Accueil  > Années 1940 et 1941  > N°597 Mars 1940  > Page 171 Tous droits réservés

Causerie vétérinaire

La bronchite du cheval.

Due à l’inflammation de la muqueuse des bronches, cette affection peut revêtir deux formes, l’une aiguë, l’autre chronique. La première est plus fréquemment observée chez les jeunes chevaux et reconnaît pour causes, le plus souvent, le refroidissement brusque et surtout humide (pluie, sueur, courants d’air), exerçant son action sur des animaux jeunes, non entraînés, principalement au cours des saisons à brusques variations atmosphériques (printemps, automne).

La bronchite aiguë peut aussi résulter de la propagation d’inflammations de voisinage (angine, coryza), ou être due à une affection générale dont elle n’est qu’une manifestation (gourme). Les poussières irritantes, les inhalations de fumées d’incendie, les gaz toxiques, peuvent aussi la provoquer.

L’affection débute par une réaction fébrile intense suivie bientôt de tristesse, d’abattement, de refus d’aliments, les boissons froides étant recherchées. Pendant que les mouvements respiratoires et circulatoires s’accélèrent, la température rectale monte à 38°,5, 39°, accompagnée bientôt d’une toux quinteuse, sèche, forte et sonore.

En général, au bout de deux à quatre jours, les symptômes s’amendent, l’appétit renaît, la toux devient grasse et humide, et s’accompagne d’un jetage muqueux, puis muco-purulent. Puis, peu à peu, la température baisse, la toux devient plus rare, le jetage moins abondant, l’appétit revient et, avec lui, la convalescence, qui est toujours longue et demande une hygiène rigoureuse, une rechute étant toujours possible. En somme, la bronchite aiguë est une affection peu grave en général ; mais c’est une maladie à récidives qui, parfois, passe à l’état chronique ou se complique de pneumonie.

La bronchite Chronique, ou catarrhe bronchique, est souvent provoquée par des refroidissements répétés, ou est consécutive aux inhalations prolongées de poussières irritantes. On l’observe surtout sur les chevaux âgés, débilités et atteints de maladie du cœur et du poumon. Elle se traduit par une toux grasse, quinteuse, de la mollesse, de l’essoufflement rapide, de la perte de l’appétit, de l’irrégularité de la respiration et de l’accélération des battements cardiaques. Arrivée à cette période, la respiration devient brève, difficile, et l’animal est bientôt incapable d’assurer aucun service, l’affection prenant les caractères de l’emphysème pulmonaire, vulgairement la pousse.

TRAITEMENT.

Bronchite aiguë.

— Tenir le malade au repos dans une écurie bien aérée et à température douce ; l’éloigner de l’étable à cause de l’irritation provoquée par les vapeurs ammoniacales provenant des déjections et urines de l’espèce bovine. Lui donner des boissons tièdes, des barbotages contenant de 50 à 100 gr. de sulfate de soude (sels de Glauber) et des aliments de facile digestion (carottes, vert).

Au début, on emploiera les révulsifs, essence de térébenthine ou cataplasme de moutarde (psinasme) sur la poitrine. À l’intérieur, on donnera, contre la toux, 4 à 6 grammes d’extrait aqueux de belladone en électuaire au miel ou à la mélasse, l’essence de térébenthine (20 à 30 gr.) en électuaire avec poudre de réglisse. À la fin, l’iodure de potassium (8 à 15 gr.) dans un petit barbotage donné à jeun, est tout indiqué pour éviter l’induration de l’arbre bronchique et de ses ganglions. Des fumigations données dans un local clos, d’eau de goudron de Norvège ou de crésyl, sont aussi recommandées ;

Bronchite chronique.

— L’affection étant très tenace chez le cheval, on insistera sur les médications prescrites pour la bronchite aiguë, auxquelles on pourra ajouter les électuaires au kermès (15 à 20 grammes), l’essence de térébenthine à dose journalière plus élevée (40 à 60 grammes) ; on peut également employer l’arsenic, qui ne sera délivré par le pharmacien que sur le vu d’une ordonnance d’un vétérinaire, ou toute autre préparation arsenicale ; la vératrine, le sulfure d’antimoine donnent aussi de bons résultats.

