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Le chien de chasse

Élevage des chiots.

Dans ma dernière causerie, je me suis étendu assez longuement sur le choix des reproducteurs. Nous voici arrivés à l’élevage des jeunes chiots.

Si vous possédez la mère, vous connaissez sans doute les quelques précautions à prendre lors de la mise-bas. Laissez-la seule dans un endroit un peu retiré, dans une bonne niche, avec de la litière fraîche et, à proximité, de l’eau claire. Elle se délivrera toute seule. Si, par malheur, au bout d’un jour de la mise-bas, elle ne voulait pas manger, il faudrait craindre qu’un chiot mort-né ne soit pas évacué. Faites appeler le vétérinaire de toute urgence, mais, malgré l’intervention chirurgicale, il y a quatre-vingt-dix chances sur cent pour que la mère ne soit pas sauvée.

La mise-bas faite, vous pouvez garder tous les chiots si la mère est robuste et a bon appétit. Si la nichée est de plus de six, vous pouvez sacrifier le surplus, en conservant les plus vigoureux.

Si la race veut qu’ils soient écourtés, faites-le dès le lendemain de la naissance ; une bonne paire de ciseaux suffit, la mère se chargera elle-même d’aseptiser la plaie.

Jusqu’à l’époque du sevrage, cinq à six semaines après la naissance, rien de particulier. Nourrissez abondamment la mère. Renouvelez souvent la litière, et mettez-lui toujours de l’eau propre à proximité.

Nous arrivons au sevrage, et, là, les difficultés vont commencer.

Le gros écueil de l’élevage du jeune chien de race sélectionnée, ce sont les vers du jeune âge. Cette variété de vers appelés ascarides et ayant la forme d’un fragment de vermicelle de plusieurs centimètres de long n’a rien de commun avec le tænia, mais ils sont excessivement dangereux et provoquent des lésions intestinales presque toujours mortelles.

Le symptôme est l’amaigrissement du jeune élève et la diarrhée, puis, si vous n’y prenez garde, les convulsions nerveuses surviennent, à la suite desquelles le jeune chiot meurt.

Le seul remède est le vermifuge donné au jeune chiot dès le sevrage. On en trouve dans toutes les pharmacies. Les vers sont bientôt évacués tout vivants et le jeune élève ne se ressent en rien de l’absorption du remède.

N’hésitez pas à donner du vermifuge à votre jeune chiot, même s’il est en bonne santé. Vous pouvez aussi mélanger à sa pâtée de l’ail pilé, c’est un excellent vermifuge.

Des maladies intestinales occasionnées par les vers provoquent presque toujours les autres symptômes de la fameuse maladie du jeune âge qui a fait couler tant d’encre et fait surgir tant de remèdes souvent inopérants et parfois très dangereux, tels que l’absorption du soufre, de la poudre de chasse et le fameux emplâtre de poix sur la tête.

Beaucoup de chasseurs vous diront : un jeune chiot doit « faire sa maladie ». Ce n’est pas vrai. Un jeune élève venant de parents robustes, bien élevé, débarrassé de ses vers, ayant de la liberté au grand air et nourri rationnellement, ne doit pas être malade.

D’éminents praticiens ont découvert récemment des vaccins contre la maladie du jeune âge. Vous avouerai-je que je demeure sceptique quant à leur efficacité ! D’abord, il ne me semble pas que l’on ait affaire à une maladie, mais bien à plusieurs affections présentant des symptômes très différents : coryza avec écoulement du nez et des yeux, maladie de peau à l’aine et aux cuisses, forme nerveuse avec danse de Saint-Gui, enfin diarrhée à odeur infecte.

Je ne conçois pas dès lors qu’un unique vaccin confère l’immunité vis-à-vis d’affections aussi différentes. Peut-être un jour arrivera-t-on — je l’espère — à mettre au point un traitement efficace, mais les vieux éleveurs ayant fait naître et mené à bien de nombreuses portées auront encore leur mot à dire.

En attendant, je vous répète encore une fois : veillez aux vers du jeune âge, donnez à vos élèves beaucoup de liberté, surveillez certains animaux recherchant avec avidité des excréments ou de la viande avariée pouvant les intoxiquer. Bonne soupe au lait trois fois par jour avec un peu de viande crue légèrement grillée, de la promenade dans les champs au printemps où ils trouvent de l’herbe tendre qu’ils aiment à mâcher et qui doit être probablement pour eux un excellent vermifuge.

S’ils sont nés en hiver, donnez-leur comme abri un endroit à température tiède, les jeunes chiens étant toujours assez frileux.

Ne tenez pas votre jeune élève, ni même quand il est adulte, attaché par une chaîne à son collier. Cela gêne ses mouvements. Faites-lui un petit chenil : quelques mètres de grillage suffisent.

Tenez-le souvent peigné avec un fort peigne en fer et bien brossé, un bon étrillage valant souvent une bonne soupe.

Avec les bons principes ci-dessus, vous devez arriver facilement à l’âge auquel vous pourrez commencer son dressage.

Le vieux Dresseur.

Le Chasseur Français N°606 Février 1942 Page 79