Quand on parcourt nos provinces françaises, on est un peu
surpris de voir l’état de délabrement de nos villages et de nos bâtiments
agricoles. La guerre, qui a ravagé certaines régions, a encore aggravé la
situation. La reconstruction ne se fait pas, les matériaux indispensables
manquent et sont hors de prix, ainsi que la main-d’œuvre spécialisée. Alors,
que faire ?
Eh bien ! il faut revenir aux matériaux
naturels, ceux que l’on peut employer tout de suite, sans transformation. Il
faut revenir aux vieilles méthodes de construction de nos pères. Le mortier de
terre, les murs en pisé, la couverture en chaume, ces procédés sont toujours
employés par les indigènes de nos colonies et dans beaucoup de pays où les
transports sont difficiles et l’industrie des matériaux peu développée.
Dans nos régions sinistrées, là où les murs sont encore
debout, certains bâtiments pourraient être réparés rapidement et sans grands
frais, en posant une charpente grossière et une couverture de chaume. Le chaume
a l’avantage de s’accommoder des bois bruts non équarris, tels qu’ils existent
dans la forêt. Les troncs de peuplier, de sapin et de nombreuses autres
essences, choisis droits, élancés, peuvent remplacer les madriers ou les
bastings. Ceux qui seront plus petits serviront de chevrons, et des gaulettes
remplaceront les lattes ou les liteaux.
En montant la charpente, prévoir une pente suffisante pour
le bon écoulement des eaux, et augmenter par conséquent la durée de la
couverture. Il faut au moins 50 centimètres par mètre : ainsi, les
deux versants forment un angle droit. Si l’on ne dispose pas de paille de blé
ou de seigle, on peut prendre les grandes graminées qui croissent dans les
endroits marécageux, le long des rivières et des étangs, les genêts, etc. ;
on voit que l’on a le choix. Maintenant, pour poser ces matériaux, voici une
méthode pratique et expéditive.
Confectionner à terre de petites bottes avec un petit fil de
fer ou une bonne ficelle de chanvre. Placer le lien aux deux tiers de la botte
et même un peu plus pour que, sur la toiture, les liens se trouvent largement
recouverts. On mesurera la distance existant du lien au plat de la botte, et
l’on clouera les lattes sur les chevrons à cette distance. La latte qui sera
fixée au bas de la toiture, c’est-à-dire à l’égout, sera surélevée à l’aide de
tasseaux cloués sur l’extrémité des chevrons, pour que le premier rang qui sera
posé ait la même pente que les autres. Il suffit maintenant de placer ces
bottes, l’épis en bas, sur la toiture et de les accrocher par le lien sur les
lattes, à l’aide de clous. On commencera par le premier rang du bas, qui sera
placé très débordant pour pouvoir être coupé une fois le travail terminé. On
placera ensuite les autres rangs, toujours l’épi en bas. On serrera bien, en
les plaçant, les gerbes les unes contre les autres. Arrivé au faîte, et lorsque
les deux versants seront faits, on terminera par des bottes placées à cheval et
maintenues par un fil de fer qui courra le long du faîte. On peut terminer
aussi le faîte par une couche de terre glaise, mélangée de paille. Voilà le
travail presque terminé. On coupera maintenant le premier rang en ne laissant
dépasser le chaume de la latte que de 10 centimètres environ. Quant aux
réparations qui pourraient survenir, elles pourront être faites très rapidement
par le premier ouvrier venu. Il suffira de remplacer les bottes manquantes ou
en mauvais état.
LE BRICOLEUR.
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