeur insecticide ou anticryptogamique et obtenir de meilleurs résultats contre les parasites. C'est peut-être vrai lorsqu'il s'agit de lutter contre certains champignons, ceux qui s'attaquent au bois par exemple, encore qu'on n'en n'ait pas la certitude absolue mais dans le cas des insectes, le principe est en défaut. C'est cette même croyance qui pousse certaines personnes à forcer la dose de remède pour obtenir un effet plus immédiat et plus énergique contre certaines maladies humaines, mais le remède énergique va parfois à l'encontre du but que l'on poursuit et mieux vaut la plupart du temps employer le remède à petites doses et répéter plus souvent la médication que de l'employer à doses massives. Dans le cas particulier du traitement des plantes cultivées contre les insectes, il n'y a souvent pas intérêt à dépasser la dose d'insecticide reconnue nécessaire pour obtenir une action nettement positive ; nous en donnerons des exemples, précis au cours du deuxième Chapitre. La conclusion pratique qui découle de toutes nos expériences et observations poursuivies dans la région lyonnaise et la Vallée du Rhône, c'est que la protection des arbres fruitiers contre les attaques des insectes est généralement bien mieux assurée par l'emploi de grandes quantités de bouillie relativement peu riche en insecticide que par celui de faibles quantités de bouillie concentrée. Nous croyons donc que l'intérêt bien compris de l'arboriculteur consiste à multiplier les traitements et, surtout, à dépasser largement les quantités de bouillie qu'il a l'habitude d'employer pour le traitement de ses arbres. Dans la plupart des cas, en particulier dans le traitement des poiriers et pommiers contre le carpocapse ; celui du traitement des pêchers contre les pucerons ; celui du traitement de la vigne contre la cochylis et l'eudémis, l'augmentation de dépense de liquide favorise la répartition des produits actifs de la bouillie sur les organes à protéger. Cette augmentation doit être obtenue, non par une dépense supplémentaire de main-d'œuvre, la crise actuelle étant trop aiguë pour songer à l'aggraver encore, mais par l'emploi d'appareils à grand débit, c'est-à-dire de pompes pulvérisant la bouillie sous une pression supérieure à 6 kilos. Depuis longtemps, aux États-Unis, on utilise sur une grande échelle ces appareils à grand travail ; ils rendent possible en effet le traitement rapide des vergers les plus étendus et permettent de multiplier les pulvérisations. Il faut croire que ces opérations laissent de larges bénéfices à ceux qui les pratiquent, puisque la plupart des vergers sont traités méthodiquement dans les principales régions fruitières des États-Unis et du Canada. En France, nous n'en sommes malheureusement pas là, mais il faut reconnaître qu'on a fait de grand progrès dans cette voie depuis deux ans. La fabrication en France d'appareils à grand débit spécialement étudiés pour le traitement des arbres fruitiers a fait également de grand progrès. Un concours-exposition organisé à Lyon en mars 1932 par la Chambre régionale d'agriculture de Lvon a réuni plus de 26 modèles différents, les uns à moteur, les autres à bras ; il suffit de comparer cette exposition à celle qui avait été organisée en 1929 par la Cie P.L.M. à l'occasion du Congrès international sur les Appareils utilisés dans la lutte contre les ennemis des cultures, pour mesurer tout le chemin parcouru depuis trois ans. Dès maintenant, les arboriculteurs sont assurés de trouver sur le marché des types d'appareils répondant à leurs besoins. Le prix de revient de ces appareils est relativement élevé, mais la dépense est assez vite amortie par les bénéfices supplémentaires qui résultent de leur utilisation. A titre d'indication, rappelons qu'un verger de 2 hectares de superficie environ, planté en Poiriers Williams demi-tiges, a rapporté 90.000 fr. en 1932 à la suite de traitements d'hiver et de printemps régulièrement appliqués chaque année avec un appareil à moteur.

B. - LES BOUILLIES

On désigne sous le nom de bouillies, des précipités de sels métalliques en suspension dans l'eau et capables de détruire les champignons et les insectes parasites. Les plus communément employées sont les suivantes : , Les bouillies cupriques (ayant pour base un sel de cuivre) ; Bouillie bordelaise à base de chaux ; Bouillie bourguignonne à base de carbonate de soude ; Les bouillies sulfocalciques à base de polysulfures de chaux Les bouillies arsenicales et cupro -arsenicales ; Les émulsions d'huile minérale en bouillie cuprique. Les solutions de nicotine et les macérations de pyrèthre dans l'eau de savon rentrent également dans la catégorie des bouillies bien que ce soient en réalité des solutions vraies. Toutes les bouillies dont nous donnons ici le mode de préparation peuvent être faites très facilement et très rapidement par l'arboriculteur, à condition d'employer les produits simples sous forme de poudre fine ou de pâte.

1. - BOUILLIES CUPRIQUES

a) Bouillie bordelaise normale. sulfate de cuivre neige ............................................................................ 2 kgs 

Chaux hydratée en poudre fine (fleur de chaux ou chaux blutée) …………………………………….. ..3 kgs Caséine en poudre ……………………………………..................................................................... 50 grs 

Eau ........ .................. .......................................................................................................................100 litres 

La bouillie peut avoir une teneur plus faible ou plus forte en sulfate ; dans le premier cas, elle sera désignée sous le nom de bouillie bordelaise faible et sa teneur en sulfate de cuivre et chaux, par 2 chiffres, le premier indiquant le poids de sulfate, le deuxième, le poids de chaux. Ainsi la bouillie bordelaise (1-1,5) sera faite avec 1 kilog. de sulfate et 1,5 kilog. de chaux ; la bouillie concentrée (3-4) comprendra 3 kilogs de sulfate et 4 kilogs de chaux.

Mode de préparation - Faire dissoudre d'une part le sulfate de cuivre, dans 80 litres d'eau environ ; mélanger d'autre part la poudre de caséine à celle de chaux et faire un lait de chaux clair ; verser petit à petit, en agitant avec un balai de bois ou un simple bâton, le lait de chaux dans la solution de sulfate, puis compléter à 100 litres.

La caséine peut être remplacée par le lait écrémé que l'on ajoute au lait de chaux ou à la bouillie toute préparée. Il faut compter 1 à 2 litres de lait par hectolitre. La caséine rend la bouillie mouillante et plus adhérente.

On trouve dans le commerce d'autres produits mouillants dont l'emploi est susceptible d'améliorer sensiblement les qualités anticryptogamiques et insecticides des bouillies.

Il convient d'employer la bouillie bordelaise aussitôt après sa préparation. Dès le lendemain, en effet, elle serait déjà altérée et aurait perdu la plupart de ses qualités.

b) Bouillie bourguignonne.

Sulfate de cuivre neige 2 kgs Carbonate de soude anhydre (Solvay) 1 kg. Caséine 50 gr. Eau 100 litres

Faire, à part, la solution de carbonate de soude dans quelques litres d'eau ; y faire dissoudre la caséine et verser ensuite lentement dans la solution de sulfate en agitant.

Ou bien verser lentement le carbonate en poudre dans la solution de sulfate de cuivre bien agitée.

Ou encore mélanger les deux poudres de sulfate et de carbonate et projeter ensuite dans l'eau maintenue agitée.

II. - BOUILLIES SULFOCALCIQUES

Les bouillies sulfocalciques sont des solutions plus ou moins concentrées de polysulfures de chaux obtenus par combinaison à chaud du soufre et de la chaux. On peut les préparer à la ferme mais la préparation est assez longue et nécessite un matériel spécial. A titre d'indication, nous donnerons quelques formules de préparation permettant d'obtenir une bouillie sulfocalcique de bonne qualité. D'après SAVASTANO, pour préparer 100 litres de bouillie sulfocalcique concentrée, on met dans un chaudron en fonte d'une contenance de 150 litres environ, 20 litres d'eau que l'on fait tiédir ; on ajoute 10 kilos de chaux vive sans agiter. Dès que le délitage est bien en train, on ajoute 20 kgs de soufre tamisé et on l'incorpore à la masse pâteuse en étendant d'eau peu à peu si elle tend à devenir trop sèche. Quand le délitage est terminé, on allonge la bouillie à 115 litres, on active le feu et on fait bouillir 3/4 d'heure à 1 heure. Si l'évaporation est trop intense, on ajoute de l'eau peu à peu de façon à maintenir le volume autour de 100 litres ; l'emploi d'un agitateur muni d'un repère correspondant à 100 litres facilite beaucoup les manipulations. La bouillie obtenue titre 250 Beaumé environ. On l'emploie diluée à 8 % environ pour les traitements d'hiver. La bouillie sulfocalcique ainsi préparée ne peut être employée en été pour le traitement des pêchers. La formule suivante donnée par Scott permet d'obtenir une bouillie non dangereuse pour le pêcher : on verse dans un baquet 14 kgs 5 de chaux vive aussi fraîchement cuite que possible avec suffisamment d'eau pour recouvrir les pierres (environ 22 litres). Dès que la chaux commence à s'effriter, ajouter 14 kgs 5 de soufre tamisé. Agiter constamment en ajoutant autant d'eau qu'il est nécessaire pour obtenir une pâte demi-fluide (environ 13 à 14 litres). La chaux, en s'hydratant, dégage suffisamment de chaleur pour déterminer l'ébullition du mélange pendant plusieurs minutes. Lorsqu'elle est complètement éteinte, on ajoute de l'eau pour obtenir un volume total de 750 litres. Il ne faut pas attendre trop longtemps pour ajouter l'eau sans quoi la combinaison du soufre et de la chaux serait trop complète et la bouillie obtenue resterait dangereuse pour le feuillage du pêcher. La bouillie sulfocalcique est spécialement recommandée pour le traitement des arbres contre les " blancs ".

