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Novembre au jardin potager

Attention ! c’est le mois des grandes précautions ; on espère toujours un été de la Saint-Martin, mais parfois ce sont les pluies froides de novembre, même quelques neiges précoces qui surviennent inopinément. Alors, adieu les beaux espoirs ; agissez donc comme s’il devait faire mauvais, vous jouirez encore mieux des quelques beaux jours qui vous seront dispensés.

Travaux généraux.

— Vous allez avoir du terrain libre par suite de l’arrachage de presque tous vos légumes ; n’attendez pas, amenez le fumier, faites l’épandage des engrais potassiques et phosphatés, de la chaux agricole et bêchez en « billon » ou « dos d’âne » ; de cette façon, l’eau de pluie s’écoulera parfaitement, de même celle provenant de la fonte des neiges ; la terre s’émiettera facilement sous l’effet des gelées, les engrais organiques décomposés produiront leur effet maximum au printemps, secondés par l’action des sels de potasse dissous et des phosphates.

Vous voyez tous les avantages que vous retirerez d’un labour ou bêchage fait à cette époque ; songez aussi qu’en février ou mars le temps ne permet pas toujours d’entreprendre ces travaux lorsqu’on le voudrait.

Ne laissez pas en désordre sur le terrain les rames qui ont servi aux haricots ou aux derniers petits pois, les tuteurs des tomates, etc. ... ; mettez-les à l’abri.

Brûlez les feuilles de haricots atteints de la rouille, vous ne devez pas ignorer que les spores se conservent en terre d’une saison pour l’autre. De même, désinfectez le sol au sulfure de carbone, de calcium ou autres produits que vous trouvez dans le commerce.

Ayez toujours des paillassons à proximité pour abriter châssis et cloches, de la paille ou des feuilles sèches de grande fougère, pour couvrir bâches ou silos.

Arrachez par poignées les derniers haricots ; pour en activer le séchage, vous les suspendrez sous un hangar, où vous pourrez faire courant d’air. Ne vous laissez pas surprendre par les gelées.

Si vous ne l’avez fait le mois dernier, débuttez les asperges et coupez les tiges à environ 10 centimètres ; mais surtout brûlez-les, elles abritent les larves du criocère et de la mouche de l’asperge ; ceci est important.

Si vous avez fait blanchir les côtes des feuilles d’artichauts, récoltez-les, sinon coupez-les et buttez les pieds sur une hauteur de 15 à 20 centimètres. Ces plantes ne craignent pas beaucoup le froid, mais plutôt l’humidité ; parfois, elles pourrissent complètement l’hiver. Pour préserver le cœur, il faut avoir des feuilles ou de la menue paille bien sèches ; par surcroît de précautions, faites un bon capuchon de paille que vous poserez dessus et que vous retirerez lorsque le temps le permettra, afin de faciliter l’aération.

Continuez d’enjauger tous les choux pommés, comme nous l’avons indiqué ; vous les couvrirez de paille ou de fougère par grands froids, mais toujours, lorsque vous le pourrez, aérez-les.

Arrachez les chicorées de Bruxelles (endives), égalisez les racines, coupez-les à 12 ou 15 centimètres, nettoyez les feuilles du collet et coupez-les à 2 centimètres de hauteur ; vous les mettrez en jauge, dans une tranchée profonde de 35 centimètres environ, les rangs espacés de la largeur de la main et deux doigts entre chaque plant. Recouvrez le tout de 10 à 12 centimètres de terre légère, tamisée si possible ; arrosez fortement. Lorsque les feuilles commencent à poindre à la surface, recouvrez encore d’une même épaisseur de terre légère, abritez avec des feuilles, ou, si vous voulez récolter tôt, recouvrez quelque temps après de fumier chaud. Faites de même pour la chicorée sauvage améliorée, qui vous fournira la barbe-de-capucin ; toutefois, recouvrez d’une épaisseur moindre de terre.

Arrachez aussi des pissenlits améliorés, égalisez les racines et faites des paquets de six, que vous ferez blanchir de la même façon ; vous obtiendrez ainsi une belle rosette de feuilles tendres, ayant au moins l’équivalence d’une grosse laitue ; c’est une salade très appréciée pendant l’hiver.

Par nos temps de restrictions, utilisez les racines de ces deux chicorées de la même façon que celles cultivées sous le nom de chicorées à café ; peut-être les premières sont-elles moins riches en matières sèches, mais elles donnent, cependant, de bons résultats.

Semis et plantations.

— C’est le ralentissement général ; cependant à bonne exposition, en terrain bien sain et fumé, semez les Pois Michaux, dits aussi Pois de la Sainte-Catherine, mais ne vous inquiétez pas trop de la variété exacte, semez un bon pois précoce, vous n’avez que l’embarras du choix ; ils sont nombreux et très bons.

Les Fèves, dans certaines régions, sont trop délaissées, parce que semées trop tard ; elles donnent de mauvais résultats, ne sont pas pincées ni soignées et se couvrent de pucerons noirs ; semez-les actuellement, vous verrez que vous serez contents de votre récolte. Ces semis peuvent se faire en terrain abrité ou sur côtières.

En terre fumée du printemps, faites tous vos semis de bulbes, Ail blanc ou rose, Rocambole, Échalote ordinaire ou de Jersey, ces dernières peu enterrées. Parfois, des retardataires repiquent des Oignons blancs ; il est préférable d’attendre au printemps, parce que les plants insuffisamment enracinés seront soulevés par les gelées et devront de nouveau être tassés au beau temps.

Si vous disposez de forts plants de Laitues d’hiver, mettez-les en place sur côtières, de même que les Choux Cabus et Milan hâtifs : Express, d’York, Cœur de bœuf, Goannet, d’Aubervilliers, etc. ...

Vous pouvez tenter un dernier semis d’Épinards ; en tout cas, n’hésitez pas à éclaircir vos précédents semis, de même que ceux d’Oseille, vous en serez récompensés par des feuilles plus larges.

Abritez les semis de Carottes, faites à la fin de septembre.

Repiquez encore vos forts plants de Fraisiers avec une petite motte si possible.

Semis et plantations sous châssis et cloches.

— Sous cloches qu’il ne faut pas laisser inoccupées, cette année surtout, plantez à bonne exposition, en terrain sain, ou sur une vieille couche que vous ne voudriez pas laisser avant mars, un chou Express ou Cœur de bœuf, une Laitue romaine, que vous entourerez de Laitues de Milly, crêpe ou gotte.

Mettez une cloche sur Laitues d’hiver, de Trémouk ou autres, que vous aurez plantées en conséquence ; vous en activerez la récolte.

Si le fumier ne vous fait pas défaut, semez sur une couche tiède, avec réchauds, des laitues à couper, des romaines, des carottes hâtives, courte de Hollande, Davanture, Bellot, etc. ..., radis à forcer, pois nains hâtifs.

Vous pouvez également semer des épinards, mais nous vous recommandons de repiquer de forts plants ou des éclats d’oseille qui donneront, sans discontinuer, des feuilles nombreuses jusqu’en avril. Notez que vous pouvez prolonger votre récolte d’épinards, tétragone, oseille, en abritant ces plantations la nuit, en ayant soin de garnir les coffres de feuilles tout autour.

Marcel EBEL.

Le Chasseur Français N°603 Novembre 1941 Page 538