La question de l’alimentation est primordiale dans l’élevage
du gibier. Nous donnerons par ailleurs les renseignements sur la façon de
nourrir les reproducteurs et les jeunes, et nous allons dans cet article
traiter uniquement des cultures pour le gibier.
L’on n’attache généralement pas une importance suffisante au
rôle que joue la verdure dans l’alimentation, et nous attirons spécialement
l’attention des éleveurs sur tous les avantages qu’ils retireront en apportant
à cette question tous les soins qu’elle mérite.
Comme en toute chose, il faut, pour obtenir un bon résultat,
s’y prendre en temps voulu et se rappeler que le temps perdu ne se rattrape
jamais. C’est donc aussitôt que les grands froids seront passés qu’on sèmera,
de façon à avoir le plus tôt possible une abondante provision de verdure à
distribuer au gibier.
Si l’on dispose de couches, on pourra y semer : de la
chicorée sauvage et améliorée (récolte en mars-avril), de la laitue de
printemps (récolte en avril-mai), différentes sortes de choux hâtifs (récolte
dès juin). Au cas où l’on ne pourrait faire ces mêmes cultures qu’en pleine
terre dès que le froid est passé, on aurait beaucoup moins vite de la verdure à
distribuer.
Il faut songer aussi aux gazons sur lesquels on fera
l’élevage, et l’on peut dès ce mois en faire les semis ou garnir les parties
claires dans ceux existants.
L’achat des graines étant une question très importante, on
les demandera à une maison sérieuse, en lui désignant la nature du terrain à
ensemencer. On spécifiera aussi que le gazon est destiné à l’élevage du gibier
et qu’il est utile qu’il soit très court et garnisse bien le terrain.
C’est aussi en février l’époque de planter les topinambours,
dont on ne dira jamais assez l’utilité, car le gibier a besoin de couverts en
plaine, et rien n’est plus facile que de les établir avec cette plante.
Le topinambour convient aux terres les plus maigres et les
moins fertiles, dans lesquelles il donnera un bon rendement.
Il peut occuper un terrain pendant plusieurs années et
donner chaque année de nouvelles tiges.
On le cultive comme la pomme de terre. La plante comporte
une seule tige qui dépasse parfois 2 mètres.
Les tubercules qui se trouvent sous terre sont groupés en
touffes de dix à trente morceaux autour desquels circulent les racines. On en
distingue trois variétés, mais, comme culture de chasse, la variété commune est
suffisante.
Si le topinambour n’est pas difficile comme climat, du moins
demande-t-il, pour prospérer, d’avoir de l’eau. Cependant, un sol marécageux ne
lui est pas favorable, à moins qu’on y fasse un drainage.
On récolte jusqu’à 50.000 kilogrammes à l’hectare dans
les terrains très favorables, c’est-à-dire en terres légères et fraîches, par
plantation annuelle. Mais, au point de vue chasse, il n’est pas question de
récolte, puisqu’on le cultive principalement comme couvert permanent. Dans ce
cas, les tiges sont un peu moins hautes, chaque année, mais on peut sans
difficulté le laisser en place une vingtaine d’années.
Lors de la plantation, on cherchera à planter de gros tubercules,
afin d’avoir de fortes tiges. Le labour sera profond (30 à 40 centimètres). Si
l’on veut laisser le topinambour occuper le sol de façon continue, on
restituera annuellement à la terre un peu de matières absorbées par la plante,
en fumant avec du fumier de ferme (environ 40.000 kilogrammes par
hectare), auquel on ajoutera à dose modérée de l’engrais azoté et potassique du
commerce.
Pour planter un hectare, il faut environ 1.200 kilogrammes
de tubercules. Si l’on veut en donner au gibier en hiver, il faut le mettre en
silo, car, à l’air libre, il se ramollit et se décompose rapidement. Les
cultures que l’on fera pour nourrir le gibier sur le terrain comporteront
l’emploi de graines déterminées, suivant la nature des terrains.
On observera que, pour flatter le goût du gibier, il y a
lieu de faire un choix judicieux de cultures différentes. Il ne faut pas les
faire toutes au même endroit, mais, au contraire, les disséminer le plus
possible sur la chasse. On cherchera dans les mélanges de graines des sortes
hâtives qui couvriront le terrain de bonne heure et d’autres, au contraire, qui
croîtront tard.
Enfin, notons que donner de l’engrais à la terre destinée
aux cultures de chasse est fort utile, et mieux vaut fumer convenablement la
terre et diminuer le poids de la semence à l’hectare que de semer beaucoup sur
une terre dans laquelle les graines ne trouveront pas leur subsistance.
