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Lettres de ma plate-bande

Les crosnes du Japon.
La flore des étangs.
À propos de la bruche des haricots.
Destruction des chardons.

Les crosnes du Japon.

— M. Saunavot, abonné à Eaubonne (Seine-et-Oise), m’écrit : « Vous serait-il possible de traiter, au cours de l’un des articles si goûtés de votre Plate-Bande, de la culture du crosne du Japon, qui intéressera certainement nombre de lecteurs ? »

Le crosne (Stachys affinis bunge) est un légume japonais d’importation assez récente, cultivé pour la première fois à Crosnes, dans la Seine-et-Oise. C’est une plante vivace, dont les rhizomes comestibles, en forme de chapelets, sont appréciés des gourmets, cuits à l’étouffée, frits, sautés au beurre, accommodés en salade, à la maître d’hôtel, etc. ...

Le crosne est un légume rustique, de culture facile, qui, dans les terres fraîches et fertiles, donne un rendement qui dépasse 100 kilogrammes à l’are. Les tubercules se plantent par trois, en mars-avril, dans trois petits trous rapprochés, profonds de 5 à 7 centimètres, qui formeront une touffe distante de ses voisines de 35 centimètres environ. Biner et sarcler en cours de saison, arroser si possible.

La récolte commence en novembre lorsque les tiges se fanent, au fur et à mesure des besoins, parce que, exposés à l’air, les tubercules flétrissent et perdent rapidement de leurs qualités. À l’approche des froids, on recouvre la plantation d’une litière longue ou de fumier pailleux, mélangés de feuilles, ce qui permet de pouvoir arracher des crosnes en tous temps, même par les fortes gelées.

La flore des étangs.

— M. Bénit, à Le Moutet (Allier), demande : « Je possède un étang dont je voudrais enherber les bords. Quelle plante dois-je y mettre et où me la procurer ? »

Indépendamment de la note pittoresque que les plantes des berges communiquent aux étangs et aux ruisseaux, la flore aquatique joue un rôle important, parce qu’elle attire les insectes, les mollusques et les infusoires qui, avec la matière organique pourrissante, contribuent pour une bonne part à la nourriture des poissons. En outre, la végétation oxygène l’eau, elle ombrage les rives et procure des refuges aux alevins, etc ; ...

On distingue : les plantes émergées, les plantes flottantes et les plantes immergées, ayant chacune leur intérêt. Comme M. Bénit désire seulement peupler les bords de son étang, il choisira, dans la catégorie des végétaux émergés, ceux qui lui conviennent le mieux sur la liste ci-après : l’acore, l’arum, l’aune, le butonne, la berle, le populage, le carex, l’iris jaune, les joncs, la linaigrette, la massette, le plantain d’eau, le roseau commun, le saule, etc. ...

Pour multiplier ces végétaux mi-aquatiques sur les rives d’un étang, on se procurera des boutures ou des plants enracinés faciles à trouver dans tous les lieux marécageux, puis on les repiquera les pieds dans l’eau, à une petite distance de la berge. Leur multiplication se fera ensuite naturellement par graine ou par drageonnage, sans que l’on ait besoin d’intervenir.

À propos de la bruche des haricots.

— Suite à la rubrique parue en avril 1940, j’ai reçu plusieurs communications intéressantes, notamment de M. Fenouillet, de Dinsac (Haute-Vienne). Après avoir mentionné l’introduction récente du haricot en France, qui date du XVIIe siècle, M. Fenouillet dit en substance :

« La bruche des petits pois, fèves et autres, n’attaque pas le haricot, tandis que celle de ce dernier attaque toutes les légumineuses, sauf la lentille, à cause de sa faible épaisseur. En cinq jours, l’œuf pondu sur les gousses éclôt, la larve pénètre dans le grain et en sort adulte au bout de cinq semaines. La ponte d’une seule femelle étant d’environ 80 œufs, en comptant trois ou quatre générations dans la même année, on arrive à un total effrayant de 5 millions d’individus. Contre ce parasite, le sulfure de carbone a fait ses preuves. »

Une autre lettre de M. Lapiche, 35, rue des Donaras, à Louhans, signale que l’on peut exterminer toutes les bruches, aussi bien que les mites, les fourmis, les punaises, ainsi que les parasites des volailles, en utilisant un produit bien connu, le carbonyle.

M. Lapiche ajoute : « La bruche du haricot, de même que le phylloxéra et le doryphore, est un cadeau de l’étranger. Cet insecte a été apporté en France pendant la guerre de 14 et ses ravages sont aujourd’hui très importants. En ce qui me concerne, je suis arrivé à m’en débarrasser en badigeonnant au carbonyle l’intérieur de la caissette compartimentée qui me sert à séparer mes diverses variétés de haricots. Après je rabats le couvercle. Cette opération tue toutes les bruches (insectes parfaits et larves) sans nuire à la germination des graines. Pour les haricots destinés à la consommation, l’odeur du carbonyle disparaît au bout de quinze jours et l’on ne peut en être incommodé. »

Au nom de mes lecteurs, je remercie vivement M. Lapiche de son intéressante communication, car elle sera certainement mise à profit dans la lutte à organiser contre les parasites des jardins, des maisons et des basses-cours, d’autant plus que le carbonyle, le meilleur agent de protection des bois, est un insecticide d’un emploi facile, ne présentant pas les dangers du sulfure de carbone.

Destruction des chardons.

— « Ma fraiseraie, mon artichautière et mon aspergeraie sont envahies par les chardons qui y poussent vigoureusement et que je n’arrive pas à détruire, malgré des binages répétés. Connaissez-vous un produit efficace contre cette invasion, à laquelle je ne comprends rien ? »

Les chardons qui envahissent votre jardin proviennent certainement des graines apportées par le vent, sans doute parce qu’il y a, dans les terrains vagues avoisinants, des pépinières de cette malfaisante composée, que l’on néglige de faucher, avant maturité, malgré les arrêtés préfectoraux. C’est le défaut de façons, dans vos carrés de plantes vivaces, qui fait que les chardons y croissent plus nombreux que dans les parcelles en cultures annuelles et labourées au moins une fois l’an.

Sans doute, la destruction des chardons dans les terres nues pourrait se faire assez facilement, en épandant en couverture, à deux ou trois reprises, dans la même saison, un bon herbicide comme on en trouve dans le commerce ; mais cela ferait périr également les fraisiers, les artichauts et les asperges.

En l’occurrence, le seul moyen de venir à bout des chardons, c’est d’opérer ainsi qu’il suit : Procurez-vous de la sylvinite riche et de la cyanamide que vous mélangez en parties égales. Laissez croître vos chardons jusqu’à ce que les tiges soient lignifiées et prêtes à fleurir. Rabattez-les alors rez-de-terre à la faucille, puis déposez sur chaque coupe une pincée du mélange caustique, que vous avez en réserve. La pluie et la rosée feront fondre le sel et les racines en pourriront. La destruction des chardons est beaucoup plus certaine ainsi que si vous cherchiez à les arracher.

Adonis LÉGUME.

Le Chasseur Français N°604 Décembre 1941 Page 604