L’article 9 de la loi du 28 février 1934 est ainsi
conçu : « Le prix des permis de chasse est porté, en ce qui concerne
la part de l’État, à 175 francs pour le permis général et à 29 francs
pour le permis départemental, décimes compris. En addition au droit de timbre
frappant les permis de chasse, il sera perçu un droit de 5 francs par
permis, dont le produit sera consacré à l’amélioration de la chasse. Ce produit
sera réparti par le ministre de l’Agriculture après avis du Comité national de
la Chasse, du ministre de l’Intérieur et du ministre des Finances, dans les
limites d’un crédit ouvert chaque année par la loi de finances et qui ne pourra
dépasser 8 millions de francs. Un règlement d’administration publique
déterminera le mode et les conditions de répartition du crédit ainsi ouvert au
ministre de l’Agriculture. »
D’autre part, d’après l’article 4 de l’arrêté
ministériel du 31 août 1934, les fédérations des sociétés de chasse
devront, pour obtenir des subventions, créer et aménager des réserves de chasse
constituées pour une durée de trois ans au minimum et où tout acte de chasse
sera interdit, etc. ...
Droit additionnel et réserves de chasse sont donc considérés
comme les fondements essentiels pour la rénovation de la chasse. Il convient, à
mon avis, de prévoir aussi, je dirai même surtout, la création d’une pépinière
départementale ou interdépartementale de perdrix qui jouerait le rôle des
pépinières ordinaires auxquelles s’adressent ceux qui veulent créer un
vignoble, un verger ou les reconstituer après une dévastation quelconque,
dévastation dont ne seront pas exemptes les réserves de chasse.
En Algérie, le droit additionnel est de 25 francs
depuis plusieurs années ; il en est sans doute de même en France, où l’on
comptait environ 1.500.000 chasseurs, d’où la possibilité d’affecter chaque
année à l’amélioration de la chasse une somme de 37.500.000 francs, soit
en moyenne 400.000 francs par département.
Puisqu’il y a deux parts bien distinctes, l’une pour l’État,
résultant uniquement du prix du permis, l’autre qui doit être consacrée
exclusivement à l’amélioration de la chasse, il semble que chaque fédération
départementale devrait pouvoir disposer, sous le contrôle de l’Administration,
de la totalité des sommes versées par ses chasseurs en sus du prix du permis.
Si donc trois départements limitrophes s’entendent, ils peuvent disposer,
chaque année, de plus d’un million pour l’amélioration de la chasse et, en
particulier, pour la création d’une pépinière commune qui ravitaillerait
toutes les réserves de la région, créées ou à créer, celles des sociétés, des
communes et même des particuliers possédant une étendue de terrain suffisante.
Les couples seraient cédés sans bénéfices, mais, en cas de doute et pour
éviter les abus, le « lâcher » serait surveillé.
Que peut donner une réserve ou une pépinière ? Au
Maroc, où existent des réserves, le gibier était tellement abondant qu’on a pu
dénombrer, de 1929 à 1934, le passage de 274.978 perdreaux et de 82.054 lapins
aux droits de portes (octroi) dans la seule région de Rabat-Casablanca. Ici, à
Constantine, en 1917, après trois ans de fermeture rigide du fait de la guerre,
nous avons pu constater des résultats comparables, sans réserves, alors
qu’aujourd’hui nous pouvons crier de nouveau : la chasse se meurt ! la
chasse est morte !
Ces résultats merveilleux ne doivent pas surprendre si l’on
considère ce que peuvent devenir, dans une seule réserve de trois ans, quatre
couples de perdrix rouges existant à la fermeture de la saison de 1945-1946.
Théoriquement, à raison de 12 œufs pondus par chaque
femelle, la nichée du printemps de 1946 peut donner à l’ouverture d’août 1946
(12x4)+8=56 perdrix ou 28 couples ; en 1947 (12x28)+56=392 perdrix ou
196 couples ; en 1948 (12x196)+392=2.744 perdrix ou 1.372
couples ; et enfin, après trois ans de fermeture, à 1 ouverture de 1949
(12x1.372)+2.744=19.208 perdrix.
Si nous tablons sur la moitié, soit 10.000 en chiffres
ronds, nous obtenons, avec une seule réserve dans chacune des 36.000 communes
de France, les conditions idéales étant remplies, 36 millions de
perdrix au bout de trois ans. C’est en somme l’histoire de l’unique grain
de blé de Robinson qui, après quelques ensemencements consécutifs, pouvait
manger du pain tous les jours.
On a l’argent ; on peut avoir la « graine »
pour peupler, repeupler, surpeupler, car la pépinière départementale ou
interdépartementale demeurera toujours comme le « tonneau inexpuisible »
de Rabelais.
Nos fédérations, chevilles ouvrières, n’ont qu’à
entreprendre pour réussir. Qu’avec le concours de l’administration forestière
les fédérations de deux ou trois départements limitrophes s’associent pour la
création, à frais communs, d’une vaste pépinière dans une région
particulièrement propice, avec plusieurs brigades de gardes à poste fixe, sous
la direction d’un officier supérieur des forêts en retraite qui aura la
compétence et l’autorité nécessaires, et la rénovation de la chasse sera
rapidement assurée grâce au concours pécuniaire de tous les chasseurs.
J. BONNET.
(Constantine.)
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