III. BOUILLIES ARSENICALES

1° GÉNERALITÉS SUR LES SELS D'ARSENIC.

Les sels d'arsenic sont de puissants insecticides et ceux qui conservent le plus longtemps leurs propriétés à l'air. Ceux qu'on emploie en agriculture sont des arséniates insolubles (arséniates tri plombique et di plombique, arséniate de chaux).

Ce sont des poisons pour l'Homme et les animaux domestiques; il faut donc observer certaines précautions dans leur emploi mais sans exagérer toutefois le danger des manipulations, Les accidents dus à leur utilisation en agriculture sont extrêmement rares. Les prescriptions concernant l'emploi des arsenicaux en agriculture ont fait l'objet de décrets et de circulaires. Des dernières prescriptions ministérielles, nous extrayons les indications suivantes Les traitements par les composés arsenicaux en pulvérisation et en badigeonnage sont interdits dans les vignes, vergers et autres plantations où sont faites des cultures intercalaires maraîchères et potagères. Lesdits traitements sont autorisés 1° Vignes : de la fin des vendanges jusqu'au début de la véraison 2° Pommiers, Poiriers, Pruniers, Pêchers, Amandiers (à l'exclusion de toutes autres essences fruitières pour lesquelles lesdits traitements sont interdits) de l'époque qui suivra la récolte totale des fruits jusqu'à 5 semaines après la floraison ; toutefois au moment de la floraison, les traitements seront suspendus 3° Cerisiers, Abricotiers : de l'époque qui suit la récolte totale. des fruits jusqu'à la fin de la floraison 4° Oliviers : du 1er juin jusqu'au début de la véraison.

2° FORMULES DE BOUILLIES ARSENICALES

Les bouillies arsenicales dont il est fait le plus fréquent usage sont les suivantes : a) Les bouillies à base d'arséniate di ou triplombique b) Les bouillies à base d'arséniate de chaux c) Les bouillies cupro-arsenicales. Les premières peuvent être employées seules ou en mélange avec la bouillie bordelaise ou bourguignonne les doses à employer sont celles indiquées par le fabricant.

b) Bouillies à l'arséniate de chaux.

Certaines marques d'arséniate de chaux peuvent être dangereuses pour les parties vertes des végétaux lorsqu'elles sont employées seules ou en mélange avec une bouillie cuprique insuffisamment riche en chaux ; d'autre part, le pouvoir insecticide de l'arséniate de chaux peut varier dans d'assez grandes limites suivant le mode de fabrication bien plus que d'après la teneur en arsenic. Il est assez délicat de conseiller le praticien sur le choix de l'arséniate de chaux à employer ; c'est à l'usage qu'il se rendra compte de la valeur réelle du produit qu'il utilisera. La dose à employer varie suivant qu'on a affaire à une poudre ou à une pâte ; cette dose est indiquée sur les boîtes de livraison du commerce.

c) Bouillies cupro-arsenicales,

La formule type de préparation est la suivante : Sulfate de cuivre neige ......... 1 kg. Chaux hydratée en poudre (fleur de chaux) ………1 kg. 5 à 2 kgs. Arséniate de plomb on de chaux (dose indiquée par le fabricant). Caséine ....…….50 gr. Eau……………………………………. 100 litres.

Préparer la bouillie bordelaise comme il a été expliqué précédemment. Délayer dans un peu d'eau l'arséniate en évitant la formation de grumeaux et verser dans la bouillie bordelaise. Le précipité d'arséniate est assez lourd et les bouillies arsenicales déposent relativement vite ; il est donc indispensable que les pulvérisateurs soient munis de bons agitateurs,

IV.BOUILLIES A BASE D'HUILES MINERALES

Les huiles minérales peuvent être émulsionnées facilement dans les bouillies cupriques ordinaires -, les émulsions obtenues sont très stables et ne peuvent être utilisées que pour les traitements d'hiver. Nous distinguerons les émulsions à base d'huile d'anthracène et celles à base de pétrole ordinaire, de pétrole brut ou mazout et d'huile de moteur usagée.

a) Bouillies à base d'huile d'anthracène.

L'huile d'anthracène est un produit de la distillation des goudrons de houille que l'on peut trouver dans les Distilleries de goudrons. Sa composition est assez variable ; des travaux récents ont montré que la valeur insecticide des huiles antracéniques était surtout fonction de leur richesse en hydrocarbures lourds et en phénols supérieurs. Lorsqu'elles renferment une trop grande proportion de phénols inférieurs, elles peuvent être dangereuses pour les arbres. Les huiles livrées actuellement par le commerce renferment généralement les produits émulsifiants destinés à favoriser la préparation de l'émulsion. La formule de préparation est des plus simples, il suffit de verser lentement l'huile dans la bouillie bordelaise normale en remuant énergiquement avec un balai de bois ; l'huile s'incorpore facilement à la bouillie et forme une émulsion très fine et très stable qui passe bien à travers tous les jets de pulvérisateurs. La dose à employer pour les poiriers et pommiers est de 10 litres pour 90 litres de bouillie bordelaise. Pour les pêchers et les abricotiers, une dose de 7 litres est suffisante.

b) Bouillies à base d'huiles minérales diverses.

On peut employer comme huiles : le pétrole ordinaire, le pétrole brut ou mazout, le pétrole usagé des garages d'automobiles (employé pour le nettoyage des pièces métalliques), l'huile d'auto usagée. La formule de préparation est la suivante

Sulfate de cuivre 2 kgs Fleur de chaux 4 kgs Huile minérale 10 litres Eau 90 litres

La préparation de l'émulsion est un peu plus délicate que celle de la précédente ; pour réussir, il est indispensable de suivre très exactement les prescriptions qui sont données ici, faute de quoi on court le risque d'obtenir une bouillie non homogène qui ne passe pas à travers les jets. Le sulfate de cuivre (sulfate neige de préférence) est dissout au préalable dans 25 litres d'eau ; on prépare dans un autre récipient un lait de chaux épais en utilisant 8 litres d'eau pour 4 kilogs de fleur de chaux. On verse petit à petit l'huile ou le pétrole dans le lait de chaux en agitant avec un gros pinceau ou un balai de bois ; étendre d'eau après avoir incorporé l'huile ou le pétrole. L'émulsion obtenue est ensuite versée dans la solution de sulfate en brassant constamment avec le balai de bois ; on complète enfin à 100 litres. Le précipité obtenu est très ténu et reste longtemps en suspension ; l'émulsion est également assez stable, mais plus grossière cependant que celle obtenue avec l'huile d'anthracène. Bien que la proportion de sulfate et de chaux soit assez élevée la bouillie peut être pulvérisée avec les appareils ordinaires sans qu'on ait à craindre l'engorgement des jets.

V. BOUILLIES NICOTINÉES

La nicotine, extraite des déchets de tabac, est livrée par la Régie française des tabacs sous la forme d'extraits titrés de nicotine concentrée et de jus titrés ordinaires de tabac. Les extraits titrés sont des solutions concentrées de sulfate de nicotine renfermant 500 grammes de nicotine pure par litre. La Régie met en vente également, depuis peu, mais seulement en bidons de 200 cent. cub., des extraits titrés de concentration dédoublée, c'est-à-dire contenant 250 gr seulement de nicotine pure par litre.

Les jus titrés ordinaires de tabac contiennent de 10 à 20 gr. de nicotine par litre.

Les extraits titrés sont vendus en bidons métalliques contenant 5 litres, 1 litre ou 1/2 litre d'extrait. Il n'est pas prévu de mode d'emballage pour les jus titrés ; en général, les acheteurs sont tenus de fournir les récipients.

La nicotine est un alcaloïde très toxique pour le plupart des insectes ; c'est également un poison violent pour l'Homme. Elle agit à la fois comme poison interne et comme insecticide de contact. On l'associe généralement au savon, mais on peut également l'incorporer aux bouillies cupriques alcalines.

