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Lettres de mon perchoir

Les poches d’eau.

— « La moitié de mes lapins, lorsque je les dépouille, sont porteurs de poches pleines d’eau incolore et inodore, qui se trouvent entre les muscles, aux épaules ou aux pattes. Ces poches, dont la grosseur varie entre celle d’une noisette et d’un œuf de poule, contiennent dans le fond des granulations blanchâtres ayant l’aspect des œufs de poisson. De quoi s’agit-il ? L’affection est-elle contagieuse ? la chair comestible ? »

Les poches en question, occasionnées par le ténia sérialis, proviennent d’œufs de ténias que les chiens rejettent avec leurs excréments et qui se trouvent déglutis par les lapins en mangeant les herbes souillées. Les larves éclosent dans le tube digestif, passent par le foie ; mais, au lieu d’en sortir pour aller se fixer après le mésentère et l’intestin, comme le font les larves de ténia serrata, elles se dirigent vers les tissus musculaires, où elles produisent des boules d’eau portant de nombreuses invaginations, avec têtes de ténia, qui reproduiront de nouveaux vers si les chiens venaient à les manger.

La cénurose du ténia sérialis, de même que la cysticercose du ténia serrata, n’empêchent pas la viande du lapin d’être comestible, puisque la cuisson tuerait sûrement les parasites. On peut d’ailleurs enlever les poches d’eau, ainsi que la chair attenante, mais cela n’empêche pas l’affection d’être répugnante pour le consommateur. Il n’y a pas d’autre remède que d’empêcher les chiens de fienter sur les herbes, à moins qu’on ne les débarrasse de leurs ténias, en leur faisant prendre un bon vermifuge, par exemple 3 à 4 grammes de noix d’arec ou encore de la poudre de Kalama ou de la racine de fougère mâle à la même dose.

Les gobeuses d’œufs.

— J’extrais d’une lettre pleine de doléances :

« Depuis six ans, je faisais au moins 70 poussins. Cette année, impossible de réussir une seule couvée. Toutes mes poules, sans exception, au bout de six à sept jours, ont mangé leurs 11 à 13 œufs. »

Des couveuses aussi dépravées que les vôtres, madame, sont justes bonnes à ce qu’on leur torde le cou. Vous pouvez d’abord être certaine que vos poules en incubation n’en sont pas à leur coup d’essai. Avant de tenir le nid, elles avaient déjà gobé plusieurs fois des œufs ; il est même probable que vous ne les corrigerez pas de leur habitude vicieuse, plus forte que l’instinct maternel.

Sans doute, en cherchant bien, on pourrait déterminer les causes originelles de la dépravation (étroitesse du parcours, défaut de verdure, de proies vivantes, de matières animalisées, etc.) ; mais cela ne nous avancerait pas beaucoup. Il faudrait dégoûter à jamais vos poules de becqueter les œufs, mis comme appât, par exemple en les traversant d’un fil électrifié, ou en les remplissant de moutarde après les avoir vidés. De toutes manières, des poules ovivores ne devraient jamais être utilisées au titre de couveuses, car il s’agit d’une manie, difficile à guérir. Comme cette gloutonnerie d’un genre spécial est passablement contagieuse, le mieux est de diriger vers la cuisine toutes les volailles qui en sont affectées.

Frigidité galline.

— « Mes cinq coqs, qui étaient fort bons et ont à peine deux ans, ne me donnent que 12 ou 75 œufs fécondés mirés au cinquième jour sur 12 à 14 douzaines d’œufs, donc 1 œuf sur 12. »

Suivent des explications se rapportant aux soins, à la nourriture, sur lesquels je glisse, pour arrêter mon attention sur un exposé succinct qui me donne, je crois, la clé de l’énigme :

« Cet hiver, mes poules ont eu la diphtérie, une partie d’entre elles ont la gale aux pattes et du picage. Malgré deux vaccinations, elles sont dans un état assez lamentable. »

Encore une basse-cour qui ne peut être d’aucun rapport parce qu’elle est peuplée de volailles malades, anémiées, déprimées sexuellement, en conséquence, incapables de fournir des œufs fécondés.

En principe, les œufs provenant de volailles diphtériques, même guéries de cette affection, ne devraient jamais être mis en incubation, ne pouvant pas être bien embryonnés, même s’ils étaient fécondés. A fortiori, doit-on les exclure invariablement lorsque les poules sont en traitement, ou en voie de guérison.

