Le Trésor des Chartreux






Brève histoire de Villeneuve



Vue de Villeneuve par Corot
Vue de Villeneuve par Corot



L'histoire de Villeneuve-lez-Avignon ne remonte guère au-delà du premier siècle de notre ère, du moins pour ce qui en est connu. Plutarque, dans "la vie d'Hannibal", cite les Volces, un peuple gaulois, comme les plus anciens habitants de cette région des bords du Rhône. Pline, Ptolémée, Strabon, en parlent comme d'une nation très riche parmi les Gaulois.

Et c'est à peu près tout. Il faut attendre l'an 62 pour apprendre que Sainte Marthe, sainte patronne d'Avignon, "ressuscite" un berger de Villeneuve tombé accidentellement dans le Rhône où il s'était "noyé". En ce temps là, les résurrections étaient plus fréquentes qu'aujourd'hui.

A la même époque, les eaux du fleuve entouraient le mont Andaon. Elles baignèrent sa base orientale jusqu'au milieu du 18 ème siècle, comme en font preuve de nombreuses estampes. Il s'établit même, dans une anse du fleuve, au sud de la cité, un port qui connut une certaine importance et resta actif jusqu'au 16 ème siècle. On n'en trouve plus trace aujourd'hui. Au XVIIIème siècle, les eaux du fleuve se retirèrent de sept cents mètres à l'Est, formant la riche plaine de l'Abbaye. Avignon voisine et rivale de Villeneuve, était elle aussi cernée par deux bras du Rhône qui en faisaient presque une île.


 Avignon cerné par le Rhône
Avignon cerné par le Rhône



Avant les travaux qui devaient régulariser son cours, les crues du Rhône étaient redoutées, à juste titre, par ses riverains de Villeneuve et d'Avignon. Certaines de ces crues catastrophiques frappèrent à ce point les imaginations qu'on voulut en perpétuer le souvenir. C'est ainsi que l'on peut encore voir, en divers lieux de ces deux cités, la marque gravée des plus hautes eaux qui, dans les rues, atteignaient la hauteur d'un homme.

C'est sur le Puy Andaon, en un bourg modeste nommé Bourg Saint-André, que se trouve le berceau de l'actuelle Villeneuve. Ces quelques maisons, actuellement ruinées, empruntèrent leur nom à la riche Abbaye bénédictine de Saint-André, fondée au 6 ème siècle, à proximité du tombeau de Sainte Casarie qui mena en ces lieux une vie humble et retirée. Le buste-reliquaire de la Sainte a été volé. Sa dalle funéraire, disparue à la Révolution, a été retrouvée et reconstituée en partie. On ne sait pas grand-chose sur les origines de Casarie.


Reliquaire de Ste Casarie - Volé
Reliquaire de Ste Casarie - Volé



Selon la tradition, elle aurait été fille d'un roi d'Aragon, souverain wisigoth de Tarragone. Mariée puis séparée de son époux, elle se retira sur la montagne Andaon pour y vivre dans une grotte. Elle meurt en 587, "au milieu de la nuit, le 6 des ides de décembre, quarante six ans après le consulat de Basile le Jeune, la deuxième année du règne de Childebert ", comme en témoigne une inscription latine relevée sur sa pierre tombale, conservée dans l'église paroissiale de Villeneuve, après avoir longtemps servi de montant de cheminée dans une habitation particulière. On ne sait pas à quel âge elle mourut.

A sa mort, la grotte où elle avait trouvé refuge devint un lieu de pèlerinage, car elle renfermait le tombeau de la sainte. Quelques moines de l'Ordre de Saint Benoît s'installèrent à proximité du sanctuaire dont ils assurèrent la garde et tirèrent des subsides. Il s'ensuivit la fondation de l'Abbaye de Saint André, à la fin du 6 ème siècle. Ce monastère resta prospère jusqu'à la Révolution de 1789, après avoir été détruit par les Sarrasins en 734, délivré par Charles Martel et totalement rétabli entre 789 et 989.

L'abbaye bénédictine jouit pendant plusieurs siècles, dans les régions méridionales, d'une grande renommée, due tant à ses immenses richesses qu'à la science et aux vertus de ses religieux. Elle reçoit de nombreuses donations. En particulier, les Comtes de Toulouse la comblent de faveurs. Seigneurs territoriaux de la région, ils lui cédent la jouissance du fief formé par le Bourg Saint André et les Angles, petit hameau situé sur une hauteur proche. L'un d'eux, Raymond IV, lui confirme ce legs en 1088. Au 14 ème siècle, elle possède des biens dans treize diocèses.