La bouillie au savon peut être préparée d'après la formule suivante

Extrait nicotiné à 500 2 à 300 gr. Savon blanc de Marseille ………..1 kg. Eau 100 litres

Il vaut mieux employer le savon blanc que le savon noir, car sa composition et ses propriétés mouillantes sont beaucoup plus constantes que celles du savon noir.

Pour dissoudre le savon, employer de préférence l'eau de pluie ; l'eau ordinaire est, en effet, plus ou moins calcaire et immobilise une certaine quantité de savon ; pour éviter cet inconvénient, on peut ajouter à l'eau une poignée de cristaux de soude.

Lorsqu'on a affaire aux jus faibles, il faut employer 7 à 10 litres par hectolitre, suivant la concentration.

La nicotine perdant rapidement son pouvoir insecticide à l'air, il est nécessaire, pour obtenir le maximum d'efficacité, de pulvériser les bouillies nicotinées au moment où il sera possible d'atteindre le maximum de parasites. Il existe donc, pour leur emploi en arboriculture fruitière, une époque favorable qu'il convient tout d'abord de déterminer avec exactitude.

CHAPITRE II

Les traitements insecticides et anticryptogamiques

1. - Traitements d'automne

CHENILLES ARPENTEUSES

Caractères et mœurs des parasites - Les chenilles arpenteuses vertes qu'on rencontre souvent en grande abondance, au printemps, sur toutes les essences fruitières, appartiennent à deux espèces voisines de Lépidoptères: la Cheimatobia brumata (synonymes - Géomètre, Compas, etc.) et l'Hybernia defoliaria.

Elles s'attaquent aux premières feuilles, aux boutons floraux, aux jeunes fruits.

Les papillons qui leur donnent naissance éclosent vers la fin de l'automne, en général à partir du mois d'octobre.

Les femelles sont incapables de voler, ne possédant que des ailes rudimentaires ; elles sont donc obligées de grimper sur le tronc pour déposer leurs oeufs dans les anfractuosités de l'écorce, des branches ou des rameaux.

Traitements. - Si l'on interpose, entre ces branches et le sol, un anneau de glu ne présentant aucune solution de continuité, on interdira l'accès de l'arbre aux femelles et, partant, on le garantira contre les attaques des chenilles. Tel est le principe de la lutte contre les chenilles arpenteuses.

Deux conditions sont indispensables pour réussir 1° Il faut employer un mélange qui reste suffisamment gluant pendant tout le temps de la montée des papillons, soit environ deux mois.

2° Les anneaux gluants doivent être mis en place avant la sortie des premiers papillons.

Les expériences poursuivies pendant quatre ans dans les principales régions fruitières de l'Est central ont montré que la sortie des papillons était plus précoce dans les régions à climat froid, comme celles de l'Est, que dans celles où la température moyenne est plus élevée : régions au sud de Lyon, par exemple.

Elles ont montré aussi que la sortie était d'autant plus retardée que l'année avait été plus chaude et plus sèche.

En année normale, on peut considérer que la sortie des papillons a lieu vers la fin d'Octobre dans les régions fruitières de l'Est (Besançon, Vallée de la Loue), dans les premiers jours de Novembre dans la région Lyonnaise.

La mise en place des anneaux doit avoir lieu avant ces dates limites.

Les anneaux gluants doivent avoir une épaisseur et une largeur suffisantes : trop étroits, ils risquent de présenter très vite des solutions de continuité par suite de la capture des papillons mâles dont les ailes s'étalent largement à la surface de l'anneau ; trop minces, ils perdent rapidement leurs propriétés gluantes.

La largeur des bandes doit être de 6 centimètres environ l'épaisseur, d'au moins 1/2 centimètre.

On étale la glu directement sur l'écorce avec une palette de bois, le Tanglefoot n'étant pas nocif pour l'arbre.

Dans les cas de grande invasion, il est bon de rafraîchir la couche gluante au cours de la montée des papillons.

En année normale, la montée peut être considérée comme terminée vers le 8 Décembre dans la région Lyonnaise, mais elle peut parfois se prolonger jusqu'à fin Décembre et même jusqu'en Mars, comme on a pu l'observer en 1919.

II - Traitement du début de l'hiver

LE CORYNEUM DU PECHER

Caractères de la maladie. - Le Coryneum est une maladie des feuilles, des rameaux et des fruits du Pêcher.

Sur les feuilles, la maladie se traduit par une tache brune couleur feuille morte, souvent entourée d'une bordure rougeâtre. La partie brune se détache souvent et tombe ; la feuille apparaît percée de trous arrondis (criblures). Mais aucun de ces caractères n'est suffisant pour distinguer les taches dues au Coryneum de celles produites par des brûlures (brûlures de bouillie bordelaise, par exemple).

Sur les fruits, il se produit de petites taches brunes, limitées, superficielles, souvent accompagnées d'un écoulement de gomme.

Sur les rameaux herbacés, la maladie consiste en taches brunes, allongées, se produisant souvent au niveau des yeux et accompagnées d'un écoulement de gomme.

Sur les rameaux aoûtés, en hiver, la maladie attaque les yeux et les tue. L'œil seulement est tué, ou bien les tissus avoisinants du rameau le sont également et il se forme une sorte de chancre à la base des yeux morts.

Enfin, en attaquant le pédicelle des pêches en voie de développement, le Coryneum détermine leur dessiccation. Les jeunes fruits ainsi desséchés restent souvent sur l'arbre, à demi détachés seulement de leur pédicelle.

La dessiccation des boutons à fleur en hiver n'est pas toujours due au Coryneum ; elle peut avoir des causes physiologiques ou physiques. En 1930, par exemple, après une gelée tardive (mi-mars) avec verglas persistant sur les arbres, on a constaté qu'une proportion très importante de boutons à fleur noircissait et se desséchait sur certaines variétés de pêcher. De même, les plaies chancreuses qu'on observe fréquemment sur grosses branches sont souvent attribuées à tort à la maladie.

Causes de la maladie. - La maladie est provoquée par un champignon parasite. Ce champignon produit ses spores à la surface des taches qu'il détermine. Ces spores peuvent se conserver dans la gomme. Elles peuvent germer, même en hiver, et contaminer les yeux, ou bien elles ne germent qu'au printemps, et en été sur les fouilles, les rameaux et les fruits.

Dégâts causés par la maladie. - Le Coryneum est une maladie grave pour le Pêcher.

Ses attaques, très dangereuses pour les rameaux et les yeux, sont, en général, peu préjudiciables aux arbres lorsqu'elles se produisent sur les feuilles. Par contre, les fruits peuvent être très endommagés, niais on ne connaît pas de moyens susceptibles d'empêcher leur contamination.

Méthodes de lutte contre le Coryneum. - Le Coryneum cause des dégâts sur le pêcher surtout parce qu'il s'attaque aux yeux et aux rameaux.

C'est surtout contre cette forme de maladie qu'il convient de lutter.

Comme les yeux sont infectés pendant l'hiver ou au printemps, le traitement doit être préventif.

Il faut donc traiter les pêchers dès la chute des feuilles, courant Novembre, par exemple, ou Décembre au plus tard.

Bouillies à employer. - Les bouillies sulfocalciques ne sont pas recommandables contre le Coryneum du Pêcher. Elles ne gardent leur efficacité que trop peu de temps après leur emploi.

On n'utilisera donc contre le Coryneum que les bouillies cupriques. Parmi ces dernières, la bouillie bordelaise concentrée (3-4) a été particulièrement recommandée jusqu'ici ; mais on a constaté pendant l'hiver 1931-1932 que l'utilisation d'une bouillie aussi riche en sulfate de cuivre pouvait occasionner des brûlures graves sur les pousses de l'année. De l'enquête qui a été faite par l'un de nous, il résulte que les brûlures ont été particulièrement graves dans certaines localités de la région lyonnaise ; l'enquête a montré, en outre, que la cause des accidents devait être cherchée dans le défaut d'aoûtement du bois. A l'avenir, il y aura donc lieu de se préoccuper de l'état de la végétation avant d'effectuer le traitement d'automne des pêchers ; en cas de doute sur le bon aoûtement du bois, on s'abstiendra de pulvériser ou on réduira la dose de sulfate à 2 kilog. par hectolitre.

Les bouillies cupriques autres que la bouillie bordelaise sont également utilisables à la condition qu'elles soient très adhérentes et conservent longtemps leur efficacité.

CORYNEUM DE L'AMANDIER, DU CERISIER ET DE L'ABRICOTIER

L'Amandier est attaqué par le Coryneum comme le Pêcher.

Sur le Cerisier, le Coryneum attaque les feuilles et y produit des taches analogues à celles qu'il produit sur les feuilles du Pêcher. Les fruits présentent des taches où la chair se dessèche jusqu'au noyau et les rameaux sont fréquemment attaqués comme ceux du Pêcher.

