La géophysique, science relativement nouvelle, vieille d’à
peine cinquante ans, ne s’est réellement développée que sous l’impulsion de
savants modernes. Jusqu’alors, elle n’utilisait que les procédés bien
imparfaits, qui n’en étaient pas moins très coûteux ; d’une part, les
anomalies de champ magnétique et surtout la méthode gravimétrique basée sur la
différence de densité des roches, mesurée à l’aide de la « balance de
torsion ». Enfin, il y a une vingtaine d’années, on eut l’idée d’employer
aussi des sismographes spéciaux, permettant d’enregistrer en divers points les
vibrations résultant d’une explosion provoquée avec des opérations
répétées ; on parvenait ainsi à déterminer le nivellement de l’assise
rocheuse, des couches meubles ou des nappes aquifères ou pétrolifères
sous-jacentes ; méthode qui, perfectionnée, donnait d’excellents
résultats.
Actuellement, ce sont les procédés électriques qui semblent
l’emporter par leur commodité et leur précision ; la prospection
électrique repose sur ce fait que les gîtes minéraux, et surtout les plans
métalliques possèdent des résistances électriques différentes : en créant
un courant continu entre deux points du sol et en étudiant le champ électrique
qui en résulte dans un certain rayon, on finit, en répétant ces mesures en des
points différents, à établir la « topographie » du sous-sol. Et
l’innovation du carottage électrique consistant à mesurer, lors d’un sondage,
certaines propriétés électriques de la roche, suffisantes pour l’identification
géologique des terrains traversés, est venue notablement améliorer ce procédé,
car le carottage mécanique, jusqu’alors en usage, exigeait l’extraction
individuelle de chaque échantillon ou carotte, d’où perte de temps et d’argent,
surtout quand les puits atteignaient de 2.000 à 3.000 mètres.
Ainsi, ces méthodes de prospection électrique se sont,
depuis une dizaine d’années, généralisées tant en Europe qu’en Amérique, car,
du point de vue pratique, elles nécessitent un matériel relativement simple et
aisément transportable, dont le principe est basé sur la mesure de la résistivité
électrique des roches. On désigne ainsi la résistance au courant électrique
d’un cylindre de cette dernière ayant pour hauteur l’unité de longueur et pour
section l’unité de surface ; cette résistivité — l’inverse de la conductibilité
— s’exprime en ohms par mètre carré. L’appareillage comprend une batterie
de piles sèches envoyant du courant continu dans le sol par deux électrodes
impolarisables. La différence de potentiel entre deux autres prises de terre se
mesure au moyen d’un potentiomètre, branché sur une ligne volante ... On
détermine donc une courbe équipotentielle en maintenant fixe une des électrodes
et en tâtant le sol à l’entour avec l’autre : l’aiguille de l’appareil
restant fixe, les deux électrodes, donc les deux points du sol touché, se
trouvent au même potentiel ; on peut donc établir un graphique de cas
courbes — carte des résistivités — permettant de connaître l’âge
géologique des couches successives. Ce procédé, facilement et rapidement réalisable,
a pu, grâce aussi aux précisions fournies par les sondages électriques
ultérieurs, fournir des résultats extrêmement intéressants, relativement à des
gisements salifères d’Alsace, et, d’autre part, on a ainsi découvert quelques
filons métalliques en divers coins de France (fer dans le Calvados) ou minéraux
(lignite dans les Landes) ; en outre, cette méthode de prospection
électrique permet d’établir la nature des roches du sous-sol d’une contrée
déterminée, ce qui est précieux quand on se propose, à cet endroit, des travaux
considérables (tunnels, barrages, etc.).
Ces différentes données théoriques confirmées par les
observations expérimentales ont donné un puissant essor à la prospection
géophysique, et c’est ainsi que le carottage électrique est universellement
employé dans les exploitations pétrolifères du monde entier et a servi, au
Maroc notamment, à faire découvrir des gisements de fer. La France est, dans ce
domaine, au tout premier rang ; aux États-Unis, les travaux de prospection
géophysiques sont activement poussés et ont valu la découverte d’un nombre
considérable de puits pétrolifères. En Russie, il faut noter les mêmes
résultats aux environs de 1929, ainsi qu’en Roumanie en 1923, où la prospection
électrique permit, en outre, la découverte de « champs » de gaz
naturel. Il n’est pas, à l’heure actuelle, un seul point du globe où ces
méthodes géophysiques ne soient à l’honneur. En Amérique du Sud, aux Indes
néerlandaises ou britanniques, en Chine ou au japon, les diverses Sociétés ou
Instituts géologiques poursuivent d’intéressantes et fructueuses recherches sur
la structure infiniment variée du sous-sol, grâce à ces procédés.
P. LAGUZET.
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