Le diaphragme est cet organe inséparable de la monture de
l’objectif, au moyen duquel on règle la quantité de lumière admise à la
formation de l’image photographique sur l’écran dépoli ou sur la couche
sensible. Après avoir présenté des formes diverses, le diaphragme est
constitué, dans les objectifs modernes, par une série de minces lamelles
mobiles en cuivre noirci ou en ébonite, montées à pivot sur une couronne
interne et se recouvrant partiellement. La rotation d’une bague extérieure dans
un sens ou dans l’autre les efface graduellement, ou bien les fait empiéter
plus ou moins sur le trajet du faisceau lumineux admis par l’objectif (ainsi
que cela se passe d’ailleurs dans l’iris de l’œil, qui lui a donné son nom). Un
repère ou index mobile indique sur une graduation fixe l’ouverture relative
correspondant à chacune des divisions de l’échelle ; cette valeur est
représentée par une expression fractionnaire sur la formation de laquelle nous
reviendrons plus loin.
Considéré en soi, comme organe purement mécanique, le
diaphragme réduit donc plus ou moins le diamètre du faisceau lumineux qui
traverse l’objectif, et, à ce titre, il exerce une influence considérable sur
le temps de pose, puisque, suivant une loi bien connue, que l’expérience
confirme, la quantité de lumière admise par le diaphragme est proportionnelle à
l’aire ou surface de l’ouverture, qui est elle-même caractérisée par le
carré de son diamètre.
Mais le rôle essentiel du diaphragme est d’éliminer, dans la
mesure où cela est nécessaire, les rayons fortement inclinés sur l’axe de
l’objectif (parce qu’ils proviennent des régions marginales du sujet), qui ont
leur point de rencontre — leur foyer, si l’on veut — en avant de
celui des rayons centraux, et qui, pour cette raison même, altèrent la netteté
moyenne de l’image résultante, en y introduisant des éléments imparfaitement
définis. À mesure que l’on réduit le diamètre d’ouverture, on constate, en même
temps qu’un obscurcissement progressif de l’image, une amélioration croissante
de la netteté générale, — surtout dans les zones marginales de l’épreuve
— car les rayons centraux donnent généralement une netteté satisfaisante
pour les objets qui sont « au point », quelle que soit l’ouverture du
diaphragme.
Ce n’est pas sans motif que, dans une précédente causerie,
nous disions que l’une des difficultés du début se rencontre dans le choix de
l’ouverture à adopter, suivant les circonstances, afin de satisfaire aussi
complètement que possible aux exigences de l’opération. Dans quelle mesure
doit-on diaphragmer ? Quand et comment doit-on user de cette faculté de se
libérer de l’action diffusante des rayons marginaux transmis par les extrêmes
bords des lentilles ? C’est là tout le problème, qui est subordonné à la
nécessité d’admettre une quantité de lumière suffisante pour impressionner
utilement la surface sensible.
En parlant de la détermination du temps de pose, nous aurons
l’occasion d’invoquer la règle posée plus haut et que nous répétons, car son
importance est primordiale : la clarté ou luminosité d’un objectif est
proportionnelle au carré du diamètre de l’ouverture utile adoptée pour
l’opération. Nous soulignons le mot utile, car il nous faut établir une
distinction entre l’ouverture réelle, mécanique, telle qu’elle peut être
mesurée avec un compas, un pied à coulisse ou de toute autre façon, et
l’ouverture utile, efficiente, qui a pour diamètre celui du faisceau
lumineux admis par le diaphragme, relevé ou mesuré avant qu’il ait été
réfracté et contracté par son passage dans la lentille antérieure. Il est vrai
que, dans la pratique courante, l’amateur n’a pas lieu de s’arrêter à cette
inégalité et d’en tenir compte dans ses calculs, car les objectifs comportent
des graduations se rapportant exclusivement à l’ouverture utile, celle qui
concourt directement à la détermination du temps de pose ; mais il était
cependant nécessaire d’établir cette distinction afin d’éviter toute erreur
d’appréciation dans la luminosité comparée des objectifs.
Au point de vue purement technique, la netteté relative de
l’image est d’autant plus satisfaisante que l’ouverture du diaphragme est
maintenue dans les limites fixées par la nature du sujet, les dimensions de
l’épreuve et la distance d’examen, et enfin par le but que l’on se propose.
