La révélation du « decca navigator » (construit,
comme son nom l’indique, par la fameuse usine de phonographes et d’appareils de
radio) annonce le début d’une ère entièrement nouvelle dans le domaine du
pilotage privé. Cette invention s’applique à la navigation sur tous les types
d’avions ou de bateaux.
Ces derniers temps, une grande publicité a été faite en
faveur du radar, mais le decca navigator est uniquement un appareil de radio et
non pas un radar. La plus importante caractéristique de cet appareil est la
suivante : sans nécessiter une manipulation aussi compliquée que le
« gee » ou le radar à l’heure actuelle, le decca navigator est cinq
fois plus précis et plus facile à manipuler ; il se signale, en outre, par
une grande rapidité de manœuvre.
Cette nouvelle invention sera, sans aucun doute, bien
accueillie par tous les membres du personnel navigant ; d’une importance
primordiale pour les gros transports de passagers et les appareils
ravitailleurs, elle obtiendra son maximum de succès auprès de l’aviation
privée. En effet, le pilote amateur d’avant guerre n’avait que les
connaissances les plus élémentaires sur le moyen de faire sa route. Il se
perdait fréquemment. Au contraire, le pilote d’après guerre dont l’appareil
sera équipé du decca navigator pourra déterminer la position de son avion avec
une certitude absolue, en rapportant la lecture de deux cadrans indicateurs à
une carte de navigation spéciale. Ce n’est pas plus difficile.
L’installation du decca dans l’avion est d’un poids total de
12kg,250, avec possibilité de le réduire encore. Il peut être
installé dans l’endroit le plus commode. La lecture se fait sur deux cadrans de
huit centimètres de diamètre, l’un chiffré en rouge, l’autre en vert. Les
seules commandes sont : une manette par cadran pour mettre l’aiguille à 0,
et un interrupteur.
Les cadrans sont munis de fenêtres dans lesquelles
apparaissent respectivement les chiffres des centaines, des dizaines et des
unités. Une aiguille indique, sur une échelle circulaire, les décimales du
chiffre donné.
Les postes émetteurs terrestres de la région survolée
diffusent des signaux de puissance constante sur grandes ondes, qui divergent
selon des trajectoires hyperboliques. Pour plus de compréhension, les canevas
ne montrent qu’une ligne sur dix, sinon l’espacement entre les courbes les
rendrait invisibles. En réalité, sur les cartes de navigation, les petites
divisions seront tracées, mais les grandes divisions de puissance captée seront
respectivement chiffrées et imprimées en rouge pour une station, et en vert
pour l’antre. C’est cette méthode consistant à supprimer les lignes de
puissance reçue pour déterminer la position de l’appareil par recoupement des
signaux qui donne à l’invention une ressemblance apparente avec le système « gee »
du radar.
À l’heure actuelle, le rayon d’action des postes émetteurs
est d’environ 2.500 kilomètres. Leur portée la plus efficace est de
l’ordre de 500 kilomètres. La position de l’appareil à cette distance est
obtenue à 100 mètres près. Par conséquent, un réseau de postes émetteurs
couvrant le continent et espacés de 900 kilomètres l’un de l’autre
permettrait une efficacité minimum comparable aux meilleurs résultats obtenus
par d’autres procédés. Pour les vols transatlantiques, le réseau des postes
britanniques émettrait sur 2.400 kilomètres dans la partie Est, et les
postes américains dans la partie Ouest. De la sorte, la position de l’appareil
pourrait être instantanément déterminée en vol. Par comparaison, les
instruments compliqués et peu précis tels que les estimateurs de distance, les
indicateurs de position par rapport au sol et par rapport à l’air semblent tous
désuets.
Supposons que le possesseur d’un avion léger vole à une
distance de 240 kilomètres du terrain d’origine. Avant de décoller, il
jette un regard sur sa carte spéciale, et, connaissant les chiffres qui
signalent son aérodrome, il note sur une carte les indicateurs de sa
destination et ceux qui lui donnent, par exemple, six intersections sur la
route. Ayant ainsi préparé d’avance sa croisière, il peut monter dans son
appareil et suivre la route préparée, puisque les intersections notées sur la
carte s’enregistrent sur les cadrans du déccomètre jusqu’à ce que la lecture
finale lui donne le point d’arrivée.
Si sa route coïncide suffisamment avec les chiffres
indicateurs, il peut décoller et suivre ces repères en prenant garde de
conserver les chiffres appropriés sur le cadran, volant rigoureusement
« sur le faisceau du radiophare ».
Il est vraiment remarquable de pouvoir se servir de ce
système au bout de cinq minutes d’explication. Il ne requiert aucune antenne, aucun
entretien spécial. Les fabricants suggèrent toutefois de faire une inspection
par trimestre, ce qui semble à peine nécessaire, car, à chaque fois que
l’interrupteur est ouvert et que les cadrans indiquent une station connue, la
vérification est faite d’elle-même.
Employé avec un avion ordinaire, l’appareil nécessite une
puissance de 80 watts, ce qui, pour le type d’avion courant avec une
différence de potentiel de 24 volts, représente une dépense de courant de
3,3 ampères. Avec un avion léger, on peut se servir d’une batterie, ce qui
offre une source d’énergie considérable.
Armand AVRONSART.
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