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Le Berger des Pyrénées

À côté du grand chien de montagne, parent du Saint-Bernard et du Terre-Neuve, une autre race pyrénéenne, probablement très ancienne, de plus petite taille, aux exigences alimentaires réduites, gagne progressivement du terrain et s’est même, en ces derniers temps, largement répandue autour de son aire d’origine. Il s’agit du Berger des Pyrénées, fréquemment appelé chien Labrit. Tire-t-il ce nom du village de Labrit, près de Mont-de-Marsan, comme le veulent certains auteurs ? ou bien cette appellation est-elle une corruption de chien de Brie, ce qui indiquerait que le Briard est un ancêtre du chien méridional étudié ici ? On nous permettra de ne point prendre parti dans un tel débat.

C’est un animal vif et remuant, à l’air malin et à la physionomie toujours éveillée. Il mesure 45 à 55 centimètres au garrot pour le mâle, 40 à 50 centimètres pour la femelle, et pèse de 15 à 25 kilogrammes.

La forme générale de la tête rappelle celle de l’ours brun ; le crâne moyennement développé, à peu près plat, avec un sillon médian peu accusé, se relie en pente douce au museau sans cassure apparente. Les oreilles, assez courtes, attachées le plus haut possible sans être trop rapprochées, sont généralement écourtées. Quand elles sont entières, ce qui est admis, leurs tiers supérieur retombe en avant dans un plan perpendiculaire au crâne. L’oreille tenue entièrement droite est l’indice d’un croisement. Les yeux, bien ouverts, très expressifs, toujours encadrés de paupières bordées de noir, sont généralement marron foncé. Cependant, l’œil taché de blanc ou entièrement vairon est assez souvent rencontré sur les sujets ardoisés ou arlequin. Le museau est droit, assez court, plutôt mince sans exagération, « affectant la forme d’un coin ». Les lèvres, minces, se rejoignent parfaitement. La truffe, assez large, avec des narines bien ouvertes, est obligatoirement noire. La muqueuse des lèvres et du palais porte également des taches noires plus ou moins étendues.

Le cou, allongé, fortement musclé, est bien sorti des épaules, qui sont assez longues et franchement obliques. La poitrine, plutôt développée, avec des côtes légèrement arrondies, descend au moins au niveau des coudes. En arrière, elle se relie à un dos long et bien soutenu, puis à des reins courts et relativement larges, cette largeur étant encore accrue par l’épaisseur du poil à ce niveau. Le ventre est moyennement développé, ni levrette, ni tombant. La croupe est plutôt courte et un peu avalée. La queue, attachée bas, garnie de poils touffus, bien frangés, est, de préférence, portée bas, au moins quand l’animal est au repos, et forme crochet à son extrémité. De nombreux sujets naissent sans queue, ou avec un court moignon.

Les membres sont secs, avec des articulations bien marqués et des aplombs réguliers. Les cuisses sont musclées à leur partie supérieure, mais peu descendues. Le jarret est bas, souvent très coudé ; les pieds sont secs, un peu plats, avec des doigts courts et rassemblés. Les ergots sont très fréquents aux postérieurs ; leur amputation est facultative.

Quelle que soit la couleur de la robe, la peau présente souvent des taches foncées. Elle est recouverte d’un poil, long ou demi-long, toujours bien fourni, plat ou légèrement ondulé, d’une texture rappelant celle du poil de chèvre, mais cependant plus fin. On apprécie surtout les sujets qui, à la tête, ont un poil plus court et plus rare, rebroussé « en coup de vent » sur les côtés du museau et des joues.

La couleur est variable et, à cet égard, les sélectionneurs devraient s’efforcer d’orienter la production vers un type plus homogène. Le plus grand nombre de sujets sont fauve ou beige plus ou moins foncé, avec ou sans mélange de poils noirs; il en est qui sont gris plus ou moins clair, ou tachés de blanc et noir (arlequin) souvent avec l’œil vairon, ou encore, noir marqué de blanc à la tête, au poitrail et aux pattes. On en trouve même quelques-uns, à la vérité peu appréciés, qui ont une robe blanche avec de grandes taches rouge vineux.

Signalons enfin qu’il existe une variété dite à face rase ; ici le museau est plus long et plus pointu ; sur la tête, le poil est court et fin ; aux pattes, il forme des manchettes et des culottes ; sur le corps, il est plus souple et plus fin que dans la variété principale.

Conformément au standard, les juges proscrivent ceux qui ont un crâne bombé, une tête trop longue ou trop courte, une cassure du nez accentuée, du prognathisme, des yeux trop grands, trop petits ou inexpressifs, des oreilles mal plantées ou mal portées, la queue trop relevée ou dépourvue de crochet, des poils trop abondants à la tête, formant sourcils et moustaches, enfin une robe portant des taches feu aux pattes, ce qui est un indice de croisement beauceron.

Ce chien mérite bien la faveur qui lui est actuellement accordée. Il a fait, en 1914, un excellent chien de guerre, et il a encore la préférence dans nos armées, tant c’est un chien d’une intelligence, d’une souplesse, d’une vigueur et d’une rusticité incomparables. Comme berger, il est indifféremment apte à la garde des moutons, des bœufs et des chevaux. « Ce berger réduit, léger, rapide, vif, écrit M. J. Dhers, ne risque pas, par son poids ou sa maladresse, de bousculer les moutons dans le ravin ; aussi à son aise sur une pointe de rocher que sur un sentier battu, il descend les raidillons les plus abrupts avec cette adresse merveilleuse, cette sûreté, qui résultent d’un long atavisme ... Sa vive intelligence, sa fidélité et son courage autorisent à l’utiliser à la surveillance de la maison, car il sait instantanément distinguer les commensaux des visiteurs indésirables. Enfin, il suffit de voir sa mine futée et malicieuse pour désirer se l’attacher comme chien de compagnie. Sans exagération, on peut dire qu’il a toutes les qualités sportives du Beauceron, jointes à la douceur et à l’aménité du sympathique chien de Brie. »

V. R.

Le Chasseur Français N°598 Avril 1940 Page 207