Deuxième reprise plutôt, car la situation du moment est, au
point de vue du cheptel canin, exactement la même que celle de 1919. La guerre
a passé, terrible ; ici comme ailleurs nous avons à en supporter les
conséquences.
Oh, certes, ce qui nous préoccupe ici n’est pas, au point de
vue strictement vital, d’une importance de tout premier plan, du moins pour les
besoins immédiats. N’empêche que le cheptel canin de la France, dont on ne
saurait mésestimer la valeur, se trouve, une fois de plus, très sérieusement
amoindri.
Ce cheptel, il va falloir le reconstituer par l’élevage, ce
qui va demander un certain temps. Il va falloir aussi, et même d’abord, que les
chasseurs, les petits chasseurs, presque tous démontés à l’heure actuelle,
puissent se pourvoir d’un auxiliaire pour la prochaine ouverture. C’est là le
plus pressé. Certes la question se pose aussi pour tous les chiens. Qu’il
s’agisse de chiens de garde, de berger, d’agrément, beaucoup de cynophiles ont
le désir de se remonter le plus rapidement possible, mais il n’y a pas le même
caractère d’urgence.
Il faut que les chasseurs puissent trouver, sans retard,
soit un adulte, soit un chiot au sevrage. Et cela ne sera pas toujours commode,
si, du moins, chacun se cantonne dans un cadre très limité. L’acheteur qui sait
ce qu’il veut, en temps normal, c’est de beaucoup le plus facile à servir et à
contenter. Oui, mais aujourd’hui ?
La production est certainement déficitaire. Les éleveurs,
ceux du moins qui ont pu conserver quelques lices pour pouvoir, plus tard,
reconstituer leurs chenils, n’ont pas fait reproduire, et beaucoup d’élevages
même ont définitivement fermé leurs chenils.
L’offre ne pourra donc suffire à la demande que si celle-ci
sait se montrer raisonnable.
J’ai souvent entendu dire : « Moi je chasse avec
des épagneuls bretons ! — Moi je n’aime que les Griffons à poil
dur ! etc. » Tout cela, ce sont des préférences du temps passé. Elles
ne sont pas à manifester aujourd’hui. Vous chasserez avec ce que vous
trouverez, ou vous ne chasserez pas. Voilà la vérité ; elle n’est pas trop
cruelle, croyez-moi, car il y a de bons chiens dans toutes les races.
Prenez donc un bon chien, ou du moins un sujet susceptible
de devenir tel. S’il n’est pas de votre race favorite, prenez-le tout de même,
ne serait-ce que pour la première saison. Ce faisant, vous vous éviterez
l’horrible chose de chasser (?) sans chien. Vous pourrez ainsi attendre,
puis acheter un chiot de votre race préférée, au fur et à mesure de la
renaissance de l’élevage. Mais, jusqu’à ce que ce chiot grandisse et puisse
être dressé et utilisé, vous aurez la possibilité de chasser. Le temps aidant,
vous pourrez revenir à vos chères habitudes.
Les races, cependant, ne seront pas tellement amoindries que
l’amateur de continentaux et l’amateur de chiens anglais ne puissent trouver
chacun leur compte, ou du moins à peu près. Peut-être un pointerman se
verra-t-il momentanément obligé de prendre un setter, peut-être un amateur
d’épagneuls sera-t-il obligé d’opter d’abord pour un braque. Il chassera et c’est
là l’essentiel. Prenons encore patience pour un peu de temps, nous y sommes du
reste habitués. La question des chiens anglais mise à part, car vous savez que
leur façon de chasser diffère sensiblement de celle des races continentales, je
recommanderai aux chasseurs qui aiment les continentaux de donner, même dès le
début, leur préférence aux chiens français.
Je n’en fais pas une question de patriotisme, ce serait
parfaitement ridicule, d’autant qu’il y a d’excellents chiens dans les races
étrangères, mais il faut faciliter, avantager l’élevage français.
En résumé, dès le premier abord, prenez donc avant tout un
chien de chasse à quelque variété qu’il appartienne, et même s’il n’a pas
d’origines sérieuses écrites. Mais laissez-le uniquement dans son rôle de chien
de service et, quelque typé qu’il vous paraisse, n’en faites pas un
reproducteur. Ne retombons pas dans les erreurs de l’après-grande guerre !
Souvenez-vous des chiens admis au L. O. F. (S. O. il est vrai,
mais ...) qu’ont-ils donné dans leur production ? Des déceptions de
toute sorte. C’est à peu près tout.
J. DHERS.
|