Dans un discours qu’il prononçait, il y a un an, à
l’Exposition de New-York, à l’occasion des fêtes anniversaires de La Fayette,
M. de Saint-Quentin, ambassadeur de France, indiquait que huit millions de
Français venaient de revêtir l’uniforme pour « tenir les engagements
d’honneur de la France envers une autre nation », et il ajoutait :
« Beaucoup d’autres, sur tous les territoires de
l’Empire français, sont prêts à soutenir de leurs mains, de leur tête, de leurs
cœurs, ceux appelés à combattre. Tous sentent qu’ils travaillent, non seulement
pour la France, mais pour la cause de tous les peuples et qu’ils soutiennent la
devise de la Révolution : Liberté, Égalité, Fraternité. »
Il est de fait que les indigènes de tous les pays de
l’Empire, dès le premier jour de la mobilisation, ont répondu à l’appel de la
Mère-Patrie et se sont déclarés prêts à donner leur vie pour elle.
On sait l’active propagande qui avait été menée, au cours
des trois dernières années, dans les pays musulmans (Afrique du Nord et Syrie
surtout), dans le but d’y ébranler la souveraineté française. Or, avant même la
déclaration officielle de l’état de guerre, le Président du Conseil syrien,
interprétant le sentiment unanime de ses compatriotes, déclarait :
« En ces heures délicates, où la Syrie n’échappe pas à
la menace qui pèse sur le monde, notre pays tient à confirmer son attachement à
la cause des démocraties et son loyalisme sans réserve à l’égard de la
France. »
De son côté, M. Djamil Mardam, ancien président du
Conseil, disait : « Servir la France, c’est servir la cause de
l’humanité. » Le chef de l’opposition, M. Chahbandar, exprimait les
mêmes sentiments, ainsi que les journaux libano-syriens de toutes nuances et de
toutes confessions.
D’autre part, le Comité de la jeunesse kurde de la Syrie du
Nord adressait au Haut-Commissaire, M. Puaux, un télégramme renouvelant
l’engagement volontaire qu’ils avaient souscrit en septembre de l’année
précédente.
M. Farès Khoury, président de la Chambre syrienne,
faisait une déclaration dans laquelle il affirmait la fidélité et l’attachement
indéfectibles du peuple syrien à la France, à laquelle il est lié par
d’innombrables liens culturels, économiques et traditionnels. « Jamais,
a-t-il dit, la Syrie n’a été plus près de la France qu’en ces heures
graves. »
En Algérie, dès le premier appel, le Gouverneur général
était saisi de nombreux messages attestant le patriotisme des populations
indigènes. Parmi ces messages, on peut citer ceux du Dr Ben
Djelloul, délégué financier, président de la Fédération des Élus musulmans
d’Algérie ; du Dr Lakhdari, délégué financier, à
Guelma ; de MM. Ben Aoud Hadi Mohata, conseiller général d’Aïn
Belda ; Kacimi Mostefa, président de l’Association des chefs des Zaouïas
et des savants religieux de l’Afrique du Nord, à Bou-Saada, etc.
En Tunisie, le Résident général recevait également, dès la
mobilisation, une délégation de personnalités représentant la population
tunisienne, venue affirmer sa solidarité à l’égard de la nation protectrice.
Les Tunisiens, musulmans et Israélites, se déclaraient solennellement et
unanimement prêts, par la voix de leurs délégués, à tous les sacrifices pour
apporter à la France un concours sans réserve.
De leur côté, les jeunes Marocains intellectuels
remettaient, au général Noguès, une déclaration dans laquelle ils proclamaient
« leur désir sincère de collaborer d’une façon loyale et désintéressée,
dans une atmosphère de confiance réciproque, avec le représentant de la France
au Maroc, pour renforcer le front franco-marocain, en expliquant aux
différentes classes de la société marocaine les dangers de la situation et la
nécessité de grouper les forces matérielles et morales à l’heure du danger,
pour parer à toute éventualité pouvant porter atteinte à l’existence du Maroc
et aux intérêts de la France. »
Quelques semaines après, dans une conférence, Si Mohamed
Mammeri, chef adjoint du protocole de S. M. le Sultan, terminait son
exposé sur les raisons de l’Union franco-marocaine, par ces paroles, couvertes
d’applaudissements : « La France continuera à nous procurer son aide
et ses conseils : l’Islam ne lui marchandera ni sa confiance, ni son
loyalisme. »
Par ailleurs, toutes nos colonies de l’Afrique noire, sans
en excepter le Togo ni le Cameroun, n’ont pas manqué, dès la période de tension
politique, de transmettre au Gouvernement français l’expression de leur
attachement et de leur concours entier. Et, sitôt appelés, Samba Diouf, Toumané
Diakité, Moussa Molo et tant d’autres, ont quitté leur village, leur case et
leur champ, ils ont « pris mon pied la route » pour la guerre contre
l’ennemi des Français, car l’ennemi des Français, c’est l’ennemi du Noir.
Ainsi donc, c’est bien un Empire de 110 millions
d’habitants, qui se dresse, à l’heure actuelle, dans un élan unanime, à côté de
ses alliés, pour le triomphe de la juste cause que nous défendons.
A. DIESNIS.
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