Le Coryneum attaque également les feuilles de l'Abricotier, très rarement les rameaux et détermine, sur les abricots, des taches superficielles qui, si elles sont très nombreuses, arrivent à déformer le fruit et à diminuer sa valeur marchande.

Méthodes de lutte. - On peut appliquer les mêmes traitements que ceux indiqués pour le Pêcher ; mais il semble préférable d'attendre la fin de l'hiver et de pulvériser à ce moment, comme il sera indiqué plus loin, une émulsion d'huile d'anthracène en bouillie bordelaise.

En Suisse, on recommande de traiter les feuilles de la base des Cerisiers sur une hauteur de 2 à 3 mètres avec la bouillie bordelaise faible : deux traitements sont nécessaires sur les arbres fortement attaqués par le Coryneum l'année précédente : le premier est fait au moment où les fruits sont noués ; le deuxième, huit jours plus tard.

III. Mesures d'hygiène générales à appliquer pendant l'hiver

L'expérience a montré que les traitements effectués à la fin de l'hiver avec émulsion d'huile en bouillie bordelaise étaient plus efficaces que ceux effectués avec la même émulsion au cours de l'hiver. Pendant cette période de repos de la végétation, les arbres seront débarrassés soigneusement des branches mortes ou malades. Beaucoup de ces branches sont attaquées par des larves d'insectes parasites qui vivent à l'intérieur du bois ou entre le bois et l'écorce. Il est indispensable de les brûler avant que les Insectes parfaits aient essaimé, c'est-à-dire avant le mois d'avril au plus tard. Si ces simples mesures d'hygiène étaient rigoureusement appliquées sur l'ensemble des vergers, on n'aurait pas à craindre ces invasions de parasites xylophages qui font parfois tant de mal, surtout dans les jeunes plantations.

Les chancres ou plaies profondes seront nettoyés, puis badigeonnés soit avec une solution forte de permanganate (10 % soit avec le mélange dit de Chavastelon ; ce mélange est obtenu de la manière suivante : dissoudre d'une part 300 gr. de sulfate de cuivre dans 5 litres d'eau ; d'autre part, 300 gr. de bichromate de potasse (sel de pile) dans 5 litres d'eau ; puis verser la solution de sulfate dans celle de bichromate en remuant avec un bâton ; le précipité épais obtenu est employé en badigeonnage.

IV. - Traitements de la fin de l'hiver

Parasites contre lesquels ces traitements sont dirigés.

Les traitements de fin d'hiver sont dirigés principalement contre :

le Champignon de la Cloque du Pêcher;

Le Champignon du Coryneum ;

Le Champignon du Monilia de l'Abricotîer;

Les Cochenilles ou kermès et les germes de Champignons divers qui s'attaquent au bois ou à l'écorce (Champignon de la maladie des plaques et craquelures du Poirier) ;

Les oeufs d'hiver de certains parasites, ceux des Pucerons et de la Chéimatobie (chenilles arpenteuses), par exemple ;

Les oeufs d'hiver de divers Champignons de maladies qui évoluent en été.

Ils assurent d'autre part le nettoyage général des arbres et font disparaître les mousses et lichens qui nuisent à leur vigueur.

Généralités sur les bouillies à employer. - Deux types de bouillies sont recommandables :

- les émulsions d'huiles minérales dans la bouillie bordelaise

- les bouillies sulfocalciques.

Les premières sont particulièrement efficaces ; la dose d'huile d'anthracène à employer est de 10 % pour un premier traitement ; par la suite, lorsqu'il s'agit de traitements d'entretien, la dose peut être ramenée à 8 % ; pour le Pêcher et l'Abricotier, une dose de 7 % est suffisante.

Les traitements répétés aux émulsions cupro-anthracéniques sont sans inconvénient pour les arbres ni pour le terrain de culture.

La pulvérisation peut être faite jusqu'au moment où les bourgeons commencent à grossir ; c'est à ce moment que l'émulsion a son maximum d'efficacité. Elle est dangereuse pour les légumes verts, les fraisiers ; il faut donc éviter de la pulvériser dans les vergers où l'on cultive des légumes, mais on peut l'employer en badigeonnage.

LA CLOQUE DU PÊCHER

Caractères de la maladie. - La Cloque du Pêcher est une maladie qui apparaît au printemps, lors du développement des jeunes pousses.

Les feuilles atteintes sont déformées, boursouflées, gaufrées, souvent enroulées en tire-bouchon. Elles sont plus grandes que des feuilles normales, plus épaisses aussi. Leur couleur est d'un vert pâle d'abord, puis elle devient rougeâtre et enfin la face supérieure se recouvre d'une pruine blanchâtre.

Les jeunes rameaux atteints sont plus gros que les normaux comme les feuilles, ils sont devenus charnus.

Les feuilles et les rameaux atteints tombent ou se dessèchent au début de l'été, si bien que la maladie disparaît en été.

Causes de la maladie. - La Cloque est provoquée par un champignon parasite constitué par de fins filaments qui vivent dans les feuilles et les rameaux atteints et provoquent la déformation de ces organes.

Ce champignon forme ses spores ou " graines " de dimensions microscopiques, à la face supérieure des feuilles atteintes ; leur nombre est tel que cette face de la feuille prend un aspect pruineux.

Ces spores restent dans les anfractuosités de l'écorce ou entre les écailles des bourgeons, y passent l'hiver, germent au printemps suivant dès le départ de la végétation et donnent un filament qui pénètre dans les jeunes fouilles ou les jeunes rameaux et s'y développe. Ainsi réapparaît la maladie à chaque printemps.

Les spores ne germent que dans des gouttes d'eau. Les Pêchers protégés de la pluie ne sont, en effet, jamais atteints par la Cloque.

La Cloque est donc une maladie grave surtout au cours des printemps froids et humides qui, d'une part, permettent la germination des spores et sont favorables au développement du parasite et, d'autre part, sont défavorables à la végétation du Pêcher.

Dégâts causés par la maladie. - La Cloque du Pêcher détermine la chute ou la dessiccation des feuilles et des rameaux atteints. Il s'ensuit que les jeunes fruits en voie de croissance sont mal nourris, grossissent pou et tombent en totalité ou en partie.

De fortes attaques de Cloque affaiblissent, d'autre part, la végétation du Pêcher et peuvent provoquer un écoulement de gomme sur toutes les branches. D'où un effet immédiat de la maladie sur la récolte de l'année et une répercussion sur les récoltes à venir.

Méthodes de lutte contre la Cloque. - Signalons d'abord qu'il convient de planter dans les endroits humides les variétés de Pêchers les plus résistantes à la Cloque. La variété Amsden, par exemple, est peu sensible alors que les variétés : Vainqueur, Earliest, Charles Inghouf et Gaillard-Girerd, n° 5 et 6, sont plus facilement atteintes.

1° ÉPOQUE DES TRAITEMENTS. - La Cloque apparaît dès le départ de la végétation. Il faut donc traiter les Pêchers avant ce moment, un mois au moins avant l'époque de la pleine floraison, c'est-à-dire, pratiquement, courant février dans la Vallée du Rhône.

Les traitements effectués plus tard, moins d'un mois avant la pleine floraison, ne sont que partiellement efficaces, sur les variétés très sensibles à la maladie tout au moins.

Les traitements effectués à l'époque indiquée sont totalement efficaces.

2° BOUILLIES A EMPLOYER. - Les bouillies cupriques et les bouillies sulfocalciques peuvent être pratiquement employées aux époques ci-dessus indiquées pour lutter contre la Cloque.

Cependant l'efficacité des bouillies sulfocalciques est nettement inférieure à celle des bouillies cupriques chaque fois qu'il s'agit de protéger des variétés de Pêchers très sensibles à la maladie ou que le climat humide au printemps favorise le développement du parasite.

On n'emploiera donc les bouillies sulfocalciques que si leur prix de revient est nettement inférieur à celui des bouillies cupriques ou si elles présentent quelques autres avantages spéciaux (traitements d'hiver contre les Kermès).

Dans tous les autres cas on préférera les bouillies cupriques et plus particulièrement l'émulsion d'huile minérale en bouillie bordelaise qui est très adhérente, très mouillante et agit d'autre part sur les Kermès et les oeufs de Pucerons. Il n'y a pas à craindre les brûlures causées par l'huile lorsque l'émulsion a été bien faite et lorsque la provenance de l'huile offre toute garantie.