Enfin, le malade sera soumis à un léger travail et placé dans de bonnes conditions hygiéniques ; la nourriture consistera en aliments alibiles : vert, bon fourrage (rejeter les foins poussiéreux), carottes, paille hachée additionnée de mélasse, aliments mélassés ; l’eau goudronneuse sera donnée comme boisson. On l’obtient en opérant ainsi : enduire un récipient de goudron de Norvège et le remplir d’eau ; laisser macérer, décanter, puis remplacer l’eau qui a été enlevée. L’addition d’un peu de bicarbonate de sodium permet de dissoudre plus de principes actifs.

Emphysème pulmonaire.

— Cette maladie des poumons due à la dilatation anormale des vésicules bronchiques trouve ici sa place après les maladies des bronches, puisqu’elle est une complication possible des bronchites. C’est elle qui, sous l’empire de la loi de 1838 sur les vices rédhibitoires, portait le nom de pousse, terme sous lequel on désigne encore l’emphysème pulmonaire dans les campagnes.

L’emphysème aigu est une complication des affections aiguës du poumon. L’emphysème chronique, celui qui se traduit par les symptômes décrits plus loin, reconnaît pour causes l’inflammation des bronches, l’obstruction des bronchioles par des mucosités, la toux violente consécutive, provoquant par la suite la dilatation des alvéoles pulmonaires et la déchirure de leurs parois.

Comme causes prédisposantes, citons les violents efforts de traction, le foin donné en grande abondance aux chevaux employés à des services rapides, l’inhalation des vapeurs irritantes, toutes causes qui, si elles agissent pendant longtemps, peuvent aussi rendre les chevaux poussifs. Enfin, on a observé que les descendants de juments emphysémateuses le deviennent à un âge peu avancé, d’où l’indication de ne pas livrer celles-ci à la reproduction.

L’emphysème chronique confirmé se traduit par une toux quinteuse, avortée, sèche, se produisant principalement le matin, ou au sortir de l’écurie : par un jetage peu abondant, muqueux, de couleur gris ardoisé ; par des mouvements respiratoires irréguliers, l’expiration s’interrompant brusquement par une sorte d’arrêt très court provoquant ce que l’on appelle le soubresaut, le coup de fouet ; puis le mouvement expirateur reprend, continue et s’achève ; par une résonance exagérée de la poitrine, etc.

La maladie évolue lentement, puis parfois s’aggrave subitement sous l’influence, par exemple, d’un travail exagéré par une température élevée ou sans cause appréciable. On constate alors des mouvements respiratoires précipités, une accélération tumultueuse des battements du cœur, de la cyanose des muqueuses, le tout constituant l’accès de pousse qui peut durer un temps variable et parfois produire l’asphyxie du malade.

TRAITEMENT.

— Le traitement hygiénique comporte un travail modéré autant que possible ; on donnera des aliments de facile digestion (vert, carottes, fourrages hachés exempts de poussières et mélangés à de la mélasse) ; on augmentera la ration d’avoine et on diminuera celle du foin ; on logera le malade dans une écurie saine et bien aérée. Le traitement curatif comporte l’emploi de l’arsenic à la dose de 0gr,50 à 1 gramme par jour, délivré par le pharmacien sur ordonnance du vétérinaire. On a préconisé la poudre de marron d’Inde, la vératrine, l’ergot de seigle, substances très actives que le vétérinaire traitant ordonnera en tenant compte de la gravité de la maladie et de la fréquence des accès. L’iodure de potassium à la dose de 10 à 15 grammes par jour, agira efficacement contre la bronchite, et la digitale (2 à 4 grammes) régularisera les mouvements du cœur.

Cette maladie, d’après la loi du 2 août 1884, modifiée par celle du 22 février 1914, est rédhibitoire avec un délai de neuf jours, sans augmentation de ce délai, à raison des distances auxquelles a pu être conduit l’animal, en dehors du domicile du vendeur.

MOREL,

Médecin vétérinaire.

Le Chasseur Français N°597 Mars 1940 Page 171