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Causerie juridique

Quelques incidences de la loi du 28 juin 1941 relative à l’organisation de la chasse

Dans un précédent numéro du Chasseur Français, nous avons donné une analyse complète de la loi du 28 juin 1941 et montré que, si cette loi modifie sérieusement le régime de la chasse tel qu’il avait été organisé par la loi du 3 mai 1844, cette dernière loi subsiste cependant et reste inchangée sur la plupart des matières dont elle s’occupait. Tel est le cas, spécialement, pour tout ce qui concerne les articles 2 et suivants relatifs aux délits de chasse et aux poursuites auxquelles ils peuvent donner naissance.

Il y a, d’ailleurs, bien d’autres matières auxquelles il n’a pas été touché d’une manière directe et expresse, mais sur lesquelles les modifications législatives survenues peuvent avoir des effets plus ou moins importants. Parmi ces questions, il nous paraît intéressant d’envisager ici celle de la chasse dans les enclos et celle, de la destruction des animaux nuisibles et des bêtes fauves.

On sait que, par application de l’article 2 de la loi du 3 mai 1844, le droit de chasser dans les enclos attenants à l’habitation échappe à presque toutes les restrictions qui atteignent le droit de chasser en dehors de ces endos. Spécialement, la chasse y est permise en tout temps et sans permis. Nous retenons seulement de là la dispense de permis dont bénéficie cette chasse.

Or la principale réforme réalisée par la foi du 28 juin 1941 consiste dans les conditions nouvelles auxquelles est subordonnée la délivrance des permis de chasse ; on a vu que, désormais, pour obtenir la délivrance ou le renouvellement d’un permis de chasse, il est nécessaire d’être membre d’une société départementale de chasseurs et produire, à l’appui de la demande de permis, la quittance de la cotisation pour l’année courante imposée aux membres de ces sociétés, quittance qui demeure annexée au permis de chasse.

Cette disposition est sans application pour la chasse dans les enclos attenants à l’habitation puisque, pour cette chasse, le permis n’est pas exigé ; par suite, pour avoir le droit de chasser dans un enclos attenant à l’habitation, il n’est nullement nécessaire d’être membre d’une société départementale de chasseurs.

La réglementation du droit de destruction des animaux nuisibles et des bêtes fauves n’est pas non plus modifiée directement par la loi du 28 mai 1941, sauf toutefois sur un point accessoire. L’article 9 de la loi du 3 mai 1844 conférait aux préfets des départements le pouvoir de prendre, sur l’avis des conseils généraux, des arrêtés ayant pour objet notamment de déterminer les espèces d’animaux malfaisants ou nuisibles que le propriétaire, possesseur ou fermier, peut détruire en tout temps sur ses terres et les conditions d’exercice de ce droit. L’article 7 de la loi du 28 juin 1941 transfère les attributions données aux préfets par les articles 3, 4 et 9 de la loi du 3 mai 1844 au ministre secrétaire d’État à l’Agriculture, assisté du Conseil supérieur de la chasse.

Sous l’empire de la loi du 3 mai 1844, il était admis que, pour pouvoir se livrer à la destruction des animaux nuisibles dans les conditions où l’arrêté du préfet l’autorisait, il n’était pas nécessaire d’être nanti d’un permis de chasse ; la jurisprudence avait même décidé qu’il n’appartenait pas au préfet de subordonner l’exercice du droit de destruction à la possession d’un permis. On peut admettre qu’il en est encore ainsi et que, par voie de conséquence, sous réserve d’une possibilité de modification ultérieure, il n’est pas nécessaire de faire partie d’une société départementale de chasseurs pour pouvoir exercer le droit de destruction des animaux nuisibles.

La destruction des bêtes fauves est réglée par la phrase finale de l’alinéa 3 de l’article 9 de la loi du 3 mai 1844, ainsi conçue : « Sans préjudice du droit appartenant au propriétaire ou au fermier de repousser ou de détruire, même avec des armes à feu, les bêtes fauves qui porteraient dommage à ses propriétés »— et ce passage n’a été modifié ni directement, ni indirectement par la loi du 28 juin 1941. Il résulte de là que l’exercice du droit de détruire les bêtes fauves alors qu’elles portent dommage aux propriétés reste ce qu’il était sous la législation ancienne et que, spécialement, pour pouvoir exercer ce droit, il n’est nullement nécessaire de faire partie d’une société de chasse départementale, ni de justifier y avoir payé sa cotisation.

Paul COLIN,

Avocat à la Cour d’Appel de Paris.

Le Chasseur Français N°608 Juin 1946 Page 179