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Élevage du gibier

Faisans et perdrix : entravage des reproducteurs.

Il y a deux façons d’empêcher les oiseaux de quitter les parquets dans lesquels on les met pour la reproduction. Ou bien on recouvre ces parquets d’un grillage, ou bien on entrave les reproducteurs.

Couvrir un parquet coûte cher et présente des inconvénients. Nous avons vu des parquets dont le grillage de couverture n’avait pu supporter le poids de la neige et s’était effondré.

En outre, si ce grillage empêche certes les oiseaux de proie de capturer des perdrix, il donne cependant aux oiseaux une sécurité qui plus tard peut leur être fatale.

En effet, mis en liberté, ils ne se rendent pas compte qu’un grillage ne les protège plus, et ils se défendent mal contre les oiseaux de proie.

L’entravage ne présente que des avantages.

Expliquons d’abord en quoi cela consiste.

C’est fixer une chaîne, ou un morceau de cuir découpé dans une certaine forme, à l’une des ailes d’un oiseau.

Quand celui-ci prend son vol, l’aile entravée ne peut s’étendre pour se poser sur l’air, mais reste à moitié ouverte, alors que l’autre aile se déploie complètement Il en résulte une rupture d’équilibre qui précipite l’oiseau au sol.

Quand il a fait deux ou trois tentatives, il constate son impuissance à s’envoler et dès lors cherche, en se sauvant avec les pattes, un refuge où il puisse s’abriter.

Cependant, dès qu’on met perdrix ou faisans en liberté, après les avoir désentravés, le fait qu’ils se trouvent dans un milieu différent que les parquets les incite à chercher à s’envoler et ils le font sans aucune difficulté.

Contrairement à ce que l’on pourrait craindre, l’aile n’est nullement ankylosée malgré l’entrave, car elle est très légère. Cependant, une entrave souple est nécessaire et il convient d’être prudent en en faisant l’achat.

C’est ainsi qu’il a été mis dans le commerce un appareil connu sous le nom de pince à ailes et qui consiste en une petite barre de métal rigide dans laquelle l’aile est serrée.

Nous avons connu plusieurs propriétaires qui ont eu le même résultat de cet appareil. Un jour l’oiseau passant trop près d’un obstacle s’accrochait, et la pince à ailes ainsi que toutes les plumes étaient arrachées d’un seul coup.

Une bonne entrave, au contraire, rend d’énormes services. C’est ainsi qu’ayant à résoudre le problème de tenir captifs dans un vaste parquet des faisandeaux en élevage qui grandissaient, nous avons procédé de la façon suivante. Nous les avons entravés d’abord avec des appareils pour perdrix, tout en laissant au dehors une bonne partie de la chaîne. Puis, tous les dix jours, l’entrave était élargie suivant la croissance des ailes. Quand cette entrave fut devenue trop petite, on employa des entraves à faisans, mais en laissant encore au dehors une bonne partie de la chaîne. Peu à peu l’oiseau arriva à sa taille d’adulte et à ce moment l’entrave était complètement déployée.

Cette façon de faire fut réalisée sur plusieurs milliers d’oiseaux, ce qui permet de dire que tous éleveurs de perdrix et de faisans peuvent employer avec succès ce procédé.

L’entrave n’est pas une nouveauté, puisqu’elle vit le jour chez mon père, à la faisanderie de Mériel, en 1885.

Cependant, au début, elle était plus compliquée et plus difficile à poser.

C’était une chaîne de nickel recouverte d’un petit tube de caoutchouc, le tout terminé par un fil de nickel.

Pour la poser, une personne tenait l’oiseau alors qu’une autre mettait une aiguille à rougir sur une flamme et perçait ce qu’on appelle la main.

On plaçait alors la chaîne autour de l’aile, son extrémité venant se placer dans le bout de fil avant que celui-ci ne traverse la main à l’endroit où l’on avait passé l’aiguille rougie. Quand c’était fait, on plaçait une rondelle de nickel, et l’on tournait avec une pince ronde l’extrémité pour que la rondelle reste en place.

Cette entrave était délicate à poser. Plus d’un garde estropia des oiseaux ; et l’on en arriva à rechercher un autre modèle qui évite le percement de la main.

La chaînette actuellement employée donne toute satisfaction puisque, ainsi que nous l’avons vu plus haut, elle a permis d’entraver des milliers de faisans depuis leur premier vol jusqu’à l’âge d’adulte.

Ajoutons que sa forme permet d’entraver indifféremment l’aile droite ou l’aile gauche, en sorte que, si une aile est abîmée, on peut placer l’entrave à l’autre aile.

Cette mise en place est très facile. Une personne tient l’oiseau par les cuisses, tandis qu’une autre pose la chaînette dont on entoure le haut de l’aile. Les extrémités se rejoignent dans un crochet en forme de S que l’on referme à la pince.

Dans de grandes faisanderies où l’on mettait autrefois des faisans capturés, jusqu’à l’époque des chasses, on entravait ces oiseaux au moyen d’un simple cordonnet plat. Si les nœuds étaient bien faits, ce genre d’entraves était très suffisant pour un ou deux mois.

On voit par là que l’entravage des perdrix et des faisans est une chose facile. La reproduction des perdrix sauvages en parquets, basée sur l’emploi de ces appareils, donne d’excellents résultats.

René DANNIN,

Expert en agriculture (chasse, gibier) près les Tribunaux.

Le Chasseur Français N°601 Septembre 1941 Page 394