LE MONILIA DE L'ABRICOTIER

Le Champignon du Monilia constitue pour la Vallée du Rhône un parasite redoutable. Depuis quelques années, ses dégâts semblent en recrudescence dans la région lyonnaise. Le parasite s'attaque tout d'abord aux fleurs qui sont tuées, flétrissent et se recouvrent de moisissure grise. De la fleur, le mycelium du Champignon pénètre dans la brindille. L'écorce brunit tout autour du point d'insertion de la fleur et toute la partie supérieure de la brindille se dessèche ; on observe souvent un écoulement de gomme à la base. Les feuilles flétrissent brusquement, se dessèchent et tombent. Beaucoup d'arboriculteurs ont attribué à la gelée les dégâts particulièrement graves causés ainsi par le Monilia en 1931 et 1932. Il est à remarquer que seules les brindilles portant des fleurs sont attaquées par le Champignon. Des brindilles d'un an, le mycelium peut pénétrer dans les rameaux de deux ans et provoquer leur dessiccation. Le plus souvent, de la brindille, le mycelium envahit le rameau qui la porte. Là, il tue seulement l'écorce et le bois tout autour du point d'insertion de la brindille, et il se forme en ce point un chancre avec écoulement de gomme. Ces chancres se forment dans la première partie de l'année ; des parasites secondaires peuvent intervenir qui aggravent les dégâts. Ainsi prendraient naissance les chancres que l'on trouve souvent, même sur des grosses branches d'Abricotier.

Des dégâts analogues peuvent être observés sur Cerisier et sur Pêcher.

Traitements à conseiller. - Les traitements de fin d'hiver avec émulsion cupro-anthracénique donnent de bons résultats contre le Monilia de l'Abricotier à condition que la pulvérisation soit faite le plus tard possible et qu'elle atteigne bien toutes les parties de l'arbre, surtout les fines ramifications. On recommande aussi la pulvérisation de bouillie bordelaise normale (2-3) juste avant l'épanouissement des fleurs.

LES COCHENILLES OU KERMÈS

Les Cochenilles ou Kermès forment sur l'écorce des arbres des croûtes plus ou moins épaisses lorsqu'elles sont très abondantes. En grattant légèrement l'écorce pour enlever la croûte, la surface apparaît blanchâtre ou grisâtre. Les Cochenilles affaiblissent considérablement l'arbre en suçant la sève.

Traitements à conseiller. - Les pulvérisations de fin d'hiver avec émulsion d'huile anthracénique en bouillie bordelaise ou avec bouillie sulfocalcique concentrée donnent de bons résultats contre les Cochenilles.

V. Traitements de printemps

LA LYDA DU PÊCHER

Ce parasite a causé des dégâts très importants à Saint-Rambert-d'Albon (Drôme) et à Saint-Désirat (Ardèche).

Un tract résumant la biologie du parasite et les principales méthodes de lutte conseillées, a été publié et répandu par les soins de la Compagnie P.-L.-M. au début de l'année 1921.

A la suite d'observations et d'expériences faites depuis cette date, ces méthodes ont été modifiées et complétées.

1° Traitement à la nicotine. - La formule recommandée était là suivante :

Extrait nicotiné (à 500 gr. de nicotine par litre). . . 300,gr.

Savon noir 1 kg.

Eau . 100 litres

Elle peut être avantageusement modifiée en substituant le savon blanc au savon noir (Voir formule, page 13).

Le savon blanc qu'on emploie à la dose de 1 kilog seulement rend la bouillie parfaitement mouillante et favorise une meilleure répartition de la nicotine sur le feuillage.

Le traitement doit être fait au moment où éclosent les premières larves.

Un deuxième traitement sera le plus souvent nécessaire en raison de l'échelonnement (les pontes, échelonnement qui paraît normal depuis 1922 ; ce deuxième traitement sera fait une semaine environ après le premier.

2° Traitement à l'arséniate de plomb. - La loi autorise maintenant le traitement des Pêchers aux arsenicaux jusque cinq semaines après la floraison.

En pulvérisant, à la limite tolérée par la loi, une bouillie à l'arséniate de plomb préparée soit avec la poudre du commerce soit avec l'arséniate diplombique en pâte, on est assuré de protéger efficacement les Pêchers contre les attaques de la fausse chenille.

Avec 240 grammes d'arséniate triplombique (500 grammes de bouillie arsenicale du commerce) ou 125 grammes d'arséniate diplombique (500 grammes du produit pâteux commercial) pour 100 litres d'eau on prépare une bouillie suffisamment efficace.

Il y a intérêt à ne pas dépasser ces doses, car l'arséniate de plomb peut être dangereux pour le feuillage ; on a pu constater en effet, au cours de la campagne 1923, que les plantations traitées tardivement et avec la dose forte d'arséniate (1 kilog. ou plus par Hl), avaient perdu quelque temps après, beaucoup de leurs feuilles. La chute anormale des feuilles a coïncidé, il est vrai, avec un abaissement notable de la température, accompagné de précipitations atmosphériques persistantes. Mais il est à considérer que les plantations traitées quinze jours avant le changement de temps, n'ont nullement souffert du traitement arsenical.

Cette méthode de lutte, malgré les accidents survenus au cours de son application, reste donc des plus recommandables. Il est indispensable toutefois de traiter aussitôt que possible et de ne pas forcer la dose d'arséniate.

PARASITES DU POIRIER ET DU POMMIER

Ces parasites sont très nombreux et s'attaquent à toutes les parties de l'arbre ; si l'on est assez bien armé contre certains d'entre eux, on est par contre sans moyens d'action contre un certain nombre d'autres.

Les plus dangereux peuvent être efficacement combattus par deux traitements de printemps avec bouillie cupro-arsenicale ; ces deux traitements, lorsqu'ils sont convenablement effectués, suffisent pour obtenir une bonne récolte de fruits sains, c'est-à dire non tachés et non véreux. Ces traitements sont dirigés plus spécialement contre les parasites suivants

Champignon de la tavelure ;

Carpocapse ou ver des fruits

Petites chenilles du feuillage

Coléoptères divers ;

Hyponomeute du Pommier.

Bouillie à employer. - Bouillie bordelaise faible (1-2) additionnée d'arséniate de plomb ou de chaux.

Époque des traitements. - Une première pulvérisation est nécessaire aussitôt après la floraison ; c'est la plus importante. Cette pulvérisation a pour but de mettre les jeunes fruits à l'abri des attaques du Carpocapse ou ver des pommes et du Champignon de la tavelure qui tache les pommes et les poires. Le traitement est également efficace contre le ver cordonnier des prunes qui s'attaque aux poires et aux pommes (larve d'Hoplocampe).

Ce premier traitement doit être complété par une deuxième pulvérisation qui sera faite de 3 à 5 semaines après la défloraison (limite extrême tolérée par la loi).

Recommandations très importantes. - La pulvérisation des arbres doit être faite de telle manière que la bouillie recouvre toute la surface des jeunes fruits, en particulier la cavité de l'œil

c'est en effet, par cette cavité que les jeunes chenilles de Carpocapse pénètrent ordinairement dans l'intérieur des pommes et des poires. Comme les chenilles n'éclosent guère avant le mois de juin, il faut que la réserve d'arséniate soit suffisante pour résister en partie à l'entraînement par les eaux de pluie. Dans les variétés où la cavité de l'œil se ferme peu après la floraison, il importe de faire le traitement alors qu'elle est encore largement ouverte. La période utile pour faire le premier traitement ne dépasse pas huit jours.

On ne peut espérer réduire notablement la proportion des pommes et des poires véreuses que si l'on applique rigoureusement ces prescriptions.

Pour réaliser pratiquement la condition essentielle d'un bon traitement, il y a intérêt à utiliser des appareils à grand débit. Lorsqu'on ne dispose que d'appareils à faible débit (pulvérisateurs a dos d'homme), il est nécessaire d'approcher le bec de lance très près des bouquets de fruits (10 centimètres environ), ce qui rend le travail long et pénible. En opérant, au contraire, comme on a l'habitude de le faire pour le traitement des vignes, on peut être assuré que les fruits seront très mal protégés contre les attaques du Ver.

La dépense de liquide est assez grande : on compte que pour traiter convenablement un Poirier en fuseau de trois mètres de haut environ, il faut dépenser quatre litres de bouillie à chaque traitement ; pour un pommier plein-vent de grosseur moyenne, la dépense est de 15 à 20 litres.

Si l'on utilise les pompes à grand débit, le traitement des arbres sera beaucoup plus facile et plus rapide qu'avec les appareils à dos d'homme car il ne sera plus nécessaire d'approcher la lance très près des fruits à traiter. On reconnaîtra que la pulvérisation est bien faite à la présence de bouillie dans la dépression de l'œil du fruit.

Entre la défloraison et la limite extrême tolérée par la loi, un traitement complémentaire avec bouillie arsenicale peut être conseillé dans le cas où la proportion des fruits véreux a été particulièrement élevée l'année précédente.

Il y a lieu de conseiller enfin l'emploi généralisé des bandes pièges pour capturer les chenilles de Carpocapse au moment où elles cherchent un abri pour hiverner. Ces pièges sont constitués par de simples bandes de carton ondulé d'une largeur de 10 centimètres environ qui sont enroulées autour du tronc et fixées à hauteur d'homme au moyen d'une ficelle. Les bandes sont mises en place au début de septembre et relevées au cours de l'hiver ; on les brûle aussitôt. On détruit ainsi un grand nombre de parasites qui se sont réfugiés dans les replis du carton.

