Nous avons vu la meilleure façon de peupler un pigeonnier.
Nous allons maintenant examiner de quelle manière un élevage doit être conduit
pour en obtenir le meilleur rendement.
Nous considérons, pour commencer, que les couples sont formés
au gré de l’éleveur qui se sera inspiré des indications données dans le numéro
de Novembre. Le colombier en pleine activité retentit des joyeux battements
d’ailes des mâles qui, sans arrêt « chassent au nid », c’est-à-dire
harcèlent impitoyablement les femelles qui s’écartent trop à leur gré de la
case attribuée au couple.
La pauvre pigeonne n’a même plus la liberté de prendre sa
nourriture, car, aussitôt que son irascible époux l’aperçoit hors de la chambre
nuptiale, il la poursuit sauvagement et la force, à grand renfort de coups de
bec, à rentrer au logis.
Cette odieuse attitude ne dure heureusement que quelques
jours, car elle cesse dès la ponte du premier œuf qui a lieu généralement au
cours de la nuit. La femelle s’intéresse assez peu à cet œuf et ne commence à
couver sérieusement qu’à partir de la ponte du second qui s’effectue le
surlendemain dans le milieu de l’après-midi.
C’est alors que l’on peut admirer cet amour maternel qui
maintiendra sur son nid cette brave bête environ vingt-deux heures par jour,
car elle ne consentira à céder la place au mâle qu’environ deux heures tous les
après-midis.
Elle emploiera ce temps de repos à se nourrir, se désaltérer
et se baigner surtout, si un manque d’hygiène coupable a laissé aux divers
parasites l’occasion de se multiplier au point d’envahir le nid.
L’incubation des pigeons dure dix-sept jours à compter de la
ponte du second œuf. Les petits naissent à quelques heures d’intervalle ;
ils sont disgracieux, très faibles et recouverts de duvet jaune, quelle que
soit la couleur des parents.
C’est alors que se révèle l’admirable mécanisme de
l’alimentation des pigeons. Depuis plusieurs jours, s’est formée une sorte de
bouillie liquide dans le jabot des parents. Cette bouillie est au point dès le
dix-septième jour d’incubation et sert à la nourriture des jeunes dès le second
jour de leur naissance.
Elle s’épaissit de jour en jour en une progression
constante, ce qui fait qu’elle s’adapte aux exigences stomacales des jeunes au
fur et à mesure de leur croissance, jusqu’à devenir un mélange de graines à
demi digérées, puis enfin de graines normales que les parents donnent à leurs
petits presque aussitôt qu’ils les ont eux-mêmes absorbées.
Cette nourriture est déglutie par les parents dans le bec
des petits qu’ils ont pris délicatement entre leurs mandibules. Cette
déglutition est provoquée par de violentes contractions accompagnées d’un
frémissement du corps qui peuvent paraître pénibles, alors qu’ils ne
correspondent en réalité qu’à l’allaitement des mammifères.
Au bout de six à sept jours, les jeunes déjà gaillards et
bien d’aplomb dans leur nid de plâtre commencent à prendre leurs couleurs. Ce
sera le moment de les baguer. Nous verrons comment procéder à cette opération.
Le Cravaté Chinois.
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