Sandro Botticelli
(1444 – 1510)
A la recherche de la beauté perdue
 
Considérés comme des artisans, au temps de Botticelli les peintres bénéficiaient d'un statut social qui n'était guère différent de celui des cordonniers ou des armuriers. Ils ne peignaient pas seulement des tableaux et des fresques mais décoraient aussi les plateaux que l'on offrait aux femmes qui venaient d'accoucher, des paniers pour des paysannes, des cartons. Un homme de très bonne humeur...
Adoration des Mages, vers 1476, détail.
C'est en peignant une bannière de tournoi que Botticelli entre en relation avec la famille Médicis. Contrairement aux peintres contemporains, les peintres de Quattrocento travaillaient presque toujours sur commande. C'est le client qui indiquait le sujet et déterminait les détails que l'œuvre devait contenir. Sans les commandes des Médicis et sans leur amour des lettres et des arts Botticelli n'aurait certainement pas eu l'occasion d'exprimer pleinement sa passion pour la beauté féminine. Un portrait de famille...
Adoration des Mages, vers 1476
Grâce à leur mécénat il a exécuté Pallas et le Centaure, Mars et Vénus, et surtout le Printemps, et la Naissance de Vénus. Malgré la beauté de certaines de ses Madones, Madone dite du Magnificat, 1483, sans ces quatre tableaux, sa place dans l'histoire de l'art ne serrait certainement pas celle qu'il occupe aujourd'hui. En regardant les visages féminins de ces tableaux plusieurs questions s'imposent. Madone la Magnifique...
Madone dite du Magnificat, 1483
Leur sujet mythologique a été inspiré par des stances de Politien ou plutôt expliqué par cet humaniste et poète en titre des Médicis, et précepteur des enfants de Laurent de Médicis.
La question qui se pose concerne la beauté de ces femmes. D'où Botticelli a-t-il tiré son inspiration? Les historiens de l'art sont presque unanimes pour affirmer que ce type féminin n'est pas né de l'observation directe du réel, que ces corps élancés aux longues jambes, aux hanches droites et aux longs cheveux blonds sortent du profond inconscient de Botticelli, c'est-à-dire que c'est la femme idéale "qui hantait ses rêveries".
Au temps de la Renaissance italienne la femme devait être plutôt ronde...
Le Printemps, vers 1478
Selon le Dictionnaire générale Larousse la rêverie est définie comme: "Etat de distraction pendant lequel l'activité mentale n'est plus dirigée par l'attention et s'abandonne à des souvenirs, à des images vagues; objet qui occupe alors l'esprit." Et pourquoi ces vagues souvenirs des Botticelli, ne viendraient-ils pas d'une réminiscence, d'une image profondément ancré dans sa mémoire, celle d'une femme rencontrée par hasard dans la rue ou dans la cour d'un seigneur florentin, dont la beauté a marqué une fois pour toute son idéal du beau et du féminin? Dans ces chefs-d'oeuvre tout est en fonction de la beauté...
La Naissance de Vénus, vers 1486
Si l'on regarde encore une fois l'Adoration des Mages, on s'aperçoit que dans ce tableau, composé de portraits des contemporains de Botticelli, l'homme tout à droite, tourné vers le spectateur, est pratiquement le seul homme blond. C'est Botticelli lui-même.

Je ne peux m'empêcher de revenir aux lignes précédentes et de suggérer une hypothèse, il se peut un peu, simpliste, fondée sur le fait que les Celtes envahirent l'Italie au IVe siècle av. J. C. pour se fixer dans la plaine de Pô. Si l'on continue à tourner les pages de l'histoire on peut voir qu'au VIe siècle les Lombards "les longues barbes", peuple originaire pense-t-on de Scandinavie, conquirent l'Italie. Leur dynastie ne fut renversée qu'en 774 par Charlemagne. Mais ils restèrent présents, solidement installés dans le nord pour s'imposer durant tout le reste du Moyen-Âge en Europe comme banquiers et financiers des foires. Il est donc fort possible que les visages du Printemps, de la Naissance de Vénus et de ses Madones doivent leur physionomie à une inspiration idéalisée ou une rêverie, si l'on veut, fondée sur des visages réels que Botticelli a pu rencontrer.
Dans ces chefs-d'oeuvre tout est en fonction de la beauté...
Portrait d'un jeune homme tenant une médaille, vers 1475
En 1873 dans la Villa Lemmi on découvre par hasard sous un badigeon deux fresques magnifiques de Botticelli dont une met en scène une Jeune femme florentine devant Vénus et les grâces.