AUTRES PARASITES DE PRINTEMPS DU POIRIER ET DU POMMIER

Champignon de la tavelure. - La tavelure est connue de tous ceux qui cultivent les Poiriers et les Pommiers. Elle attaque non seulement les feuilles et les fruits, mais aussi le bois et même, d'après les Américains, le pédoncule des fleurs, ce qui détermine leur chute ou celle des jeunes fruits. Cette éventualité se produit surtout dans les terrains et sous les climats où la maladie est plus particulièrement à redouter. Certaines variétés sont également plus sensibles que d'autres. Il est recommandé dans ces cas de faire un traitement supplémentaire avant la fleur, lorsque les boutons à fleur sont bien dégagés ; on emploiera une bouillie bordelaise faible (1-2) ; en ajoutant de l'arséniate de plomb ou de chaux, on détruira en même temps les chenilles arpenteuses qui peuvent se trouver dans les nouvelles parties vertes de la plante.

Sur les feuilles et les fruits, la tavelure se manifeste par l'apparition de taches noires plus ou moins étendues à contours indécis. Les traitements d'hiver effectués dans les conditions indiquées précédemment auront pour effet de réduire sensiblement les dégâts causés par le parasite d'été et rendront le plus souvent inutile le traitement conseillé avant la floraison.

Petites chenilles du feuillage. - Ces chenilles appartiennent à plusieurs espèces de microlépidoptères du groupe des Tordeuses. Elles vivent en général entre plusieurs feuilles qu'elles réunissent par des fils de soie ou dans une feuille repliée dont les bords sont accolés par des fils soyeux.

Les arbres dont le feuillage a été abondamment et régulièrement pulvérisé avec la bouillie arsenicale n'ont pas à souffrir clos chenilles. L'emploi des appareils à grand travail facilite beaucoup la réalisation de ces conditions.

Coléoptères divers. - Les coléoptères du groupe des Cucurlionides (Charançon " pique brots ") sont parfois très abondants sur les Poiriers et Pommiers. Les traitements indiqués page 15 mettent les arbres à l'abri de leurs déprédations.

Hyponomeute du Pommier. - Le papillon de l'Hyponomeute, très reconnaissable à ses ailes blanches semées de points noirs, ressemble à une teigne ordinaire.

Il pond ses oeufs en juillet-août sur les branches de Pommiers. Les pontes sont très caractéristiques : ce sont de petites plaques d'œufs recouvertes d'une croûte dure adhérant solidement à l'écorce.

Les jeunes chenilles éclosent en automne et passent l'hiver sous la croûte composée de substance glutineuse et de débris de coques d'œufs Elles font leurs dégâts au premier printemps, toujours à l'abri d'une toile protectrice ; à la fin de l'invasion, l'arbre peut être entoilé complètement. A ce moment, les chenilles longues d'environ 1 centimètre sont brun verdâtre et portent sur le dos de petites taches noires.

Les deux traitements arsenicaux ordinaires ont une efficacité suffisante 'contre le parasite.

Chéimatobie. - Les chenilles de Chéimatobie (chenilles arpenteuses) éclosent vers le moment où les bourgeons s'ouvrent et commencent aussitôt leurs dégâts. Sur les arbres qui n'ont pu être englués en automne, il est indispensable de faire un traitement à la bouillie arsenicale avant la floraison ; le moment le plus opportun est celui où les boutons à fleurs se séparent les uns des -autres et où l'on commence à apercevoir le blanc ou le rose des pétales. Ce traitement est efficace également contre l'Anthonome du Pommier.

Hoplocampe. - La larve est une fausse chenille qui vit à l'intérieur du jeune fruit ; on pourrait la confondre avec le Carpocapse si ses dégâts n'étaient pas aussi précoces ; les Poires attaquées par l'Hoplocampe ont l'aspect extérieur de Poires véreuses ; leur odeur rappelle celle que dégagent les Fourmis. Les larves d'Hoplocampe descendent en terre pour se nymphoser. L'insecte parfait est une Mouche à quatre ailes qui éclôt au printemps et dépose ses oeufs au moment de la floraison dans l'épaisseur du calice. L'Hoplocampe est connu surtout comme parasite du prunier ; on ne connaît pas de traitement bien efficace contre ce parasite.

Cécydomie. - L'insecte parfait ressemble à un Moustique il vole au moment de la floraison et dépose ses oeufs vers la base des étamines ; les jeunes pénètrent à l'intérieur de l'ovaire et déterminent le grossissement prématuré des fruits qui apparaissent bientôt plus ou moins déformés. Les Poires ainsi déformées sont dites " calebassées ". Il n'existe pas de procédé de lutte vraiment efficace contre ce parasite en dehors du ramassage des fruits atteints.

Anthonomes du Poirier et du Pommier. - Deux Anthonomes très voisins se rencontrent sur Poirier : l'un pond ses oeufs en octobre dans les boutons à fleur et la larve qui éclôt au cours de l'hiver provoque leur dessiccation (clous de girofle) ; l'autre pond dans les bourgeons en voie de développement ou dans les bourgeons à bois. L'Insecte parfait éclôt en avril-mai.

Les plantations de Poiriers méthodiquement traitées à la fin de l'hiver avec l'émulsion cupro-anthracénique et au printemps avec les bouillies cupro-arsénicales paraissent assez bien protégées contre les attaques d'Anthonomes.

L'Anthonome du Pommier passe l'hiver à l'état d'Insecte parfait sous les écorces et pond ses oeufs dans les fleurs avant leur épanouissement, Les traitements de fin d'hiver avec l'émulsion cupro-anthracénique ont une action marquée contre l'Anthonome. Le traitement arsénical qui est conseillé avant la floraison contre les chenilles arpenteuses est également efficace contre le parasite.

Pucerons du Poirier et du Pommier. - Deux espèces de Pucerons se rencontrent communément à la fois sur Poirier et sur Pommier : l'une est de couleur grisâtre ou noirâtre et forme des colonies très denses à la face inférieure des feuilles qui se recroquevillent et se décolorent partiellement ; les Pucerons de l'autre espèce vivent également sous les feuilles ou vers l'extrémité des jeunes pousses ; ils sont de couleur verte. On rencontre enfin sur Poirier une espèce de Puceron noir qui vit sous les feuilles en les recroquevillant.

Les traitements de fin d'hiver avec émulsion d'huile d'anthracène en bouillie bordelaise ont une action certaine sur les deux premières espèces. L'addition de nicotine aux bouillies cuproarsénicales utilisées pour les traitements ordinaires de printemps donnera de bons résultats contre les différentes espèces de Pucerons à condition de rendre mouillante les bouillies par addition de caséine ou d'autres produits mouillants.

VI. - Traitements de Printemps - Été

PUCERONS PARASITES DES ARBRES FRUITIERS

Biologie des parasites. - Il existe un grand nombre de pucerons nuisibles aux arbres fruitiers. On les distingue grossièrement par leur couleur et par les dégâts qu'ils commettent. Tous sont caractérisés par leur extrême puissance de multiplication.

Les pucerons sont très sensibles aux insecticides, à la nicotine en particulier, mais ils se multiplient avec une telle rapidité que les effets d'un seul traitement, lors même qu'il a été consciencieusement exécuté, sont à peine sensibles au bout de quelques jours.

Un exemple concret donnera une idée très précise de cette puissance de multiplication : le 26 juin, un puceron vert adulte a été déposé sur un petit Pêcher en pot. Quatre petits pucerons ont été pondus dès le premier jour. Au bout de six jours, la mère pondeuse était entourée de trente individus dont les plus âgés ont commencé de pondre une deuxième génération. Après douze jours, le nombre total des pucerons issus de la mère pondeuse et de ses descendants était voisin de mille. - Après trois semaines le petit Pêcher était à peu près complètement envahi.

Pucerons du Pêcher. - Quatre espèces se rencontrent communément sur Pêcher et commettent toutes quatre des dégâts plus ou moins importants dans un grand nombre de plantations de la Vallée du Rhône et de la région lyonnaise.

. Les deux plus communes sont habituellement confondues en une seule qui est désignée sous le nom de puceron noir ; l'une (Anuraphis persicae-niger) vit surtout sur les racines en hiver et en été ; l'autre (A. amigdali) se rencontre seulement sur les feuilles ; elle apparaît très tôt au printemps. .

Le puceron gris (Myzus persicae) apparaît également très tôt au printemps. Il recroqueville les feuilles comme les précédents. En été, il abandonne le Pêcher pour y revenir en automne et déposer ses oeufs d'hiver sur les rameaux de l'année, près des bourgeons en général.

