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Philatélie

Les timbres des États-Unis

Les Maîtres de Poste.

— La nomenclature du catalogue commence par ces timbres locaux, lesquels, pour la presque totalité des philatélistes, ne sont que des pièces fabuleuses qu’on ne verra jamais. Aussi nous nous bornerons à ne parler que de ceux que l’on rencontre dans nos collections, c’est-à-dire Saint-Louis, Providence et New-York. Nous dirons peu de choses des Saint-Louis, si ce n’est qu’il existe des faux peu dangereux quand on peut comparer avec les photos des planches. Pas mal de réparés, le papier étant fragile. Aucun essai ni réimpression connus à ce jour. Les timbres de Providence sont de beaucoup les plus communs. La légende philatélique dit que la presque abondance de ces vignettes vient de ce que le Maître de la Poste aurait tapissé une pièce avec les feuilles qui lui étaient restées pour compte après la parution de la première émission générale et que ce seraient ces papiers peints d’un genre spécial qui figureraient aujourd’hui dans les collections. Il doit y avoir quelque chose de vrai dans cette histoire, car les deux « loups » de cette émission sont les timbres regommés et ceux plus ou moins fripés ou pliés et retapés par un savant repassage à chaud. Réimpressions, comme indiqué au catalogue, donc sans danger de confusion avec les originaux. Il existe aussi un essai sur papiers allant de l’épais au carton, mais qui est très rare. Les timbres sur lettres sont excessivement rares, et chers en proportion : expertise indispensable.

Le « 5 cents » de New-York terminera notre court exposé. Ce timbre fait l’objet de nombreux truquages. Comme dans la plupart des cas il fut oblitéré à la plume, rien de plus tentant que d’essayer de le faire passer pour un timbre neuf, et mieux encore un timbre sans signature, ce qui quintuplait sa valeur. Aussi les timbres lavés sont-ils nombreux. La réimpression, ou plus exactement l’imitation de 1862 diffère de l’original surtout par le papier qui est d’un bleu presque noirâtre. Il existe aussi des essais sur coins de graveur qui ont été tirés en six couleurs différentes sur différents papiers, habituellement très blancs. Le tirage en noir est facile à différencier du timbre, car, contrairement à celui-ci, le dessin de l’essai est très net, sans aucune de ces nombreuses traces, lignes et points (particulièrement dans les marges et dans le visage) qui caractérisent le timbre et facilitent le planchage. De plus, l’essai sur le coin présente, dans ses derniers tirages, un accident dans le jambage du P de « Post », ce qui ne se retrouve dans aucun des quarante dessins de la planche. Ces essais se trouvent quelquefois sur des lettres truquées. Nous touchons là le second truquage dangereux et courant du timbre de New-York : le timbre sur lettre. Comme à cette époque la majorité des lettres, même en port payé, ont circulé sans timbre, il est facile de prendre une telle pièce, sans valeur marchande aucune, et d’y fixer un timbre dont on augmente ainsi sérieusement la rareté. Se défier tout particulièrement de l’oblitération « PAID » en demi-cercle, qui a été fort bien imitée ; et des timbres sans signature. Pour ces derniers, se rappeler que leur rencontre n’est possible que pendant les premiers jours de l’émission, c’est-à-dire juillet-août 1845.

Pour en terminer avec les Maîtres de Poste, signalons cette anomalie qui pourra intéresser les spéculateurs : le prix relativement très bas de ces timbres par rapport aux autres émissions. Pour en donner une idée, le 5 cents New-York cote exactement le même prix que son contemporain le 10 cents noir de 1847 : or celui-ci a eu un tirage à peu près décuple de celui-là.

Émission de 1847.

— Comme précédemment, deux plaies habituelles : le timbre lavé et la lettre truquée par fixation d’un timbre sur une missive ayant circulé port payé en espèces, ou même quelquefois en port dû. Le premier truquage se décèle assez facilement à l’œil, et plus sûrement encore à la lampe. La seconde supercherie est beaucoup plus dangereuse, car seul un spécialiste peut s’y retrouver dans les ports et dans les cachets différents. Un bon conseil, n’achetez jamais un timbre sur lettre de cette émission sans l’avis de quelqu’un de vraiment compétent. Les faux abondent, surtout dans les collections françaises, et il semble même qu’ils se soient multipliés depuis quelques années. Comme autres truquages mineurs, signalons : les 5 cents traités chimiquement dans le but d’arriver aux nuances rares, orange et brun-orange ; les timbres neufs regommés (les timbres avec gomme faisant respectivement prime de 50 et de 325 dollars, cela vaut la peine) ; les timbres lavés et agrémentés d’une oblitération aussi rare que facilement imitable ; les essais sur coins de graveur et sur certains papiers, présentés comme timbres (les timbres sur papier vergé mince qui figurent dans les nomenclatures des vieux catalogues ne sont que des essais) ; et enfin les imitations officielles de 1875 qu’on essaie de refiler comme originaux. Pour reconnaître ces dites réimpressions, pour le 5 cents original, les deux branches de la cravate de Franklin se rejoignent à la hauteur du F et forment un angle, tandis que, dans la réimpression, la partie supérieure de la cravate est plus courte que l’inférieure, laquelle se termine à la hauteur de la tête du 5. Pour le 10 cents, la ligne blanche qui marque le bord du col de Washington est beaucoup plus marquée dans l’imitation que dans l’original, ainsi que les lignes de la bouche. Attention aussi aux marges rajoutées et autres habituelles réparations qui sont assez courantes pour ces deux timbres originaux, le papier employé en 1847 étant fragile.

M. L. WATERMARK.

Le Chasseur Français N°608 Juin 1946 Page 222