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Au jardin fruitier

Soins généraux d’été

Les travaux à effectuer, en été, dans le jardin fruitier, sont assez nombreux, si l’on tient à entretenir convenablement celui-ci. Bien que pouvant, en effet, donner un certain produit sans beaucoup de soins, l’arbre fruitier rapporte bien davantage, quand il est mieux soigné. Certaines opérations culturales, faites à propos, ont surtout une influence très nette sur le volume et sur la qualité des fruits ; d’autres ont plus particulièrement pour but l’obtention d’une forme correcte, utilisant au mieux l’emplacement. Toutes visent, en définitive, au même résultat : augmentation et amélioration du produit.

L’ébourgeonnement, opération qui consiste à supprimer, le plus tôt possible, les pousses inutiles, trop négligé dans bien des cas, a cependant une incontestable utilité. Il évite les déperditions de sève sur des ramifications en surnombre et concentre cette sève sur les pousses fructifères et sur les bourgeons de remplacement. Moins nécessaire sur les arbres à fruits à pépins, il l’est davantage sur le pêcher et la vigne. Il facilite, en outre, beaucoup l’exécution des traitements et leur assure une plus grande efficacité.

Le pincement, qui s’effectue un peu plus tard, est extrêmement utile pour provoquer, sur chacune des ramifications fruitières du poirier et du pommier, la formation des boutons à fruit le plus près possible de la branche de charpente. Ainsi, le fruit tiendra mieux à l’arbre et profitera davantage, parce que mieux alimenté. Si l’on n’est pas trop à court de main-d’œuvre, on fera subir, aux poiriers et aux pommiers, trois pincements au cours de la belle saison. Sur le pêcher, cette opération culturale est également nécessaire pour faire développer les bourgeons de remplacement. Sur la vigne, elle limite le développement des rameaux au profit des grappes.

Pour les arbres conduits sur un treillage, en espalier ou en contre-espalier, l’accolage ou palissage en vert, à l’aide de jonc ou de raphia, des pousses terminales des branches de charpente (prolongements), constitue une opération indispensable, si l’on veut avoir une forme correcte. En été, en effet, on peut aisément imprimer aux bourgeons, presque aussi souples alors que des brins d’herbe, la direction qu’on entend leur faire prendre et conserver ensuite lorsqu’ils seront devenus ligneux.

Cet accolage est également pratiqué pour les pousses de la vigne, de même que pour les bourgeons de remplacement des pêchers qu’il permet de répartir, dans les meilleures conditions d’aération et d’éclairement, de part et d’autre des branches de charpente.

À moins qu’il ne s’agisse de sujets nouvellement plantés, il est rare, sauf dans le Midi, que l’on soit obligé d’arroser les arbres. Mais il arrive cependant, notamment dans les sols légers, que le terrain ne conserve que très difficilement une fraîcheur suffisante pour leur bonne végétation. On peut y remédier, sans trop de peine, en étendant un paillis à la surface du sol, après en avoir pioché et bien pulvérisé la couche superficielle par un crochetage énergique.

En tous cas, l’application de ce paillis ne sera pas faite trop tôt, car on risquerait alors d’empêcher l’échauffement et l’aération du sol, indispensables à l’activité microbienne qui reste la base de sa fertilité. La seconde quinzaine de juin constitue, en général, l’époque la plus favorable pour l’exécution de ce travail.

L’arrosage des arbres, lorsqu’il se révèle absolument indispensable, doit être effectué de préférence par temps sombre, plutôt froid, et doit être très copieux. On ne le renouvellera qu’à de longs intervalles. Par-dessus tout, il faut éviter d’arroser les arbres en pleine chaleur avec de l’eau sortant directement d’un puits, c’est-à-dire non réchauffée.

Pour donner du volume aux fruits, notamment lorsqu’il s’agit de pêchers en espalier, on se trouvera toujours bien de bassiner fréquemment la charpente et le feuillage des arbres. Ce travail, surtout utile aux expositions du Midi et Sud-est, s’effectue le soir, après des journées très chaudes, en se servant d’eau tirée quelque temps à l’avance et exposée au soleil. Le bassinage se fait, soit à la seringue, soit au pulvérisateur, lorsque le soleil a quitté le mur depuis quelque temps.

Il est bon, également, de préserver des coups de soleil le tronc des pêchers en espalier aux expositions trop ensoleillées. Un procédé fort simple consiste à placer, en mai, devant le tronc et au pied de l’arbre, soit une tuile demi-ronde, soit une planche, de préférence peinte en blanc, que l’on fiche en terre par une de ses extrémités, taillée en pointe à cet effet. On enlève cet écran provisoire vers la fin de septembre, alors que le soleil a perdu une grande partie de sa force.

Une semblable précaution peut être utile pour des poiriers en espalier au Midi ou au Sud-est Elle est, par contre, inutile pour la vigne en treille, qui résiste fort bien aux fortes insolations.

Lorsque les cultures fruitières sont pratiquées en plein champ, on s’efforcera de maintenir la végétation en multipliant les façons superficielles à la bineuse qui, d’une part, s’opposent à l’évaporation de l’eau du sol et, d’autre part, favorisent la pénétration de l’air nécessaire à l’activité de certains microbes et, en particulier, du bacille de la nitrification.

Pendant la saison d’été, on a presque toujours à lutter contre les pucerons noirs, verts, gris, qui sont, surtout en année sèche, très redoutables.

Dans une de nos précédentes causeries, nous avons indiqué comment se défendre contre ces parasites.

Une variété de puceron, le puceron lanigère, appelé communément blanc du pommier, est surtout répandu sur cette essence, lorsqu’elle est cultivée au jardin. Protégé contre les insecticides par une efflorescence cireuse dont il se recouvre et qui a l’aspect de la neige, il est difficile à détruire et se propage très vite. Aussi faut-il être extrêmement vigilant pour en éviter l’extension dans le jardin fruitier.

Contre ce redoutable ennemi, nous employons avec succès, en été, un insecticide mixte de la composition suivante, que nous pulvérisons à plusieurs reprises, à quelques jours d’intervalle, avec un pulvérisateur à pression préalable de préférence :

Eau 100 litres.
Savon blanc 2 kilogrammes.
Alcool dénaturé 2 litres.
Nicotine pure alcaloïde 100 à 150 grammes.

E. DELPLACE.

Le Chasseur Français N°600 Juin 1940 Page 350