Accueil  > Années 1942 à 1947  > N°607 Avril 1946  > Page 163 Tous droits réservés


Le « CHASSEUR FRANÇAIS » sollicite la collaboration de ses abonnés
et se fait un plaisir de publier les articles intéressants qui lui sont adressés.

Au rucher

Conseils aux débutants

Comment débuter ?

— Pour faire de l’apiculture, il faut, naturellement, des abeilles et des ruches. Les ruches se trouvent partout, chez les fabricants d’outillage apicole. Quant aux abeilles, on peut s’en procurer de différentes manières.

On cite de grands apiculteurs qui ont commencé par un essaim de fortune qui est venu s’offrir à eux. Inutile de dire que c’est là une exception et qu’il ne faut pas s’attendre à pareille aubaine pour se mettre à l’apiculture.

D’autres dénichent des essaims dans de vieux troncs d’arbres. La chose n’est pas facile, surtout pour un débutant, et, le plus souvent, on y perd sa peine et son temps.

Le plus grand nombre achètent des essaims à des apiculteurs voisins ou à un éleveur. Mais beaucoup installent ces essaims mal ou trop tard ; mal, lorsqu’ils n’aménagent pas comme il faut la ruche ; trop tard, lorsqu’ils les mettent en ruche après la miellée et ne leur donnent pas les soins voulus.

D’aucuns préfèrent acheter des ruches peuplées. C’est fort bien, pourvu que la ruche soit d’un bon modèle et parfaitement construite, et que la population soit saine, nombreuse et bien approvisionnée.

D’autres enfin, et c’est peut-être la méthode la plus économique, achètent des essaims sur cadres, quelques semaines avant la miellée principale, puis les nourrissent et élargissent le nid au fur et à mesure qu’ils se développent.

On peut aussi acheter des paniers ou ruches vulgaires peuplées et les installer au rucher pour les transvaser en ruches modernes, ou pour en recueillir des essaims qui serviront à peupler les ruches à cadres. Mais le débutant n’est pas encore expérimenté, et, à moins qu’il fasse faire ces opérations par un praticien, on ne saurait lui conseiller les transvasements et les essaims anticipés. Quant à attendre des essaims de ruches vulgaires, ce n’est pas non plus à souhaiter pour débuter, parce que les essaims, s’il s’en produit, arriveront trop tard pour profiter de la miellée principale.

On peut également peupler des ruches avec des essaims nus, mais là encore se présente plus d’un écueil pour les novices. Pour que ces essaims donnent de bons résultats, il faut qu’ils soient mis en ruche de bonne heure dans la saison et avant la miellée. Il faut aussi qu’ils soient assez forts, et enfin il faut les nourrir pour qu’ils se développent, trois conditions qui ne se réalisent pas souvent, parce que le novice s’imagine que les essaims se tireront d’affaire seuls.

Que tous se souviennent qu’un essaim ne doit pas être abandonné à lui-même, mais qu’il doit être secouru, même en année favorable. C’est le point capital pour réussir, et c’est le point le plus négligé.

Une fois en possession d’une ou deux ruches, — et nous ne conseillons pas d’en avoir davantage au début, — le jeune apiculteur gagnera beaucoup à observer au trou de vol l’activité de ses ouvrières. Il apprendra ainsi à se familiariser avec elles et à étudier leurs mœurs, car il cherchera dans son manuel l’explication de ce qui lui paraîtra intéressant ou anormal. Toutefois, il s’abstiendra, sauf en cas de nécessité, d’ouvrir les ruches, ce qui jette plus ou moins le trouble parmi les colonies.

Pour éviter le désappointement de nombreux novices qui sont consternés de voir leurs essaims périr l’hiver ou au printemps, le débutant instruit et avisé aura soin de préparer ses ruches à l’hivernage, en complétant les vivres en août-septembre. Après quoi, il n’aura qu’à bien protéger les ruches contre les intempéries de l’hiver et à attendre leur réveil au printemps.

C’est pour n’avoir pas donné à leurs abeilles les soins voulus que nombre de novices, voyant leurs ruches périr, sont déçus, découragés et abandonnent l’apiculture. Il importe de bien commencer.

Lorsqu’on achète des ruches peuplées, il y a lieu de se rendre compte de la force de la population et des provisions.

L’apiculteur expérimenté sentira, en soupesant un panier, s’il est suffisamment lourd pour que les provisions ne fassent pas défaut, mais un novice pourra s’y tromper.

On peut alors, pour estimer le miel d’une bonne colonie, se baser sur les données suivantes de M. Collin, pour une ruche de 18 à 20 litres.

Poids brut : 8,300 kilogrammes.

Ruche vide 3,000 kilogrammes
Abeilles 1,000
Cire 0,700
Couvain 0,300
Miel 3,300
 
Total
——
8,300
 
kilogrammes

Pour un panier de trois à quatre ans, les rayons, sans contenir plus de cire, sont plus lourds de moitié, à cause des nombreuses pellicules que chaque abeille, en naissant, a laissées au fond des alvéoles et aussi d’un vieux stock de pollen dont les populations vigoureuses savent seules se débarrasser en rongeant les cellules qui le contiennent. Il faut ajouter la propolis dont les abeilles se servent pour consolider des points de jonction, boucher les interstices, polir leurs passages, etc.

Il y aurait donc lieu d’établir le poids des ruches à vieux gâteau de la façon suivante :

Poids brut : 8,500 kilogrammes.

Ruche vide 3,000 kilogrammes
Cire et pollen 1,500
Abeille 1,000
Couvain, environ 0,300
Miel 2,700
 
Total
——
8,500
 
kilogrammes

Pour les vieux paniers jaugeant de 50 à 60 litres, on a donné les chiffres suivants :

Poids brut : 15,500 kilogrammes.

Ruche vide 5,000 kilogrammes
Cire et pollen 4,000
Abeille 2,000
Couvain, environ 1,500
Miel restant 3,000
 
Total
——
15,500
 
kilogrammes

En prenant pour base ces données, le débutant pourra mieux se rendre compte de la valeur des ruches vulgaires qu’il achète. Il est très important pour lui de commencer avec des colonies fortes et bien pourvues de miel. Autrement, il éprouvera des pertes et des déceptions qui pourraient le décourager pour toujours.

P. PRIEUR.

Le Chasseur Français N°607 Avril 1946 Page 163