Dans la photographie scientifique ou documentaire, il est essentiel d’obtenir
une définition très poussée, qui n’est pas désirable dans la photographie
anecdotique ou d’amateur, et moins encore dans les compositions à tendance
artistique, où l’attention du spectateur doit être attirée et retenue par le
motif principal, et non éparpillée sur tous les détails. Autant de genres
différents, autant de conséquences diverses, ce qui ne simplifie pas la
question, nous en convenons.
Comment peut-on caractériser la netteté ? L’image d’un
point quelconque du sujet donne sur l’écran, non pas un point géométrique sans
étendue appréciable, mais une petite tache de dimensions réduites, à laquelle
on donne le nom de cercle de diffusion. On appelle enfin cercle de diffusion tolérée,
la tache dont le diamètre ne dépasse pas la limite de séparation visuelle de
deux points voisins. Son étendue varie donc avec la distance d’examen prévue
pour l’image terminée, l’œil étant placé à une distance en rapport avec les
dimensions de l’image. C’est donc une relation que l’on peut serrer d’assez
près, quand on possède tous les éléments du problème.
Ce qui fait tort au diaphragme dans l’esprit du débutant,
c’est la forme du symbole adopté pour caractériser l’ouverture relative
— « en fonction du foyer », dirait un mathématicien. Malgré son
aspect cabalistique, cette représentation n’est pas arbitraire, ni
fantaisiste ; elle exprime sous forme de fraction dont le numérateur est 1
(ou f), le rapport du diamètre de l’ouverture utile, exprimée par
exemple en millimètres, à la distance focale de l’objectif, également exprimée
en millimètres. C’est ainsi qu’un objectif de 80 millimètres de distance
focale, employé avec une ouverture utile de 10 millimètres de diamètre,
travaille à 1/8 ou f/8, ce que tout le monde comprend certainement.
— « Mais, dira-t-on, pourquoi les opticiens
adoptent-ils des graduations dont les termes semblent n’avoir entre eux aucun
lien apparent, tels que : f/8, f/11,2, f/16, etc. ? »
Cette relation existe, et elle est d’obligation étroite ; voici
comment : Dans un but d’unification, et aussi en vue d’une commodité
immédiate, dont l’intérêt n’a pas besoin d’être démontré, on est convenu de
graduer les échelles de diaphragmes de façon que le temps de pose soit exactement
doublé quand on passe d’une ouverture donnée à celle qui la suit dans le
sens décroissant. Or, le raisonnement, aussi bien que l’expérience, enseignent,
nous l’avons vu, que les temps de pose sont directement proportionnels aux
surfaces des ouvertures, qui sont elles-mêmes déterminées par le carré de leurs
diamètres : une ouverture de diamètre deux fois plus petit exige donc un
temps de pose quatre fois plus considérable. Pour obtenir une graduation
ininterrompue procédant du simple au double, à la fois logique et d’emploi
universel, on s’est arrêté à une solution ingénieuse consistant à prélever les
repères des échelles d’ouverture relative dans la suite des racines carrées des
termes de la progression 1, 2, 4, 8, 16, 32, 64, etc., qui vont en doublant, et
c’est ainsi que se sont trouvés déterminés les dénominateurs des expressions
fractionnaires f/4, f/5, 6, f/8, f/11,2, etc.
Nous n’insisterons pas davantage sur ce sujet, que nos
explications auront peut-être contribué à éclaircir. Mais nous ne terminerons
pas sans mettre l’amateur en garde contre la pratique fâcheuse consistant à
combattre une surexposition possible, en réduisant plus qu’il ne conviendrait
le diamètre de l’ouverture, car on compromet ainsi l’espacement des plans et on
détruit aussi l’effet de perspective aérienne, qui est le plus bel attrait des
compositions dignes d’intérêt. En cas d’actinisme excessif du sujet et faute de
disposer d’un obturateur assez rapide pour en modérer l’influence, il est
préférable d’exercer cette action modératrice en interposant un écran jaune
orangé convenablement choisi, qui contribue au surplus à améliorer le rendu des
valeurs colorées du sujet.
Jacques BÉRYL.
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