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Colombiculture

Conduite de l’élevage.

Nous avons appris, dans la précédente causerie, à baguer nos pigeonneaux ; mais, il faut aussi noter que, pour obtenir de certaines races des jeunes de belle venue, races trop lourdes : Romains, Montaubans, ou trop maladroites : races à pattes emplumées : Tambours, Hirondelles, ou races ayant une conformation anormale du bec : Tunisiens, Tumblers, Polonais, etc., il est indispensable, de faire couver leurs œufs par d’autres pigeons, dont on aura éprouvé les qualités de bons reproducteurs.

La chose en soi peut paraître banale, car, quoi de plus simple en apparence que d’opérer une substitution dans deux nids différents ?

En réalité, l’opération est assez délicate, car, tout d’abord, il faut absolument que les dates de ponte coïncident. Un écart de vingt-quatre heures sera tout juste toléré.

La raison de cette condition est extrêmement simple à comprendre. Elle réside dans ce fait déjà expliqué que, quelques jours avant l’éclosion, il se forme dans le jabot des parents une bouillie destinée à l’alimentation des jeunes.

Cette bouillie, qui est juste à point pour le dix-septième jour de l’incubation, s’épaissit au fur et à mesure de la croissance au point de devenir presque consistante au bout d’une dizaine de jours.

Il est aisé de comprendre que, s’il se produit un décalage dans les dates d’éclosion, cette bouillie sera ou trop épaisse, ou trop fluide, sinon absente, et que, dans ces conditions, la substitution opérée en vue d’obtenir un résultat positif ne donnera qu’une déconvenue.

D’autre part, l’instinct des pigeons leur fait abandonner le nid, en cas de non-éclosion (œufs clairs ou mortalité en coquille) dès le dix-neuvième jour. Il tombe donc sous le sens que la moindre négligence dans cette délicate opération qu’est une substitution d’œufs ne causerait que des déboires.

Considérons cependant que l’affaire a été bien conduite et prenons pour exemple un couple de Romains et un couple de Carneaux, ayant, bien involontairement, échangé leurs œufs. Les quatre bonnes bêtes vont couver bien sagement, les Carneaux avec application et sans incident, les Romains peut-être un peu maladroitement ; mais, comme les œufs de Carneaux sont plus petits que les leurs et, partant, plus résistants, il y aura de fortes chances pour qu’un jeune au moins voie le jour.

Dans les premières heures de leur naissance, ces jeunes seront alimentés raisonnablement par leurs parents adoptifs, mais, au bout de quatre ou cinq jours, les malheureux Carneaux ne pourront plus suffire à la voracité de leurs nourrissons. Il faudra alors remettre les choses en état, c’est-à-dire restituer à chacun sa propre progéniture.

Cette deuxième opération sera pratiquée la nuit, en s’éclairant discrètement avec une lanterne et en agissant avec la plus grande douceur, de telle sorte qu’au jour naissant, les parents ne soient pas trop surpris par ce changement.

L’élevage des jeunes se poursuivra alors avec le maximum de chances de réussite, et cette façon de procéder aura permis à l’amateur de mener à bien la reproduction de certaines races qui tirent justement leur valeur de la difficulté de leur élevage.

LE CRAVATÉ CHINOIS.

Le Chasseur Français N°599 Mai 1940 Page 295