Abbaye Saint-André
Abbaye Saint-André



Le monastère hébergera parfois, au Moyen-Age, des papes ou des souverains. Urbain II s'y arrête au retour du concile de Clermont qui marqua le début des croisades. Il déclare prendre l'abbaye sous sa protection. Gélase II, fuyant l'empereur germanique Henry V, y trouve asile en 1118 et y consacre lui-même l'église qui vient d'être achevée. En 1226, Louis VIII le Lion est l'hôte des religieux pendant les trois mois que dure le siège d'Avignon.

Au cours de sa longue existence, l'abbaye connaît des abbés qui se distinguent par l'austérité de leur vie, leur piété, leur éloquence, tels Saint-Pons (1063-1087), ou leur érudition, comme César Branca (1572-1597).

Le petit bourg de Saint-André, habité par les vassaux du monastère, groupe, dès le VII ème siècle, ses quelques maisons auprès des bâtiments conventuels. Il a comme église la chapelle Notre Dame de Belvezet bâtie entre 1150 et 1175 sur le point culminant du Mont Andaon où elle subsiste encore. D'autres maisons commencent ensuite à s'échelonner le long de la pente sud-ouest de la butte et constituent l'actuel quartier du Bourguet.

Enfin, lorsque les deux rives du Rhône sont reliées par le pont Saint-Bénézet, achevé en 1186, (sa célébrité est due au fait qu'il fut à la fois une admirable œuvre d'art et le premier pont de pierre franchissant le Rhône en aval de Lyon), une petite agglomération s'établit en tête de passage : ce sera le futur quartier de la Tour.

Du XI ème au XIII ème siècles, la seigneurie de Saint-André, qui relève toujours du comte de Toulouse, grand vassal de la couronne, possède de l'autre côté du Rhône, avec la commune d'Avignon, un puissant et dangereux voisin qui prétend avoir des droits sur elle. Dès 1154, le bourg de l'abbaye tombe sous la dépendance des avignonnais.

L'Abbé tente à plusieurs reprises de se soustraire à ce joug, mais ses efforts restent vains. Après l'échec d'une ultime tentative, en 1213, il doit reconnaître l'autorité de la Commune d'Avignon et satisfaire à ses exigences. Parmi les conditions imposées, figure la démolition des fortifications qui entourent le Mont Andaon.

Cependant, le triomphe des Avignonnais est de courte durée. En 1226, le roi Louis VIII, dont le règne très court (trois ans, trois mois et trois semaines), fut tout occupé par sa lutte contre les Anglais installés au Sud-Ouest et contre la dynastie toulousaine encore très puissante dans le midi, vint en Provence prendre possessions des territoires que ne peut conserver Amaury, fils de Simon de Montfort le vainqueur des Albigeois. Avignon ose résister au puissant capétien. Le roi assiège la ville et vient à bout de sa résistance après trois mois d'une lutte sans merci. La ville a désormais perdu sa superbe en même temps que l'indépendance communale.

Pendant le siège, Louis VIII est l'hôte de l'abbé de Saint-André qui profite de la présence du souverain pour s'en faire un allié en lui proposant de devenir co-seigneur de Saint-André et des Angles. Le traité de pariage est conclu en septembre 1226. Le bourg et le monastère sont désormais couverts par la haute protection royale et pourront échapper ainsi à la tutelle d'Avignon.

Le traité devait être renouvelé le 11 juillet 1292 par Philippe le Bel qui, reconnaissant la valeur stratégique de la région du Puy Andaon placé à la frontière de ses états, au débouché de l'un des rares ponts du Rhône, décide de faire du bourg Saint-André, la clé du Languedoc et du royaume de France du côté de l'Orient.

Aussitôt après la conclusion du second acte de pariage, le roi donne l'ordre de construire une forteresse destinée à commander le passage du pont Saint-Bénézet. C'est ainsi que s'élève, de 1293 à 1307, une citadelle dont ne subsiste plus aujourd'hui que des fondations et le puissant donjon connu sous le nom de tour Philippe le Bel. La garnison des soldats établis dans la forteresse avait droit de regard sur les mouvements qui se produisaient autour du Palais des Papes d'Avignon. Ce voisinage découragera longtemps les pontifes avignonnais de tout velléité de fuite.

