Les découvertes humaines, dit-on souvent, ne consistent pas
à copier la nature. Pourtant, malgré l’admiration que doit susciter le génie de
l’homme, il faut bien avouer que ses réalisations sont souvent inférieures à
celles de la nature, si ce n’est dans l’art de la destruction.
Le moteur musculaire a un rendement très supérieur au plus
perfectionné de nos modernes moteurs à essence ; si nous considérons plus
spécialement l’évolution des moyens d’éclairage, nous constatons qu’ils sont
encore très inférieurs aux procédés naturels.
Voici le modeste ver luisant, qui, pendant les nuits d’été,
semble une petite étoile lumineuse dans les buissons. C’est, en réalité, un
appareil d’éclairage parfait, parce que toute l’énergie dépensée dans le corps
de l’animal est utilisée uniquement pour produire des radiations lumineuses,
sans effet de chaleur quelconque. C’est la lumière froide intégrale, le
véritable éclairage de l’avenir.
L’idéal consisterait à établir un dispositif électrique
produisant directement des radiations lumineuses. Malheureusement, jusqu’à
présent, nous sommes obligés d’avoir recours à un intermédiaire, d’où il
résulte généralement une perte d’énergie considérable.
La pile de Volta a constitué le premier générateur
électrique réalisable. Peu après, un physicien anglais, Humphry Davy,
découvrait l’arc électrique, en utilisant l’étincelle électrique
produite par des milliers d’éléments de piles reliées à deux morceaux de
charbon de bois taillés en pointe.
Pendant longtemps, la lampe à arc constitua le seul procédé
d’éclairage électrique, puis laissa place, peu à peu, à la lampe à
incandescence d’Edison.
Qu’il s’agisse de la lampe à arc ou de la lampe à
incandescence, nous n’obtenons, d’ailleurs, des radiations lumineuses que par
l’intermédiaire d’un corps chauffé : particules de carbone
chauffées par un arc, capsule réfractaire placée dans une flamme, filament
traversé par un courant électrique. Or, le rayonnement d’un corps chauffé
augmente très rapidement en même temps que la température, et il y a un très
grand intérêt à obtenir des températures de plus en plus élevées. La
température de l’arc électrique peut dépasser 4.000°, et sa brillance atteint
alors 20.000 à 30.000 bougies par centimètre carré.
Le rendement d’une lampe à incandescence varie également
avec la température ; une lampe de projection permet d’atteindre une
brillance de 3.500 bougies par centimètre carré, qui demeure donc encore
bien inférieure à celle d’une lampe à arc.
Lorsqu’on étudie une source lumineuse destinée à
l’éclairage, il faut, d’ailleurs, considérer uniquement les radiations utiles,
c’est-à-dire celles qui se trouvent dans la zone de visibilité optimum.
Plus on augmente la température, plus on améliore le
rendement lumineux, et les radiations lumineuses sont alors formées d’ondes de
courte longueur.
Toute l’évolution de la lampe à incandescence a été une
application de ce principe. La lumière par les lampes à filament de carbone
était d’un jaune clair plus ou moins brillant ; la température du filament
était de l’ordre de 1.600°, et la consommation de l’ordre de 3 watts par
bougie.
La lampe à filament métallique primitive a permis d’obtenir
une température de l’ordre de 2.000°. Le premier modèle pratique à filament de
tantale assurait un rendement de l’ordre de 1,8 watt par bougie. Le
filament de tungstène a permis de dépasser la température de 2.500° et
d’abaisser la consommation à 1,2 watt par bougie : c’était le modèle monowatt.
L’emploi de petites quantités d’azote ou d’un mélange
d’argon et d’azote dans les ampoules a permis de dépasser la température de
2.500° et d’accroître le rendement lumineux jusqu’à 0,7 watt par
bougie : ce qui a fait donner à ces modèles le nom d’ampoules demi-watt.
Le perfectionnement des méthodes de fabrication du filament
en boudin, l’emploi du krypton, gaz de l’air très rare, a permis d’élever
encore la température du filament et d’obtenir ainsi la forme la plus récente
de l’ampoule à incandescence.
Les lampes à incandescence ont trouvé un premier concurrent
redoutable dans les tubes à luminescence, tubes généralement
cylindriques contenant un gaz rare, du néon par exemple, sous une faible
pression, et deux électrodes sur lesquelles on applique une différence de
potentiel assez élevée. On obtient alors, en principe, une lumière froide,
et on peut obtenir une consommation de l’ordre de 0,60 watt par bougie
dans les premiers essais, et des chiffres encore plus bas dans les modèles les
plus récents.
Le remplacement du néon par la vapeur de mercure, l’emploi
d’autres gaz, tels que l’argon, permettent d’obtenir un éclairage analogue à
celui de la lumière du jour. Les inconvénients dus, dans les tubes primitifs, à
la nécessité d’une manœuvre d’amorçage et à l’emploi des hautes tensions ont
été peu à peu atténués.
Pourtant, depuis la guerre de 1939, un nouveau venu vient de
faire son apparition, et semble devoir l’emporter sur le tube à luminescence,
grâce à ses qualités encore bien supérieures et, surtout, à son emploi beaucoup
plus pratique.
Le tube à fluorescence peut être utilisé dans les
conditions les plus diverses, car il fonctionne directement sur le courant d’un
secteur et ne nécessite pas de manœuvres d’amorçage. Il comporte deux tubes,
l’un intérieur constituant un générateur à rayons ultra-violets, ou lampe de
Wood, l’autre un tube concentrique recouvert intérieurement d’un enduit
chimique, qui devient fluorescent sous l’action des rayons
ultra-violets. On obtient ainsi une lumière froide, dont on peut régler à
volonté la coloration, en faisant varier la composition de l’enduit
fluorescent. Ces différents avantages ont valu à ce nouveau système d’éclairage
un succès universel aux États-Unis, et il commence désormais à être utilisé
pratiquement en France.
R. SINGER.
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