Le puceron vert (Hyalopterus pruni) est un parasite d'été il ne recroqueville pas les feuilles ; ses dégâts sont plus importants que ceux commis par les deux autres espèces. Il n'a pas encore été possible de déterminer son mode d'hivernation.

Conditions générales des traitements. - De ces particularités biologiques découlent les conditions générales du traitement des arbres contre les pucerons.

1° L'arboriculteur doit être pénétré de cette idée que le traitements seront d'autant plus efficaces qu'ils seront plus précoces.

Il doit donc s'astreindre à une surveillance fréquente et minutieuse de ses plantations de manière à repérer les premiers foyers de pucerons dès leur apparition et à les détruire aussitôt, soit en coupant et brûlant les organes atteints, soit en les pulvérisant abondamment avec la bouillie nicotinée.

S'il attend que l'invasion soit en voie de généralisation pour faire les premiers traitements, il ne pourra l'enrayer qu'avec les plus grandes difficultés. Même en multipliant les pulvérisations, il ne pourra détruire tous les parasites et les survivants suffiront à reconstituer rapidement l'invasion.

2° Toutes les parties de l'arbre attaquées par les pucerons doivent être abondamment pulvérisées.

Le traitement idéal consisterait a enfermer l'arbre dans une atmosphère toxique où tous les pucerons seraient atteints, mais une telle méthode serait coûteuse et peu pratique.

L'emploi d'appareils dégageant, sous pression, un mélange de vapeur et d'insecticide, faciliterait l'exécution des traitements, mais ces appareils ne sont pas encore bien au point.

Avec les appareils ordinaires, le meilleur moyen pour obtenir une bonne pulvérisation est de suivre les branches charpentières, de la base au sommet, et de s'attacher à pulvériser les feuilles plutôt en dessous qu'en dessus.

3° En général, un seul traitement ne suffit pas ; il doit être complété par un ou deux autres à quatre ou cinq jours d'intervalle au plus.

Les traitements d'hiver ont une action certaine sur les pucerons qui hivernent à l'état adulte sur les parties aériennes des plantes ; sur les oeufs d'hiver, l'action n'est pas aussi nette ; sur les espèces qui passent l'hiver sur les racines, les traitements d'hiver ne peuvent être d'aucune utilité.

En ce qui concerne plus particulièrement le Pêcher, il y a intérêt à ajouter de la nicotine à la bouillie bordelaise au moment des traitements contre le Coryneum et la Cloque. Il y a lieu d'insister également sur la nécessité de faire une pulvérisation de bouillie nicotinée au moment du départ de la végétation pour réduire les dégâts causés par le puceron noir et le puceron gris.

Bouillies à employer. - La meilleure bouillie à conseiller pour le traitement contre les pucerons en général est donnée par la formule à base de savon blanc et de nicotine.

Le savon blanc présente, comme on l'a vu, l'avantage d'assurer toujours une mouillabilité parfaite de la bouillie.

La quantité de nicotine, suffisante pour détruire les pucerons, ne suffit pas pour tuer les larves de différents parasites auxiliaires comme celles de Syrphes, de Coccinelles, qui font une grande consommation de pucerons. Le traitement offre donc le double avantage de détruire les parasites tout en conservant les auxiliaires.

VII. - traitements d'Eté

LA TENTHRÈDE LIMACE

Caractères et mœurs du parasite. - Ce parasite a commis, il y a quelques années, d'importants dégâts dans les plantations de Cerisiers de Saint-Rambert-d'Albon (Drôme) et dans diverses plantations de la Vallée du Rhône. Il attaque également les Poiriers.

L'insecte adulte est un Hyménoptère (Mouche à quatre ailes) il sort de terre vers la fin du mois de Mai et pond ses oeufs sous l'épiderme de la feuille ; en général, sous celui de la face supérieure.

La larve ressemble à un petit limaçon gris clair ou noir brillant ; elle dévore le parenchyme de la feuille, en respectant les nervures.

Arrivée au terme de sa croissance, elle descend en terre pour se nymphoser ; il existe en général une deuxième génération dont les larves vivent en Septembre-Octobre.

Traitements. - Le traitement des arbres consiste en une pulvérisation arsenicale aussitôt après l'apparition des premières larves. La dose d'arséniate suffisante pour obtenir de bons résultats est sensiblement plus faible que celle qu'on utilise contre le Carpocapse.

Employer pour le traitement les arséniates de plomb ou l'arséniate de chaux. Lorsqu'on emploiera ce dernier arséniate, il sera prudent d'ajouter 1 kilog. de fleur de chaux à la bouillie.

Le traitement n'est possible qu'avec les appareils à grand travail.

Généralisation du traitement méthodique des vergers contre les insectes et les maladies cryptogamiques

par M. A. PAILLOT

Docteur ès-Sciences, Directeur de la Station de Zoologie agricole du Sud-Est

Au dernier Congrès organisé à Lyon en 1929 par la Compagnie des Chemins de fer P.L.M., j'avais attiré l'attention sur la nécessité d'une organisation rationnelle et uniforme de la lutte contre les parasites des arbres fruitiers. J'avais demandé en outre " qu'on ait enfin une politique des traitements d'arbres fruitiers, mais une politique simple à laquelle puissent se rallier tous ceux qui veulent sincèrement la rénovation de notre arboriculture fruitière ".

J'ignore les mesures qui ont été prises à ce sujet sur l'ensemble du territoire, mais en ce qui concerne plus spécialement les régions qui sont dans le rayon d'action de la Station de Zoologie agricole du Sud-Est, c'est-à-dire la région lyonnaise et les régions fruitières limitrophes y compris l'Auvergne, je suis heureux de constater que la mise en application des principes posés en 1929 est en bonne voie de généralisation. Ce résultat est dû avant tout à l'esprit de collaboration qui n'a cessé de régner entre les services officiels du Ministère de l'Agriculture, représentés par les Directions de services agricoles, la Station de Zoologie agricole et l'Inspection régionale du service de la Défense des végétaux ; les Chambres d'Agriculture, l'Union du Sud-Est des Syndicats agricoles et le Service Agricole de la Compagnie P.L.M.

Les expériences poursuivies pendant plusieurs années avaient eu pour résultat la mise au point de méthodes de traitement dont l'efficacité n'est plus à démontrer aujourd'hui. Est-ce à dire qu'il n'y a plus de progrès à réaliser dans cette voie - L'affirmer serait faire preuve de grande présomption ; les méthodes proposées peuvent être certainement perfectionnées ; ce sera le but des recherches futures ; mais en attendant mieux, il faut se servir des armes dont on dispose ; il est d'ailleurs bien démontré maintenant qu'elles peuvent améliorer considérablement le rendement de nos cultures fruitières. Il y a deux ans, j'ai proposé l'adoption d'une méthode générale de traitement des arbres fruitiers ; cette méthode a fait l'objet d'un tract qui a été répandu à de nombreux exemplaires dans les principales régions fruitières par les soins des Chambres d'Agriculture, de l'Inspection régionale du Service de la Défense des végétaux et de l'Union du Sud-Est des Syndicats agricoles.

J'ai conseillé tout d'abord de traiter les arbres fruitiers au moins une fois par an, à la fin de l'hiver de préférence, avec une émulsion d'huile minérale en bouillie bordelaise. La formule recommandée comporte 10 parties d'huile d'anthracène pour 90 parties de bouillie bordelaise à 2 % de sulfate de cuivre et 3 % de chaux. Cette proportion d'huile est nécessaire lorsqu'il s'agit de traiter des Poiriers et Pommiers recouverts de mousses et lichens et infestés de Cochenilles, mais par la suite, on peut réduire cette proportion à 8 %. De même lorsqu'il s'agit de traiter des Pêchers peu sensibles en général aux attaques de parasites de l'écorce ou de plantes épiphytes, l'emploi d'émulsions faibles à 6 ou 7 % d'huile est suffisante. On a objecté que l'emploi répété de l'émulsion cupro-anthracénique était susceptible de nuire à la santé de l'arbre ; or les expériences qui sont poursuivies depuis 1924, de même que les applications qui remontent déjà à 1925, ont démontré le mal-fondé de cette objection. La seule condition que doive remplir l'huile d'anthracène pour être sans danger pour les arbres, c'est de renfermer moins de 2 % de phénols inférieurs ; les huiles qui sont livrées à la consommation dans nos régions sont bien en dessous de cette limite.

Les brûlures qui ont été constatées cette année dans certaines plantations de Pêchers traitées en automne et même dans la première moitié de l'hiver contre le Coryneum, avaient été attribuées tout d'abord à l'huile d'anthracène. Mais il a été démontré par la suite que seuls les sels de cuivre devaient être incriminés. La sensibilité anormale présentée cette année par les jeunes pousses de Pêcher à l'action des sels de cuivre est due pour une grande part à l'aoûtement défectueux du bois. Cette sensibilité a duré jusqu'en. février ; les traitements effectués en mars n'ont occasionné aucune brûlure. A l'avenir, il sera donc prudent de s'abstenir de traiter en automne les Pêchers lorsque le bois apparaîtra in. suffisamment aoûté ; les traitements effectues en mars avec l'émulsion cupro-anthracénique, outre leur action contre la Cloque, protègent également l'arbre contre les attaques de printemps du Coryneum.

