Beaucoup de cultivateurs se sont contentés, quand leur
contrée fut électrifiée, de faire installer l’électricité dans leur maison
d’habitation, sans étendre cette installation aux communs et bâtiments
d’exploitation. Jugeant sans doute la lumière électrique un luxe inutile pour
les vaches, chevaux et autres animaux de la ferme, ils continuaient de se
servir d’une lampe à pétrole ou d’une lanterne à huile ou à bougie, pour
s’éclairer dans les étables, écuries, etc. ... Nous avons déjà indiqué que
cette manière est généralement peu économique, car, en plus des dépenses de
pétrole ou de bougie, on paye, pour la maison seule, les frais fixes
mensuels (location de compteur, entretien du branchement, etc. ...) qui
représentent souvent une partie importante des quittances de la compagnie
électrique et qui ne sont pas plus élevés pour une consommation plus
importante. Maintenant, d’ailleurs, la question économique passe au second
plan : la pénurie des corps gras et des produits pétroliers ne permet plus
de les utiliser librement pour l’éclairage, et, chaque fois que l’on dispose du
courant électrique, il faut étendre l’installation à tous les locaux où la
lumière est indispensable.
Une objection que les cultivateurs formulent parfois contre
l’extension de l’éclairage électrique aux bâtiments d’exploitation, c’est le
danger d’incendie. En réalité, le risque est très faible, certainement moindre
qu’avec les autres moyens d’éclairage, si l’installation électrique est
soigneusement faite; peut-être faut-il craindre que cette dernière condition ne
soit pas toujours aussi scrupuleusement respectée à l’époque actuelle qu’en
temps normal, non par la faute de l’installateur électricien, mais à cause du
manque de matériel, qui peut obliger parfois à se contenter de ce que l’on
trouve encore dans le commerce : il ne devra pourtant jamais en résulter
un risque appréciable, et, en tout cas, il y a un moyen bien simple d’éviter
tout danger d’incendie. Il suffit, au départ de la ligne électrique alimentant
les bâtiments d’exploitation, d’intercaler un interrupteur placé dans la
maison, à un endroit commode, près de la porte par où l’on gagne ces
bâtiments : chaque soir, en rentrant se coucher, on manœuvre cet
interrupteur, isolant ainsi les locaux où l’incendie serait le plus dangereux
s’il se déclarait la nuit, sans qu’on puisse s’en apercevoir, et, par
conséquent, le combattre immédiatement. Et si l’on craint encore d’oublier de
manœuvrer régulièrement cet interrupteur — quoique ce soit une habitude
vite prise — on peut aussi se munir d’une lampe-témoin, qui pourra
même être installée dans une chambre à coucher de la famille ! Mais,
alors, l’électricité n’étant certainement pas la principale cause d’incendie,
surtout à la campagne, il vaudrait mieux sans doute avoir constamment sous la
main un bon extincteur et une police d’assurance bien faite ...
Une fois décidée l’installation de l’éclairage électrique
dans ces bâtiments, encore faut-il la réaliser le mieux possible, sans oublier
que, là comme ailleurs, un équipement bien conçu, qui semble d’abord plus
coûteux, permet ensuite d’obtenir de sensibles économies de consommation.
Écuries. Étables.
— Naturellement, il n’est pas nécessaire d’avoir un
éclairage très intense, ni surtout des appareils bien luxueux : de simples
réflecteurs en tôle émaillée, d’entretien facile, conviennent
parfaitement ; toutefois, au lieu de l’abat-jour classique en forme
d’assiette, on préférera une forme rationnelle, plus creuse, qui renvoie mieux
vers le bas la plus grande quantité de lumière, car il ne faut pas trop compter
sur l’effet réfléchissant des murs et plafonds, qui ne sont pas souvent
suffisamment blancs. Comme toujours, il faut adopter un compromis entre les
deux solutions : foyers lumineux puissants et peu nombreux, qui donnent la
lumière au meilleur compte, les ampoules ayant un meilleur rendement, ou lampes
multiples qui procurent un éclairage plus agréable, mieux réparti, avec des
ombres plus douces. Pratiquement, on n’utilisera pas d’ampoules de moins de 40
ou 60 watts, et les foyers seront écartés de 4 à 6 mètres,
c’est-à-dire que — sauf pour les très petits bâtiments, de deux ou trois
bêtes seulement, on aura au moins deux lampes, ou davantage ; en les
répartissant en deux circuits pouvant s’allumer séparément, on pourra réaliser
des économies de consommation chaque fois qu’il n’est pas indispensable
d’allumer tout ensemble. Notamment, si l’entrée de l’écurie sert également de
passage vers d’autres bâtiments, ou pour l’échelle du grenier, il est bon que
la première lampe destinée à éclairer particulièrement ce passage puisse
s’allumer seule, et même qu’elle soit disposée pour ne pas trop éclairer les
bêtes, de façon à éviter de les déranger chaque fois, inutilement.
Laiteries.
— C’est un local essentiellement propre et où il faut
un très bon éclairage. Murs et plafond étant régulièrement blanchis, on se
trouvera bien d’une ampoule de 75 ou 100 watts, enveloppée d’un diffuseur
clos, de forme simple, au centre de la pièce ; si celle-ci est assez
grande, on pourra ajouter contre les murs deux ou trois appliques éclairant
spécialement chacun des appareils : écrémeuse, baratte, malaxeur, et qu’on
allumera successivement suivant les différentes phases du travail.
Garage.
— Si l’automobile ne sert plus guère, en ce moment,
cela ne durera pas indéfiniment, et il vaut mieux prévoir tout de suite
l’équipement électrique du garage. Une ampoule de 60 ou 75 watts, dépolie
de préférence et munie d’un bon réflecteur en tôle émaillée, sera placée, non
pas au centre du garage — où elle n’éclairerait probablement que le toit
de la voiture — mais nettement vers le fond, à peu près au-dessus du
moteur ; d’ailleurs, c’est généralement au fond du local qu’on dispose un
petit établi ; si cet établi est placé dans un autre coin, on l’éclairera
indépendamment par une applique. Ne pas oublier non plus une prise de courant,
qui servira soit pour une lampe baladeuse, soit pour un petit rechargeur
d’accumulateurs.
J. KAEPPELIN,
Ingénieur E. S. E.
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