Il ne faudra pas oublier non plus que les terrains ne sont
pas tous favorables au gibier et que constituer une remise cultivée dans un
endroit peu favorable et où le gibier ne demeurerait pas serait perdre temps et
argent.
On étudiera, lorsqu’on projettera de mettre des terrains en
culture de chasse, les différents points signalés plus haut, afin de ne les
constituer qu’à bon escient.
Liste des plantes, arbres, arbuste et arbrisseaux
utiles au gibier soit comme abris, soit comme nourriture.
Nom |
Terrain qui convient |
Kg de semence à employer pour un hectare |
Remarques |
Acacia commun |
Tous |
10 |
Semer comme luzerne et faucher. |
Agrestis d’Amérique |
Tous |
10 |
|
Ajonc d’Europe |
Croît en terre pauvre pas calcaire. |
15 |
Durée illimitée. S’étale sur le sol. Bon couvert. |
Alpiste ou millet long |
Bonne terre meuble, bien fumée |
20 |
|
Arbousier |
Tous |
|
Fruits genre fraise. |
Armoise (ou herbe de la Saint-Jean) |
Les plus mauvais |
|
Croît spontanément en terrains incultes et pierreux. |
Avoine de printemps |
Tous |
150 |
|
Bambou doré |
Meuble, frais et sain |
|
|
Betteraves fourragères |
Profond, bien fumé |
10 |
Plaisent aux lièvres et aux lapins. |
Brome des bois |
Bien cultivé, frais mais sain, pas trop sec |
60 |
Très précoce et se maintient tard. |
Brome de Hongrie |
Tous, pas trop humides |
50 |
Très bon couvert d’hiver. |
Brome des prés |
Tous, pas trop humides |
60 |
Garnit bien sols médiocres et calcaires. |
Brome Schrader |
Bien cultivé, frais mais sain |
50 |
Peut subsister quatre ou cinq ans sur le même terrain. |
Bruyère commune |
Sous-bois à sol siliceux |
|
La tailler pour qu’elle couvre le terrain de nombreuses années. |
Buis en arbre |
Sous-bois |
|
|
Buis toujours vert (ou des prés) |
Tous. Préférence dans calcaires |
|
Vient bien sous-bois. Pas mangé par le lapin. |
Buisson ardent de Lalande |
Tous |
|
|
Canche élevée |
Frais et humide |
40 |
Bon pour voisinage d’étang et de marais. |
Carotte (grosse rouge des Flandres) |
Bien ameubli et frais |
5 |
Plante fourragère. |
Cerisier Sainte-Lucie |
Pépinière |
|
On sème rarement, piantation préférable. |
Chalef comestible |
Silico-argileux |
|
Feuille persistante. Résiste aux grands froids. Excellente pour faisans. |
Chêne banister |
Médiocres, coteaux arides, craint le calcaire |
|
Se taille à 1m,50. Glands excellents pour faisans. |
Chicorée sauvage |
Sec, ayant du fond |
12 |
Dure de trois à six ans si on coupe avant la floraison. |
Choux fourragers |
Tous |
1 |
Pincer les têtes à 15 centimètres de terre pour qu’ils ramifient. |
Cognassiers du Japon |
Tous |
|
|
Colza |
Bonne terre |
6 |
Excellente nourriture pour le gibier. |
Consoude du Caucase |
Frais et ombragés |
100 |
Aux abords d’étangs et de fossés humides. |
Cornouiller de Floride |
Siliceux, frais ou graveleux |
|
|
Corroyère à feuille de Myrte ou Redoux |
Tous |
|
Consolide les terrains en pente et les talus. |
Cotonlaster à feuilles étroites |
Presque tous |
|
|
Dactyle pelotonné |
Tous terrains, même secs |
40 |
Très bon pour le gibier. |
Épine-vinette |
Calcaire pauvre, peu profond |
|
Retient terrain en pente et frais. |
Fétuque élevée |
Humide et frais |
50 |
|
Ficaire renoncule |
Sous-bois |
|
Produit de petits tubercules remplis d’amidon qui plaisent beaucoup aux faisans. |
Fléole |
Humides, froids, argileux |
10 |
Plaît beaucoup aux lièvres. |
Fragon (ou faux fruits) |
Calcaires |
|
|
Fromental (ou avoine élevée) |
Tous, sauf humides |
100 |
|
Fusain commun |
Frais et fertiles |
|
Bonne garniture bordures de bois. |
Galega officinal (ou rue de chèvre) |
Moyen |
30 |
|
Genêt commun |
Landes, dunes, siliceux, secs, sablonneux, calcaires |
15 |
