Dans notre dernière causerie, nous avons examiné la conduite
et l’entretien des gazogènes. Pour clore ce chapitre, il nous reste à examiner
les modifications classiques que l’on fait subir au moteur lors de l’adaptation
d’un gazogène sur un véhicule préalablement équipé pour la marche à l’essence.
Quand le gazogène est construit et monté, on peut se livrer
aux essais avec le moteur tel qu’il est d’origine. Il est évident que le moteur
doit être en bon état mécanique, c’est-à-dire posséder de bonnes compressions.
Si l’on a une marge de surpuissance, on pourra, dans certains cas, se contenter
d’un tel montage et n’entreprendre aucune modification mécanique. L’essai
fixera l’usager d’une façon certaine. Dans le cas contraire, il y aura lieu
d’agir sur l’un ou l’autre ou mieux encore sur l’un et l’autre des deux points
suivants du moteur :
1° Augmentation du rapport de compression ;
2° Augmentation du diamètre du collecteur d’admission. Pour
la majorité des véhicules de série, on trouve dans le commerce des tuyauteries
ou collecteurs d’admission à grande section ou encore des culasses spéciales
« Gazo » à haute compression. Si l’on n’est pas limité par la
dépense, on pourra toujours faire appel avec fruit à ces accessoires.
Au cas où on ne voudrait pas faire les frais d’une nouvelle
culasse, ou si l’on n’en trouve pas sur le marché, on pourra tourner la
difficulté de la manière suivante. Il y a, en effet, deux façons d’augmenter la
compression sur un moteur existant :
1° Raboter la culasse sur son plan de joint ;
2° Monter des pistons avec des hauteurs, d’axe au fond, plus
grandes.
La deuxième solution n’est à employer que s’il est
impossible, pour une cause quelconque, de faire appel à la première. Il existe
des spécialistes qui ont déterminé pour chaque culasse de moteur quel est le
nombre de millimètres à enlever afin d’obtenir un bon rendement et une marge de
sécurité suffisante. Ces motoristes exécutent souvent en plus un polissage ou
un dépôt par électrolyse d’un métal antidétonant dans le collecteur d’admission.
Toutes ces opérations donnent de bons résultats.
Le rapport, volumétrique de compression le plus usuel à
atteindre pour la marche au gaz est de 8 à 1. On peut déterminer l’ordre de
grandeur de ce rapport en remplaçant une bougie par un manomètre et en tournant
le moteur très lentement pour laisser au gaz le temps de se refroidir. Cette
mesure est peu précise, car l’air a le temps de s’échapper par les fentes des
segments. Mais le mieux, le moteur étant démonté, est de procéder comme
suit : enlever les poussoirs de soupape, placer le piston au point mort
haut, et, par le trou de bougie, verser doucement, afin de laisser à l’air le
temps de s’échapper et de ne pas donner naissance à de la mousse, de l’huile
jusqu’au point bas du trou de bougie, faire descendre le piston ensuite
jusqu’au point mort bas et faire à nouveau le plein d’huile. On jauge le plus
exactement possible le volume d’huile versé chaque fois. Si, la première fois,
on a versé un volume v, à la seconde fois, un volume V, on en déduit le
rapport volumétrique en additionnant V plus v et en divisant le chiffre
obtenu par v. On détermine la hauteur à raboter approximativement On
rabotera, puis on vérifiera si le rapport est atteint. Au cours du rabotage, il
y aura lieu de faire attention à ne pas atteindre les chambres d’eau et laisser
un voile de sécurité suffisant. Si l’on veut fonctionner de nouveau à l’essence
par la suite, il suffira de mettre plusieurs joints de culasse ou de faire
exécuter un joint spécial.
Nous rappelons qu’il faut être très prudent si, avec une
culasse à haute compression, on désire marcher accidentellement à
l’essence ; avoir soin de n’employer le moteur qu’à de petits régimes.
Quant à accroître le diamètre du collecteur d’admission, on pourra, pour cela,
s’adresser aux spécialistes de la marque ou de ce genre de transformations pour
savoir s’il existe déjà des collecteurs à gros diamètre (le plus gros possible)
pour la marche du gazo. Sinon, on pourra confectionner ou faire confectionner
des collecteurs spéciaux soit en fonte, soit même en tôle, et répondant à ces
conditions. Certains moteurs à collecteur d’admission noyé dans la masse du
cylindre ne se prêtent pas à cette transformation. Si l’on désire dans se cas
obtenir le rendement maximum, il faudra faire appel au surcompresseur.