Dans le même temps, par une ordonnance faite à Paris en mars 1293, le roi fonde Villeneuve-Saint-André. La charte de fondation édicte, entre autre, que les habitants sont " libres et exempts de taille, subsides, corvées et réquisitions d'aucune sorte, de droits de péage par terre et par eau, d'impôts, les droits sur le sel exceptés". La cité est gratifiée d'un marché par semaine et de deux foires annuelles d'une durée de trois jours chacune.

Sa population s'accroît rapidement. Au 14ème siècle, pendant le séjour des papes à Avignon, comme le disent les gens du crû (et non "en Avignon", parisianisme pédant), de 1309 à 1378, la ville connaît une fortune étonnante.

En effet, comme sa voisine, Villeneuve devient résidence des papes, des cardinaux, des prélats de la cour pontificale, qui y édifient des livrées (sortes de palais fortifiés), y fondent des couvents, des églises. En 1333, le cardinal Arnaud de Via institue la collégiale Notre Dame qu'il dote richement. En 1356, le cardinal Pierre Aubert devenu pape sous le titre d'Innocent VI, fonde la Chartreuse du Val de bénédiction. Il y fait construire le mausolée où il sera inhumé.

Les rois de France se transportent souvent à Villeneuve et, particulièrement, Jean le Bon, ce roi aux malheurs exemplaires, fait prisonnier par les Anglais à Poitiers et qui obligea ses sujets à se saigner aux quatre veines pour réunir les trois millions d'écus d'or de rançon réclamés par ses geôliers pour sa libération. Ce roi fit de fréquents séjours à Villeneuve pour obtenir des subsides du pape afin de mener sa lutte contre les Anglais.

Des souverains étrangers y logent parfois : en 1348, c'est la reine Jeanne de Naples ; en 1356, l'Empereur d'Allemagne, Charles VI ; en 1386-1387, Marie de Blois, reine de Sicile.

Plusieurs traités importants pour la France sont négociés à Villeneuve. En 1343, Humbert II, dernier dauphin du Viennois, y cède à la couronne son domaine du Dauphiné. En 1349, Jacques II, roi de Majorque, y signe le traité qui donne au roi de France la seigneurie de Montpellier.

Villeneuve connaît cependant quelques misères en ce 14 ème siècle si brillant pour elle. Elle est ravagée plusieurs fois par la peste ; et particulièrement en 1348, année de la Grande Peste Noire. En cette tragique circonstance, Clément VI suivant les conseils de son médecin Guy de Chauliac, s'enferma dans son Palais, isolé de sa cour et de ses serviteurs, vivant entre deux brasiers. Et il survécut malgré les terribles ravages causés autour de lui par le fléau (Cent évèques et neufs cardinaux de la cour pontificale périrent de ce mal). Pape décrié, il intervint cependant pour sauver les nombreux Juifs d'Avignon que la populace voulait égorger sous prétexte qu'en empoisonnant les puits, ils auraient été cause du terrible mal.

Puis Villeneuve tremble d'effroi aux bruits terribles qui précédaient l'approche des quarante mille sanguinaires routiers aragonais. Chargé par le roi de France de débarrasser le pays de ces pillards criminels, Du Guesclin menait les Grandes Compagnies à Avignon pour y être bénies par le pape (qui en profita pour les excommunier), avant de les conduire guerroyer en Espagne où elles furent exterminées. A cette époque d'insécurité, la Chartreuse s'entoure de murailles et les moines cachent leurs richesses ; l'enceinte du fort Saint-André est complétée et les imposantes tours jumelles édifiées.


Populations victimes des Grandes Compagnies
Populations victimes des Grandes Compagnies



Indésirables sur le sol avignonnais, les Grandes Compagnies établirent leur immense campement dans les environs du Bourg Saint-André, en un lieu qui, depuis, se nomme le Camp de Bataille.

