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Au jardin fruitier

Pour mieux conserver les fruits

L’époque de la récolte des fruits d’automne et d’hiver s’approche à grands pas et plus que jamais s’impose, cette année, le problème de leur conservation jusqu’à une date aussi éloignée que possible.

Celle-ci ne peut se réaliser que si l’on possède un local approprié et, bien souvent, quelques travaux sommaires d’aménagement pourront permettre d’adapter à cette nouvelle utilisation un local ne répondant pas parfaitement aux conditions nécessaires à une bonne conservation des fruits.

Rappelons d’abord brièvement les conditions que doit remplir un bon fruitier :

    1° Sa température doit être, autant que possible, basse et constante (de + 3° à + 4°). Si elle varie, elle ne doit, en tout cas, varier que fort lentement ;

    2° Une aération modérée n’a pas d’effet nuisible, mais il faut seulement laisser accéder, dans le fruitier, de l’air ayant, à peu près, la température du local. La privation complète d’air a pour effet de retarder la maturation des fruits, ce qui peut être intéressant dans certains cas (fruits d’hiver, par exemple) ;

    3° L’atmosphère du fruitier doit être saine, l’humidité excessive favorisant le développement de certaines moisissures ;

    4° Une demi-obscurité est favorable, en ce sens qu’elle a aussi pour effet de reculer la date de la maturité en retardant la formation des sucres ; pour les raisins, il faut l’obscurité complète.

Le fruitier est rarement un bâtiment spécialement construit en vue de sa destination. Une telle construction serait en effet, à l’heure actuelle, d’un prix de revient fort élevé et ne saurait d’ailleurs convenir que dans quelques rares exploitations.

Mais une cave creusée dans le roc, lorsqu’elle n’est pas trop humide, peut fort bien être utilisée pour la conservation des fruits. Il en est de même de certains celliers.

À défaut, toute pièce saine d’un appartement située soit au rez-de-chaussée, soit au premier étage, et n’ayant d’ouvertures que du côté du nord peut être aménagée en fruitier si les murs en sont assez épais pour que la température se maintienne au-dessus de zéro en hiver et ne varie que très lentement en tout temps. Les fenêtres devront, cependant, être pourvues, autant que possible, de volets pleins.

Le grenier, parfois utilisé pour la conservation des fruits, ne convient guère, car les variations de température y sont trop brusques. En outre, les fruits s’y rident plus ou moins.

L’aménagement intérieur de la pièce affectée à la conservation des fruits comprend, le plus souvent :

    1° Le long des murs latéraux, des tablettes, superposées tous les 40 ou 45 centimètres et larges de 50 à 60 centimètres. Ces tablettes, composées d’un certain nombre de barres séparées par des intervalles de quelques centimètres, devront être bordées d’une planchette formant rebord, afin d’empêcher les fruits de rouler à terre ;

    2° Dans la partie centrale du local, s’il a une certaine largeur, une simple ou une double série de tablettes, superposées à 45 centimètres l’une de l’autre, supportées par un bâti formé de montants verticaux allant du plancher au plafond.

Entre les tablettes appuyées aux murs latéraux et celles du centre doit exister un passage assez large pour permettre d’effectuer aisément toutes les manipulations nécessaires en se servant, au besoin, d’une échelle.

Cette installation peut, si le nombre de fruits à entreposer chaque année est suffisamment important, être fixe. Elle peut, dans le cas contraire, être réalisée, à la demande, en totalité ou seulement en partie.

Pour cela, il est notamment possible d’utiliser des claies à claire-voie formées, par exemple, d’un cadre de bois à l’intérieur duquel est un fond en osier blanc tressé. Ces claies sont simplement posées sur des tasseaux, maintenus en place par des montants. Il suffit d’y placer les fruits, récoltés par temps sec, en évitant que ces fruits se touchent. S’il s’agit de poires, elles reposent sur l’œil placé à l’opposé du pédoncule. S’il s’agit, au contraire, de pommes, elles reposent sur le pédoncule.

Mais le petit propriétaire qui ne doit compter que sur une récolte de quelques centaines de fruits, peut fort bien trouver, dans les différents types de fruitiers portatifs du commerce, les appareils pratiques lui permettant de réaliser, sans la moindre difficulté, l’entreposage et la parfaite conservation de ces fruits en utilisant, bien entendu, un local remplissant, aussi parfaitement que possible, les différentes conditions indiquées ci-dessus.

Tantôt l’appareil est constitué par un certain nombre de clayettes à claire-voie avec pieds, de dimensions variables, mais susceptibles de se superposer très exactement sans exiger aucun bâti, et de former un ensemble fort peu encombrant. Entre ces clayettes, l’air peut circuler librement. La visite d’un tel fruitier est chose extrêmement facile, car il suffit, après avoir vérifié l’état des fruits de la clayette supérieure, de placer celle-ci à terre, d’examiner les fruits de la seconde que l’on met par-dessus, puis ceux de la troisième, et ainsi de suite jusqu’à la clayette du fond, qui se trouve finalement au-dessus.

Ce fruitier peut, si la chose se révèle indispensable, être garanti des rongeurs par une toile métallique fine, constituée soit de panneaux munis d’un dispositif de fixation, soit de toute autre manière.

Tantôt le fruitier portatif est formé d’un bâti comprenant des montants en bois ou en fer, réunis par des traverses sur lesquelles viennent se poser des claies. Celles-ci se trouvent ainsi superposées à 20 centimètres environ l’un de l’autre et, comme on peut les coulisser à volonté, il devient facile de procéder à la visite périodique du fruitier, lorsqu’elle est nécessaire. Huit ou dix claies, de 50 centimètres environ de côté, peuvent ainsi se superposer, formant, par leur ensemble, un appareil dont la hauteur n’excède pas 1m,50 ou 2 mètres et qui peut contenir plusieurs centaines de beaux fruits.

Parfois encore, le fruitier est une sorte de garde-manger entouré d’une toile métallique fine, dans lequel les fruits sont placés dans des tiroirs peu profonds, ou même sur des claies mobiles coulissant sur des tasseaux disposés à cet effet. Les dimensions peuvent en varier selon la quantité de fruits que l’on se propose d’entreposer.

Quelques constructeurs ont apporté récemment des modifications, basées sur des observations scientifiques, à ces divers modèles, en réglant l’aération et l’éclairement, de retarder ou d’avancer de quelques jours la maturité des fruits.

Au lieu de claies, on a, dans ce cas, des casiers à fond plat garnis d’une substance absorbante (matelas de fins copeaux ou de sciure, par exemple) sur laquelle sont posés les fruits. Ces casiers s’emboîtent l’un dans l’autre par une feuillure qui forme en même temps poignée.

Sur les côtés sont des ouvertures permettant la pénétration de l’air et de la lumière, ouvertures qui peuvent être, au besoin, obturées à l’aide de volets en fort carton. Pour arrêter les phénomènes d’oxydation et retarder ainsi la maturité des fruits, on place les volets. On les retire, au contraire, pour activer les maturations et pouvoir avancer quelque peu la consommation de certains fruits dans les périodes creuses.

En connaissant bien l’époque moyenne de maturité des fruits, on peut ainsi arriver, avec un peu de doigté, à en régler presque à son gré l’utilisation.

E. DELPLACE.

Le Chasseur Français N°601 Septembre 1941 Page 416