Accueil  > Années 1940 et 1941  > N°598 Avril 1940  > Page 236 Tous droits réservés

La radio

La réception sur cadre.

Il existe deux moyens pour recueillir les ondes radiophoniques envoyées par les postes émetteurs, et les transmettre aux récepteurs de T. S. F. On peut utiliser une antenne, nappe de fils métalliques isolée, plus ou moins longue, et combinée avec une prise de terre, le plus souvent simple tuyauterie d’eau ou de chauffage central. On peut également employer un cadre, bobinage en fil de cuivre isolé, dont les deux extrémités sont réunies au récepteur. Ce bobinage est vertical, et son plan doit, en principe, être dirigé vers le poste émetteur, dont on veut recevoir les émissions.

Depuis quelques années, après une grande vogue, le cadre n’était plus en faveur en France, et on ne le trouvait plus que sur des modèles très rares, établis par des fabricants spécialisés. Cet abandon temporaire est dû à des raisons techniques, et surtout pratiques.

Une antenne, même courte, recueille toujours plus d’énergie qu’un cadre ; avec un appareil sensible, comme le sont la majorité des postes-secteur actuels, il suffit, pour obtenir une audition d’intensité suffisante, sinon de haute qualité musicale, d’adopter une antenne de fortune quelconque, ou même un simple bout de fil isolé, de quelques mètres de long.

Lorsqu’on emploie un cadre avec un poste-secteur, ce qui était la majorité des cas, les avantages de ce collecteur d’ondes sont encore réduits. Le cadre supprime l’emploi de la prise de terre, mais la liaison au secteur reste nécessaire, et la mobilité n’est pas beaucoup plus grande. Cette liaison au secteur diminue les propriétés directives du cadre, et aussi ses qualités plus ou moins antiparasites, car le réseau d’alimentation constitue bien souvent un véritable collecteur d’ondes utilisé involontairement, et qui recueille aussi bien les ondes utiles que les courants parasites.

Les cadres utilisés dans les débuts de la T. S. F. étaient, d’ailleurs, relativement de grandes dimensions, et avaient, par exemple, au minimum, 60 à 80 centimètres de côté ; on ne saurait songer actuellement à placer un tel enroulement dans le boîtier d’un récepteur, et son utilisation séparée, à côté de ce dernier, ne peut être pratique.

La réduction des dimensions de l’enroulement est possible, mais elle diminue nécessairement la quantité d’énergie utile recueillie. Comme la quantité des ondes parasites est à peu près toujours la même, par suite de la liaison au secteur, la qualité finale de l’audition diminue de ce fait très rapidement.

Pourtant, des facteurs nouveaux, apparus tout d’abord aux États-Unis, sont venus modifier les conditions actuelles d’emploi du cadre ; désormais, on réalise, en 1940, de très nombreux modèles d’appareils portatifs, ou même de postes-midgets ou de postes-meubles, qui sont munis de cadres. La plupart du temps, ces appareils peuvent également fonctionner sur antenne, de sorte que l’usager peut, à volonté, et suivant les conditions de la réception, utiliser l’un ou l’autre de ces collecteurs d’ondes.

Pourquoi utilise-t-on le cadre à l’heure actuelle ? Il semble qu’on puisse avoir en vue deux buts essentiels, combinés ou distincts :

    1° Établir un poste transportable, à batteries ou « universel », et pouvant fonctionner partout sans aucune installation d’une façon absolument autonome.

    2° Obtenir un effet antiparasite particulier, tout en bénéficiant d’une facilité d’installation et d’emploi fort agréable.

Le but recherché, en adoptant un cadre de réception, consiste donc désormais surtout à établir un collecteur d’ondes possédant des propriétés antiparasites spéciales. C’est là un problème qui avait été étudié en France déjà depuis de longues années. Des constructeurs avisés avaient réalisé des postes complets modernes à cadres incorporés, et même des cadres séparés pouvant être adaptés immédiatement à n’importe quel récepteur fonctionnant déjà normalement sur antenne. Ces dispositifs n’avaient reçu qu’un accueil assez peu enthousiaste de la part de la clientèle; sans doute, faudra-t-il que cette « vieille nouveauté » nous revienne d’Amérique, pour qu’elle paraisse vraiment intéressante aux auditeurs français !

Les cadres adoptés aujourd’hui ne sont pourtant pas semblables aux premiers cadres des débuts de la T. S. F. Ce sont des enroulements plats, peu encombrants, de dimensions assez faibles pour trouver place dans le boîtier du récepteur lui-même, même s’il s’agit d’un modèle réduit ; ils comportent surtout un montage destiné à accroître leur pouvoir antiparasite.

L’idéal consisterait à supprimer complètement l’action des perturbations parasites sur le cadre, à ne laisser agir sur lui que les ondes radiophoniques provenant de l’émetteur ; ce résultat peut être atteint, comme nous le montrent les techniciens, avec des cadres équilibrés, des cadres compensés, ou des cadres blindés.

Les modèles généralement employés aux États-Unis sont du type blindé. Ils comportent des écrans électrostatiques protecteurs formés par des plaques métalliques, ou des enroulements protecteurs, reliés à la terre, et supprimant toute capacité, par rapport aux objets extérieurs, de manière à ne plus laisser subsister que les effets purement électromagnétiques.

Dans ces appareils de T. S. F. américains, le système protecteur est constitué, par exemple, par deux disques métalliques horizontaux avec des montants verticaux, disposés suivant les génératrices d’un cylindre. Un seul de ces montants réunit le disque supérieur au disque inférieur, de manière à ne pas constituer de court-circuit qui empêcherait toute réception. L’écran est réuni au sol par l’intermédiaire d’une capacité de 5/100 de microfarad, et l’appareil peut également servir sur antenne. Le cadre, en forme de prisme vertical, est placé au centre.

La sensibilité est réduite; mais l’effet directif permet d’éviter certaines actions parasites particulières, telles que les perturbations des lignes à haute tension, et les effets des étincelles des contacteurs. Le dispositif n’est pas universel, mais l’amélioration est déjà notable.

Le cadre protecteur est maintenu à l’aide d’un tissu fixant les tiges verticales, et protégeant l’enroulement de la poussière.

La plupart du temps, dans ces postes américains, le cadre est cependant constitué par un enroulement en fond de panier très plat, et le blindage par deux nappes de fils verticaux soudés ensemble à une extrémité, libres à une autre, maintenus par un filet de cordes à mailles très larges.

L’antenne est presque toujours également utilisable, le cadre servant alors de bobinage d’accord, avec bobinage d’antenne séparé ou prise intermédiaire.

Ces modèles, construits en grand nombre, semblent donner de bons résultats, et ont déjà été introduits en France.

Comme les cadres sont de petites dimensions, et, par conséquent, ne recueillent que peu d’énergie, les résultats sont évidemment meilleurs pour la réception des émissions lointaines, lorsque le montage est assez sensible, c’est-à-dire comporte un assez grand nombre de lampes. Ces différents modèles, dont nous verrons sans doute, en des jours meilleurs qu’il faut espérer prochains, des types analogues européens, pourront être également accueillis avec faveur, par les sans-filistes français.

P. HEMARDINQUER,

Ingénieur-conseil.

Le Chasseur Français N°598 Avril 1940 Page 236