Une excellente mesure à préconiser en hiver, c'est le décorticage des vieux arbres avant la pulvérisation de l'émulsion cuproanthracénique. On détruit ainsi beaucoup de refuges utilisés par divers parasites et de plus, on favorise par ce moyen la pénétration ultérieure de la bouillie dans toutes les anfractuosités du bois,

La pratique régulière des traitements d'hiver a pour effet d'augmenter sensiblement la vitalité de l'arbre, de réduire le nombre des parasites de toutes espèces qui s'attaquent au bois comme aux parties vertes de l'arbre ; mais ils ne dispensent pas des traitements de printemps. Dans le cas des Poiriers et des Pommiers, deux traitements au moins sont indispensables pour obtenir des fruits sains : le premier a pour but d'empoisonner durablement l'œil du fruit, c'est-à-dire la région habituelle de pénétration des jeunes chenilles de Carpocapse à l'intérieur du fruit ; dans certaines variétés, l'œil se ferme quelques jours après la défloraison ; d'où la nécessité de faire le traitement avant ce moment. D'autre part, les attaques de tavelure sont souvent très précoces. Pour toutes ces raisons, le premier traitement doit être fait au plus tard 8 jours après la défloraison. La quantité de liquide à dépenser par arbre pour réaliser l'empoisonnement durable de la cavité de l'œil est beaucoup plus importante qu'on ne le croit généralement. Pour un Poirier de 3 à 4 mètres de haut, il faut dépenser de 5 à 6 litres de bouillie par arbre et par pulvérisation ; pour des pommiers de grosseur moyenne, la dépense s'élève à 20 litres et pour des Noyers, à 60 litres environ. Le deuxième traitement doit être fait au moment où éclosent les premières chenilles de Carpocapse, c'est-à-dire vers la fin du mois de Mai pour nos régions. Mais la loi fixe une limite pour le traitement arsenical des arbres fruitiers (5 semaines après la défloraison pour les Poiriers et Pommiers). Il est incontestable que 16 traitement effectué à la limite extrême fixée par la loi ne peut être efficace contre les chenilles de deuxième génération qui éclosent à partir de ' la fin du mois de juillet. On constate même certaines années un manque d'efficacité des traitements de printemps contre les vers de première génération lorsque ceux-ci éclosent tardivement ; c'est ce qui s'est produit cette année en particulier où les papillons de Carpocapse ont éclos avec un retard de 15 jours à 3 semaines sur une année normale. Une troisième pulvérisation aurait été nécessaire au delà de la limite fixée par la loi. Des traitements arsenicaux supplémentaires seraient également très utiles pour protéger les Pommes contre les attaques de Carpocapse de la génération d'été, mais en l'état de la législation actuelle, ils ne peuvent être envisagés maintenant. En dehors des traitements de base qui doivent être exécutés chaque année et à des époques bien déterminées, il peut être nécessaire de faire des traitements complémentaires en vue de la lutte contre certains parasites occasionnels. Ainsi dans les cas de multiplication anormale des chenilles arpenteuses, il y a intérêt à faire une pulvérisation de bouillie arsenicale avant la floraison ; l'époque la plus favorable est celle où les boutons à fleur se séparent les uns des autres.

S'il y a menace d'invasion de pucerons, on peut ajouter de la nicotine à la bouillie cupro-arsenicale recommandée pour le premier traitement de printemps (300 cent. cubes d'extrait nicotiné. par hectolitre de bouillie).

Enfin j'ai recommandé l'emploi de bandes-pièges en carton ondulé comme mesure complémentaire contre le Carpocapse. Ces bandes sont disposées autour du tronc des arbres vers la fin du mois d'août. Une proportion assez importante de vers se réfugient sous les bandes pour hiverner ; on les relève au début de l'hiver et on les brûlé aussitôt. Il est bon d'aplanir la surface du tronc avant de placer les bandes. La généralisation de cette méthode de lutte aurait pour effet de réduire sensiblement la gravité des invasions de Carpocapse.

L'application méthodique des traitements d'hiver et de printemps a pour conséquence un accroissement notable de la valeur marchande de la récolte fruitière. A titre d'exemple, je citerai le cas d'un propriétaire de la région viennoise qui applique depuis près de sept ans la méthode préconisée par la Station et qui a fait cette année, dans une plantation de 2 hectares environ une récolte de 30.000 kilog. de Poires Williams à peu près indemnes de tavelure et dont la proportion de fruits véreux était inférieure à 5 % Ce magnifique résultat doit être attribué, avant tout, aux traitements insecticides et anticryptogamiques puisque des arbres non traités de la même plantation n'ont eu qu'une récolte médiocre -et de valeur marchande à peu près nulle.

Il y a donc intérêt à propager et à faire appliquer la méthode que j'ai proposée. Comment obtenir sa généralisation rapide à l'ensemble des cultures fruitières - Mais d'abord, il convient de s'entendre sur un certain nombre de principes généraux :

1° L'arboriculteur a intérêt à préparer lui-même ses bouillies, afin de réduire le plus possible le prix de revient des traitements et d'obtenir le maximum de résultats contre les parasites ; une bouillie préparée au moment de l'emploi est, en effet, toujours plus efficace qu'une bouillie préparée longtemps à l'avance ;

2° La pulvérisation des arbres fruitiers doit être réalisée dans le minimum de temps tout en répondant aux conditions exposées analogues à ceux qui sont utilisés depuis de longues années en Amérique. En 1926, pendant le Congrès des maladies des plantes organisé à Lyon par la Compagnie P.L.M., j'ai affirmé que le problème du traitement des arbres fruitiers était plus un problème d'appareil qu'une question de bouillie. Les constructeurs ont enfin compris qu'il y avait intérêt pour eux à étudier la fabrication d'appareils conçus spécialement pour le traitement des arbres, les pulvérisateurs à dos d'homme ne répondant pas aux conditions économiques actuelles. Il suffit de comparer la première exposition d'appareils organisée à l'Ecole d'arboriculture fruitière et de viticulture d'Écully à l'occasion du Congrès de 1929 et l'exposition qui s'est tenue, au printemps dernier, pendant la semaine de la machine agricole, pour mesurer tout le chemin parcouru depuis trois ans.

Les démonstrations publiques ont contribué certes à faire connaître les avantages des nouveaux appareils à pulvériser, mais il faut reconnaître aussi que les Offices agricoles et les Chambres d'Agriculture ont joué un rôle important dans la mise en train de la nouvelle technique de pulvérisation, soit en donnant des subventions pour l'achat des appareils, soit en organisant des expositions. A cet égard, le concours-exposition organisé par la Chambre régionale d'agriculture de Lyon doit être considéré comme une initiative des plus heureuses ; la diversité des appareils présentés, le nombre des visiteurs, montrent bien que le monde agricole, comme le monde industriel, suivent avec intérêt les transformations profondes de la technique arboricole. Dès maintenant, les arboriculteurs sont assurés de trouver sur le marché des types d'appareils susceptibles de faciliter dans une grande mesure le travail de pulvérisation des arbres. Et c'est là une constatation réjouissante pour l'avenir de notre production fruitière.

Malheureusement les appareils à grand travail, les moto pulvérisateurs surtout, sont d'un prix relativement élevé et beaucoup de petits propriétaires ne peuvent songer à en faire maintenant l'acquisition. D'un autre côté, l'achat des produits nécessaires à la préparation des bouillies pose des problèmes d'organisation qui ne sont pas tous résolus, bien que les syndicats agricoles aient déjà fait beaucoup pour faciliter leur diffusion. On peut donc se demander s'il ne serait pas opportun d'envisager la création de groupements dans chaque centre fruitier, groupements de propriétaires ou d'associations de propriétaires effectués uniquement en vue du traitement des arbres fruitiers. L'achat des produits insecticides et anticryptogamiques au lieu même de fabrication et par grosses quantités, réduirait très sensiblement le prix de revient des bouillies tout en donnant de sérieuses garanties sur la valeur de ces produits. D'autre part, il serait possible d'acheter des appareils en commun et d'organiser pratiquement le traitement rapide des différents vergers de la communauté. Une telle organisation pourrait être mise assez rapidement sur, pied avec le concours des services officiels du Ministère de l'Agriculture ; elle contribuerait grandement à l'amélioration de notre production fruitière, car, ce dont nous souffrons le plus à l'heure ,actuelle, c'est d'un défaut d'organisation. Aux arboriculteurs de montrer qu'ils sont décidés à marcher de l'avant.

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