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L’éducation respiratoire

L’un des premiers soucis du sportif doit être d’adapter sa respiration à l’exercice ou au sport qu’il pratique. Il va de soi que le débit respiratoire doit être proportionnel à l’intensité du travail produit, et que le rythme de la respiration doit s’adapter, dans la mesure du possible, à celui de l’exercice.

Tout comme un bon conducteur règle le débit de l’essence et des gaz, selon l’effort qu’il demande à son moteur.

En effet, la respiration pulmonaire n’est que la traduction apparente de la respiration d’ordre plus général qui s’effectue au cours du travail dans tous nos muscles et dans tous nos tissus, celle-ci restant inaperçue du profane.

C’est au niveau des alvéoles pulmonaires que s’effectuent les échanges entre l’air chargé de toxines à la suite de ce travail généralisé et l’air frais apporté de l’extérieur à chaque inspiration. On peut se faire une idée de l’importance de ces échanges en se souvenant que, développée, la surface de ces alvéoles représente environ 100 mètres carrés et que l’air qui y circule en vingt-quatre heures peut être évalué à 10.000 litres. Car, sous peine d’intoxication, il faut constamment le renouveler, c’est pour que cet échange se fasse dans les meilleures conditions qu’il est nécessaire d’apprendre à l’enfant à respirer au repos d’abord, puis au sportif de respirer pendant l’exercice. Il est prouvé d’ailleurs que, par une éducation respiratoire à la portée de tous, on parvient en quelques mois à ramener à la normale (3 litres et demi environ chez les adultes) la capacité respiratoire de la plupart des sujets chez lesquels cette capacité est insuffisante par rapport à leur taille et à leur poids.

Sous l’influence du travail ou de l’exercice sportif intense, la respiration s’amplifie et s’accélère dans des proportions considérables, puisque le débit peut passer du simple au quadruple.

En même temps, la durée de l’inspiration et celle de l’expiration (celle-ci beaucoup plus longue au repos) tendent à s’égaliser, ce qui se traduit pratiquement par l’essoufflement.

Enfin, il faut saisir que nous pouvons, dans une certaine mesure, diriger et contrôler, par notre propre volonté, le rythme et le débit de notre respiration, contrairement à celui, par exemple, de notre circulation, sur laquelle notre volonté est impuissante. C’est dire l’importance capitale que prend, en matière de sport, l’éducation respiratoire. À ce point qu’on peut affirmer que la respiration est le rythme de base de tout exercice sportif.

Doit-on, comme tous les classiques le disent, respirer par le nez ? Théoriquement oui, puisque, grâce à la muqueuse dont il est tapissé, le nez va réchauffer et humidifier l’air aspiré, le préparant ainsi à son contact avec les alvéoles pulmonaires et le débarrassant en outre des poussières et des germes qu’il contient, comme le meilleur des filtres. Et ceci est vrai dans la respiration au repos. Ou au cours d’un exercice modéré, tel que celui d’une leçon d’éducation physique élémentaire.

Mais, pratiquement, dès que l’exercice devient intense, la respiration par la bouche et le nez à la fois devient nécessaire pour assurer un débit suffisant. C’est à ce moment qu’interviennent aussi la cage thoracique et le diaphragme, solidaires avec la sangle abdominale, qui leur sert de base et de point d’appui.

C’est dire que l’éducation respiratoire est complexe. Elle doit porter à la fois sur le nez et la bouche, sur la cage thoracique et la sangle abdominale. C’est ainsi qu’il faut apprendre à l’enfant à « creuser le ventre » pendant que les côtes s’abaissent pour l’expiration, afin que celle-ci soit aussi complète que possible, condition indispensable pour que l’inspiration suivante puisse avoir, à son tour, toute son amplitude.

L’éducation respiratoire et la gymnastique préparatoire à cette éducation sont donc en réalité complexes, puisqu’elles doivent porter sur les trois « étages » que nous venons de décrire : voies respiratoires supérieures (nez et bouche), cage thoracique, abdomen. Et que ces trois étages sont en pratique étroitement unis et solidaires, avec des variantes individuelles selon le type, l’âge et le sexe du sujet considéré.

Dr Robert JEUDON.

Le Chasseur Français N°603 Novembre 1941 Page 534