Vient bien dans un sarrasin clair. |
Genévrier |
Sablonneux, pierreux, surtout calcaires |
|
Très rustique. |
Gesse |
Moyens, un peu calcaires |
100 |
Bon couvert, se maintient très haut en été. |
Goumi du Japon |
Tous |
|
|
Groseillier des Alpes |
Sous-bois |
|
Fruits très goûtés des faisans. |
Groseillier à grappes rouges |
Redoute l’humidité |
|
Très goûté des faisans. |
Gynerie |
Bons terrains |
|
|
Houblon sauvage |
Frais, sains, calcaires, sablonneux |
|
|
Houque laineuse |
Frais, humides, tourbeux |
20 |
|
Houx communs |
Tous, sauf calcaire |
|
|
Jujubier |
Sablonneux |
|
Couper à un mètre pour faire buissonner. |
Laurier-tin |
Tous |
|
|
Leynestéria élégant |
Bonne terre, situation ombragée |
|
|
Lierre d’Irlande |
Frais |
|
|
Lupin blanc ou jaune |
Médiocres mais non calcaires ni humides |
60 |
Non touché par les lapins. |
Luzerne |
Sains, profonds et même frais |
20 |
|
Luzerne lupuline (ou minette ou triolet) |
Médiocres, arides, calcaires, crayeux, sablonneux |
15 |
|
Lyciet d’Europe |
Tous |
|
|
Mahonia à feuilles de houx |
Tous. Pleine lumière |
|
Très rustique. Baie recherchée des oiseaux. Un des meilleurs abris. |
Maïs |
Terres saines et peu calcaires |
150 |
|
Mélilot de Sibérie |
Médiocres et secs, calcaires, arides |
20 |
Très bon couvert. |
Millepertuis à grandes feuilles |
Sains, légers, chauds, calcaires |
|
|
Millet commun |
Légers et sains |
30 |
Pousse rapidement, mais fumer la terre. Grains excellents pour faisans. |
Moha de Hongrie |
Bonnes terres |
20 |
Couvre bien et rapidement le terrain. Très résistant à la sécheresse. |
Morelle (ou Douce-amère) |
Tous |
|
Fourré très épais, bon abri pour faisans. |
Moutarde blanche |
Tous |
15 |
Pas touché par le lapin s’il y a d’autres nourritures. |
Myrobolan |
Tous |
|
|
Navette |
Médiocres |
5 |
|
Nerprun bourdaine |
Sous-bois, humides, siliceux, granitiques |
|
|
Nerprun commun |
Sous-bois en tous terrains |
|
|
Persicaire de Sokalin |
Tous |
|
Vivace, rustique, résiste au froid. |
Peuplier suisse |
Frais |
|
Recéper tous les deux ans. |
Pimprenelle |
Calcaire, pauvre, siliceux |
30 |
Plante vivace très goûtée du lapin. |
Pourpier de mer |
Frais |
|
|
Prunier épineux |
Tous |
|
Haies vives, très défensives. |
Rhododendron pontique |
Légèrement humide, bonne terre, craint le calcaire |
|
Élaguer pour maintenir bas. Pas touché par le lapin. |
Ronce commune |
Sous-bois |
|
Bon couvert pour le gibier. |
Rosier de Wichura |
Bons |
|
Arbuste à rameaux traînants. Pas touché par le lapin. Très bon. |
Rutabaga (choux-navets) |
Bonne qualité, légèrement frais |
3 |
|
Sainfoin |
Graveleux, crayeux, calcaires |
120 |
|
Sarrasin |
Tous, sauf humides. Craint la gelée |
60 |
Très utile sur pied après la moisson quand les champs sont dégarnis. Ce qu’il y a de meilleur pour le faisan. |
Saule Marsault. |
Tous, même secs ou humides |
|
Très utile au gibier par son écorce. Recéper tous les deux ans. |
Seringat à grandes fleurs |
Tous. Pousse sous couvert. Craint la sécheresse |
5 |
Se sème bien dans un sarrasin. |
Soleil |
Meuble et fertile. Même humide |
5 |
|
Sorbier |
Tous |
|
|
Sorgho |
Légers et profonds. Sensible au froid |
40 |
Exposition ombragée, se taille bien. |
Spirée à feuille d’aubier |
Tous, préférence meubles et frais |
|
|
Sureau commun |
Argilo-calcaires |
|
|
Symphorine à fruits blancs |
Frais |
1.500 |
En juillet-août, semer sarrasin au pied des tiges. |
Topinambour |
Tous. Ne souffre pas de la gelée |
|
|
Trèfle blanc |
Tous, humides ou secs, calcaires ou argileux |
15 |
Vient bien sous bois. |
Troène commun |
Tous |
|
|
Vesce |
Bons. Un peu fort et frais mais sain |
200 |
|
Viorne mancienne |
Calcaires |
|
|
René DANNIN.
|