Bien que préjudiciable à la cité, le départ des papes d'Avignon, devenu définitif en 1418, n'arrête pas son essor. Elle continue à jouir d'une grande prospérité due au développement de la Chartreuse et de l'Abbaye Saint-André, dont le rayonnement ne cesse de croître et qui drainent d'immenses richesses, à l'activité de son port où s'effectue un important commerce, à l'attention bienveillante des rois de France qui l'honorent toujours de leurs visites et lui prodiguent leurs faveurs. Grâce à eux, elle continue à être un lieu privilégié, un centre commercial, administratif et militaire non négligeable de la province.

Ses habitants demeurent fidèles aux souverains. Quand le royaume est déchiré par la féroce rivalité des Armagnacs et des Bourguignons, Villeneuve, contrairement à l'exemple donné par la majeure partie du Languedoc, qui épouse la cause du Duc de Bourgogne allié des Anglais, se range aux côtés du roi légitime, Charles VII, et du Dauphin. En 1417, l'évêque de Gap, partisan de la cause royale, retranché dans le fort Saint-André et dans la citadelle de la Tour, résiste avec succès aux assauts du Comte De Chalon, rallié à la faction bourguignonne. (Certains pensent qu'un souterrain reliant la Tour au Fort aurait été creusé à cette occasion. D'autres affirment qu'il existait déjà et qu'on peut encore le visiter. Mais son entrée se trouve dans une propriété privée, ce qui est le cas pour les nombreux souterrains de Villeneuve).

Les luttes religieuses n'ont qu'une faible répercussion dans Villeneuve qui demeure attachée au catholicisme. On y signale quelques troubles en 1561, au cours d'une réunion protestante dispersée par une partie de la population. Cet épisode, qui fit deux morts chez les protestants, resta sans lendemain. L'année suivante, la cité repousse avec succès une violente attaque du sanguinaire baron des Adrets.

La paix publique restaurée, la ville connaît à nouveau la prospérité. Dès la fin du 16 ème siècle, mais surtout au 17 ème, la cité s'embellit par l'édification d'hôtels particuliers, tels l'hôtel dit "de Saint-Pierre-du-Luxembourg" et celui dit "du Prince-de-Conti". L'église Saint-Pons qui menaçait ruine, est démolie et reconstruite en 1652. Les religieux Récollets s'installent à Villeneuve et y bâtissent leur monastère.

Les Chartreux transforment leur Maison dont la porte monumentale est érigée en 1649, d'après les plans de Royers de la Valfrenière.

Les embellissements se poursuivent au 18 éme siècle grâce à la présence d'habiles artisans. Dans la ville était né en 1638, un architecte dont la renommée devait dépasser le cadre régional : J.B. Franque. La cité lui doit la chapelle des Pénitents Gris et la rotonde connue sous le nom de fontaine Saint-Jean, dans le cloître supérieur de la Chartreuse.

Les Chartreux font procéder à d'importants aménagements dans leur monastère qui devient un véritable musée où sont rassemblés œuvres d'art, objets de culte, manuscrits rares, imprimés précieux, ainsi qu'un riche médaillier, tandis que l'or s'entasse dans la cave du Prieur. De leur côté, les Bénédictins de Saint-André, également détenteurs d'ouvrages nombreux et choisis, entreprennent de grands travaux de reconstruction dans les bâtiments conventuels.

A la veille de la Révolution, Villeneuve occupe une place importante en Languedoc. Elle jouit encore des prérogatives non négligeables accordées par son fondateur, confirmées et augmentées parfois par les rois successifs. Elle possède une maîtrise générale des ports, un bureau général des traités forains (douanes), une chambre des gabelles, un entrepôt des tabacs, un bureau des domaines, des postes. Elle est lieu de résidence d'un contrôleur général des Fermages de France. L'armée royale y est représentée par la garnison du fort Saint-André et de la Tour du Pont.

La Révolution porte un coup fatal à la cité dont disparaissent les prérogatives, la garnison, les juridictions spéciales, les prospères établissements religieux ; le Chapitre Collégial de Notre Dame est supprimé. Les trois couvents d'hommes et les deux de femmes sont fermés. Les biens ecclésiastiques découverts sont inventoriés et mis à la disposition de la Nation.

Les bibliothèques des ci-devant Chartreux, Bénédictins et Récollets qui comptent plus de vingt mille volumes et trois mille manuscrits, connaissent l'abandon et le pillage. Les archives sont dispersées et les œuvres d'art auraient sans doute disparu si le chanoine Lhermitte, ancien bénéficier de la Collégiale n'avait réussi à mettre en sûreté la plupart d'entre elles.

