Classement des races.
— Les races bovines ont été travaillées de temps
immémorial pour la production simultanée de la viande, du lait et du travail,
les races spécialisées à production unique étant plutôt rares. En effet, si l’on
en excepte les bêtes dites de boucherie, telles que Durham-Mancelle, la plupart
des vaches sont exploitées pour les trois affectations. C’est le cas des
Parthenaises, des Maraîchines, des Poitevines, des Nantaises, des Fémelines,
des Béarnaises, des Saint-Girons, des Salers, des Simminthales, des
Montbéliardes, des Comtoises, des Abondances, des Fribourgeoises, des Schwitz,
etc. ...
Les races de boucherie et de travail sont
représentées en France par les Charolaises, les Nivernaises et les Gasconnes.
En tête des races réputées pour le lait et la viande vient la Normande, dans
ses trois variétés : Cotentine, Augeronne et Cauchoise. Enfin, lorsque
l’on vise avant tout à produire beaucoup de lait, soit pour la consommation en
nature, soit pour le beurre ou pour le fromage, les races les plus réputées,
vers lesquelles on se portera, sont, pour la quantité, la Hollandaise et la
Flamande, et, pour la qualité, la Jersiaise et la Bretonne.
Influence du taureau.
— Suivant la situation que l’on occupe et les besoins
de son exploitation, on choisira, parmi les races précitées, celle qui convient
le mieux à chaque cas particulier. Mais, comme il n’est guère pratiquement
possible de substituer d’un seul coup une race à une autre, d’abord à cause de
l’acclimatement qui peut laisser à désirer, plus encore en raison de dépenses
élevées qui en résulteraient, on pourra conserver les vaches du pays, en se
contentant de les faire saillir par un taureau à sa convenance, à aptitudes
mixtes : lait et viande ; lait et travail ; lait, viande et
travail.
Si le géniteur est de bonne souche, la descendance, en
première génération, se trouvera certainement revigorée par l’infusion de sang
nouveau, dans le sens que l’on prévoyait. Il suffira de faire saillir plusieurs
fois les métisses par un mâle de la même race, pour que l’on obtienne, en
deuxième et en troisième génération, des sujets aussi bons, sinon meilleurs,
que si l’on avait acheté des animaux de race pure.
Les bons métissages.
— Pour la substitution d’une race à une autre, les
résultats obtenus n’ont pas toujours été heureux, parce que l’on n’a pas tenu
compte du facteur lactation, qui est primordial. Ainsi, dans le Centre, où l’on
a tâté du croisement Charolais, bête à viande et de travail, avec la
Montbéliarde, race mixte, les aptitudes laitières n’ont pas été relevées
suffisamment. Cela tient à ce que l’alliance d’un taureau montbéliard, à
aptitudes galactologues médiocres, avec une vache charolaise, qui nourrit
péniblement son veau, ne stimule pas assez les fonctions mammaires. En
l’occurrence, il aurait fallu faire intervenir une race très laitière et assez
fortement charpentée, afin de ne pas nuire au poids, à la viande, ainsi qu’à la
propension à l’engraissement. Dans ce cas, il aurait mieux valu employer comme
géniteur un taureau de la race cotentine, dont ci-après la monographie, dressée
par le Herd-Book normand.
Standard de la race normande.
— Tête expressive à profil concave. Cornes
fines, blanches ou jaunes, à section arrondie, recourbées en avant. Front
large, légèrement déprimé. Yeux gros et saillants. Sus-naseaux,
droits et soudés en voûte plein cintre. Mufle gros et retroussé. Face
ni longue, ni courte, un peu déprimée sur les côtés. Gorge dégagée. Encolure
moyenne sans fanon. Dos en ligne rectiligne et horizontale. Poitrine
bien développée. Garrot et hanches larges. Culotte assez
fournie et cuisses bien descendues formant un ensemble distingué. Peau
souple et moelleuse, d’épaisseur moyenne. Mamelle très développée,
recouverte d’une peau fine et onctueuse, laissant paraître en surface des
veines fortes et sinueuses. Taille forte : la moyenne des vaches
dépasse 600 kilogrammes. Rusticité remarquable : la race
normande est celle qui se dépayse le mieux. Aptitudes multiples : lait,
beurre, fromage, viande, travail.
Couleur de la robe : variée, mais généralement
bringée, c’est-à-dire caractérisée par des rayures ou zébrures brun foncé,
allant jusqu’au caille. On distingue le bringé foncé, le bringé blond, le
caille bringé et le caille blond, suivant la nuance du fond de la robe et le
dosage du blanc. Certains sujets ont un fond de robe blanc, tacheté de tigrures
ou de mouchetures, avec le ventre et les extrémités blancs.
Brelan de remarques.
— Le croisement d’une race viandeuse, telle que la
Charolaise, avec la Normande, ne peut que donner d’heureux résultats, car la
deuxième n’est pas sensiblement inférieure à la première sous le rapport de la
production de la chair ; également rustique et précoce, elle fournit à
dix-huit mois d’excellents châtrons d’embouche, rustiques et de bonne venue.
Par conséquent, le croisement des deux races ne peut pas influencer
défavorablement la viande, qui sera toujours de première qualité.
D’autre part, les métisses normandes et charolaises seront
presque toutes d’excellentes laitières. Il suffira de les sélectionner pour
arriver à créer, au bout d’un petit nombre de générations, des laitières dont
le rendement annuel ne tombera pas au-dessous de 3.500 litres d’un lait
crémeux, convenant aussi bien pour la beurrerie que pour la fromagerie.
Les résultats seraient sensiblement différents si l’on
prenait comme géniteur un taureau de race hollandaise ou flamande, lesquels
sont d’ailleurs plus exigeants sous le rapport de la nourriture et moins
rustiques pour la vie d’herbage, en dehors de la zone littorale. Enfin, les
animaux issus du croisement seraient moins aptes aux travaux de la culture et
loin d’atteindre le poids des Charolais purs.
Dans les autres régions de l’Ouest, où le lait est
généralement dirigé vers les beurreries, on aurait intérêt à créer des métisses
donnant un lait plus riche que les vaches du pays. Pour cela, il suffirait de
prendre comme géniteur un taureau de race jersiaise ou bretonne, réputées au
titre de beurrières, dont la teneur butyrique du lait varie entre 4 et 5
p. 100.
En admettant que le métissage provoque seulement un
relèvement de 1 p. 100 de la richesse en graisse du lait, et que la
lactation se trouve augmentée de 500 litres, on se rend compte du gain
réalisé annuellement par tête en faisant intervenir une race beurrière
amélioratrice.
Comme la teneur en caséine du lait reste à peu près
proportionnelle à celle de la matière grasse, on admettra que les laits riches
en graisse fourniront un rendement plus élevé en fromage.
C. ARNOULD.
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