Les ennemis des Salmonidés.
— Les ennemis des œufs et des alevins de truite sont
nombreux, surtout dans l’élevage naturel. Citons notamment les rats d’eau, les
palmipèdes, les grenouilles, les vairons, les chabots, les dytiques, les
crevettes d’eau, les hydrophiles, les larves de libellules, de phryganes, etc.
Mais le plus terrible de tous appartient au monde des cryptogames. C’est le soprolégnia,
qui attaque indistinctement les œufs pendant toute la période de l’incubation,
ainsi que les jeunes alevins.
Il s’agit d’une moisissure qui se propage avec une rapidité
effrayante dans les frayères naturelles et artificielles, ainsi que dans les
laboratoires éclairés par la lumière solaire. On la combat en obscurcissant les
frayères et les bassins d’alevinage, en plaçant des rondins jointifs ou un
couvercle en voliges, et en nettoyant sérieusement les bacs comprenant tout le
matériel d’incubation et d’élevage.
Soins aux alevins.
— À leur naissance, les alevins de truite se tiennent à
peu près immobiles dans le fond des incubateurs où ils ont éclos sur des claies
perforées, ou sur baguettes de verre. Cet état subsiste pendant vingt à
vingt-cinq jours, tant que les jeunes alevins n’ont pas résorbé leur vésicule
ombilicale et qu’ils ne cherchent pas leur nourriture.
Tout ce que l’on peut faire de mieux, c’est chercher à
augmenter de 2 degrés environ la température de l’eau qui se renouvelle
dans leur vivier, en la laissant exposée, par exemple, pendant quelques heures
à l’air ambiant, quand il se réchauffe. Ce faisant, on augmente la précocité
des alevins, et leur appétit se manifeste plus vite que si on les laissait
séjourner dans de l’eau très froide.
Pendant cette période de transition, et même après,
lorsqu’ils commencent à nager, les alevins de truite n’en restent pas moins
très vulnérables au saprolégnia, surtout si on ne les change pas de logement.
Les viviers habités se polluent rapidement et, pour bien faire, la désinfection
des bacs devrait s’effectuer tous les huit jours au moins, si l’on veut éviter
l’apparition des moisissures. On est d’ailleurs prévenu de l’utilité des
mutations lorsque, passant la main sur la paroi intérieure des viviers, on
ressent une sensation de gras ou de visqueux. À ce moment, il est absolument
nécessaire de brosser énergiquement l’intérieur des bacs ayant servi avec de
l’eau bouillante alcalinisée à 2 p. 100 de carbonate de soude, puis
de les rincer à plusieurs reprises à l’eau froide, avant de les remployer.
Il va sans dire que, pendant l’incubation et l’élevage, on
doit retirer avec une pipette les œufs et alevins attaqués par le saprolégnia,
facilement reconnaissables à leur décoloration, de manière à enrayer sa
propagation.
Aussitôt que les alevins commenceront à manger et, par la
suite, lorsqu’ils grossiront, ils exigeront plus de place, il faudra dédoubler
et détripler progressivement les populations. On s’efforcera, en outre,
d’assurer le renouvellement de l’eau, en réglant les robinets d’alimentation de
façon que le contenu des viviers soit remplacé entièrement toutes les deux
heures. Enfin, la nourriture du début sera surtout constituée par du sang
défibriné, la distribution se faisant de préférence dans des mangeoires
spéciales.
Un système pratique.
— Un moyen simple et pratique permettant le transvasement
facile des alevins des bacs souillés dans d’autres ayant été nettoyés et
désinfectés consiste à les accoupler deux à deux et côte à côte, sur deux
tréteaux complétés par une série de cales.
Admettons que l’on veuille faire passer les alevins du
vivier peuplé B dans le vivier vide A.
Pour cela, on soulève le premier en N après avoir retiré les cales N’
et démasqué l’orifice M, afin que le contenu du récipient B passe
entièrement dans le récipient A, en entraînant les alevins. La vidange
s’effectuant automatiquement, on retirera le bac B, pour glisser à sa
place le bac A, jusque sous le robinet d’alimentation. Tous les huit jours
environ, on répétera la même manœuvre, et ainsi on évitera la propagation de la
terrible moisissure tant redoutée des pisciculteurs.
Nota.
— Lorsque les alevins auront atteint la taille de 7 à 8 centimètres
de longueur, on remplacera le sang défibriné et cuit par de la viande crue,
finement hachée, en donnant la préférence à la viande de cheval, plus
économique que les autres. Dans certains cas, on pourra utiliser
avantageusement pour une partie de la nourriture les viscères d’animaux,
notamment les intestins de volailles et de lapins, ainsi que des déchets
d’abattoir.
J.-B. NICOLAS.
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