Enfin, si l’on garde le collecteur d’origine, on pourra faciliter
le passage des gaz, en polissant soigneusement au grattoir, puis à la toile
émeri, l’intérieur dudit collecteur.
Voyons les pannes : le moteur refuse de partir sur les
gaz ; si l’on dispose d’un aspirateur, on essaye le gaz à la cheminée :
A. il flambe bien, mais ronfle plus ou moins régulièrement :
l’entrée d’air est mal réglée ou il y a une entrée d’air intempestive aux
portes ou ailleurs.
B. Il ne flambe pas : le foyer n’est pas encore en
activité, la grille est encombrée de cendres ou autres.
C. Il consent à rester allumé, mais sa flamme est
éclairante, faible : il n’arrive pas assez d’air au foyer, tuyère
obstruée ; la piquer, au besoin la décrasser ; trou de la tuyère
insuffisant. Si l’on a prévu un jeu de buses, on pourra se livrer à des essais
et juger du résultat.
D. Il flambe, s’éteint, recommence si on l’allume à
nouveau : c’est la qualité du combustible qui est en jeu. Il peut être
mouillé ou d’un calibrage non conforme.
Si, étant parti sur le carburateur à l’essence, le
moteur ayant tourné cinq à dix minutes dans de bonnes conditions, il refuse de
passer sur le gaz, on retombe sur l’une des causes précédentes et les remèdes
sont les mêmes.
Le moteur étant franchement sur gaz : la
puissance normale pendant les premières heures baisse sensiblement quoique
l’allumage électrique soit bon : commande d’avance à l’allumage déréglée,
le combustible va bientôt manquer, formation de voûte au-dessus du foyer,
calibrage défectueux du combustible. Si ce phénomène se présente après un
rechargement de trémie, on peut en conclure que le nouveau combustible contient
trop d’eau. Le remplacer par un autre bien sec. Si le même incident se produit
en fin de journée et d’une façon lente, avec affaiblissement important de la
puissance, c’est que des rentrées d’air anormales se sont produites ;
vérifier les portes. Dans tous ces cas, la trémie a une température plus élevée
que la normale. Avec un filtre bouché ou des manchons colmatés, les mêmes phénomènes
se produisent, mais la trémie reste froide.
Quelques autres causes du phénomène qu’un véhicule tire
moins qu’au début :
Charbon trop gros ou de qualité inférieure : le
changer.
Tuyère obstruée : piquer ou décrasser.
Grille encrassée : la décrasser.
Tube de prise de sortie des gaz obstruée par les
cendres : à décendrer.
Manchons encrassés ou colmatés : les brosser et les
remettre en état.
Tuyauterie obstruée : démonter, si possible, et laver
avec un fort jet d’eau.
Mauvais allumage du moteur : mêmes diagnostic et
remèdes que pour le moteur à essence.
La sortie des gaz rougit ; ce qui peut entraîner la
détérioration de la grille : charbon trop gros ; rentrée d’air
par la porte du foyer ou encore par la porte de trémie ; besoin de
décrassage de la grille ; formation d’une voûte tenant à un mauvais
calibrage du charbon ou à un arrêt trop prolongé : coups de ringard.
Le foyer rougit : vitesse insuffisante du vent
dans la tuyère, celle-ci a un trou trop gros ; monter une buse du diamètre
voulu.
Pour un véhicule brûlant de 8 à 10 kilogrammes à l’heure, il
faut un trou de 20 millimètres. Il peut y avoir aussi une masse de laitier sur
la grille : décrasser.
Les tuyères brûlent : entrée d’air au joint de
la tuyère : le changer. Avec la tuyère à circulation d’eau : mauvaise
circulation d’eau.
Le filtre de sécurité s’encrasse souvent :
manchons accidentés.
Mauvais allumage, pétarades à l’admission :
s’assurer si les pointes de bougies ont l’écartement désiré : 1 à 3 dixièmes
de millimètre au maximum. Avec un moteur surcomprimé, il importe d’avoir des
bougies spéciales de très bonne qualité ; une bobine également et des
accus surpuissants et en parfait état.
G. AVANDO.
|