Botticelli qui était excellent portraitiste Portrait d'un jeune homme tenant une médaille, présente la scène où la jeune épouse est accueillie par Vénus et ses Trois Grâces. La différence entre la jeune femme et les personnages allégoriques n'est pas énorme. D'ailleurs, même aujourd'hui, surtout dans le nord de l'Italie on peut rencontrer sans difficultés des Madones de Botticelli dont les ancêtres ont pu être aussi bien les Celtes que les Lombards.

Dans ces chefs-d'oeuvre tout est en fonction de la beauté...
Jeune femme florentine devant Vénus et les grâces, 1486
Mais ces charmants visages capables d'évoquer en nous des sensations propres à la poésie, disparurent un jour des tableaux de Botticelli. On peut affirmer, non sans raison, que, son idéal du beau atteint, il ne lui était plus possible d'avancer et que ce fut la cause de l'absence ultérieure de toute évolution dans son art. L'idéal...
La Naissance de Vénus, vers 1486, détail
On peut dire aussi que cet artiste de nature extrêmement sensible et vulnérable connut dans sa quarantaine l'influence d'un petit homme au profil de bouc, Girolamo Savonarole. Il était dominicain et jouissait d'une grande popularité pour les sermons où il blâmait la corruption des Florentins, leur débauche et leur amour d'argent et du luxe. Il annonçait même les calamités qui allaient s'abattre sur la ville pécheresse - l'entrée triomphale de l'armée française de Charles VIII dans Florence parut confirmer sa prophétie. Entre 1494 et 1497 il devint un véritable chef politique de la ville et imposa une "dictature théocratique". Ses partisans, surnommés les Piagnoni (les Pleurnichards) avaient pour adversaires les Arrabbiati (les Enragés). Il n'est pas sûr que Botticelli fut un piagnone. En tout cas il a du être cruellement tiraillé. D'une part les Médicis, ses amis, à qui son art devait tant, avaient été les premiers à être attaqués par Savonarole. D'autre part il approuvait les attaques contre les vices de ses concitoyens et leur manque de foi.

En 1497 le pape Alexandre VI excommunia le prédicateur et sa popularité en souffrit. En 1498 il fut arrêté et le 23 mai il mourut pendu.

Les œuvres de cette période témoignent d'une grande dévotion du peintre retournant dans son œuvre à la pureté des primitifs, Dernière communion de Saint Jérôme.

Une de ses dernières oeuvres...
Dernière communion de Saint Jérôme, vers 1495
Si l'on revient à l'anecdote du début du texte, on peut constater que ses dernières années furent assez sombres et que par la suite Botticelli n'eut pratiquement pas de disciples. Il meurt en 1510 sans laisser d'œuvres réalisées dans la dernière décennie de sa vie. Son art fut négligé pendant plusieurs siècles. Les recherches des artistes qui le succédèrent allaient dans d'autres chemins. Il ne fut tiré de l'oubli qu'à la fin du XIXe siècle par un essai de Walter Pater, critique anglais d'origine hollandaise auteur de la célèbre formule "l'art pour l'art!" qui s'adapte si bien à la peinture de Botticelli.  
Page d'accueil - Apelle Botticelli Dali Drljaca Giotto Manet Munch Picasso Utrillo Valadon

Created & maintained by
 
©Copyright 1999 MAGAZIN PETAR - multi expression