Dans les circonstances actuelles, il importe que vous vous
assuriez le plus de provisions légumières pour l’hiver, en même temps que vous
vous approvisionnez régulièrement de légumes frais en été et en automne.
Le haricot est un des légumes de grande consommation auquel
il est de votre intérêt d’accorder la plus large attention. En juin, la saison
est propice pour amplifier vos cultures de sortes à consommer en gousses :
filets verts, mange-tout verts et beurres, en grains frais et secs.
Limitez le nombre des variétés en donnant la préférence aux
meilleures, d’adaptation générale. Si vous disposez de perches qui servent de
rames, de cannes de Provence et de bambous, selon la région, adoptez une ou
plusieurs variétés à rames en raison du rendement plus élevé et en récoltes
échelonnées. Dans le cas contraire, tenez-vous aux variétés naines en
effectuant plus de semis. Les haricots mange-tout vous fournissent une masse de
légumes savoureux et nutritifs. Une des meilleures variétés à rames, à deux et
même à trois fins, d’une grande, très grande productivité, est le blanc
extra-hâtif de juillet, que, dans le Midi, on désigne aussi sous le nom de
« quatre à quatre », parce que ses gousses sont réunies en grappe de
quatre, souvent de six, parfois de huit. C’est le plus hâtif des haricots à
rames, excellent en cosse verte, comme mange-tout, en grains frais et secs.
Le mange-tout Saint-Fiacre blanc, aux longues cosses
vertes sans fil, en grappes, est également très productif, d’excellente
qualité, à consommer aussi en mange-tout, en grains frais et secs. Le meilleur
et le plus productif des mange-tout beurre à rames est certainement le Saint-Fiacre
beurre dont les cueillettes sont presque inépuisables en saison.
Parmi les haricots nains à consommer en filets verts, le fin
de Bagnols (le bagnolais) est de premier mérite ; il est hâtif
à filets longs, fins et très charnus. La couleur du grain est chocolat clair
marbré.
À défaut de cette variété, le Super-Métis, au filet
rond et long, très fin, vous donnera satisfaction.
Le Sultan, variété demi-tardive, donne une abondance
de cosses vertes et droites ; il résiste aux grandes chaleurs et il est
assez remontant.
Le beurre nain du Mont-d’Or est très hâtif, rustique,
donne des cosses excellentes ; grains brun foncé.
Parmi les haricots nains à écosser, à consommer en grains
frais et secs, vous disposez du flageolet blanc très hâtif d’Étampes,
excellente variété, qui vous fournit filets verts, grains frais et grains secs.
Aussi du flageolet vert roi des verts, très productif, au grain vert
bien coloré, qui conserve sa teinte si vous arrachez et faites sécher les
touffes à l’ombre. Variété d’approvisionnement familial de premier plan.
Pour consommer en frais comme en sec, les deux variétés
suivantes, toutes deux à grains blancs, sont de très grande production : Suisse
blanc lingot et surtout Michelet abondance de Perpignan hâtif, qui
vous permettent de constituer de fortes provisions. À ce titre, et surtout pour
le Midi, le coco blanc nain est une des meilleures variétés résistantes
à la chaleur.
Si vous faites un semis de haricots nains destinés à être
récoltés en sec, vous pouvez y consacrer tout un carré que vous n’aurez pas à
piétiner au cours de cueillettes successives, les touffes étant arrachées à
maturité comme c’est le cas pour les flageolets. Si, au contraire, vous désirez
récolter au fur et à mesure les gousses en filets, en mange-tout et en grains
frais, constituez des planches de 1m,30 de largeur, séparées par des
sentiers de 40 centimètres. Dans ces planches, ne faites que trois rangs
espacés également de 40 centimètres, ce qui laisse un rebord de 20 centimètres
pour le buttage, Donnez la même largeur aux planches de haricots à rames, mais
ne faites que deux rangs espacés de 60 à 70 centimètres.
Façonnez très profondément la terre et n’épandez pas de
fumier. Au lieu de semer en poquets, ouvrez des rayons aux distances prévues,
avec la langue de la serfouette, profonds de 8 à 10 centimètres, et
mouillez copieusement le fond de ces rayons. Semez alors ces haricots nains à
raison de 5 à 6, distants de 35 à 40 centimètres, en quinconce, pour le
rang du milieu.
Procédez de même pour les haricots à rames et semez le même
nombre de grains, par séries de deux touffes espacées de 60 centimètres et
deux autres en vis-à-vis. Séparez chaque groupe de quatre touffes de 30 centimètres.
Je vous conseille, en effet, de disposer les rames en pilier : une rame à
chaque touffe, soit quatre rames pour chaque groupe que vous réunissez et liez
à environ lm,90 à 2 mètres de hauteur. Ainsi disposées, ces
rames résistent aux assauts du vent et acquièrent une grande stabilité,
celle-ci encore accrue par des rames disposées horizontalement au-dessus des ligatures.
Ne recouvrez que légèrement les haricots de terre
fine : ils doivent voir partir le semeur ! Dès juin, la levée est
rapide. Deux ou trois jours après, donnez un premier binage, qui chausse les
haricots. Arrosez s’il fait sec pour assurer un départ rapide et vigoureux de
la végétation ; binez de nouveau lorsque la terre est ressuyée et buttez
les rangs amplement ; puis posez les rames en procédant ainsi qu’il vous
est conseillé ci-dessus. Par la suite, et s’il fait sec, arrosez en distribuant
l’eau par irrigation, de préférence entre les lignes de haricots.
Vous pouvez faire succéder les planches de haricots nains
dans le même carré ; mais, si vous faites plusieurs planches de haricots à
rames, distancez-les d’environ 3 mètres, en intercalant entre elles deux
planches de nains ou d’autres cultures basses pour assurer une bonne aération et
un bon éclairement.
En général, limitez prudemment les semis de haricots à
récolter en grains en juin sous le climat de Paris jusqu’à fin juillet dans la
zone méditerranéenne ; les haricots à cueillir en filets jusque dans la
seconde quinzaine de juillet dans la région de Paris, jusqu’à fin août dans la
zone méditerranéenne ; même une quinzaine de jours plus tard dans les deux
cas, si vous pouvez les abriter des gelées précoces en arrière-saison. Cueillez
les filets au fur et à mesure qu’ils sont à point, soit tous les deux à quatre
jours, sans quoi les grains se forment, la floraison cesse, limitant la
récolte.
A. DE BRETEUIL.
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