Les cloches, les médailliers, monnaies et reliques trouvés sont envoyés à la fonderie. On cède à un prix dérisoire les meubles et les domaines des ci-devant religieux. Les églises de l'Abbaye sont livrées aux démolisseurs. Les bâtiments de la Chartreuse, divisés en 17 lots, connaissent de nouveaux possesseurs qui les transforment ou les laissent, faute d'entretien, s'acheminer vers la ruine.

Les églises et chapelles de la localité sont désaffectées les unes après les autres. La "Société des Amis de la Liberté" tient séance dans l'église Saint-Pons, devenue plus tard un entrepôt de charbon. Cette société, devenue en 1794 le "Club des Sans-Culotte" obtient la transformation de la Collégiale en Temple de la Raison.

Au moment des plus graves périls, quand la Terreur sévit en France, les réquisitions, perquisitions, levées d'hommes se succèdent dans la cité. De nombreux suspects sont incarcérés dans les vastes salles de la Tour Philippe le Bel et des deux tours jumelles du Fort, où des graffitis témoignent de leur séjour.

Villeneuve, cependant, ne paie aucun tribu à la guillotine. Bien que les passions politiques y soient exacerbées, elle est accueillante un moment à de nombreux Avignonnais qui viennent lui demander asile quand de violents troubles les contraignent à quitter leur cité. C'est avec quelque fierté que sa municipalité pouvait se prévaloir auprès des administrateurs du département du Gard, en novembre 1797, de ce que le sang n'avait jamais coulé dans la ville.

Après la tourmente, Villeneuve, ancienne cité cardinalice et papale, dépouillée de tout ce qui avait contribué à sa gloire, devenu un village pauvre et délabré, se voit réduite au modeste rôle de chef-lieu de canton longtemps dépeuplé et de banlieue d'Avignon. La commune a contribué à l'appauvrissement de son patrimoine artistique. Sur la place Jean Jaurès on pouvait voir une belle fontaine qui a disparu. La collégiale Notre-Dame possédait de grandes orgues soutenues par des colonnes de marbre vert. Là aussi tout a disparu, vendu à des particuliers. Peut-être les colonnes de marbre se trouvent-elles dans l'Abbaye.

Nota : En 1971, dans le cadre de la restauration de la collégiale, l'instrument fut démonté par Alain Sals. Puis la commune de Villeneuve-lès-Avignon commanda à Sals la reconstruction de cet instrument, désormais destiné à la chapelle des pénitents gris. Après onze ans de stockage, l'instrument fut désaffecté par arrêté préfectoral ! En 1991, la commune de Villeneuve-lès-Avignon céda pour 300 000 frs (45 734 euros) l'orgue de la Collégiale (fabriqué en 1582 par Pierre Marchand), à François Delangue. Celui-ci le revendit à la paroisse d'Hagondange-centre et le remonta durant l'été 1992.

De nos jours, Villeneuve n'est plus qu'une cité-dortoir dont les habitants, installés à la périphérie toujours plus vaste du bourg, pour faire nombre et accroître sa démographie à coups de projets immobiliers réalisés à l'emporte-pièce dans une belle garrigue vouée à disparaître, vont travailler dans la métropole voisine, pour revenir au soir dormir dans les habitations qu'ils ont fait construire ou qu'ils ont achetées souvent au prix fort à Villeneuve.

La cité déchue d'un rang dont elle a oublié le souvenir, s'endort chaque année pour un long hiver maussade et ressuscite aux beaux jours pour participer, à sa mesure, aux festivités estivales de la Provence, dont le très couru Festival d'Avignon qui a lui aussi, depuis longtemps perdu son lustre et ses fastes d'antan. Certaines mauvaises langues ne disent-elles pas que, in ou off, on n'y produit plus que des pitreries, du mauvais théâtre de patronage laïque, ou, au mieux, des pièces classiques défigurées par des mises en scène et des décors souvent grotesques, preuves de la calamiteuse dégénérescence des arts, dont on ne sortirait que par une nouvelle Renaissance où les imposteurs n'auraient plus droit de cité ? Et puis, trop de théâtre ne tue-t-il pas le théâtre ?


 Le Pont Saint Bénézet et citadelle de la Tour
Le Pont Saint Bénézet et citadelle de la Tour