D’autre part, les volailles qui se piquent ne valent rien pour la reproduction, parce que cette dépravation vicieuse est l’indice d’un défaut de soins et d’une alimentation anormale sous le rapport des matières animales, minérales et des vitamines. Rien d’étonnant, alors, que des œufs issus d’un parquet en double déficience organique et génésique ne puissent fournir qu’un faible pourcentage d’œufs fécondés. D’ailleurs, les œufs embryonnés ne pourront jamais engendrer que des poussins malingres, sans vitalité, destinés à trépasser au bout de quelques jours. Pour les mises à couver, il ne faut pas oublier que les coqs doivent provenir d’un élevage en parfait état physiologique, peuplé de reproducteurs sains, ardents et rationnellement nourris.

La Faverolles.

— « Que pensez-vous des Faverolles ? Je ne suis pas très satisfait des volailles de cette race et mon intention est de les remplacer. Voudriez-vous me guider pour le choix ? »

La Faverolles est une race de création assez récente, qui semble tenir la première place pour la production des poulets précoces, à la chair délicate. La poule est, en outre, une couveuse et une maman de premier ordre, qui prend soin de ses poussins et réussit fort bien ses couvées.

On lui reproche parfois d’être assez avare de ses œufs, mais cela n’est vrai que si on la néglige. Bien soignée et convenablement nourrie, elle pond normalement, et ses œufs, à coquilles très colorées, sont très appréciés. Il est possible que son rendement global soit quelque peu inférieur à celui des races pondeuses, dans le genre de la Bresse, de la Wyandotte et de la Leghorn ; toutefois, elle a le mérite de pondre de bonne heure, à condition d’éviter pour elle le froid aux pattes.

Les trois races précitées étant moins estimées que la Faverolles pour le poulet, il y aurait un moyen simple d’obtenir satisfaction, à tous les points de vue, ce serait de croiser le coq Faverolles avec la poule Leghorn, par exemple, afin d’obtenir des métis mâles ayant du poids, de la précocité, de la viande de qualité, et des métisses femelles possédant les aptitudes de la très bonne pondeuse. Le croisement est couramment pratiqué dans la production des poussins de batterie.

Les œufs anormaux.

— « Pour quelle raison les œufs de mes poules ont-ils une coquille tellement mince qu’elle s’écrase au moindre choc ? Assez souvent, j’en trouve qui n’ont que leur membrane. Je remarque, en outre, que le jaune est pâle, donc peu appétissant. »

Les œufs hardés ou sans coquille et ceux à coquille mince ont fait l’objet de nombreuses discussions de la part des physiologistes, théoriciens et praticiens qui s’intéressent à la ponte des volailles. On sait aussi qu’en pondant un œuf du poids moyen de 60 grammes une poule exporte environ 7gr,2 de matières minérales, rien que pour former la coquille.

Aussi propose-t-on, pour remédier aux anomalies, de forcer l’alimentation minérale des poules. Sachant que, sur les 7gr,2, il y a 93,70 p. 100 de carbonate de chaux, 1,3 p. 100 de carbonate de magnésie, 0,75 p. 100 de phosphate tricalcique, autant de phosphate de magnésie, des traces de chlorure de sodium et de soufre, on a combiné des formules qui paraissent convenir à la restitution.

Logiquement, il devrait en être ainsi ; mais, dans la pratique, les apports ne suffisent pas toujours à rétablir le bon fonctionnement des oviductes déréglés, chargés de sécréter le test calcaire. Cela tient à ce que d’autres facteurs peuvent troubler les organes ovigènes. On peut citer à ce propos le défaut de matières azotées, de vitamines et de diastases énergétiques dans la ration des poules, les affections parasitaires et microbiennes, l’anémie, l’excès d’embonpoint, etc.

C’est pourquoi, tout en incorporant des verdures et des minéraux associés dans la ration, notamment des coquilles d’huîtres, il convient de vérifier d’abord l’état sanitaire des volailles, et, si on remarque quelque chose d’anormal, on les soumettra à un remède adéquat pour les guérir.

Mondiage d’ARCHES.

Le Chasseur Français N°604 Décembre 1941 Page 612